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12/05/2022 | FRANCE | N°19/03399

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-4, 12 mai 2022, 19/03399


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-4



ARRÊT AU FOND

DU 12 MAI 2022



N° 2022/

CM/FP-D











Rôle N° RG 19/03399 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BD3UC







[J] [X]





C/



Association L'UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA DE [Localité 4]

S.C.P. B.T.S.G.2

























Copie exécutoire délivrée

le :

12 MAI 2022

à :

Me Sara

h GHASEM-

JUPPEAUX, avocat au barreau de GRASSE



Me Isabelle JOGUET, avocat au barreau de NICE



Me Raymond RUDIO, avocat au barreau de GRASSE



















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRASSE en date du 29 Janvier 2019 enregi...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-4

ARRÊT AU FOND

DU 12 MAI 2022

N° 2022/

CM/FP-D

Rôle N° RG 19/03399 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BD3UC

[J] [X]

C/

Association L'UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA DE [Localité 4]

S.C.P. B.T.S.G.2

Copie exécutoire délivrée

le :

12 MAI 2022

à :

Me Sarah GHASEM-

JUPPEAUX, avocat au barreau de GRASSE

Me Isabelle JOGUET, avocat au barreau de NICE

Me Raymond RUDIO, avocat au barreau de GRASSE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRASSE en date du 29 Janvier 2019 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 17/00600.

APPELANTE

Madame [J] [X], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Sarah GHASEM-JUPPEAUX, avocat au barreau de GRASSE

INTIMEES

Association L'UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA DE [Localité 4]

, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Isabelle JOGUET, avocat au barreau de NICE

S.C.P. B.T.S.G.2 en la personne de Me [U] [P] agissant ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL ART & TRAVAUX, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Raymond RUDIO, avocat au barreau de GRASSE substitué par Me Charlène COLOMBAIN, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Février 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Catherine MAILHES, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre

Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller

Madame Catherine MAILHES, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Françoise PARADIS-DEISS.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Mai 2022.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Mai 2022

Signé par Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre et Madame Françoise PARADIS-DEISS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Mme [X] (la salariée) a été embauchée le 24 octobre 2016 selon contrat à durée indéterminée par la société Art&Travaux (la société) en qualité de secrétaire.

Le contrat est soumis aux dispositions de la convention collective nationale des employés, techniciens et agents de maîtrise du bâtiment, numéro 2609.

Suivant courrier remis en mains propres contre décharge le 21 avril 2017, la salariée a été mise à pied à titre conservatoire et convoquée un entretien préalable à un éventuel licenciement pour le 2 mai 2017.

Le 6 mai 2017, la salariée a été licenciée pour un motif personnel et disciplinaire.

Le 11 août 2017, Mme [X] a saisi le conseil de prud'hommes de Grasse aux fins de voir dire abusif son licenciement, de voir la société Art&Travaux condamnée à lui verser des dommages-intérêts pour licenciement abusif, des dommages-intérêts pour travail dissimulé, des rappels de salaire pour heures supplémentaires non rémunérées, pour heures effectuées avant embauche officielle et non rémunérées, pour des heures accomplies pendant les arrêts de travail les périodes de congés payés, des indemnités de congés payées afférentes, une indemnité kilométrique, des dommages-intérêts pour manque à gagner au titre de l'épargne salariale PEI/PERCO, une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux fins d'ordonner la remise des documents de fin de contrat et bulletins de salaire pour les mois d'octobre 2016 à juin 2017 rectifiés dans un délai de 8 jours à compter de la décision à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard.

Selon jugement du 29 janvier 2019, le conseil de prud'hommes de Grasse a :

débouté Mme [X] de l'ensemble de ses demandes,

débouté la société Art&Travaux de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné Mme [X] aux entiers dépens.

Par déclaration électronique remise au greffe de la cour le 27 février 2019, Mme [X] a interjeté appel du jugement précité qui lui a été notifié le 1er février 2019, selon les formes et délais légaux, en précisant que l'appel portait sur les chefs de jugement suivants : en ce qu'il l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes et en ce qu'il l'a condamnée aux entiers dépens.

Selon ses dernières conclusions remises au greffe de la cour le 14 juin 2019, Mme [X] demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a débouté de l'ensemble de ses demandes et en ce qu'il a condamné aux entiers dépens, et statuant à nouveau de :

dire et juger abusif le licenciement de Mme [X],

condamner la société Art&Travaux à lui verser les sommes suivantes :

10'000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait du licenciement abusif,

12'487,0 2 euros à titre de dommages-intérêts pour travail dissimulé,

6636,84 euros au titre des rappels de salaire décomposé comme suit :

2917,95 euros à titre de rappel de salaire pour les heures supplémentaires non rémunérées,

3345,23 euros à titre de rappel de salaire pour les heures effectuées avant embauche officielle et non rémunérées,

373,66 euros à titre de rappel de salaire pour les heures accomplies pendant les arrêts de travail ou les périodes de congés payés,

