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25/05/2022 | FRANCE | N°22/00079

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-11 ho, 25 mai 2022, 22/00079


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Hospitalisation sans consentement

1-11 HO





ORDONNANCE

DU 25 MAI 2022



N° 2022/79







Rôle N° RG 22/00079 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJNI7







[G] [U]





C/



PREFET DES ALPES MARITIMES

CENTRE HOSPITALIER DE SAINTE-MARIE

Procureur Général Près la Cour d'Appel

























Copie adressée :

par télécopie le

:

25 Mai 2022

à :

-Le patient

-Le directeur

-L'avocat

-Le préfet

-Le curateur/tuteur

au Ministère Public













Décision déférée à la Cour :



Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de NICE en date du 06 Mai 2022 enregistrée au répertoire gé...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Hospitalisation sans consentement

1-11 HO

ORDONNANCE

DU 25 MAI 2022

N° 2022/79

Rôle N° RG 22/00079 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJNI7

[G] [U]

C/

PREFET DES ALPES MARITIMES

CENTRE HOSPITALIER DE SAINTE-MARIE

Procureur Général Près la Cour d'Appel

Copie adressée :

par télécopie le :

25 Mai 2022

à :

-Le patient

-Le directeur

-L'avocat

-Le préfet

-Le curateur/tuteur

au Ministère Public

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de NICE en date du 06 Mai 2022 enregistrée au répertoire général sous le n°22/00745.

APPELANT

Monsieur [G] [U]

né le 09 novembre 1971 à MONACO (99), demeurant 54 avenue du 03 septembre - 06320 CAP D'AIL

comparant en personne, assisté de Me Angélique SERAFINI BRIGNON, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE, commis d'office

CURATEUR :

ASSOCIATION ATIAM

8 Avenue Walkanaer - 06105 NICE CEDEX 2

non comparante et non représentée, ayant fait parvenir un rapport de situation en date du 18 mai 2022

INTIMES :

PREFET DES ALPES MARITIMES, demeurant Préfecture des Alpes Maritimes - Route de Grenoble - 06000 NICE

non comparant et non représenté

CENTRE HOSPITALIER DE SAINTE-MARIE, demeurant 87 avenue Joseph Raybaud - 06009 NICE CEDEX 1

non comparant et non représenté

PARTIE JOINTE :

Madame LA PROCUREURE GENERALE

COUR D'APPEL - PALAIS MONCLAR - 13100 AIX- EN-PROVENCE

non comparante, ayant déposé des réquisitions écrites dont il a été donné connaissance à l'audience

*-*-*-*-*

DÉBATS

L'affaire a été débattue le 25 Mai 2022, en audience publique, devant Madame Catherine LEROI, Conseiller, déléguée par ordonnance du premier président, en application des dispositions de l'article L.3211-12-4 du code de la santé publique,

Greffier lors des débats : Mme Nezha BOURIABA,

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 25 Mai 2022.

ORDONNANCE

Par décision réputée contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 25 Mai 2022

Signée par Madame Catherine LEROI, Conseiller et Mme Nezha BOURIABA, greffier présent lors du prononcé,

RAPPEL DE LA PROCÉDURE

Monsieur [G] [U], hospitalisé la demande d'un tiers au sein du centre hospitalier Sainte-Marie à Nice à compter du 7 janvier 2022, a fait l'objet d'une réintégration en hospitalisation complète, suite à des troubles du comportement sur la voie publique.

Le 26 avril 2022, le Dr [R], médecin psychiatre exerçant au sein du centre hospitalier Sainte Marie, a établi un certificat indiquant que le patient, habituellement connu et suivi pour trouble schizo-affectif au CMP de Menton et hospitalisé à cinq reprises en moins de six mois, a été réintégré en hospitalisation complète alors qu'il se trouvait en programme de soins, suite à des troubles du comportement sur la voie publique dans un contexte de rupture thérapeutique, qu'il présente un important délire à mécanisme imaginatif de thématique mégalomaniaque, avec une adhésion totale, une reconnaissance des troubles nulle et une opposition aux traitements, que le déni du caractère perturbateur pour l'ordre public de ses troubles psychiatriques est majeur ; ce certificat conclut, compte tenu de l'échec des dernières hospitalisations, de l'insuffisance de contenance de la prise en charge en soins à la demande d'un tiers, des multiples rechutes et ré-hospitalisations consécutives à des ruptures thérapeutiques, à la levée des soins sans consentement à la demande d'un tiers et à la mise en place d'une mesure de soins sans consentement à la demande du représentant de l'Etat, conformément aux dispositions de l'article L 3213-6 du code de la santé publique, au vu des troubles présentés, de l'incapacité du patient de consentir pleinement aux soins et du trouble à l'ordre public existant.

