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03/06/2022 | FRANCE | N°20/12526

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8, 03 juin 2022, 20/12526


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8



ARRÊT AU FOND

DU 03 JUIN 2022



N°2022/.



Rôle N° RG 20/12526 - N° Portalis DBVB-V-B7E-BGUYT







Société ENTREPRISE [L]



C/



CPAM DU VAR





Copie exécutoire délivrée

le :

à :







- Me Anne-Sylvie VIVES



- Me Stéphane CECCALDI













Décision déférée à la Cour :



Jugement du Pole social du

Tribunal Judiciaire de Toulon en date du 13 Novembre 2020,enregistré au répertoire général sous le n° 19/1838.





APPELANTE



Société ENTREPRISE [L], demeurant Madame [Adresse 2]



représentée par Me Anne-Sylvie VIVES, avocat au barreau de TOULON substitué par Me Alexandra PI...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8

ARRÊT AU FOND

DU 03 JUIN 2022

N°2022/.

Rôle N° RG 20/12526 - N° Portalis DBVB-V-B7E-BGUYT

Société ENTREPRISE [L]

C/

CPAM DU VAR

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me Anne-Sylvie VIVES

- Me Stéphane CECCALDI

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du Tribunal Judiciaire de Toulon en date du 13 Novembre 2020,enregistré au répertoire général sous le n° 19/1838.

APPELANTE

Société ENTREPRISE [L], demeurant Madame [Adresse 2]

représentée par Me Anne-Sylvie VIVES, avocat au barreau de TOULON substitué par Me Alexandra PIGNÉ, avocat au barreau de TOULON

INTIMEE

CPAM DU VAR, demeurant [Adresse 1]

ayant pour avocat Me Stéphane CECCALDI, avocat au barreau de Marseille, dispensé de comparaître

dispensé en application des dispositions de l'article 946 alinéa 2 du code de procédure civile d'être représentée à l'audience

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 31 Mars 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Madame Catherine BREUIL, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Séverine HOUSSARD.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 03 Juin 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 03 Juin 2022

Signé par Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre et Mme Séverine HOUSSARD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Par requête du 15 mars 2019, la société [L] a saisi le tribunal d'un recours contre la décision de la CPAM du Var lui notifiant le 16 novembre 2018 la prise en charge de l'accident du travail de son salarié M. [W] [K] survenu le 21 août 2018.

Par jugement du 13 novembre 2020, le pôle social du tribunal judiciaire de Toulon a :

- déclaré recevable mais non fondé le recours de la société [L] à l'encontre de la décision de la CPAM du Var en date du 16 novembre 2018,

- déclaré opposable à la société [L] la prise en charge de l'accident du travail de M. [W] [K] survenu le 21 août 2018,

- débouté la société [L] de l'ensemble de ses demandes,

- condamné la société [L] aux dépens.

Par acte adressé le 12 décembre 2020, la société [L] a régulièrement interjeté appel de cette décision qui lui a été notifiée le 19 novembre 2020.

A l'audience du 31 mars 2022, elle se réfère aux conclusions déposées le jour même et visées par le greffe, pour demander à la cour d'infirmer le jugement dans toutes ses dispositions et en conséquence, de :

- dire que l'accident dont se prétend victime M. [K] survenu le 21 août 2018 n'est pas un accident du travail au sens de la législation des risques professionnels,

- dire que la prise en chrge de l'accident dont se prétend victime M. [K] survenu le 21 août 2018 lui est inopposable,

- condamner la CPAM du Var au paiement de la somme de 8.877,44 euros au titre des frais irrépétibles de procédure ainsi qu'aux entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions, la société conteste l'existence d'un fait accidentel en indiquant que

M. [K] souhaitait procéder à une rupture conventionnelle de son contrat de travail avant l'accident allégué et s'appuie sur une attestation de l'ex-conjoint de la victime pour démontrer qu'il s'était fait mal au poignet la veille de l'accident dans un cadre familial.

Elle conteste également la matérialité de la lésion en s'appuyant sur le rapport d'enquête d'une société agréée pour soutenir que M. [K] se servait de son poignet sans difficulté et ne respectait pas les heures de sorties fixées sur son arrêt de travail.

Elle conteste aussi l'existence d'un lien entre l'accident et la lésion en l'absence d'accident du travail et d'une lésion.

Elle ajoute avoir émis des réserves dès la déclaration d'accident du travail, maintenues après s'être déplacée à la CPAM pour consulter le dossier et considère que c'est à tort que le tribunal a affirmé qu'elle avait émis des réserves hors délais.