663,68 euros à titre d'indemnité de congés payés sur rappel de salaire,

355,62 euros à titre d'indemnité kilométrique,

3537,98 euros à titre de dommages-intérêts pour le manque à gagner au titre de l'épargne salariale PEI/PERCO,

ordonner la remise des documents de fin de contrat et des bulletins de salaire pour les mois d'octobre 2016 à juin 2017, rectifiés dans un délai de 8 jours à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard,

assortir les condamnations prononcées des intérêts légaux à compter de la décision à intervenir, le tout avec anatocisme en application des articles 1231 ' 7 et 1343 ' 2 du code civil,

en tout état de cause,

condamner la société Art&Travaux à lui verser la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner la société Art&Travaux aux entiers dépens de première instance et de la présente instance.

Par jugement en date du 2 décembre 2020, le tribunal de commerce a prononcé la liquidation judiciaire de la société Art&Travaux et désigner la société BTSG² PACA prise en la personne de Maître [U] [P] en qualité de mandataire judiciaire.

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe de la cour le 2 mars 2021, la société BTSG² PACA prise en la personne de M. [U] [P], est intervenue en qualité de mandataire liquidateur de la société Art&Travaux et demande à la cour de :

confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit et jugé que le licenciement de Mme [X] reposait sur une cause réelle et sérieuse, débouter celle-ci de toutes ses demandes et en ce qu'il a condamné aux dépens,

à titre subsidiaire, si la cour jugeait sans cause réelle et sérieuse le licenciement de Mme [X],

limiter l'indemnisation de son préjudice à l'Euro symbolique, en l'absence de préjudice démontré,

en tout état de cause,

condamner Mme [X] à lui verser en sa qualité de liquidateur de la société Art&Travaux, la somme de 3000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner Mme [X] aux entiers dépens.

Par ses dernières conclusions remises au greffe de la cour le 13 avril 2021, l'UNEDIC délégation AGS CGEA de [Localité 4] est intervenu à la cause et demande à la cour de :

à titre liminaire,

vu l'article L. 622 ' 21 du code de commerce,

dire irrecevables les demandes de condamnation en l'état de la procédure collective,

sur le fond,

dire et juger bien fonder le licenciement pour cause réelle et sérieuse de Mme [X],

confirmer le jugement entrepris et débouter Mme [X] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

à titre subsidiaire si la cour devait réformer la décision et reconnaissait le licenciement sans cause réelle ni sérieuse,

débouter Mme [X] de sa demande d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse et la réduire à de plus faibles proportions,

en tout état de cause,

dire et juger que la somme indemnitaire réclamée pour manque à gagner au titre de l'épargne salariale relève de la responsabilité de l'employeur et n'entre pas dans le cadre de la garantie de l'AGS

dire que la somme réclamée au titre de l'article 700 du code de procédure civile n'entre pas dans le cas de la garantie de l'AGS,

dire qu'aucune condamnation ne peut être prononcée à l'encontre des concluants et que la décision à intervenir ne peut tendre qu'à la fixation d'une éventuelle créance en deniers ou quittances,

dire que l'obligation de l'AGS de faire l'avance de la somme à laquelle serait évaluée le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement,

dire que la décision à intervenir sera déclarée opposable au conclu dans les limites de la garantie de l'AGS ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L. 3253 ' 6 et 3253 ' 8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253 ' 15, L. 3253 ' 18, L. 3253 ' 19, L. 3253 ' 20, L. 3253 ' 21 et L. 3253 ' 19 et D. 3253 ' 5 du code du travail le

statuer ce que de droit en ce qui concerne les dépens.

La clôture des débats a été ordonnée le 17 février 2022 et l'affaire a été évoquée à l'audience du 21 février 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties il est fait expressément référence au jugement entrepris et aux conclusions des parties sus-visées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la fin de non recevoir

L'AGS soulève l'irrecevabilité des demandes de condamnation par application des dispositions de l'article L.622-21 du code de commerce.

Il résulte de l'article L.625-3 du code de commerce que les instances en cours devant la jurisdiction prud'homale à la date du jugement d'ouverture de la procédure collective étant poursuivies en présence des organes de la procédure ou ceux-ci dûment appelés, la demande en paiement d'une créance résultant d'un contrat de travail, antérieure au jugement d'ouverture est recevable dès lors que la juridiction prud'homale en est saisie avant l'ouverture de la procédure, et qu'après celle-ci, elle doit, après mise en cause des organes de la procédure, statuer sur son bien fondé et, le cas échéant, constater l'existence de la créance et en fixer le montant au passif de la procedure collective.

Dès lors que le liquidateur judiciaire de la société est dans la cause, il appartient à la cour de se prononcer d'office sur l'existence et le montant des créances alléguées en vue de leur fixation au passif, peu important que les conclusions du salarié aient tendu à une condamnation au paiement.