Une décision d'hospitalisation complète a donc été prise le 26 avril 2022 par le représentant de l'Etat dans le cadre des articles L3213-1 et suivants du code de la santé publique, au vu de ce certificat médical.

Par ordonnance rendue le 6 mai 2022 notifiée le même jour à M. [U], le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Nice, saisi dans le cadre du contrôle obligatoire prévu aux articles L3211-12-1 et suivants du même code, a dit que la mesure de soins psychiatriques sont M. [G] [U] faisait l'objet sous la forme d'hospitalisation complète, restait fondée.

Par lettre datée du 15 mai 2022 adressée au greffe le 16 mai 2022, M. [G] [U] a interjeté appel de la décision précitée.

L'ATIAM désignée comme tutrice de M. [U] par jugement en date du 5 mai 2022, a fait parvenir un rapport de situation faisant état de l'aggravation des troubles de son protégé depuis sa séparation avec sa compagne en septembre 2021, de la commission d'incivilités répétées par M. [U] lorsque celui-ci n'est pas hospitalisé et de la tenue par l'intéressé d'un discours coupé des réalités (détention d'avoirs cachés de plusieurs milliards, exercice de hautes fonctions diplomatiques assurées officieusement, inventions révolutionnaires de nature à modifier le monde). Elle a indiqué s'en remettre pour la poursuite de l'hospitalisation aux avis des médecins.

Le ministère public a conclu par écrit en date du 18 mai 2022 à la confirmation de la décision querellée.

A l'audience du 24 mai 2022; M. [G] [U] a comparu et a déclaré : ' c'est pas vrai , je ne peux pas laisser dire ça. Il y a eu beaucoup d'erreurs . Premièrement, je n'ai jamais porté atteinte à l'ordre public , je suis venu seul de moi-même le 16 avril pour une injection. Le docteur [R] est antisémite, et je crois que beaucoup d'élucubrations de personnes sont liées à cet aspect des choses. Je préfère ma non-complétude à cet aspect des choses. Le Dr [B], je l'ai vu 5 minutes, le 23 mai. C'est pas vrai , demandez aux jeunes qui sont là, je prends toujours mon traitement , oui j'ai besoin de mon traitement à la maison, j'ai besoin de soins à la maison . J'ai besoin d'une infirmière qui vienne me donner mon traitement à 18h à la maison. Il y a un peu de paranoïa, c'est possible. Faux , le docteur [R] m'a dit que j'ai volé des voitures, c'est faux. Je n'ai pas fait de troubles à l'ordre public. Le Dr [P] qui me suit au CMP, c'est un très bon médecin, vous voulez son téléphone ' J'ai pas volé et j'ai pas dégradé. C'es vrai que quand je suis pas traité....., les médecins m'ont dit que je devais prendre mon traitement. C'est moi qui suis venu . Maintenant je prends un nouveau traitement à base de lithium depuis 5 semaines; ma mère vient me voir à l'hôpital mais elle ne peut pas rentrer, je la vois au portail.'

Un membre du personnel soignant présent à l'audience confirme que l'état de M. [U] s'est amélioré depuis son hospitalisation.

L'avocat de M. [U] a été entendu. Il conteste la régularité de l'arrêté préfectoral ordonnant l'admission de M. [U] en soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète en date du 26 avril 2022 au motif qu'aucun trouble à l'ordre public n'est établi ; en effet, l'arrêt préfectoral fait état de multiples troubles du comportement présentés sur la voie publique par l'intéressé sans en spécifier la nature alors que M. [U] a été réintégré après s'être présenté de lui-même à l'hôpital ; il ajoute que le Dr [R] dans son certificat médical sollicitant la transformation de la mesure fait état seulement au conditionnel de vols et de dégradations qui auraient été commises par M. [U] et qui ne sont donc pas établis.

