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13/05/2022 | FRANCE | N°18/12481

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-6, 13 mai 2022, 18/12481


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-6



ARRÊT AU FOND

DU 13 MAI 2022



N° 2022/ 159













Rôle N° RG 18/12481 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BC24G







Association BESSE ACCUEIL LA MAISON DU LAC





C/



[X] [J]





















Copie exécutoire délivrée

le :13/05/2022

à :



Me Clément LAMBERT, avocat au barreau de TOULON



Me Ch

ristophe COUTURIER de la SCP COUTURIER ET ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE











Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de DRAGUIGNAN en date du 09 Juillet 2018 enregistré au répertoire général sous le n° .





APPELANTE

...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-6

ARRÊT AU FOND

DU 13 MAI 2022

N° 2022/ 159

Rôle N° RG 18/12481 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BC24G

Association BESSE ACCUEIL LA MAISON DU LAC

C/

[X] [J]

Copie exécutoire délivrée

le :13/05/2022

à :

Me Clément LAMBERT, avocat au barreau de TOULON

Me Christophe COUTURIER de la SCP COUTURIER ET ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de DRAGUIGNAN en date du 09 Juillet 2018 enregistré au répertoire général sous le n° .

APPELANTE

Maison de Retraite [3] venant aux droits de l'Association Besse Accueil Maison Du Lac, [Adresse 2]

représentée par Me Clément LAMBERT, avocat au barreau de TOULON substitué par Me Olivier LEROY, avocat au barreau de TOULON

INTIMEE

Madame [X] [J], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Christophe COUTURIER de la SCP COUTURIER ET ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été appelée le 22 Février 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Philippe SILVAN, Président a été chargé du rapport de l'affaire.

La Cour était composée de :

M. Philippe SILVAN, Président de chambre

Monsieur Thierry CABALE, Conseiller

M. Ange FIORITO, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Suzie BRETER.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 13 Mai 2022.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 13 Mai 2022,

Signé par M. Philippe SILVAN, Président de chambre et Mme Suzie BRETER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Selon contrat à durée déterminée du 29 mai 2011, Mme [J] a été recrutée par l'association « Besse accueil la maison du lac » (ci-après l'association « Besse accueil ») en qualité d'aide-soignante. La relation de travail s'est poursuivie sous la forme d'un contrat à durée indéterminée. A compter du 7 octobre 2011, Mme [J] a été placée en arrêt de travail.

Au terme d'une seule visite médicale de reprise du 9 novembre 2011, le médecin du travail l'a déclarée inapte à tout poste dans l'entreprise en raison d'un danger immédiat d'altération de sa santé.

Le 7 décembre 2011, Mme [J] a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Le 22 juillet 2016, elle a saisi le conseil de prud'hommes de Draguignan d'une demande portant principalement sur l'allocation de dommages et intérêts pour manquement de l'association « Besse accueil » à son obligation de sécurité (harcèlement moral) ainsi tendant à voir juger son licenciement nul ou, subsidiairement, dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Par jugement du 9 juillet 2018, le conseil de prud'hommes de Draguignan a :

-  condamné l'association « Besse accueil » à payer à Mme [J] les sommes suivantes :

- 15.000 € au titre des dommages et intérêts pour l'obligation de sécurité,

- 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

-  débouté Mme [J] du surplus de ses demandes.

Le 24 juillet 2018, l'association « Besse accueil » a fait appel de ce jugement.

A l'issue de ses conclusions du 19 avril 2019 auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions, l'association « Besse accueil » demande de :

-  réformer partiellement le jugement querellé en ce qu'il l'a condamnée à payer à Mme [J] les sommes suivantes :

- 15.000 € au titre des dommages et intérêts pour l'obligation de sécurité/harcèlement moral,

- 2,000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau,

-  débouter Mme [J] de l'intégralité de ses demandes tant principales qu'incidentes et accessoires,

-  condamner Mme [J] au paiement de la somme de 3,000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens

L'association « Besse accueil » fait valoir que les demandes de Mme [J] au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail sont irrecevables car prescrites pour avoir été formées plus de deux ans après la rupture du contrat de travail.