En l'occurence, le mandataire judiciaire de la société en liquidation judiciaire a été mis en cause en appel, en sorte que la fin de non recevoir tirée des demandes de condamnation sera rejetée.

Sur l'exécution du contrat de travail

1/Sur la date d'embauche

La salariée soutient qu'elle a en réalité commencé à travailler pour la société dès le mois d'août 2016, sans qu'un contrat de travail ait été signé ni même l'embauche déclarée à cette date. Elle dénie tout caractère régulier au prêt de main d'oeuvre allégué.

Le mandataire liquidateur expose que l'employeur occupait les même locaux que la société Xyléo pour le compte de laquelle Mme [X] travaillait comme secrétaire, que les deux sociétés ont convenu d'une mise à disposition temporaire de la salariée à compter du mois d'août 2016 et celle-ci a signé une rupture conventionnelle avec la société Xyléo avant d'être embauchée par la société Art&Travaux le 24 octobre 2016. Il invoque l'aveu de la salariée de ce que le contrat n'a débuté que le 24 octobre 2016 aux termes de son courrier du 3 mars 2017.

L'ags soutient que la salariée ne verse aucun élément probant démontrant la réalité d'une activité salariée pour la société en cause, sur la période d'août 2016 au 24 octobre 2016 alors qu'elle était rémunérée par la société Xyleo.

Il résulte des articles L.1221-1 et suivants du code du travail que le contrat de travail suppose un engagement à travailler pour le compte et sous la subordination d'autrui moyennant rémunération. L'existence de la relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs.

Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. Peut constituer un indice de subordination, le travail au sein d'un service organisé lorsque l'employeur en détermine unilatéralement les conditions d'exécution.

En cas de litige, le juge ne s'attache pas à la dénomination du contrat mais à la situation de fait.

C'est à celui qui se prévaut d'un contrat de travail d'en établir l'existence.

En l'occurrence, il est constat que la salariée a effectué des tâches pour le compte de la société dès le mois d'août 2016.

Aux termes du procès-verbal de sommation interpellative du 8 novembre 2018 établi par huissier de justice, M. [W], salarié de la société a déclaré que pendant l'été 2016, Mme [X] avait nettoyé du mobilier de la société dans le local des Cyclades, qu'il savait que la salariée allait quitter la société Xyléo et travailler pour la société Art&Travaux, que M. [V], gérant de la société avait annoncé à la reprise après les congés d'été que Mme [X] faisait partie des effectifs de l'entreprise, que lorsqu'il venait aux Cyclades entre 17h et 19h M.[V] et Mme [X] étaient présents, que cette dernière travaillait tous les jours sans faire de pause de 7h30 à 20h.

Il en ressort que l'appelante était alors salariée de la société Xyleo, corroborant les assertions de l'intimée, étant précisé que les deux sociétés occupaient des locaux situés à la même adresse.

Si la société ne justifie pas d'une convention écrite de prêt de main d'oeuvre en conformité avec les dispositions des articles L.8241-2 et suivants du code du travail, il n'en demeure pas moins que ces éléments ne sont pas suffisants pour établir l'existence d'un lien de subordination avec la société Art&Travaux pendant la période d'août au 24 octobre 2016 et le caractère illicite de la mise à disposition n'est pas établie.

Par ailleurs, les notes du médecin du travail au sein du suivi médical de la salariée selon lesquelles l'employeur lui aurait signalé que 'les heures supplémentaires ont été faites avant l'embauche dans son entreprise' sont susceptibles d'interprétation et il ne peut pas en être tiré argument pour le présent litige.

En conséquence, la salariée ne rapporte pas la preuve de la relation salariale comprenant un lien de subordination avec la société Art&Travaux avant la conclusion du contrat le 24 octobre 2016 et elle sera déboutée de sa demande de rappel de salaire au titre d'heures de travail effectuées d'août 2016 au 23 octobre 2016. Le jugement entrepris sera confirmé à ce titre.

2/ Sur les rappels de salaire

Au soutien de ses demandes de rappel de salaire, la salariée produit un tableau ainsi que son agenda faisant état des horaires de travail effectués et la sommation interpellative de M. [W], salarié de l'entreprise, qu'elle estime suffisants pour permettre à l'employeur de répondre mais que ce dernier ne produit aucunement son propre décompte, invoquant l'accord implicite de l'employeur pour la réalisation d'heures supplémentaires.

Le mandataire liquidateur de la société conteste que l'employeur ait demandé à la salariée d'exécuter des heures supplémentaires, expliquant que cette dernière avait des horaires de travail de 9h à 17h avec une heure de pause le midi du mardi au samedi et qu'elle n'étaye pas sa demande par le tableau exel établi pour les besoins de la cause, que M. [W] qui ne travaillait pas au même endroit ne pouvait constater ses horaires et la sommation interpellative n'a aucune valeur probante.

L'Ags soutient que les éléments versés par la salariée ne permettent pas de démontrer l'existence d'heures supplémentaires.

