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13/05/2022 | FRANCE | N°21/08404

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8, 13 mai 2022, 21/08404


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8



ARRÊT AU FOND

DU 13 MAI 2022



N°2022/.



Rôle N° RG 21/08404 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHSRU







CPAM DU LOT ET GARONNE





C/



Société [2]









Copie exécutoire délivrée

le :

à :





- CPAM DU LOT ET GARONNE



- Me Olivia COLMET DAAGE















Décision déférée à la Cour :



J

ugement du Pole social du tribunal judiciaire de Marseille en date du 03 Mai 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 18/11313.





APPELANTE



CPAM DU LOT ET GARONNE, demeurant [Adresse 1]



représenté par Mme [Y] [F] en vertu d'un pouvoir spécial





INTIMEE



Société [2], demeuran...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8

ARRÊT AU FOND

DU 13 MAI 2022

N°2022/.

Rôle N° RG 21/08404 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHSRU

CPAM DU LOT ET GARONNE

C/

Société [2]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- CPAM DU LOT ET GARONNE

- Me Olivia COLMET DAAGE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du tribunal judiciaire de Marseille en date du 03 Mai 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 18/11313.

APPELANTE

CPAM DU LOT ET GARONNE, demeurant [Adresse 1]

représenté par Mme [Y] [F] en vertu d'un pouvoir spécial

INTIMEE

Société [2], demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Olivia COLMET DAAGE, avocat au barreau de PARIS substitué par Me François-xavier CARON, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Février 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Mme Catherine BREUIL, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Isabelle LAURAIN.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 13 Mai 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 13 Mai 2022

Signé par Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre et Madame Isabelle LAURAIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [R] [W], ayant été employé en qualité de chauffeur TP-bitume-goudronnage depuis le 26 janvier 1976 par la société [2], a déclaré le 14 juin 2017 à la caisse primaire d'assurance maladie du Lot et Garonne être atteint d'un cancer de la vessie en sollicitant la reconnaissance de son caractère professionnel et en précisant que la date de la première constatation médicale de sa maladie est celle du 30 avril 1996.

Après enquête, la caisse primaire d'assurance maladie du Lot et Garonne a pris en charge le 14 février 2018 cette pathologie au titre du tableau 16 bis des maladies professionnelles puis a déclaré M. [W] consolidé à la date du 30 mars 2017 et a fixé à 25% son taux d'incapacité permanente partielle.

La société [2] a saisi le 9 mars 2018 le tribunal du contentieux de l'incapacité de Marseille de sa contestation de cette décision afférente au taux d'incapacité.

Par jugement en date du 03 mai 2021, le tribunal judiciaire de Marseille, pôle social, a :

* dit que le taux d'incapacité permanente partielle opposable à la société [2] et attribué à M. [R] [W] suite à sa maladie professionnelle en date du 30 mars 2017 doit être 'porté' à 15%,

* condamné la société [2] aux dépens en jugeant qu'ils comprennent notamment les frais de la consultation médicale.

La caisse primaire d'assurance maladie du Lot et Garonne a relevé régulièrement appel, dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas discutées.

En l'état de ses conclusions réceptionnées par le greffe le 31 janvier 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé plus ample de ses moyens et arguments, la caisse primaire d'assurance maladie du Lot et Garonne sollicite l'infirmation du jugement entrepris et demande à la cour de:

* dire que le taux d'incapacité permanente partielle de 25% est médicalement justifié,

* débouter la société [2] de l'ensemble de ses demandes.

En l'état de ses conclusions visées par le greffier le 16 février 2022, reprises oralement à l'audience auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé plus ample de ses moyens et arguments, la société [2] sollicite la confirmation du jugement entrepris.

Elle demande à la cour de:

* juger que les séquelles de M. [W] en lien avec sa maladie professionnelle du 30 mars 2017 justifient l'attribution d'un taux d'incapacité permanente partielle de 15% ,

* débouter la caisse primaire d'assurance maladie du Lot et Garonne de ses demandes,

* condamner la caisse primaire d'assurance maladie du Lot et Garonne aux dépens.

MOTIFS

L'incapacité permanente partielle correspond au regard de la législation professionnelle à la subsistance d'une infirmité, consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle, diminuant de façon permanente la capacité de travail de la victime.

Il résulte de l'article L.434-2 du code de la sécurité sociale que le taux d'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d'un barème indicatif d'invalidité.

Ainsi, le taux d'incapacité doit s'apprécier à partir de l'infirmité dont la victime est atteinte et d'un correctif tenant compte de l'incidence concrète de cette infirmité sur son activité, et ce en se plaçant à la date de la consolidation.