Concernant le défaut de mention de la convention collective, l'association « Besse accueil » expose qu'elle ne relève d'aucune convention collective et que le conseil de prud'hommes, relevant que Mme [J] ne justifiait pas de son préjudice, l'a débouté à juste titre de sa demande en dommages et intérêts.

Elle conteste l'existence de faits de harcèlement moral au détriment de Mme [J], caractérisés selon celle-ci par sa charge de travail et sa mise en difficulté par de nombreux résidents aux motifs que dans le cadre de ses conclusions de première instance, elle n'a jamais reconnu que Mme [J] rencontrait des difficultés dans l'exécution des nombreuses tâches qui lui incombaient, que la production d'arrêts de travail pour maladie ne saurait suffire à eux seuls à attester du harcèlement moral, que l'existence d'un danger immédiat dans le cadre de la procédure d'inaptitude n'entraîne pas reconnaissance de harcèlement moral, que Mme [J] n'a alerté ni le délégué du personnel, ni le médecin du travail, ni l'inspection du travail, ni l'employeur et aucune plainte pénale n'a été déposée et qu'elle ne verse aucun élément de preuve pertinent.

L'association « Besse accueil » dénie en outre avoir manqué à son obligation de sécurité aux motifs que Mme [J] a été déclarée apte lors de sa visite médicale d'embauche du 23 juin 2011 et qu'elle ne s'est jamais plainte de ses conditions de travail, que la fiche des tâches ainsi que l'état des transmissions chronologiques attestant du déroulement d'une nuit de travail à la Maison du Lac qu'elle produit aux débats ne sont pas significatives du fait que l'employeur aurait manqué à son obligation de sécurité, que Mme [J], qui invoque la faute inexcusable de son employeur, n'a pas saisi le tribunal des affaires de la sécurité sociale en reconnaissance d'une faute inexcusable ni déposée la moindre plainte pénale, que le manquement à son obligation de sécurité et le manquement à l'obligation de sécurité de résultat/ pour être établis, supposeraient que l'employeur ait été alerté soit par Mme [J], soit par les délégués du personnel ou toute autre institution (médecine du travail, inspection du travail') et qu'il n'ait pas réagi ni pris aucune mesure.

Au terme de ses conclusions du 22 janvier 2019 auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions, Mme [J] demande de :

-  confirmer partiellement le jugement du 9 juillet 2018 rendu par le conseil de prud'hommes de Draguignan en ce qu'il a reconnu que l'association « Besse accueil » avait manqué à son obligation de sécurité et qu'elle s'était rendue coupable de harcèlement moral à l'encontre de Mme [J] ;

-  réformer partiellement le jugement du 9 juillet 2018 rendu par le conseil de prud'hommes de Draguignan ;

-  débouter l'association « Besse accueil », de toutes ses demandes, fins et conclusions,

-  dire que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

-  condamner l'association « Besse accueil » au paiement des sommes suivantes :

- 21 480 € à titre de dommages et intérêts réparation le préjudice subi en raison du manquement de l'employeur à son obligation de sécurité (harcèlement moral),

- 21 480 € à titre de dommages et intérêts réparation le préjudice subi en raison du manquement de l'employeur à son obligation de reclassement,

sur le licenciement,

à titre principal,

-  21 480 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

à titre subsidiaire,

-  21 480 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

en tout état de cause,

-  1 790 € à titre d'indemnité de préavis,

- de rappel de salaire (sic),

-  179 € au titre des congés payés afférents,

-  1 790 € à titre de dommages et intérêts pour défaut de mention de la convention collective,

-  1 790 € à titre de dommages et intérêts réparant le préjudice subi en raison de l'absence de pauses,

-  intérêts au taux légal à compter du jour de la saisine,

-  capitalisation des intérêts,

-  condamner l'association « Besse accueil » au paiement de la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

-  condamner l'association « Besse accueil » au paiement des entiers dépens distraits au profit de la SCP Couturier & Associés,

-  Autant que de besoin, en cas de non transmission, le jour de l'audience, des documents ci-après, enjoindre à l'association « Besse accueil » de communiquer, sous astreinte de 75 € par jour de retard et par document, passé un délai de 8 jours à compter du jugement avant-dire droit à intervenir : ses documents de fin de contrat corrigés selon sa note manuscrite sur le reçu pour solde de tout compte du 7 janvier 2012.