La durée légale du travail effectif des salariés est fixée à 35 heures par semaine soit 151.67 heures par mois.

Les heures effectuées au-delà sont des heures supplémentaires qui donnent lieu à une majoration de salaire de 25% pour chacune des 8 premières heures (de la 36ème à la 43ème incluse) et de 50% à partir de la 44ème heure.

La durée du travail hebdomadaire s'entend des heures de travail effectif et des temps assimilés.

Le salarié peut prétendre au paiement des heures supplémentaires accomplies, soit avec l'accord au moins implicite de l'employeur, soit s'il est établi que la réalisation de telles heures a été rendue nécessaire par les tâches qui lui ont été confiées.

Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés.

Selon l'article L. 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l'employeur tient à la disposition de l'inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

Enfin, selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

En l'espèce, la salariée était soumise à la durée légale du travail.

Elle verse aux débats:

- un listing des heures accomplies par semaine et non rémunérées à compter de la semaine 31 du mois d'août 2016 jusqu'à la semaine 15 (mois avril) de l'année 2017,

- son agenda 2016 à compter de la semaine 30 à la semaine 51, à l'exception des semaines 42 et 43 (fin octobre 2016) mentionnant ses horaires d'embauche et de débauche outre la pause méridienne pour chacun des jours travaillés, ses jours d'absence,

- son agenda 2017 de la semaine 1 à la semaine 12, mentionnant ses horaires d'embauche et de débauche outre la pause méridienne pour chacun des jours travaillés, ses jours d'absence

- la sommation interpellative contenant les déclarations de M. [W], salarié de l'entreprise, faisant état de ce que lorsqu'il venait dans les locaux de l'entreprise entre 17h et 19h, la salariée était présente ainsi que le gérant M. [V].

Cette déclaration n'est pas utilement contredite par l'employeur malgré l'absence de crédibilité de ses déclarations suivantes concernant les horaires quotidiens et habituels de la salariée, puisqu'il indique que la salariée travaillait tous les jours de la semaine de 7h30 à 20h sans faire de pause, alors même qu'il n'était pas sur les lieux pour le constater et que ces déclarations sont en contradiction avec les mentions figurant sur les agendas de la salariée notamment en ce qui concernent les horaires ou les pauses.

Au regard de la présence de M. [V] en fin de journée en présence de la salariée entre 17h et 19h outre de ce que l'employeur lui avait accordé une promotion à la suite de son courrier du 3 mars 2017 dans lequel elle lui indiquait que le volume de travail qui lui était confié était de plus en plus important et les tâches à accomplir de plus en plus lourdes, il est établi que la salariée disposait de l'accord au moins implicite de son employeur pour effectuer les heures supplémentaires qui étaient générées par sa charge de travail.

La période antérieure à l'embauche du 24 octobre 2016 sera exclue au regard de ces développements précédents concernant la date d'embauche.

Ces éléments sont suffisamment précis quant aux heures non rémunérées que la salariée prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur d'y répondre. Or ce dernier n'apporte aucun relevé des horaires effectués par la salariée ni d'éléments contraires à ceux apportés par la salariée alors même que les bulletins de salaire font apparaître qu'aucune heure supplémentaire n'a été réglée. L'intégralité des 247,58 heures supplémentaires accomplies à compter du 24 octobre 2016 lui sera donc accordée, soit la somme de 2.917,95 euros bruts outre l'indemnité de congés payés afférente de 291,79 euros bruts.

La salariée ne justifie pas avoir travaillé pendant son arrêt de travail de décembre 2016 en violation de celui-ci.

Aux termes du courrier du 26 mars 2017, elle a annoncé à son employeur qu'elle serait présente à la réunion du lundi 27 mars à 7h30 alors qu'elle se trouvait en arrêt maladie, mais elle ne justifie pas que cela lui a été demandé par l'employeur, indiquant uniquement que par respect pour la société elle serait présente à cette réunion pour mettre au point les solutions permettant d'atténuer les conséquences de son absence. La salariée sera donc déboutée du surplus de ses demandes de rappel de salaire.

En définitive, la créance de la salariée au passif de la liquidation judiciaire de la société sera fixée aux sommes de 2.917,95 euros bruts au titre du rappel de salaire outre 291,79 euros bruts au titre de l'indemnité de congés payés afférente.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a débouté la salariée de l'intégralité de ses demandes de rappel de salaire.

3/ Sur les indemnités kilométriques

Il est de principe que les frais qu'un salarié expose pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur doivent être supportés par ce dernier.

Ces frais professionnels qu'un salarié justifie avoir exposés pour les besoins de son activité professionnelle doivent lui être remboursés sans qu'ils puissent être imputés sur la rémunération qui lui est due, à moins qu'il n'ait été contractuellement prévu qu'il en conserverait la charge moyennant le versement d'une somme fixée à l'avance de manière forfaitaire et à la condition d'une part, que cette somme forfaitaire ne soit pas manifestement disproportionnée au regard du montant réel des frais engagés et, d'autre part que la rémunération proprement dite du travail reste chaque mois au mois égale au Smic.

