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13/05/2022 | FRANCE | N°21/01733

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8, 13 mai 2022, 21/01733


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8



ARRÊT AU FOND

DU 13 MAI 2022



N°2022/.













Rôle N° RG 21/01733 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BG4YY







S.A. LASER PROPRETE





C/



Organisme CPAM DE SEINE ET MARNE













Copie exécutoire délivrée

le :

à :





















Décision déférée à la Cour :

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Jugement du Pole social du TJ de MARSEILLE en date du 12 Janvier 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 17/00071.





APPELANTE



S.A. LASER PROPRETE, demeurant [Adresse 1]



représentée par Me Chloé FABIAN, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Vanessa DIDIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVEN...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8

ARRÊT AU FOND

DU 13 MAI 2022

N°2022/.

Rôle N° RG 21/01733 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BG4YY

S.A. LASER PROPRETE

C/

Organisme CPAM DE SEINE ET MARNE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du TJ de MARSEILLE en date du 12 Janvier 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 17/00071.

APPELANTE

S.A. LASER PROPRETE, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Chloé FABIAN, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Vanessa DIDIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

CPAM DE SEINE ET MARNE, demeurant [Adresse 2]

représentée par Mme [F] [Y], Inspectrice Juridique, en vertu d'un pouvoir spécial

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Mars 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Mme Catherine BREUIL, Conseillère

Greffier lors des débats : Madame Isabelle LAURAIN.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 13 Mai 2022.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 13 Mai 2022

Signé par Madame Colette DECHAUX, Présidente de chambre et Madame Isabelle LAURAIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Mme [Z] [G], employée en qualité d'ouvrière de nettoyage par la société Laser propreté depuis le 1er octobre 2014, a adressé à la caisse primaire d'assurance maladie un certificat médical initial en date du 30 août 2015 prescrivant un arrêt de travail au titre d'une maladie professionnelle 'tendinite épaule droite', puis une déclaration en date du 1er octobre 2015 sollicitant la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie tendinite de l'épaule droite dont la date de la première constatation médicale est celle du 30 août 2015.

La caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne a décidé le 31 mars 2016 de prendre en charge au titre du tableau 57 des maladies professionnelles la maladie 'tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs de l'épaule droite'.

En l'état d'un rejet implicite par la commission de recours amiable, la société Laser propreté a saisi le 1er juillet 2016 le tribunal des affaires de sécurité sociale de Meaux, lequel s'est déclaré, par jugement en date du 31 octobre 2016, incompétent au profit du tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches du Rhône.

Par jugement en date du 12 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Marseille, pôle social, a:

* débouté la société Laser propreté de ses demandes,

* déclaré opposable à la société Laser propreté la décision de prise en charge de la maladie professionnelle de Mme [Z] [G] du 30 août 2015 au titre du tableau 57A,

* condamné la société Laser propreté aux dépens.

La société Laser propreté a interjeté régulièrement appel dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas discutées.

Par conclusions visées par le greffier le 18 février 2012, reprises oralement à l'audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé plus ample de ses moyens et arguments, la société Laser propreté sollicite l'infirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions et demande à la cour de lui déclarer inopposable la décision de prise en charge de la maladie de Mme [G] au titre de la législation sur les risques professionnels ainsi que les prestations servies à ce titre.

Elle sollicite la condamnation de la caisse primaire d'assurance maladie au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Par conclusions visées par le greffier le 16 mars 2022, reprises oralement à l'audience, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé plus ample de ses moyens et arguments, la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne sollicite la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions et la condamnation de la société Laser propreté au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

* sur le moyen d'inopposabilité de la décision de prise en charge de la maladie professionnelle tiré du non-respect du principe du contradictoire au stade de la phase d'instruction:

Il résulte des dispositions de l'article R. 441-11 II et III du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction issue du décret n°2009-938 du 29 juillet 2009, applicables en l'espèce, que la victime adresse à la caisse la déclaration de maladie professionnelle. Un double est envoyé par la caisse à l'employeur à qui la décision est susceptible de faire grief par tout moyen permettant de déterminer sa date de réception. L'employeur peut émettre des réserves motivées. La caisse adresse également un double de cette déclaration au médecin du travail.

En cas de réserves motivées de la part de l'employeur ou si elle l'estime nécessaire, la caisse envoie avant décision à l'employeur et à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ou de la maladie ou procède à une enquête auprès des intéressés. Une enquête est obligatoire en cas de décès.

L'appelante expose avoir reçu dans un premier temps un arrêt de travail au titre du régime maladie à compter du 27 avril 2015, prolongé une première fois au titre d'un accident du travail, puis le 30 août 2015 un arrêt de prolongation prescrit cette fois pour maladie professionnelle.

