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19/05/2022 | FRANCE | N°18/18428

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-1, 19 mai 2022, 18/18428


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1



ARRÊT AU FOND

DU 19 MAI 2022



N° 2022/187













N° RG 18/18428 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDMDF







SA AVIVA ASSURANCES





C/



SARL LOCAIR

SARL AAZ NAUTISME

SAS [M] [K] INVESTISSEMENTS





















Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me Sophie CAÏS



Me Maud DAVAL-GUEDJ



Me Elie MUSACCHIA



Me Louisa STRABONI













Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 03 Octobre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 16/04528.





APPELANTE



SA AVIVA ASSURANCES, dont le siège social est sis [Adres...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1

ARRÊT AU FOND

DU 19 MAI 2022

N° 2022/187

N° RG 18/18428 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDMDF

SA AVIVA ASSURANCES

C/

SARL LOCAIR

SARL AAZ NAUTISME

SAS [M] [K] INVESTISSEMENTS

Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me Sophie CAÏS

Me Maud DAVAL-GUEDJ

Me Elie MUSACCHIA

Me Louisa STRABONI

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 03 Octobre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 16/04528.

APPELANTE

SA AVIVA ASSURANCES, dont le siège social est sis [Adresse 1]

représentée par Me Sophie CAÏS, avocat au barreau de TOULON substituée par Me Julie KERANGUEVEN, avocat au barreau de TOULON

INTIMEES

SARL LOCAIR, dont le siège social est sis [Adresse 4]

représentée par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Frédéric FAUBERT, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Rémy STELLA, avocat au barreau de MARSEILLE

SARL AAZ NAUTISME, dont le siège social est sis [Adresse 2]

représentée par Me Elie MUSACCHIA, avocat au barreau d'AIX-EN- PROVENCE, assisté de Me Thierry DEBARD, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

SAS [M] [K] INVESTISSEMENTS, actuellement en liquidation et représentée par Monsieur [K] [M] en qualité de mandataire ad hoc, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Louisa STRABONI, avocat au barreau de MARSEILLE, substituée par Me Laure BARATHON, avocat au barreau d'AIX-EN- PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 28 Mars 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Marie-Christine BERQUET, Conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Pierre CALLOCH, Président

Madame Marie-Christine BERQUET, Conseillère

Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. Alain VERNOINE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Mai 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Mai 2022,

Signé par Monsieur Pierre CALLOCH, Président et M. Alain VERNOINE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCEDURE

La société LOCAIR a acquis le 18 août 2009, au prix de 74.800€ TTC un bateau neuf semi-rigide «'RAIMAR 830'» à la société AAZ NAUTISME et en a confié la gestion à cette société avec pour mission l'entretien de celui-ci, la recherche de locataires, la signature des contrats de location et l'encaissement du montant des locations.

Au printemps 2013 la société AAZ NAUTISME a fait appel à la société NEBO MARINE afin d'effectuer une réparation sur le bateau.

Une avarie étant survenue en mer le 13 juillet 2014 alors que le bateau était loué par monsieur [I] [J], la société LOCAIR a déclaré le sinistre auprès de son assureur dommages, la MMA qui a opposé un refus de garantie au motif que les dommages constatés résultaient d'une mauvaise réparation effectuée antérieurement au sinistre et d'un défaut d'entretien, et que ce type de dommage était exclu de la garantie.

Monsieur [Z] [R], expert maritime désigné par ordonnance rendue le 14 juin 2015, a déposé un rapport daté du 15 février 2016

Par actes des 25 et 26 mai 2016, la société LOCAIR a saisi le tribunal de grande instance de Draguignan.

Par jugement du 3 octobre 2018, le tribunal de grande instance Draguignan a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire':

- condamné la société AAZ NAUTISME et la société AVIVA ASSURANCES à payer à la société LOCAIR la somme de 48.435,60 8€ à titre de dommages et intérêts pour manquement de la société AAZ à ses obligations contractuelles,

- condamné la société AAZ NAUTISME à payer à la société LOCAIR la somme de 2.000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties de leurs autres demandes,

- condamné la société AAZ NAUTISME aux dépens en ce compris les frais d'expertise judiciaire.