Elle soutient que tout a été simulé et orchestré par M. [K] pour les besoins de la cause.

Enfin, elle fait valoir que le dossier qu'elle a consulté en fin d'instruction était incomplet de sorte que la caisse ne l'a pas informée de l'ensemble des éléments recueillis susceptibles de lui faire grief.

La CPAM des Bouches-du-Rhône, dispensée de comparaître à l'audience, se réfère aux conclusions déposées la veille et visées par le greffe le jour de l'audience. Elle sollicite la confirmation du jugement et le débouté de l'appelant.

Elle fait valoir qu'elle a satisfait à son obligation d'information et conclut que la décision a été rendue au terme d'une procédure contradictoire à l'égard de l'employeur.

Elle se prévaut de la matérialité du fait accidentel, au vu des questionnaires remplis par le salarié et l'employeur, et du certificat médical initial. Elle considère que l'employeur n'apporte aucun élément probant permettant d'établir l'existence d'une cause étrangère au travail et donc de renverser la présomption d'imputabilité. Elle conclut au bien-fondé de sa décision reconnaissant le caractère professionnel de l'accident du 21 août 2018.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions et moyens des parties, il convient de se reporter à leurs écritures déposées et auxquelles elles se sont référées lors de l'audience.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le caractère incomplet du dossier consulté par l'employeur en fin d'instruction

Aux termes de l'alinéa 3 de l'article R.441-14 du Code de la sécurité sociale dans sa version en vigueur du 1er janvier 2010 au 1er décembre 2019 : 'Dans les cas prévus au dernier alinéa de l'article R.441-11, la caisse communique à la victime ou à ses ayants droit et à l'employeur au moins dix jours francs avant de prendre sa décision, par tout moyen permettant d'en déterminer la date de réception, l'information sur les éléments recueillis et susceptibles de leur faire grief, ainsi que sur la possibilité de consulter le dossier mentionné à l'article R.441-13.'

L'article R.441-13 précise que le dossier constitué doit comprendre :

'1°) la déclaration d'accident ;

2°) les divers certificats médicaux détenus par la caisse ;

3°) les constats faits par la caisse primaire ;

4°) les informations parvenues à la caisse de chacune des parties ;

5°) les éléments communiqués par la caisse régionale.'

En l'espèce, dès lors que la caisse a informé la société [L] par courrier daté du 26 octobre 2018, que l'instruction du dossier était terminée et qu'elle avait la possibilité de consulter les pièces constitutives du dossier avant que la décision sur la prise en charge de la maladie professionnelle déclarée par son salarié n'intervienne le 16 novembre 2018, soit 10 jours francs plus tard, et dont il n'est pas discuté qu'il a été reçu à temps pour permettre à la société de consulter le dossier le 15 novembre 2018 telle qu'il en ressort de la fiche relative à la consultation du dossier AT/MP signée par Mme [H] [L], la caisse a respecté son obligation d'information.

Il importe peu que par mail adressé à la caisse primaire d'assurance maladie du Var le jour même de la consultation du dossier, le 15 novembre 2018, Mme [L] ait transféré un mail du 27 septembre précédent dans lequel elle demandait à la caisse d'être attentive aux éléments du dossier en visant un certificat de reprise du 14 septembre 2018 et certificat de prolongation d'arrêt de travail du 17 septembre 2018 et que dans son courrier du 7 janvier 2019, postérieurement à la notification de sa décision de prise en charge par la caisse, Mme [L] ait indiqué que le dossier consulté était incomplet dans la mesure où il ne comprenait pas les certificats de prolongation d'arrêt de travail de la victime, ni le certificat de reprise du travail, ni le rapport de son enquêteur privé que la caisse aurait détenus.

Aucune inopposabilité de la décision de prise en charge ne saurait donc être retenue de ce chef.

Sur le caractère professionnel de l'accident déclaré

Aux termes de l'article L.411-1 du Code de la sécurité sociale :

'Est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise.'

Il résulte de ces dispositions un principe de présomption d'imputabilité d'un accident au travail dés lors qu'il survient au temps et sur le lieu du travail, qui s'étend aux soins et arrêts de travail prescrits ensuite à la victime jusqu'à la consolidation de son état de santé dès lors qu'un arrêt de travail a été initialement prescrit ou que le certificat médical initial d'accident du travail est assorti d'un arrêt de travail.

