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13/05/2022 | FRANCE | N°21/02437

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8, 13 mai 2022, 21/02437


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8



ARRÊT AU FOND

DU 13 MAI 2022



N°2022/.



Rôle N° RG 21/02437 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BG65L







CAISSE DE PREVOYANCE ET DE RETRAITE DES NOTAIRES





C/



[N] [K]





Copie exécutoire délivrée

le :

à :



- Me Laurent DELVOLVE



- Me Edouard BAFFERT





















Décision déférée à la Cour :r>


Jugement du Pole social du tribunal judiciaire de Marseille en date du 16 Décembre 2020,enregistré au répertoire général sous le n° 17/4505.





APPELANTE



CAISSE DE PREVOYANCE ET DE RETRAITE DES NOTAIRES, demeurant [Adresse 1]



représenté par Me Laurent DELVOLVE de l'AARPI D...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8

ARRÊT AU FOND

DU 13 MAI 2022

N°2022/.

Rôle N° RG 21/02437 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BG65L

CAISSE DE PREVOYANCE ET DE RETRAITE DES NOTAIRES

C/

[N] [K]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me Laurent DELVOLVE

- Me Edouard BAFFERT

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du tribunal judiciaire de Marseille en date du 16 Décembre 2020,enregistré au répertoire général sous le n° 17/4505.

APPELANTE

CAISSE DE PREVOYANCE ET DE RETRAITE DES NOTAIRES, demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Laurent DELVOLVE de l'AARPI Delvolvé Poniatowski Suay Associés, avocat au barreau de PARIS substituée par Me Tiphaine DE VARAX, avocat au barreau de PARIS

INTIME

Monsieur [N] [K], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Edouard BAFFERT de la SARL BAFFERT-MALY, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Février 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Mme Catherine BREUIL, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Isabelle LAURAIN.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 13 Mai 2022.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 13 Mai 2022

Signé par Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre et Madame Isabelle LAURAIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

M. [N] [K], notaire, est retraité depuis le 31 juillet 2016.

La caisse de retraite des notaires lui a adressé les 14 décembre 2016 et 9 février 2017 des appels de cotisations au titre du régime d'assurance vieillesse afférentes au 4ème trimestre 2016 et au 1er trimestre 2017.

Après rejet le 05 avril 2017 de sa contestation de ces appels de cotisations par la commission de recours amiable, M. [K] a saisi le 1er juin 2017 le tribunal des affaires de sécurité sociale.

Par jugement en date du 16 décembre 2020, le tribunal judiciaire de Marseille, pôle social, a:

* réformé la décision de la commission de recours amiable,

* prononcé la décharge des cotisations du régime complémentaire d'assurance vieillesse de la caisse de retraite des notaires afférentes aux 4ème trimestre 2016 et 1er trimestre 2017,

* condamné la caisse de retraite des notaires à payer à M. [N] [K] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamné la caisse de retraite des notaires aux dépens.

La caisse de retraite des notaires a relevé régulièrement appel dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas discutées.

En l'état de ses conclusions remises par voie électronique le 07 février 2022, reprises oralement à l'audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé plus ample de ses moyens et arguments, la caisse de retraite des notaires sollicite l'infirmation du jugement entrepris et demande à la cour de:

* confirmer la décision de la commission de recours amiable du 05 avril 2017 rejetant la demande d'exemption des cotisations de M. [K],

* dire que M. [N] [K] est redevable de ses cotisations au titre des 4ème trimestre 2016 et 1er trimestre 2017.

A titre subsidiaire, elle demande à la cour de:

* rejeter la demande de question préjudicielle,

* débouter M. [K] de l'intégralité de ses demandes,

* condamner M. [K] à lui verser les cotisations restant dues assorties des majorations de retard suivant le taux qu'elle a fixé, soit 19 214.10 euros au titre du 4ème trimestre 2016 et 18 800.98 euros au titre du 1er trimestre 2017,

* condamner M. [N] [K] à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance et celle de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel,

* condamner M. [N] [K] aux dépens.

En l'état de ses conclusions réceptionnées par le greffe le 10 février 2022, reprises oralement à l'audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé plus ample de ses moyens et arguments, M. [N] [K] conclut titre principal à la confirmation du jugement et demande à la cour, y ajoutant de:

* débouter la caisse de retraite des notaires de l'ensemble de ses demandes,

* condamner la caisse de retraite des notaires à lui payer la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

A titre subsidiaire, il demande à la cour in limine litis de renvoyer au tribunal administratif la question de la légalité de la résolution 2 votée au point 5 du procès-verbal du conseil d'administration de la section professionnelle d'assurance vieillesse des notaires du 6 avril 2017 et de surseoir à statuer dans l'attente de la décision définitive de la juridiction administrative.