La société AVIVA ASSURANCES a relevé appel de cette décision par déclaration enregistrée au greffe le 23 novembre 2018.

Le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de l'instruction par ordonnance du 28 février 2022 et a fixé l'examen de l'affaire à l'audience du 28 mars 2022

Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 17 janvier 2020, auxquelles il est expressément référé en application de l'article 455 du code de procédure civile, la société AVIVA ASSURANCES':

- invoque la nullité du contrat pour fausse déclaration intentionnelle du risque entraînant une déchéance de garantie sur le fondement des articles 5 et 6 du contrat d'assurances et de l'article L113-8 du code des assurances, la société AAZ NAUTISME n'ayant pas déclaré utiliser de sous-traitant, alors qu'un sous-traitant serait intervenu, et à tout le moins l'absence de garantie,

- affirme que la responsabilité de la société AAZ NAUTISME n'a pas été retenue par l'expert,

- fait valoir la déduction de la franchise contractuelle et demande à ramener à de plus justes proportions le montant des dommages et intérêts, à défaut de certitude sur la chance perdue d'avoir pu louer le navire sur la totalité de la période invoquée

La société AVIVA ASSURANCES demande ainsi à la cour de':

Vu les dispositions de l'article 1134 du Code civil,

Vu le contrat liant la société AVIVA à la société AAZ NAUTISME

REFORMER dans toutes ses dispositions le Jugement du Tribunal de Grande Instance de Draguignan en date du 03 octobre 2018.

En conséquence,

A TITRE PRINCIPAL

Vu l'article L 113-8 du code des assurances,

DIRE ET JUGER qu'en raison de la sous-traitance par la société AAZ NAUTISME à la société NEBO MARINE de la prestation à l'origine du sinistre, la Sté AVIVA est fondée à opposer à la Sté LOCAIR la nullité du contrat pour fausse déclaration et à tout le moins l'absence de garantie.

DEBOUTER la société LOCAIR de l'ensemble de ses demandes en ce qu'elles sont dirigées à l'encontre de AVIVA.

A TITRE SUBSIDIAIRE,

DIRE ET JUGER que la solidarité ne se présumant pas il ne saurait y avoir de condamnation solidaire des sociétés AAZ NAUTISME et NEBO MARINE

DIRE ET JUGER qu'il n'y a pas lieu de condamner la société AAZ NAUTISME dès lors que sa responsabilité n'a pas été retenue par l'expert judiciaire dans la réalisation de la prestation litigieuse et la survenance du sinistre.

DIRE ET JUGER que la garantie d'AVIVA ne saurait être mobilisée en dehors des clauses contractuelles.

A TITRE INFINIMENT SUBSIDIAIRE

DIRE ET JUGER que la garantie de l'assureur ne peut être due que sous déduction d'une franchise de 10% allant de 1.550 à 7.625 euros, outre un plafond de garantie de 310.000 euros.

DEBOUTER la société LOCAIR de sa demande de condamnation au titre des frais de parking et de gardiennage injustifiés.

RAMENER à de plus juste proportion le montant des dommages-intérêts dus au titre de la perte financière locative.

EN TOUT ETAT DE CAUSE

CONDAMNER tout succombant à verser à AVIVA la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure civile STATUER ce que de droit sur les dépens

Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 17 mai 2019, auxquelles il est expressément référé en application de l'article 455 du code de procédure civile, la société AAZ NAUTISME :

- soutient qu'aucune clause d'exclusion de garantie ne peut lui être opposée

- conteste toute fausse déclaration intentionnelle, indiquant ne pas avoir eu recours à un sous-traitant de manière habituelle et précisant que la société NEBO Marine n'est intervenue qu'une seule fois sur le bateau selon facture du 22 juillet 2013, et n'a pas pratiqué la maintenance du bateau.