La caisse rappelle que le barème indicatif applicable est celui des maladies professionnelles et expose que son médecin conseil a, pour évaluer le taux d'incapacité permanente partielle, pris en considération la maladie (carcinome urothélial papillaire grade 1 avec manifestation clinique modérée) pour laquelle le taux indicatif du guide barème, chapitre 5.7.2.1, donne une évaluation entre 10 et 50% suivant l'importance des manifestations cliniques et les contraintes imposées par la surveillance, et souligne que ce taux doit être apprécié au moment de la consolidation, ce qui exclut la prise en considération d'un état évolutif postérieur.

Elle précise que son médecin conseil a majoré le taux théorique affecté à l'infirmité en raison des obstacles que les conséquences de l'âge apportent à la réadaptation et au reclassement professionnel et qu'ainsi le taux retenu est fonction de la nature de l'infirmité, de l'état général, de l'âge, des facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle.

L'intimée lui oppose que les conclusions du médecin consultant sont claires, précises et dénuées de toute ambiguïté et est corroboré par celui de son propre médecin conseil. Elle soutient que l'appelante ne produit aucun élément de nature à contredire les avis convergents de ces deux médecins.

En l'espèce, le salarié était âgé de 77 ans à la date de la consolidation du 30 mars 2017 pour être né le 25 janvier 1940.

Le rapport du médecin conseil de la caisse évaluant le taux d'incapacité permanente partielle travail à 25% n'est pas versé aux débats en cause d'appel.

Le barème indicatif d'invalidité des maladies professionnelles précise en son chapitre 5 les modalités d'évaluation du taux d'incapacité permanente pour les affections des reins et voies urinaires. Il mentionne que l'atteinte de l'appareil urinaire au cours des maladies professionnelles peut relever de divers mécanismes physiopathologiques et réaliser des lésions variées touchant le parenchyme rénal et que quelle que soit la maladie, les séquelles au moment de la consolidation donnent lieu à un nombre restreint de situation, le médecin chargé de l'évaluation devant estimer l'incapacité permanente partielle résultant des syndromes suivants:

- insuffisance rénale chronique,

- hypertension artérielle,

- protéinurie importante,

- hématurie ou protéinurie isolée,

- tubulopathie chronique,

- lithiase urinaire,

- lésions vésicales.

Le chapitre 5.7.2.1 relatif aux tumeurs papillomateuses non dégénérées avec ou sans hématuries nécessitant une ou plusieurs résections et des contrôles endoscopiques itératifs évalue de 10 à 50% le taux d'incapacité permanente suivant l'importance des manifestations cliniques et des contraintes imposées par la surveillance.

Le taux retenu par le médecin consultant, suivant en cela l'avis du médecin conseil de l'employeur présent, à la différence du médecin conseil de la caisse, est le taux le plus bas de la fourchette du guide-barème pour la maladie professionnelle reconnue.

Dans son rapport de consultation médicale sur pièces, le consultant indique que le carcinome urothélial papillaire a été traité par résection endoscopique à plusieurs reprises, que les doléances de la victime sont des douleurs au niveau de la vessie avec brûlure en fin de vidange vésicale, une pollakiurie toutes les 1/2 heures et 3/4 d'heure, impliquant de se lever 4 à 5 fois la nuit, une perte de la libido et une dysurie et mentionne en outre une tension artérielle de 180/6.

Les manifestations cliniques de la pollakiurie ainsi quantifiées ne sont pas compatibles avec le taux le plus bas de la fourchette alors qu'elles ont une incidence importante dans la vie quotidienne de la victime et génèrent nécessairement une fatigabilité importante le sommeil étant nécessairement perturbé plusieurs fois par nuit.

Compte tenu de l'âge du salarié à la date de la consolidation, des résections endoscopiques itératives relevées ainsi que de la tension artérielle indiquée par le médecin consultant, il ne peut être considéré que le taux de 10% correspond à une juste évaluation des séquelles de la maladie professionnelle contractée, alors que le taux retenu par le médecin conseil de la caisse correspond à un taux médian au regard du guide barème, prenant en considération de telles incidences.

Le jugement entrepris doit en conséquence être infirmé et le taux d'incapacité permanente partielle de 25% retenu par la caisse primaire d'assurance maladie du Lot et Garonne doit être déclaré opposable à la société [2].

Succombant en ses prétentions la société [2] doit être condamnée aux dépens, hormis les frais de la consultation ordonnée en première instance demeurant à la charge de la caisse nationale de l'assurance maladie.

PAR CES MOTIFS,

- Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

- Dit opposable à la société [2] le taux d'incapacité permanente partielle résultant de la maladie professionnelle dont a été victime M. [R] [W] fixé à 25%,

y ajoutant,

- Déboute la société [2] de ses demandes,

- Condamne la société [2] aux dépens, hormis les frais de la consultation ordonnée en première instance demeurant à la charge de la caisse nationale de l'assurance maladie.

Le GreffierLa Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8
Numéro d'arrêt : 21/08404
Date de la décision : 13/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-13;21.08404 ?
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