Il appartient à la caisse d'assurance maladie de rapporter la preuve de la matérialité d'un fait accidentel sur les lieux et dans le temps du travail pour justifier de sa prise en charge au titre de la législation professionnelle et, il appartient ensuite à la société employeur qui conteste la décision de prise en charge par la caisse de détruire la présomption d'imputabilité en rapportant la preuve que la lésion justifiant les soins et arrêts de travail a une cause totalement étrangère au travail.

En l'espèce, il ressort de la déclaration d'accident du travail reçue par la caisse d'assurance maladie le 2 octobre 2018, que le 21 août précédent, alors qu'il remplaçait le mécanisme d'une chasse d'eau de WC chez un client domicilié à [Adresse 2], M. [K] a été victime d'un traumatisme au poignet droit et que la société qui l'emploie en a été informée le même jour à 13h30.

Le certificat médical initial daté du jour même de l'accident allégué, le 21 août 2018, par lequel le docteur [G] constate que M. [K] présente un 'traumatisme du poignet droit par choc direct' corrobore la nature, le siège et la date à laquelle la lésion est apparue et corrobore les déclarations de la victime.

En effet, il résulte des réponses du salarié au questionnaire de la caisse, le 17 octobre 2018, que les circonstances de l'accident sont précises et invariables : il indique qu'alors qu'il intervenait pour changer un mécanisme de chasse HS, n'ayant pas de place pour utiliser des outils, il était à califourchon sur le WC pour dévisser une vis papillon rouillée, avec la force exercée, celle-ci a cédé et sa main a cogné contre le mur à 10 heures le 21 août 2018. Il précise qu'il n'y avait pas de témoin de l'accident mais qu'un technicien, du nom de [M] [S], est venu le remplacer pour finir l'intervention.

Les réponses au questionnaire de la caisse données par la société employeur corroborent celles du salarié dans la mesure où d'abord les circonstances de l'accident sont reprises dans les mêmes termes que ceux du salarié avec la précision qu'il s'agit des explications du salarié mais sans que la société ait estimé 'devoir apporter des précisions ou des informations complémentaires sur l'accident', malgré l'espace laissé à cet effet par la caisse. En outre, la société y confirme que M. [S] a constaté que la victime souffrait de douleurs au poignet droit à 10h30.

Malgré les assertions contraires de la SARL [L], il ne ressort ni de la déclaration d'accident du travail, ni des réponses au questionnaire de la caisse, ni d'aucun autre document qu'elle a émis des réserves sur les circonstances de l'accident.

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, les premiers juges ont pertinemment retenu que des présomptions graves, précises et concordantes ont permis à la caisse de prendre en charge l'accident de M. [K], survenu le 21 août 2018, au titre de la législation professionnelle.

En outre, la société employeur échoue à renverser la présomption d'imputabilité.

En effet, l'attestation de Mme [R], ex-conjointe de la victime, selon laquelle M. [K] lui aurait rapporté que la veille de son accident du travail il s'était fait mal au poignet en s'étant violemment disputé avec sa femme, n'est pas suffisamment précise et circonstanciée, et ne relate pas des faits directement constatés par son auteur, de sorte qu'elle est dépourvue de crédibilité.

Les constatations d'un enquêteur de droit privé agréé lors d'une surveillance de la victime menée du 10 au 14 septembre 2018, sont sans emport sur la matérialité de l'accident du travail survenu le 21 août 2018.

De la même façon, la proposition ultérieure de la victime par courrier du 3 octobre 2018, de mettre fin au contrat de travail dans le cadre d'une rupture conventionnelle avec son engagement de rembourser l'éventuelle indemnité spécifique de rupture perçue, n'est pas non plus de nature à renverser la présomption d'imputabilité de l'accident au travail.

Il s'en suit que le jugement ayant déclaré la décision de la caisse primaire d'assurance maladie du Var de prendre en charge l'accident survenu le 21 août 2018 à M. [K] opposable à la SARL [L], sera confirmé en toutes ses dispositions.

Sur les frais et dépens

La SARL [L], succombant, sera condamnée au paiement des dépens de l'appel en vertu de l'article 696 du Code de procédure civile.

En application de l'article 700 du Code de procédure civile, la société sera déboutée de sa demande en frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant publiquement par arrêt contradictoire

Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré,

Déboute la SARL [L] de l'ensemble de ses prétetions,

Condamne la SARL [L] aux éventuels dépens de l'appel.

Le GreffierLa Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8
Numéro d'arrêt : 20/12526
Date de la décision : 03/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-03;20.12526 ?
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