Mme [J] expose qu'elle a fait l'objet pendant la relation de travail de faits de harcèlement moral caractérisés, d'une part, par la réalisation, seule, de sa prestation de travail pendant toute la nuit sans pouvoir prendre de pauses alors que la nature de sa mission nécessitait la présence de plusieurs salariés et, d'autre part, les nombreux agissements de la part des résidents de la Maison du Lac qui l'ont mis en difficultés.

Elle indique qu'après quelques mois de travail, elle a fait face à une dépression liée au travail et aux conditions difficiles de son emploi, que le médecin du travail a reconnu que l'origine de son état de santé était professionnelle mais confidentiel et a confirmé que son inaptitude à travailler était liée à un danger immédiat et qu'elle est donc fondée à réparer l'indemnisation du préjudice subi.

Elle reproche à l'association « Besse accueil » d'avoir manqué à son obligation de sécurité aux motifs que l'ensemble des éléments précités ne sauraient être inconnus de l'association « Besse accueil » et constituent dès lors une faute inexcusable de ce dernier ayant entraîné l'apparition d'un état dépressif chez elle et que l'association « Besse accueil » a reconnu en première instance qu'elle avait connaissance du fait qu'elle rencontrait des difficultés dans l'exécution des nombreuses tâches lui incombant notamment suite au comportement de ses résidents lesquels pouvaient se montrer particulièrement désagréables voire agressifs.

Elle fait grief à l'association « Besse accueil » d'avoir manqué à son obligation de reclassement qu'elle a engagé sa procédure de licenciement moins d'un mois après l'avis d'inaptitude, qu'il est ainsi démontré qu'elle n'a pas recherché de solution de reclassement dans ses effectifs et qu'il incombe à l'association « Besse accueil » de démontrer l'impossibilité de reclassement.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 28 janvier 2022. Pour un plus ample exposé de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère expressément à la décision déférée et aux dernières conclusions déposées par les parties.

SUR CE :

sur la prescription :

Conformément à l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Dans le cadre du dispositif de ses dernières conclusions qu'elle a déposées au greffe le 19 avril 2019, l'association « Besse accueil » n'a pas soulevé l'irrecevabilité des prétentions de Mme [J]. Il n'y a donc pas lieu à rechercher si les demandes de Mme [J] sont prescrites.

Sur la nullité du licenciement pour harcèlement moral :

L'article L. 1152-1 du code du travail prévoit qu'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Par ailleurs, l'article L 1154-1 du même code édicte que lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L 1152-1 à L 1152-3 et L 1153-1 à L 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, qu'au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement et que le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Par ailleurs, il résulte des articles L. 1152-2 et L. 1152-3 du code du travail que le licenciement d'un salarié victime de harcèlement moral est nul si ce licenciement trouve directement son origine dans ces faits de harcèlement ou leur dénonciation.

Cependant, les règles de preuve plus favorables à la partie demanderesse ne dispensent pas celle-ci d'établir la matérialité des éléments de fait précis et concordants qu'elle présente au soutien de l'allégation selon laquelle elle subirait un harcèlement moral au travail.

En l'espèce, la seule production par Mme [J] de la fiche de tâches définissant ses attributions d'aide-soignante de nuit, de deux fiches de transmission détaillant ses interventions au cour des nuits des 18 au 19 août 2011 et 6 au 7 septembre 2011, le courrier d'une collègue de travail, qui relate des faits la concernant mais auxquels cette collègue n'a pu assister, étant en vacances à l'époque des faits, et un article relatif à la création d'une mission parlementaire sur les conditions de travail et qui, par sa généralité, est dépourvu de toute force probante ne suffit pas à établir des faits suffisamment précis et concordants de nature à présumer l'existence de faits de harcèlement moral à l'égard de Mme [J]. Cette dernière ne peut en conséquence solliciter des dommages et intérêts pour harcèlement moral et conclure à la nullité de son licenciement sur ce fondement. Elle sera déboutée de ce chef de demande.

Sur le respect par l'association « Besse accueil » de son obligation de sécurité :

L'article L. 4121-1 du code du travail prévoit que l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. L'article L. 4121-2 du même code décline les principes généraux de prévention sur la base desquels l'employeur met en 'uvre ces mesures.