Elle soutient que la caisse ne lui a jamais communiqué le double de la déclaration de maladie professionnelle et qu'ayant émis des réserves, après avoir dans un premier temps sollicité des informations de la caisse, cette dernière l'a informée, le 4 janvier 2016, qu'un délai complémentaire d'instruction était ouvert. Elle a alors, d'initiative, transmis à la caisse un questionnaire le 20 janvier 2016.

Elle soutient que la caisse a pris sa décision sans jamais lui avoir communiqué le double de la déclaration de maladie professionnelle, ni l'avoir invitée à venir consulter le dossier préalablement à sa décision, et n'a pas rempli son obligation d'information.

L'intimée réplique avoir respecté le principe du contradictoire pour avoir avisé l'employeur le 14 octobre 2015 de la déclaration qui lui a été communiquée accompagnée d'une copie du certificat médical initial, lui avoir demandé de contacter le médecin du travail afin que ce dernier établisse un rapport à adresser à son service médical, ce dont l'intimée a accusé réception le 19 octobre 2015. Elle ajoute avoir notifié à l'employeur, par courrier du 11 mars 2016, la possibilité de venir consulter le dossier préalablement à prise de décision sur le caractère professionnel de la maladie, et qu'il en a accusé réception le 16 mars 2016.

Elle soutient avoir ainsi respecté le principe du contradictoire.

Les premiers juges ont retenu avec pertinence que la société a accusé réception le 19 octobre 2015 du courrier de la caisse l'informant de la déclaration de maladie professionnelle de sa salariée en lui demandant de contacter le médecin du travail afin que ce dernier établisse un rapport à adresser au service médical de la caisse, que la société a en outre adressé à la caisse le questionnaire complété qu'elle lui avait adressé le 20 janvier 2016 et que par lettre recommandée avec avis de réception en date du 11 mars 2016, dont la société a accusé réception le 16 mars 2016, la caisse l'a informée de la clôture de l'instruction du dossier et de la possibilité de venir le consulter avant décision prévue le 31 mars 2016.

Il s'ensuit effectivement que la caisse a respecté le principe du contradictoire et que l'appelante est mal fondée en ce moyen d'inopposabilité.

* sur le moyen d'inopposabilité de la décision de prise en charge de la maladie professionnelle tiré de l'absence de réunion des conditions du tableau 57A:

Il résulte des dispositions de l'article L.461-1 alinéa 2 du code de la sécurité sociale que toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau, est présumée d'origine professionnelle.

A partir de la date à laquelle le travailleur a cessé d'être exposé à l'action des agents nocifs inscrits aux tableaux, l'article L.461-2 du code de la sécurité sociale subordonne la prise en charge par l'organisme social au titre de la maladie professionnelle, pour les maladies correspondant aux travaux énumérés, à la première constatation médicale pendant le délai fixé à chaque tableau.

La première constatation médicale de la maladie concerne toute manifestation de nature à révéler l'existence de la maladie, même si son identification n'intervient que postérieurement au délai de prise en charge.

La présomption d'imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'étend pendant toute la durée de l'incapacité de travail précédant soit la guérison complète, soit la consolidation de l'état de la victime.

L'appelante, qui expose que la salariée a travaillé chez elle du 6 décembre 2014 au 26 avril 2015 soit durant moins de six mois ne remplit pas pour la maladie déclarée la condition de durée d'exposition au risque posée par le tableau, reproche aux premiers juges de ne pas avoir tenu compte des bulletins de paye ainsi que des arrêts de travail qui justifient de congés sans solde ainsi que des dates d'absences.

Elle conteste être tenue de rapporter la preuve, en sa qualité de dernier employeur d'une salariée ayant eu une activité professionnelle similaire dans d'autres entreprises, de l'absence d'exposition au risque pendant son emploi chez elle et allègue que la seule mention d'un poste d'ouvrier qualifié antérieurement occupé ne permet pas de conclure que la salariée accomplissait les mêmes tâches.

La caisseréplique que les déclarations de la société appelante sont contradictoires sur les congés et arrêts de la salariée et qu'elle a donné de fausses informations durant l'instruction.

Elle soutient que la condition relative à la durée d'exposition au risque est respectée et souligne que dans le colloque médico-administratif son service médical a retenu que la date de début d'exposition est 2007 et que la durée d'exposition cumulée est de 8 ans.

Elle relève que la salariée ayant exercé les mêmes fonctions d'ouvrière qualifiée depuis près de 8 ans, la durée d'exposition au risque doit être appréciée au regard de tous les employeurs chez lesquels elle a été exposée et souligne que dans son questionnaire, la salariée a fait état des similitudes entre les missions antérieurement effectuées.

Elle ajoute que pour ne pas supporter financièrement la maladie professionnelle, il incombe à l'appelante de rapporter la preuve que sa salariée n'a pas été exposée au risque chez elle.