La société AAZ NAUTISME demande à la cour de':

Vu les articles L 113-8 et L113-9 du contrat d'assurance ;

DEBOUTER la société AVIVA des fins de son appel ;

CONFIRMER le jugement du Tribunal de grande instance de DRAGUIGNAN du 3 octobre 2018 ;

Y ajoutant,

CONDAMNER la société AVIVA à relever et garantir la société AAZ NAUTISME de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre sur la demande de la société LOCAIR, sous déduction de la franchise contractuellement applicable.

Vu l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNER tout succombant au paiement de la somme de 3.000 € au titre des frais irrépétibles ainsi qu'aux dépens.

Par dernières conclusions notifiées par RPVA le 17 avril 2020, auxquelles il est expressément référé en application de l'article 455 du code de procédure civile, la société LOCAIR soutient que

- l'avarie subie par le bateau le 13 juillet 2014 a pour origine le mauvais entretien général du bateau et les mauvaises réparations effectuées par les sociétés AAZ NAUTISME et [M] [K] INVESTISSEMENT (anciennement dénommée NEBO MARINE),

- l'entretien et les réparations du bateau réalisées par les sociétés AAZ NAUTISME et [M] [K] INVESTISSEMENT (anciennement dénommée NEBO MARINE) n'ont pas été effectuées dans les règles de l'art,

- ces sociétés ont manqué à leurs obligations de conseil et d'information,

La société LOCAIR demande à la cour de':

Vu les articles 1231-1, 1240 et suivants du code civil,

Vu les articles L. 113-9 et 112-4 du code des assurances,

vu le rapport d'expertise judiciaire,

CONFIMER le jugement du tribunal de grande instance de Draguignan ce qu'il a retenu la responsabilité de la société AAZ NAUTISME et dit que la société AVIVA ASSURANCES devait relever garantie des condamnations prononcées contre son assuré,

INFIRMER le jugement en ce qu'il n'a pas retenu la responsabilité de la société NEBO MARINE,

INFIRMER le jugement ce qu'il a limité le quantum des dommages et intérêts dû à la société LOCAIR à la somme de 48.435,68 euros,

HOMOLOGUER le rapport d'expertise judiciaire déposé le 15 février 2016 par monsieur [R],

DIRE ET JUGER la demande de nullité du contrat sollicité par la société AVIVA irrecevable, tardive et en tout état de cause mal fondée,

DIRE ET JUGER que la déchéance du contrat invoquée par AVIVA ASSURANCES n'est pas opposable à la société LOCAIR,

DEBOUTER de toutes ses demandes la société AVIVA ASSURANCES,

DEBOUTER de toutes ses demandes monsieur [K] [M], es qualité de mandataire ad hoc de la société [M] BORUS INVESTSSEMENT,

DEBOUTER de toutes ses demandes la société AAZ NAUTISME,

DIRE ET JUGER que la société AAZ NAUTISME a engagé sa responsabilité contractuelle,

DIRE ET JUGER que la société [M] [K] INVESTISSEMENT (anciennement dénommée NEBO MARINE) a engagé sa responsabilité délictuelle,

DIRE ET JUGER que la société [M] [K] INVESTISSEMENT (anciennement dénommée NEBO MARINE) et AAZ NAUTISME doivent indemniser in solidum la société LOCAIR des préjudice subis,

DIRE ET JUGER que la société AVIVA ASSURANCES doit relever garantir toutes les condamnations prononcées à l'encontre de son assuré la société AAZ NAUTISME

CONDAMNER in solidum monsieur [K] [M] ès qualité de mandataire ad hoc de la société [M] [K] INVESTISSEMENTS (anciennement dénommée NEBO MARINE), la société AAZ NAUTISME et son assureur la société AVIVA à payer à la société LOCAIR les sommes suivantes':

- 8.430,60 8€ hors taxe au titre des travaux de remise en état du bateau

- 13.680€ hors taxe au titre des frais de gardiennage du bateau pour la période du 01 août 2014 au 31 octobre 2017,

- 43.875€ hors taxes au titre de la perte financière de location pour la période du 14 juillet 2014 au 31 octobre 2017,

CONDAMNER tout succombant à payer à la société LOCAIR la somme de 5.500€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens.