En l'occurrence, la salariée qui sollicite le paiement de frais kilométriques se contente de donner un récapitulatif du nombre de kilomètres parcourus par mois sans justifier des trajets effectués et sans détail aucun, en sorte qu'elle ne prouve pas avoir exposé ces frais pour les besoins de son activité professionnelle et sera déboutée de sa demande.

Le jugement entrepris sera confirmé sur ce chef.

4/ Sur l'indemnité de travail dissimulé

Il résulte de l'article L.8221-5 du code du travail que la dissimulation d'emploi salarié n'est caractérisée que si l'employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de paye un nombre d'heure de travail inférieur à celui réellement effectué.

En l'espèce, le caractère intentionnel de cette omission n'est pas établi par du fait du nombre d'heures supplémentaires. La salariée sera déboutée de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé et le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé.

5/ Sur la demande de dommages et intérêts pour le manque à gagner au titre de l'épargne salariale

La salariée ayant été déboutée de sa demande tendant à reconnaître l'existence d'un contrat de travail avec la société dès le 1er août 2016 sera en conséquence, déboutée de sa demande de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi à raison de la perte d'abonnement de l'employeur sur la période d'août 2016 jusqu'à la régularisation de l'écrit du 24 octobre 2016.

Le jugement entrepris sera confirmé sur ce chef.

Sur la rupture du contrat de travail

Pour contester le jugement entrepris en ce qu'il a dit que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse, la salariée fait valoir que les griefs énoncés dans la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, ne sont ni exacts, ni précis, ni objectifs et matériellement vérifiables, que c'est à l'employeur d'apporter la preuve de la véracité des faits allégués, que :

- le premier grief tenant à l'insubordination et au refus d'exécuter certaines tâches ne se rapporte à aucun fait précis ; la réalité des faits invoqués n'est aucunement démontrée ; elle conteste l'imputabilité de ces faits à sa personne en indiquant que c'est l'employeur qui l'a lui-même privée d'un poste téléphonique l'empêchant de facto de prendre les appels, niant par ailleurs avoir déclaré à la responsable de production qu'elle répondrait au téléphone si elle pouvait «peut être' » et que celle-ci n'était aucunement sa supérieure hiérarchique, en sorte qu'aucune insubordination ne peut lui être reprochée ;

- l'absence de transmission à l'expert comptable des contrats de travail de Madame [D] de M. [R] ne lui est pas imputable dès lors que d'une part dans le cadre du fonctionnement bien établi dans l'entreprise, les contrats de travail et les documents nécessaires à l'établissement des fiches de paye n'étaient transmis au comptable qu'en fin de mois, d'autre part elle était en arrêt maladie du 24 mars au 6 avril 2017 et avait transmis à son employeur le 27 mars, des codes d'accès à son ordinateur et informations utiles pour l'accès aux documents permettant la continuité de la gestion administrative de l'entreprise ; le grief selon lequel le contrat aurait été emporté à son domicile n'a pas fait l'objet d'un débat contradictoire lors de l'entretien préalable et ne saurait fonder son licenciement ; elle conteste avoir emporté ledit contrat chez elle ainsi que la valeur probante de l'attestation de Madame [E], précisant avoir déposé plainte contre cette dernière pour fausse attestation ;

- le 3e grief tenant à l'absence de préparation du dossier QUALIBAT est imprécis et matériellement impossible à vérifier, en l'absence d'explication sur les missions spécifiques qui lui incombaient dans le cadre de ce dossier ; le retard de traitement dans ce dossier ne lui est pas imputable au motif qu'il n'entre pas dans ses compétences et ses responsabilités de prendre des décisions quant au choix des chantiers à présenter, qu'elle était chargée de la partie administrative conformément à ses attributions et a laissé à son employeur la réalisation des tâches excédant son champ de compétence ;

- le 4e grief tenant à l'absence de transfert des lignes téléphoniques, du réseau Internet et du désabonnement d'eau et d'électricité ne lui est pas imputable, indiquant avoir effectué les diligences qui s'imposaient auprès des différents prestataires avant le déménagement et que les délais de traitement ont été allongés compte tenu des éléments qui lui étaient étrangers (absence de résiliation par le locataire sortant de son abonnement d'eau, hésitation de l'employeur sur l'installation à prévoir en matière d'outils informatiques et sur la révision de l'armoire électrique, conditionnant les abonnements en électricité et Internet) ;

- le 5e grief tenant à l'absence de remise de sa fiche médicale à l'issue de la visite à la médecine du travail du 20 avril 2017 ne peut constituer une faute dès lors que s'agissant d'une visite médicale à l'initiative de la salariée, ce document n'a pas à être transmis à l'employeur ;

- le 6e grief portant sur le harcèlement et le chantage dont elle se serait rendue coupable envers son employeur et son époux est évasif et non fondé, sans date ni aucun exemple concret ;

- le caractère abusif de la mesure de licenciement est conforté par le fait d'avoir prononcé une mise à pied à titre conservatoire et de n'avoir finalement pas opté pour un licenciement pour faute grave, établissant que l'employeur avait conscience du caractère non justifié des griefs invoqués, outre par la proposition d'une rupture conventionnelle du contrat de travail avec une indemnité de 5000 euros et d'avoir augmenté son salaire dans le mois précédent la procédure de licenciement.