Il sollicite en conséquence la mainlevée de la mesure.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L'appel a été interjeté dans le délai de 10 jours prévu par les articles R 3211-18 et R 3211-19 du code de la santé publique.

Le juge des libertés et de la détention a statué dans le délai prévu à l'article L 3211-12-1 1° du même code.

L'arrêté pris par le préfet des Alpes Maritimes le 26 avril 2022 portant admission de M. [U] en soins psychiatriques sous le régime de l'hospitalisation complète vise le certificat médical du Dr [R] du même jour faisant état de la réintégration récente de l'intéressé, qui bénéficiait d'un programme de soins, en hospitalisation complète suite à des troubles du comportement sur la voie publique et de plusieurs troubles à l'ordre public qui auraient été occasionnés au cours des 6 derniers mois.

L'arrêté lui-même vise les multiples troubles du comportement sur la voie publique présentés par M. [U].

Aux termes de l'article L 3213-1 du code de la santé publique, le représentant de l'Etat dans le département prononce par arrêté, au vu d'un certificat médical circonstancié ne pouvant émaner d'un psychiatre exerçant dans l'établissement d'accueil, l'admission en soins psychiatriques des personnes dont les troubles mentaux nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l'ordre public. Les arrêtés préfectoraux sont motivés et énoncent avec précision les circonstances qui ont rendu l'admission en soins nécessaire.

En l'occurrence, l'absence totale de précisions tant dans l'arrêté préfectoral que dans le certificat médical auquel ce dernier renvoie, sur la nature des troubles du comportement présentés par M. [U] ne permet pas de vérifier qu'ils sont de nature à compromettre la sûreté des personnes ou à porter atteinte, de façon grave, à l'ordre public. Par ailleurs, l'emploi du conditionnel dans le certificat médical du Dr [R] en ce qu'il se rapporte aux troubles à l'ordre public perpétrés au cours des derniers mois ne permet pas de tenir ces derniers pour acquis.

A cet égard, M. [U] [G] conteste fermement avoir été l'auteur d'un trouble quelconque sur la voie publique.

A défaut de précisions suffisantes figurant dans la décision préfectorale renvoyant au certificat médical du même jour sur la nature des troubles du comportement sur la voie publique et des troubles à l'ordre public perpétrés alors que la loi prévoit que les circonstances ayant donné lieu à l'admission doivent être énoncées de manière précise, l'arrêté préfectoral en date du 26 avril 2022 apparaît irrégulier.

Aux termes de l'article L 3216-1 du code de la santé publique, l'irrégularité des décisions administratives ne peut entraîner la mainlevée de la mesure que si elle fait grief.

En l'occurrence un tel grief existe en ce que le défaut de caractérisation d'un risque pour la sûreté des personnes ou d'un trouble grave à l'ordre public n'aurait pas du permettre à l'autorité préfectorale de prendre une mesure d'hospitalisation sous contrainte à l'égard de M. [U].

Il y a lieu dès lors d'ordonner la mainlevée de cette mesure.

Cette décision sera toutefois assortie d'un effet différé afin de permettre le cas échéant, l'établissement d'un programme de soins en application de l'article L.3122-2-1 du code de la santé publique.

Les dépens seront laissés à la charge du Trésor public en application de l'article R 93-2° du code de procédure pénale.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par décision réputée contradictoire.

Déclarons recevable l'appel formé par M. [G] [U].

Infirmons la décision rendue le le 06 mai 2022 par le Juge des libertés et de la détention de NICE et statuant à nouveau,

Disons que la procédure est irrégulière .

Ordonnons la mainlevée de la mesure d'hospitalisation complète de M. [G] [U].

Différons la prise d'effet de la mainlevée de 24 heures après notification de la présente décision afin qu'un programme de soins puisse, le cas échéant, être établi en application du II de l'article L. 3211-2-1 du code de la santé publique ;

Laissons les dépens à la charge du Trésor public.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-11 ho
Numéro d'arrêt : 22/00079
Date de la décision : 25/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-25;22.00079 ?
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