Par dernières conclusions en date du 20 août 2019, auxquelles elles il y a lieu de se référer par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la société [M] [K] INVESTISSEMENTS, actuellement liquidée, représentée par monsieur [K] [M] es qualité de mandataire ad hoc désigné par le tribunal de commerce de Fréjus par ordonnance du 21 mars 2018 affirme que':

- il n'apparaît pas qu'il y ait eu une intention de l'assuré AAZ NAUTISME de tromper son assureur en déclarant ne pas avoir recours à la sous-traitance,

- elle n'est intervenue qu'une seule fois sur le bateau conformément à la facture du 22 juillet 2013, avant la saison d'utilisation 2013, et qu'il n'y a eu aucune autre commande, notamment aucune commande avant la saison d'utilisation 2014 au cours de laquelle l'avarie s'est produite, qu'elle ignore si AAZ NAUTISME a fait appel à un autre sous-traitant ou a effectué elle-même les opérations usuelles de levage, carénage et vérification ou si rien n'a été fait sur le bateau avant la saison 2014,

- l'expert a retenu un non-respect des règles de l'art par les professionnels en charge de l'entretien du bateau, et a relevé expressément que «'l'intervention de la société NEBO MARINE sur le tissu n'a eu pour but que le recollage de ce dernier sur une petite partie écornée'» et qu'il est établi qu'elle «'ne pratiquait pas la maintenance constante du bateau'».

La société [M] [K] INVESTISSEMENT demande à la cour de':

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Draguignan le 3 octobre 2018,

- rejeter l'ensemble des prétentions de la compagnie AVIVA ASSURANCES,

- condamner la société AAZ et la compagnie AVIVA ASSURANCES à indemniser la société LOCAIR de l'ensemble de son préjudice découlant de l'avarie subie le 13 juillet 2014,

- condamner la compagnie AVIVA ASSURANCES à payer à la société [M] [K] INVESTISSEMENTS représentée par monsieur [K] [M] es ce qualité de mandataire ad hoc, la somme de 3.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens de première instance et d'appel en ce compris les frais d'expertise.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur les demandes en nullité du contrat d'assurance et exclusion de garantie formées par AVIVA ASSURANCES

Aux termes de l'article L.113-8 du code des assurances, le contrat d'assurance est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l'assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l'objet du risque ou en diminue l'opinion pour l'assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l'assuré a été sans influence sur le sinistre. Les primes payées demeurent alors acquises à l'assureur, qui a droit au paiement de toutes les primes échues à titre de dommages et intérêts.

Aux termes de l'article L. 113-9 du code des assurances, l'omission ou la déclaration inexacte de la part de l'assuré dont la mauvaise foi n'est pas établie, n'entraîne pas la nullité de l'assurance. Dans le cas où la constatation n'a lieu qu'après un sinistre, l'indemnité est réduite en proportion du taux des primes payées par rapport au taux des primes qui auraient été dues, si les risques avaient été complètement et exactement déclarés.

Au cas présent, la demande visant à voir prononcer la nullité du contrat pour fausse déclaration n'est pas nouvelle dès lors qu'elle tend aux mêmes fins que la demande visant à voir exclure sa garantie formulée en première instance, et ce conformément aux dispositions de l'article 565 du code de procédure civile. Elle sera par conséquent déclarée recevable et le moyen tirée de l'irrecevabilité de cette demande rejeté.

Il appartient à la société AVIVA ASSURANCES qui invoque la nullité du contrat pour fausse déclaration intentionnelle, de faire la démonstration qu'en l'espèce sont réunies les conditions d'application de l'article L.113-8 précité et en particulier la mauvaise foi de l'assuré.