Le mandataire judiciaire de la société en liquidation, estime fondé le licenciement opéré.

L'ags s'en rapporte aux écritures du mandataire judiciaire.

Aux termes de l'article L. 1232-6 alinéa 2 du code du travail dans sa version en vigueur jusqu'au 1er janvier 2018, la lettre de licenciement comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur.

Les motifs énoncés dans la lettre de licenciement doivent être suffisamment précis pour permettre au juge d'en apprécier le caractère sérieux. Elle doit énoncer des motifs précis et matériellement vérifiables. La datation dans cette lettre des faits invoqués n'est pas nécessaire

La cause réelle du licenciement est celle qui présente un caractère d'objectivité. Elle doit être existante et exacte. La cause sérieuse concerne une gravité suffisante pour rendre impossible la poursuite des relations contractuelles.

Le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige doit être apprécié au vu des éléments fournis par les parties, étant précisé que, si un doute subsiste, il profite au salarié, conformément aux dispositions de l'article L. 1235-1 du code du travail dans sa version applicable à l'espèce.

Si la lettre de licenciement doit énoncer des motifs précis et matériellement vérifiables, l'employeur est en droit, en cas de contestation, d'invoquer toutes les circonstances de fait qui permettent de justifier ce motif.

Aux termes de la lette de licenciement du 6 mai 2017 qui fixe les limites du litige, il est reproché à la salariée les faits suivants :

'(...)

1. Insubordination et refus d'exécuter des tâches prévues au contrat

Nous avons dû constater et déplorer ces dernières semaines que vous aviez décidé de ne plus répondre au téléphone, que vous laissiez celui-ci sonner jusqu'à ce que l'interlocuteur raccroche. L'accueil téléphonique est pourtant une de vos tâches listées à votre contrat de travail.

Lors d'une absence temporaire de notre assistante administrative Mme [E], alors que le téléphone était posé sur votre bureau s'était mis à sonner, vous n'avez pas daigné répondre et avez continué votre travail sans vous interrompre. Aux sonneries incessantes, notre responsable production, Madame [D], qui n'était pas dans le même bureau, a dû courir pour répondre à votre place.

Vous avez été interpellé sur votre comportement le 13 avril, lors d'une réunion de liaison entre le service administrative et le service production. Au cours de cette réunion, devant témoins vous avez répondu à Madame [D], responsable de production, que vous répondriez au téléphone « si vous pouviez »,' « peut-être' ».

2.Non transmission des documents

En fin de mois de mars, lors de l'établissement des fiches de paye des salariés, notre expert-comptable nous a signalé ne pas détenir les contrats de :

Mme [D] (alors que celle celui-ci avait été signé le 8 mars 17)

M. [R] qui, d'ailleurs était INTROUVABLE !

De plus, ce dernier nous a confirmé qu'il n'a signé son contrat qu'à votre retour de maladie, début avril qu'il ne l'avait jamais vu, ni lu, auparavant. Alors que la date de son embauche remonte au 13 mars.

Lors de notre entretien préalable du 2 mai, en présence de votre conseillère Mme [K], vous nous avez expliqué que vous aviez emporté chez vous le contrat de travail de M. [R], ainsi que votre propre avenant, et les aviez conservés chez vous pendant votre maladie. Nous vous reprochons d'avoir sans aucune autorisation du gérant, sorti et conservé chez vous des documents appartenant à l'entreprise.

3. Non préparation du dossier de demande QUALIBAT

Lors de la réunion du 13 avril, vous nous avez répondu à notre stupéfaction, que la préparation de ce dossier n'entrait pas dans vos fonctions car selon vous, trop de responsabilités en découleraient. Nous pensons que cette tâche est une simple demande de formalités administratives et entre tout à fait dans vos compétences et dans vos attributions. Nous pensons par ailleurs que ce n'est pas à vous de décider quelles tâches vous conviennent et apparaissent adéquates avec vos compétences mais que c'est à votre employeur de décider.

4. Déménagement prévu de longue date (mi-février)

Lors de notre emménagement le 24 mars dans nos nouveaux locaux à la Sarrée, nous avons constaté qu'aucune ligne téléphonique n'avait été transférée, ni de demande Internet engagée. Seule démarche prévue par vos soins : une mise en service du standard téléphonique qui sans ligne active, et inexploitable.