Sur le fond, il demande à la cour de:

* réformer la décision de la commission de recours amiable de la caisse de retraite des notaires en date du 15 mai 2017,

* prononcer la décharge des cotisations du régime complémentaire d'assurance vieillesse des la caisse de retraite des notaires mises à sa charge au titre des 4ème trimestre 2016 et 1er trimestre 2017,

* débouter la caisse de retraite de l'ensemble de ses demandes,

* condamner la caisse de retraite des notaires au paiement de la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

MOTIFS

L'article L.642-1 du code de la sécurité sociale, pris dans sa rédaction issue de la loi 2014-626 du 18 juin 2014 applicable en l'espèce, dispose que toute personne exerçant une activité professionnelle relevant de l'Organisation autonome d'assurance vieillesse des professions libérales est tenue de verser des cotisations destinées à financer notamment:

1° Les prestations définies au chapitre III du présent titre,

2° Les charges de compensation incombant à cette organisation en application des articles L. 134-1 et L. 134-2.

Le régime de la pension de retraite reçoit une contribution du fonds institué par l'article L. 135-1 dans les conditions fixées par l'article L. 135-2.

L'article D.642-1 du code de la sécurité sociale pris dans sa rédaction issue du décret 2012-443 du 03/04/2012 stipule que les cotisations mentionnées à l'article L. 642-1 sont dues, sous réserve des dispositions de l'article L. 131-6-1, à compter du premier jour du trimestre civil qui suit le début d'activité et jusqu'au dernier jour du trimestre civil au cours duquel la radiation intervient.

Aux termes des articles 1 et 3 du décret n°49-578 en date du 22 avril 1949 relatif au régime d'assurance vieillesse complémentaire des notaires, est institué, en sus de la cotisation générale imposée à tous les notaires non-salariés en application de l'article L. 642-1 du code de la sécurité sociale, une cotisation complémentaire destinée à financer un régime d'assurance vieillesse complémentaire fonctionnant à titre obligatoire. En application de l'article L. 644-3 du code de la sécurité sociale, sont également tenus de cotiser au régime d'assurance vieillesse complémentaire institué par le présent décret les notaires exerçant les fonctions mentionnées aux 11°, 12° ou 23° de l'article L. 311-3 du même code. La cotisation du régime d'assurance vieillesse complémentaire est versée à la section professionnelle des notaires dans les mêmes formes et conditions que la cotisation du régime d'assurance vieillesse de base des professions libérales prévu au titre IV du livre VI du code de la sécurité sociale.

Enfin, par application de l'article 4 du décret précité, le régime d'assurance vieillesse complémentaire des notaires est établi par les statuts de la section professionnelle des notaires.

L'appelante soutient que conformément au principe d'autonomie régissant la gestion de son régime complémentaire, elle peut librement déterminer l'assiette et le calcul des cotisations de ce régime qui ne sont pas régis par les dispositions relatives au régime de base et donc à l'article L.642-1 du code de la sécurité sociale.

Elle expose que par délibération en date du 6 avril 2017, son conseil d'administration a adopté la résolution n °2 critiquée par l'intimé, concernant l'assiette de cotisation de la section C dans la situation où le notaire associé liquide ses droits à la retraite et conserve ses parts dans l'office, que cette délibération, qui respecte les dispositions du décret du 22 avril 1949, ne souffre d'aucune illégalité et a été rendue exécutoire le 18 juin 2017, et ne peut faire l'objet, en l'absence de difficulté sérieuse, d'une question préjudicielle, les conditions d'application de l'article 49 du code de procédure civile n'étant pas réunies.

Elle soutient que la date du 18 juin 2017 ne peut lui être opposée par l'intimé, motif pris que le vide juridique lié à la loi Macron l'a contrainte à adapter la gestion de ses cotisations ainsi que les modalités de la liquidation de la retraite des notaires concernés par la limite d'âge pour tenir compte d'une part de la fin d'exercice au 1er août 2016 pour les notaires concernés et d'autre part de la survie financière de son régime de retraite.

L'intimé lui oppose que la résolution 2 relative à la gestion de l'assiette de cotisation de la section C dans la situation où le notaire associé liquide ses droits à la retraite et conserve ses parts dans l'office adoptée par la délibération du conseil d'administration de la caisse de retraite des notaires en date du 6 avril 2017 est contraire aux dispositions des articles L.642-1 et D.642-1 du code de la sécurité sociale et par conséquent aux articles 1 et 3 du décret n°49-578 du 2 avril 1949 relatifs au régime d'assurance vieillesse complémentaire des notaires, en ce qu'il résulte de ces dispositions que l'exigibilité de la cotisation est conditionnée à l'exercice par le cotisant d'une activité professionnelle et que les cotisations du régime d'assurance vieillesse complémentaire de la section professionnelle des notaires ne peuvent être appelées pour une période dépassant le dernier jour du trimestre civil au cours duquel la radiation du notaire intervient.

Il en tire la conséquence que si la résolution 2 votée par le conseil d'administration était jugée applicable en l'espèce, la question de sa légalité constitue une question préjudicielle devant être renvoyée au tribunal administratif.