Il résulte du rapport d'expertise que la société NEBO MARINE est intervenue une fois sur le bateau pour un lavage du bateau selon devis 11 juin 2013 puis selon facture du 22 juillet 2013, pour un seul entretien «'cosmétique'», et qu'elle ne pratiquait pas la maintenance constante et de règle du bateau (cf. rapport d'expertise en pages 12 et 20). Aucun élément du dossier ne permet de retenir que la société AAZ NAUTISME aurait eu recours de façon habituelle à un sous-traitant. Au regard de la date de souscription du contrat, à savoir janvier 2006, l'intentionnalité du défaut de déclaration de l'unique intervention de la société NEBO MARINE en juillet 2013 n'est pas établie.

En conséquence, il y a lieu, en application des dispositions précitées, de débouter la société AVIVA ASSURANCES de sa demande visant à voir prononcer la nullité du contrat.

C'est à juste titre que le tribunal, après avoir relevé que la société AVIVA ASSURANCES se prévalait d'une exclusion de garantie contenue selon elle dans le contrat la liant à son assuré principal qui exclurait les dommages causés lors de ses activités professionnelles de réparation et d'entretien en cas de sous-traitance, a relevé à la lecture du contrat que celui-ci ne contenait pas de clause stipulée dans la police en caractère très apparent comme l'impose l'article L.112-4 du code des assurances. En effet si certaines mentions de l'article 1 des conditions particulières du contrat, intitulé «'Déclarations de l'assuré'» sont en caractère gras, ce n'est pas le cas de la mention «'sans appel à des sous-traitants'».

Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur la responsabilité contractuelle de la société AAZ NAUTISME et la responsabilité délictuelle de la société NEBO MARINE

Vu les articles 1147,1984 et 1382 du code civil,

Monsieur [Z] [R], expert maritime désigné par ordonnance rendue le 14 juin 2015, a déposé un rapport daté du 15 février 2016 comportant les conclusions suivantes :

- ce navire destiné à la location commerciale n'a bénéficié d'aucun entretien selon les règles basiques de l'art, par les professionnels en charge, seulement un entretien moteur annuel';

- l'avarie a été causée par une rupture de la masse fibrique jamais réparée correspondant à un choc subi à une date indéterminée et recouverte simplement d'un tissu PVC qui a servi de camouflage étranger à la matière des boudins'; le point faible sur la coque à l'étrave tribord, dû à un manque de réparation dans les règles de l'art, conjuguée à la force hydraulique appliquée à l'étrave même à faible vitesse, ayant été le point de départ de l'avarie par arrachage des boudins.

Au terme de ses travaux, l'expert confirme ainsi «'une insuffisance notable d'entretien général, de contrôles visuels et structurels, non conforme aux règles de l'art dévolus aux professionnels'», «'outre les entretiens moteur, il n'a bénéficié que d'un seul entretien cosmétique (peinture du frigo, lavage, et recollage d'un tissu PVC écorné à l'entrave'; (cf. facture NEBO Marine du 22/07/2013).'»

C'est dès lors à juste titre que le tribunal a retenu la responsabilité contractuelle de la société AAZ NAUTISME, société spécialisée en réparation et maintenance navale, qui n'a pas respecté ses obligations aux termes du mandat qui lui avait été confié, tant en ne réalisant pas un entretien régulier et correct du bateau, qu'en informant pas la société LOCAIR de la nécessité de faire réparer l'étrave du bateau et en donnant en location un bateau qui n'était pas en état de prendre la mer.

Les pièces versées au dossier montrent que l'intervention de la société NEBO MARINE a été ponctuelle et a consisté en un lavage du bateau et des travaux commandés à visée esthétique en juillet 2013. Elles ne permettent pas de retenir que la société AAZ NAUTISME aurait sous-traité à la société NEBO MARINE des travaux de réparation à des fins mécaniques sur la coque à l'étrave tribord, ni d'autres travaux que ceux précités.