Les abonnements d'eau de la compagnie Suez sont, aujourd'hui encore, au nom de la SCI la Sarrée (propriétaire des locaux) et l'électricité Engie au nom de l'ancien locataire : Sita Sud.

Par ailleurs, Engie nous menace actuellement de couper temporairement l'électricité pour la réalisation du transfert d'abonnement. Étant une petite entreprise en voie de développement, cette coupure serait hautement préjudiciable !

5. Rétention de documents

Suite à votre visite médicale du 20 avril, que vous vous étiez chargée d'organiser, aucun récépissé ne nous a été transmis pour confirmation que vous vous étiez réellement rendue à la médecine du travail.

6. Harcèlement

Nous n'acceptons pas votre comportement consistant à harceler par SMS votre propre employeur et son époux et votre tentative de chantage consiste à tenter de monnayer les informations confidentielles auquelles vous avez eu accès en toute confiance à l'occasion de l'exécution de votre contrat de travail pour obtenir une indemnité de rupture en le menaçant de dévoiler ces informations confidentielles.

Nous vous avons répondu que nous ne cèderions jamais à une tentative de chantage et que nous préférions faire face et assumer toutes conséquences préjudiciables de votre comportement quel qu'en soit le prix à payer, plutôt que de devoir payer un centime en cédant à votre entreprise de chantage.

Nous vous dispensons de votre préavis d'une durée d'un mois. Celui-ci sera payé aux échéances habituelles. Le salaire de votre mise à pied conservatoire sera également payé(...)'

* sur l'insubordination

Il n'est justifié d'aucune pièce au soutien de ce grief d'insubordination lié au refus de la salariée de répondre au téléphone alors même qu'il est contesté, en sorte qu'il ne sera pas retenu par la cour.

* sur l'absence de transmission des contrats de travail de salariés et leur sortie des locaux de l'entreprise sans l'autorisation de l'employeur

Lors de l'entretien préalable la salariée a opposé à son employeur le fait que les documents comptables du mois de mars n'avait pas pu être envoyés puisqu'habituellement ils étaient envoyés en fin de mois et qu'en raison de son arrêt maladie, elle n'avait pas pu y procéder. Par ailleurs, il est constant que l'employeur avait connaissance des codes d'accès à l'ordinateur de la salariée et des informations utiles pour l'accès aux documents permettant la continuité de la gestion administrative de l'entreprise, en sorte que l'absence de transmission des contrats de travail au service comptable ne lui est pas imputable.

Contrairement à ce que prétend l'employeur, rien ne permet de considérer que la salariée a reconnu avoir sorti des locaux pour l'emporter à son domicile, le contrat de travail de M. [R].

Aux termes de son attestation en date du 14 décembre 2017, Mme [E], salariée de l'entreprise a indiqué concernant ce contrat que 'à son retour, je lui pose donc la question. En effet il était bien introuvable au bureau car elle m'a dit, en sortant le contrat de son sac, qu'elle l'avait oublié chez elle et qu'elle était du coup revenu avec . De plus elle a ajouté : 'je vais d'ailleurs le faire tout de suite signer par [F]'. En effet, nous avons découvert qu'il n'était pas signé et pas au bureau.'

Le fait que ce grief n'ait pas été débattu lors de l'entretien préalable n'est pas de nature à rendre sans cause réelle et sérieuse le licenciement.

La salariée qui conteste la réalité des faits énoncés dans cette attestation et a déposé plainte devant les services de la gendarmerie nationale le 21 mars 2018 pour fausse attestation, en indiquant qu'elle avait remis au gérant avant l'embauche de M. [R] le 13 mars 2017, pour qu'il puisse les faire signer par ce dernier qui exerçait à l'atelier, qu'avant son embauche, elle a avisé M. [R] par mail qu'il signerait les contrats avec le gérant, qu'elle n'avait jamais emporté de documents chez elle et n'avait jamais eu le contrat dans son sac, que le contrat de M. [R] était enregistré dans un dossier sur son ordinateur accessible à tous sous l'appellation 'projet de contrat'.

Au regard de ces éléments contradictoires, et de l'absence de toute mention au sein de l'attestation de la conseillère de la salariée lors de l'entretien préalable, il existe un doute sur la réalité du grief lié au fait pour la salariée d'avoir sorti le contrat de [R] des locaux de l'entreprise. La seconde série de griefs ne saurait donc être lui être reprochée.

* sur le refus de préparation du dossier Qualibat

Il est constant que la salariée n'a pas traité en son intégralité le dossier Qualibat et qu'elle n'a pas renvoyé le dossier dans les délais impartis du 30 janvier 2017.

La salariée soutient qu'elle s'est chargée de remplir le volet portant sur les renseignements administratifs et comptables rentrant dans ses attributions mais qu'elle a laissé à l'employeur la réalisation du volet 'fiches de description et illustrations de chantiers réalisés', laquelle ne rentrait pas dans les tâches inhérentes au contrat de travail.