Il est de jurisprudence constante que respecte son obligation légale de sécurité, l'employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures de prévention prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail.

En l'espèce, il est constant que Mme [J] a fait l'objet d'un avis d'aptitude lors de la visite médicale d'embauche du 23 juin 2021.

Il ne ressort pas de la procédure de première instance l'aveu par l'association « Besse accueil » qu'elle avait connaissance des difficulés rencontrées au travail par Mme [J].

En revanche, l'association « Besse accueil » tenue d'une obligation légale de sécurité, ne justifie pas avoir mis en 'uvre les actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail et d'information et de formation prévues par l'article L. 4121-1 du code du travail ni mis en 'uvre l'organisation et les moyens adaptés par ces mêmes dispositions.

Cette obligation, de nature légale, s'impose à l'employeur sans qu'il soit nécessaire qu'il soit préalablement alerté par le salarié, ou les délégués du personnel, la médecine du travail ou encore l'inspection du travail. Par ailleurs, dès lors que Mme [J] ne sollicite pas l'indemnisation du préjudice subi à raison d'une maladie professionnelle ou d'un accident du travail, l'association « Besse accueil » ne peut lui reprocher de n'avoir pas saisi la juridiction de la Sécurité sociale d'une action en reconnaissance d'une faute inexcusable. Enfin, la reconnaissance du manquement de l'employeur à son obligation légale de sécurité ne ressort pas de la compétence exclusive de la juridiction pénale. L'association « Besse accueil » ne peut donc faire grief à Mme [J] de ne pas avoir déposé de plainte à son encontre.

Il est donc établi que l'association « Besse accueil » a manqué à son obligation légale de sécurité.

Mme [J] a été placée en arrêt de travail pour syndrome dépressif à compter du 7 octobre 2011. Devant son médecin traitant, elle a invoqué des problèmes professionnels conflictuels

Le préjudice qu'elle a subi, à raison du manquement de l'association « Besse accueil » à son obligation de prévention des risques professionnels, justifie de lui allouer la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts.

Il est de principe qu'est privé de cause réelle et sérieuse le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement d'un salarié lorsque l'inaptitude trouve sa cause dans un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité.

Si au terme d'une seule visite médicale de reprise du 9 novembre 2011, le médecin du travail l'a déclarée inapte à tout poste dans l'entreprise en raison d'un danger immédiat d'altération de sa santé, les éléments médicaux produits aux débats ne permettent d'établir avec certitude un lien entre le manquement de l'association « Besse accueil » à son obligation légale de sécurité et l'inaptitude de Mme [J]. Cette dernière ne peut en conséquence conclure à l'absence de cause réelle et sérieuse à son licenciement sur ce fondement.

sur le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement de Mme [J] :

L'article L. 1226-2 du code du travail, sans sa version en vigueur à l'époque du licenciement de Mme [J], prévoyait que, lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui

propose un autre emploi approprié à ses capacités, que cette proposition prenait en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise et que l'emploi proposé était aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail.

Ces dispositions ne dispensaient pas l'employeur de son obligation de reclassement même si le médecin du travail retenait l'existence d'un danger immédiat pour la santé du salarié.

En l'espèce, il est constant que l'association « Besse accueil » a engagé sa procédure de licenciement le 22 novembre 2011, soit à bref délai après l'avis d'inaptitude du 9 novembre 2011. Ce bref délai, en lui-même, ne suffit pas à caractériser chez l'association « Besse accueil » l'absence de recherche sérieuse et loyale de reclassement de Mme [J]. En revanche, si la lettre de licenciement de Mme [J] indique que les effectifs de l'employeur étaient suffisants par rapport au nombre de lits de l'établissement et que l'association « Besse accueil » avait procédé à des recherches de reclassement auprès de trois autres maisons de retraite, il convient de relever que ces assertions ne sont confirmées par aucun élément de preuve tel que, par exemple, le registre d'entrées et de sorties du personnel démontrant l'absence de postes disponibles dans les effectifs de l'association « Besse accueil » pouvant être proposé à Mme [J].