La notification de la décision de prise en charge en date du 31 mars 2016 porte sur la maladie suivante: 'tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs de l'épaule droite inscrite au tableau n°57" et il résulte du colloque médico-administratif que cette maladie est objectivée par une IRM en date du 12 août 2015, le service administratif ayant précisé que la date de début d'exposition est 2007, la durée cumulée d'exposition étant de 8 ans.

La maladie déclarée est effectivement inscrite au tableau 57A et est caractérisée conformément à ses prescriptions.

Il est exact que pour cette maladie, le tableau exige une durée d'exposition de 6 mois et fixe le délai de prise en charge à la même durée.

Dans son questionnaire, la société employeur a indiqué que la salariée a été embauchée le 1er octobre 2014, avec reprise d'ancienneté au 23 janvier 1991, ce que corroborent les mentions des bulletins de paye qu'elle verse aux débats.

S'il résulte effectivement de ces bulletins que la salariée, qui était employée à temps plein, a été absente (maladie ou congés sans solde) en octobre 2014 (du 10 au 20), en novembre 2014 (du 1er au 30), en décembre 2014 (du 1er au 5), mais a travaillé tout le mois de janvier 2015, a eu 40 heures d'absences injustifiées en février 2015, a été absente le 22 mars 2015, a travaillé tout le mois d'avril 2015, pour autant il en résulte aussi la reconnaissance que la salariée avait déjà occupé antérieurement le même poste du fait de la reprise d'ancienneté et que la condition de la durée d'exposition au risque est remplie.

Le relevé de carrière rempli par la salariée, dont la teneur n'est pas contredite par l'appelante, corrobore ces mentions relatives à la reprise d'ancienneté pour faire état d'un premier emploi de 1991 à 1996 d'ouvrière dans la société Poneil, puis de 1996 à 2006 d'ouvrière spécialisée dans la société Ferro Mitry, de 2007 à 2014 d'ouvrière qualifiée au sein de la société Labrenne, et à nouveau à partir de 2014 d'ouvrière qualifiée dans la société appelante.

Il s'ensuit que l'appelante ne peut utilement soutenir que l'exposition aux risques n'aurait débuté que le 1er octobre 2014, et que la condition du tableau n'est pas remplie.

Le tableau n°57A liste limitativement les travaux susceptibles de provoquer la tendinopathie chronique non rompue de l'épaule' comme 'comportant des mouvements ou le maintien de l'épaule sans soutien en abduction:

- avec un angle supérieur ou égal à 60° pendant au moins deux heures par jour en cumulé,

ou

- avec un angle supérieur ou égal à 90° pendant au moins une heure par jour en cumulé'.

Pour sa part, la salariée a fait état dans son questionnaire de gestes répétitifs (nettoyage des banquettes des trains, des vitres et des cabines), en utilisant des seaux d'un poids évalué à 10 kilos, une raclette pour les vitres, une monobrosse et la 'centrale' et a quantifié les gestes de décollement du bras par rapport au corps pour l'épaule droite, soit des mouvements en abduction au-delà de 60° à plus de 3.5 heures en durée journalière cumulée.

Dans son questionnaire employeur, l'appelante a indiqué que les tâches de la salariée consistaient dans le nettoyage des trains à l'arrêt ainsi que des vitres intérieures et qu'il n'a avait pas de manutention ni de port de charges supérieures à 1.5 kg et que le nettoyage des vitres s'effectuait à hauteur d'homme et avec une raclette, sans mouvements d'extension.

Or la nature de telles tâches induit nécessairement des mouvements répétitifs de décollement des bras du corps que l'employeur s'est abstenu de quantifier, alors qu'il reconnaît les tâches décrites par sa salariée.

La nature des travaux liés au poste de travail d'ouvrière qualifiée d'une entreprise de nettoyage intervenant dans le secteur des nettoyages de trains correspond bien aux travaux limitativement listés au tableau n°57A et l'ancienneté reprise par l'employeur conduit la cour à considérer que la salariée a occupé le même type de poste depuis au moins 2007, comme retenu par le colloque médico-administratif, soit durant plus de six mois à la date de la déclaration de la maladie professionnelle.

Le jugement entrepris doit en conséquence être confirmé sur l'opposabilité à l'employeur de la décision de renaissance de la maladie professionnelle déclarée par Mme [Z] [G].

Succombant en son appel, la société Laser propreté doit être condamnée aux dépens et ne peut utilement solliciter l'application à son bénéfice des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Il serait par contre inéquitable de laisser à la charge de l'intimée les frais qu'elle a été contrainte d'exposer en cause d'appel ce qui conduit la cour à lui allouer à ce titre la somme de 2 000 euros.

PAR CES MOTIFS,

- Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, y ajoutant,

- Condamne la société Laser propreté à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Dit n'y avoir lieu à application au bénéfice de la société Laser propreté des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamne la société Laser propreté aux dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8
Numéro d'arrêt : 21/01733
Date de la décision : 13/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-13;21.01733 ?
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