Il soutient d'une part que la commission de réflexion et de communication de la caisse, qui est un organe consultant, n'a pas compétence pour modifier les statuts de la caisse et/ou déroger aux conditions légales et réglementaires d'assujettissement aux cotisations et d'autre part que la délibération litigieuse étant postérieure à la date de la liquidation de ses droits à la retraite ne peut s'appliquer rétroactivement, la modification des statuts prévoyant que, malgré la fin de son exercice en tant que notaire, l'ancien notaire demeure tenu soumis pour six mois à l'obligation de cotisations étant postérieure à la fin de son exercice intervenue le 31 juillet 2016 et les cotisations litigieuses étant antérieures à l'adoption et à l'entrée en vigueur de la modification invoquée par la caisse.

Il relève en outre que le procès-verbal du conseil d'administration en date du 6 avril 2017 ne fait pas état d'une quelconque rétroactivité et que l'autorité de tutelle ne s'est pas davantage prononcée sur le caractère rétroactif de ces dispositions.

Enfin, il souligne qu'il n'était pas notaire associé d'une société civile professionnelle ouvrant droit automatiquement à une quote-part des bénéfices de la société, qu'il a cessé toute activité au sein de la Selarl au 30 juillet 2016, dans le cadre de laquelle il n'avait vocation à percevoir qu'une quote-part des dividendes éventuellement votés par l'assemblée générale des associés et qu'il ne se situait pas dans un cumul emploi-retraite.

En l'espèce, la délibération du conseil d'administration de la caisse de retraite des notaires (dite CRN) en date du 6 avril 2017 comporte en son point 5 deux résolutions:

* la première, relative à la liquidation des droits des notaires impacts par la limite d'âge, dispose que 'l'entrée en jouissance de l'allocation de retraite des notaires concernés par la limite d'âge prévue par la loi du 6 août 2015 est fixée au 1er jour du mois civil qui suit la date de réception du dossier complet de demande de retraite pour le régime complémentaire',

* la seconde, relative à la gestion de l'assiette de la cotisation de la section C dans la situation où le notaire associé liquide ses droits à retraite et conserve ses parts dans l'office, est la suivante: 'lorsqu'un notaire associé concerné par la limite d'âge, liquide ses droits à retraite tout en conservant une quote-part dans les bénéfices de l'étude:

- il entre dans le dispositif assimilable au cumul emploi-retraite',

- il est redevable de cotisations non génératrices de droits pour une durée de cotisation maximum de 6 mois ou 2 trimestres.

Au-delà du délai de 6 mois la CRN sollicite les associés de l'étude afin qu'une nouvelle répartition des parts lui soit communiquée afin d'émettre les cotisations aux associés en activité'.

La première résolution est ainsi compatible avec les dispositions de l'article D.642-1 du code de la sécurité sociale, dont la cour a repris la teneur, stipulant que les cotisations sont dues jusqu'au dernier jour du trimestre civil au cours duquel la radiation intervient.

La cour rappelle que l'article D.642-1 du code de la sécurité sociale est inséré dans son titre IV du livre VI du code de la sécurité sociale auquel renvoie expressément l'article 3 du décret précité relatif au régime d'assurance vieillesse complémentaire des notaires.

L'intimé, né le 1er août 1945, ayant atteint l'âge limite de 70 ans fixé par la loi du 6 août 2015, la caisse de retraite des notaires a notifié le 1er août 2016 à la Selarl dans laquelle il était associé, le 'retrait de M. [N] [K]' enregistré au 31/07/2016 et en ne listant plus que deux associés.

La caisse de retraite des notaires a en outre notifié le 12 août 2016 à M. [K] l'attribution de sa retraite avec effet pour la retraite complémentaire au 01/08/2016 et pour l'assurance vieillesse de base au 01/10/2016.

Il est exact que la seconde résolution de la délibération du 6 avril 2017 ne prévoit nullement une application rétroactive du dispositif qu'elle instaure à l'égard du notaire associé déjà concerné par la limite d'âge, et ayant déjà liquidé ses droits à retraite tout en conservant une quote-part dans les bénéfices de l'étude.

Il s'ensuit que la caisse de retraite des notaires ne peut se prévaloir de cette délibération du 6 avril 2017 pour exiger paiement de cotisations et de surcroît afférentes à des trimestres antérieurs pour concerner le 4ème trimestre 2016 et le 1er trimestre 2017.

Elle n'est donc pas fondée à poursuivre sur la base de dispositions statutaires qui n'étaient pas applicables le recouvrement de cotisations de retraite complémentaires à l'encontre de l'intimé.

Le jugement entrepris doit en conséquence être intégralement confirmé et la caisse de retraite des notaires doit être déboutée de ses demandes.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de l'intimé les frais qu'il a été contraint d'exposer pour sa défense, ce qui conduit la cour à lui allouer la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Succombant en ses prétentions et en son appel, la caisse de retraite des notaires doit être condamnée aux dépens et ne peut utilement solliciter l'application à son bénéfice des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

- Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions et y ajoutant,

- Condamne la Caisse de retraite des notaires à payer à M. [N] [K] la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Dit n'y avoir lieu à application au bénéfice de la caisse de retraite des notaires des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamne la caisse de retraite des notaires aux dépens.

Le Greffier La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8
Numéro d'arrêt : 21/02437
Date de la décision : 13/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-13;21.02437 ?
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