Dès lors, le licenciement de Mme [J] s'avère dépourvu de cause réelle et sérieuse. Compte tenu de l'ancienneté de la salariée et de sa rémunération mensuelle, soit 1 700 € bruts, le préjudice qu'elle a subi de ce chef sera justement indemnisé en lui allouant la somme de 6 800 € à titre de dommages et intérêts. Par ailleurs, Mme [J] est fondée à solliciter la condamnation de l'association « Besse accueil » à lui payer la somme de 1 700 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et celle de 170 € au titre des congés payés afférents.

sur le surplus des demandes :

Il n'y a pas lieu à statuer sur la demande en rappel de salaire formée par Mme [J] puisqu'aucune prétention chiffrée n'est formulée à ce titre dans le dispositif de ses conclusions.

Mme [J], qui invoque un défaut de mention de la convention collective applicable à la relation de travail n'indique pas la convention collective applicable à la relation de travail, ne précise pas sur quel document cette convention collective devrait être mentionnée et ne caractérise pas le préjudice qu'elle subit à raison d'une telle omission. Elle sera déboutée de sa demande en dommages et intérêts de ce chef.

L'article L. 3121-16 du code du travail (ancien article L. 3121-33 du même code) prévoit que dès que le temps de travail quotidien atteint six heures, le salarié bénéficie d'un temps de pause d'une durée minimale de vingt minutes consécutives. Il est de principe que la preuve du respect des temps de pause incombe à l'employeur. L'association « Besse accueil » ne justifie s'être acquittée de son obligation envers Mme [J] de ce chef. Elle sera condamnée à lui payer la somme de 500 € à titre de dommages et intérêts.

Le licenciement ne résultant pas d'une cause réelle et sérieuse. Il conviendra en conséquence de faire application des dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail et d'ordonner le remboursement par l'employeur des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour de la présente décision et ce dans la limite de deux mois d'indemnités de chômage.

Enfin l'association « Besse accueil », partie perdante qui sera condamnée aux dépens et déboutée de sa demande au titre de ses frais irrépétibles, devra payer à Mme [J] la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

DECLARE l'association « Besse accueil la maison du lac » recevable en son appel,

INFIRME le jugement du conseil de prud'hommes de Draguignan du 9 juillet 2018 en ce qu'il a :

- condamné l'association « Besse accueil » à payer à Mme [J] la somme de 15 000 € à titre de dommages et intérêts pour manquement à son obligation de sécurité-harcèlement moral,

- débouté Mme [J] de sa demande en dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- débouté Mme [J] de sa demande au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;

- débouté Mme [J] de sa demande au titre des congés payés afférents ;

LE CONFIRME pour le surplus,

STATUANT à nouveau sur les chefs d'infirmation et y ajoutant ;

DIT que le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement de Mme [J] est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

CONDAMNE l'association « Besse accueil la maison du lac » à payer à Mme [J] les sommes suivantes :

- 5 000 € à titre de dommages et intérêts pour manquement à son obligation légale de sécurité ;

- 6 800 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 1 700 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;

- 170 € au titre des congés payés afférents ;

- 500 € à titre de dommages et intérêts pour absence des temps de pause ;

- 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

DIT que les condamnations de nature salariales porteront intérêts au taux légal à compter du 22 juillet 2016;

DIT que les condamnations de nature indemnitaires porteront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

ORDONNE la capitalisation annuelle des intérêts échus ;

CONDAMNE l'association « Besse accueil la maison du lac » à remettre à Mme [J], dans un délai de deux mois à compter de la signification du présent arrêt, un certificat de travail, un bulletin de paie et une attestation Pôle Emploi conformes aux condamnations qui précèdent ;

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes ;

ORDONNE le remboursement par l'association « Besse accueil la maison du lac » des indemnités de chômage versées à Mme [J], du jour de son licenciement au jour de la présente décision et ce dans la limite de deux mois d'indemnités de chômage ;

CONDAMNE l'association « Besse accueil la maison du lac » aux dépens de première instance et d'appel, dont distraction de ceux dont elle a fait l'avance sans en recevoir provision au profit de la SCP Couturier et associés.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-6
Numéro d'arrêt : 18/12481
Date de la décision : 13/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-13;18.12481 ?
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