Les travaux réalisés par la société NEBO MARINE apparaissent sans lien de causalité avec le sinistre survenu en 2014, alors même au surplus que la société AAZ NAUTISME est intervenue personnellement sur le bateau après la société NEBO MARINE en novembre 2013, puis deux mois avant le sinistre (facture du 18/11/2013 et 15/05/2014).

C'est ainsi également à juste titre que le tribunal a écarté la responsabilité de la société NEBO MARINE.

Sur la franchise et les demandes indemnitaires

Le propre de la responsabilité civile est de rétablir aussi exactement que possible l'équilibre détruit par le dommage, et de replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l'acte dommageable ne s'était pas produit.

Le chiffrage des dommages effectué par l'expert et repris par le tribunal est critiqué en plusieurs points, en particulier concernant les frais de gardiennage et le montant des dommages immatériels.

C'est à juste titre qu'ont été retenus des frais de gardiennage pour la période d'immobilisation du bateau après sinistre, dans la mesure où si le bateau n'avait pas été sinistré, il serait resté à l'eau, et l'ensemble des frais auraient été pris en charge par la société AAZ NAUTISME.

S'agissant de la perte financière liée à l'absence de location du bateau pendant la période de son immobilisation consécutive au sinistre, l'expert a effectivement retenu une décote de 40 % sur le prix de base de location, eu égard aux sommes qui aurait été retenues par la société AAZ NAUTISME en exécution des clauses du mandat. La société AVIVA ASSURANCES soutient à raison qu'il n'est pas justifié de ce que le bateau aurait été loué ou réservé de façon certaine durant toute la période retenue. Au regard de l'ensemble de ces éléments, le préjudice lié à la perte de chance de louer le bateau sur la période du 14 juillet 2014 au 31 octobre 2017 apparaît avoir été correctement évalué à la somme de 26.'325 euros.

Dès lors, au égard à l'ensemble de ces éléments et du principe rappelé ci-dessus, il y a lieu de confirmer la décision qui a retenu une somme totale de 48.435,68 euros au titre des dommages et intérêts dus par la société AAZ NAUTISME

Les limites de garantie sont opposables au tiers lésé qui exerce l'action directe.

En conséquence en l'espèce, la garantie sera due sous déduction de la franchise de 10 % insérée au contrat d'assurances.

Le jugement à la motivation duquel il convient de se référer pour le surplus est confirmé en toutes ses dispositions, les demandes présentées par la société LOCAIR étant rejetées.

Sur les demandes accessoires

La société AVIVA ASSURANCES, partie perdante est condamnée à payer à la société LOCAIR une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux dépens de l'instance d'appel.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

-CONFIRME le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Draguignan le 3 octobre 2018 en toutes ses dispositions, sauf à préciser que la garantie de l'assureur la société AVIVA ASSURANCE est due sous déduction de la franchise de 10%,

Y ajoutant,

- REJETE l'exception d'irrecevabilité de la demande visant à voir prononcer la nullité du contrat d'assurance,

- DEBOUTE la société AVIVA ASSURANCES de sa demande visant à voir prononcer la nullité du contrat d'assurance,

-CONDAMNE la société AAZ NAUTISME à régler à la société LOCAIR la somme de 48.435,68 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à ses obligations contractuelles,

- DIT que la société AVIVA ASSURANCE devra relever et garantir la société AAZ NAUSTISME à hauteur de la somme de 48.435,68 euros sous déduction de 10 % au titre de la franchise, soit 43.592,68 euros.

- CONDAMNE la société AVIVA ASSURANCES à payer à la société LOCAIR une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- DEBOUTE les parties de leurs demandes autres ou plus amples,

- CONDAMNE'la société AVIVA ASSURANCES aux dépens recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Le GREFFIER Le PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 3-1
Numéro d'arrêt : 18/18428
Date de la décision : 19/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-19;18.18428 ?
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