Selon le contrat de travail la salariée occupait le poste de secrétaire niveau D. Il y est précisé qu'elle était chargée d'exécuter l'ensemble des tâches de secrétariat (rédaction de courrier, standard téléphonique), de préparer les documents ou synthèses à transmettre au cabinet comptable et d'accomplir toutes formalités administratives selon les directives de M. [V].

Le choix des chantiers et photographies illustrant les compétences de l'entreprise ne rentrait pas dans les tâches inhérentes au poste de secrétaire occupé par la salariée et l'employeur qui soutient lui avoir fourni tous les éléments portant sur le volet illustrations de chantier n'apporte aucun élément pour le démontrer. Il s'ensuit que le doute doit profiter à la salariée et qu'aucune faute imputable à celle-ci ne peut être retenue à ce titre.

*sur l'absence de transfert des lignes téléphonique, internet et d'abonnement en eau et électricité lors du déménagement

En l'absence de tout élément concernant l'absence de transfert de la ligne téléphonique, il existe un doute sur la réalité de ce grief qui doit profiter à la salariée.

Les pièces versées aux débats établissent que les abonnements d'eau et d'électricité n'avaient pas été transférés lors de l'emménagement de la société dans ses nouveaux locaux et que ce n'est qu'en juin 2017 qu'il y a été procédé, soit postérieurement au départ de la salariée, étant précisé qu'il avait été convenu entre l'ancien occupant et la société que cette dernière devait procéder à la reprise des contrats en février 2017, sans que l'absence de résiliation de l'abonnement par le précédent occupant soit un argument opérant. Par ailleurs les seules allégations de la salariée en l'absence de tout élément prouvant les atermoiements du gérant sur le type d'abonnement en électricité ou en internet, lesquels sont modifiables, ne sont pas de nature à la dégager de toute imputabilité.

L'absence d'exécution des transferts d'abonnement en eau, électricité et en internet sont donc établis et sont imputables à la salariée, qui au regard des heures supplémentaires effectuées disposait du temps pour le faire. Ces faits caractérisent donc un comportement fautif qui lui est imputable.

*sur l'absence de communication à l'employeur de l'avis du médecin du travail en suite de la visite du 20 avril 2017

Il ne rentre pas dans les obligations du salarié de communiquer à son employeur les avis du médecin du travail concernant son aptitude au travail, en sorte qu'aucun manquement ne saurait lui être reproché sur ce chef.

*sur le harcèlement et le chantage

Il n'est justifié d'aucun élément sur ces griefs alors qu'ils sont matériellement vérifiables, en sorte qu'il existe à tout le moins un doute sur leur réalité, qui profitera à la salariée.

En définitive, l'absence de transfert des abonnements en eau, électricité et internet caractérisent des manquements de la salariée à ses obligations issues du contrat de travail qui lui sont imputables et qui caractérisent une cause réelle et sérieuse de licenciement, sans qu'il puisse être déduit quoique ce soit du choix de l'employeur de ne retenir qu'une faute simple après l'avoir mise à pied à titre conservatoire.

Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a débouté la salariée de ses demandes tendant à dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et de ses demandes indemnitaires subséquentes.

Sur les autres demandes

Il convient d'ordonner au mandataire liquidateur de remettre à la salariée les documents de fin de contrat outre un bulletin de salaire rectifiés dans un délai de deux mois à compter de la présente décision, sans qu'il y ait lieu à astreinte.

Il sera rappelé qu'en application des dispositions de l'article L. 622-28 du code de commerce le cours des intérêts des créances dont l'origine est antérieure au jugement d'ouverture de la procédure collective est arrêté.

Il est rappelé que les sommes allouées par la cour sont exprimées en brut.

Sur la garantie de l'AGS

Il convient de rappeler que :

l'AGS ne garantit pas la somme réclamée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

son obligation de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte-tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par mandataire judiciaire, et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement.

La décision à intervenir sera déclarée opposable l'AGS dans les limites de sa garantie et elle ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L.3253-6 et L.3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L.3253-15, L.3253-18, L.3253-19, L.3253-20, L.3253-21 et L.3253-17 et D.3253-5 du code du travail.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

La société BTSG² PACA prise en la personne de M. [U] [P] ès qualité de mandataire liquidateur de la société Art&Travaux en liquidation judiciaire succombe même partiellement en sorte qu'elle sera condamnée aux entiers dépens de l'appel et de première instance. Elle sera en conséquence déboutée de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a condamné la salariée aux dépens de première instance et il y sera ajouté concernant les dépens d'appel.

L'équité commande de ne pas faire bénéficier la salariée des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de la débouter de cette demande. Le jugement entrepris sera confirmé sur ce chef et il sera ajouté au jugement.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Statuant contradictoirement et publiquement par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile;

Dans la limite de la dévolution,

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [X] de sa demande de rappel de salaire et d'indemnité de congés payés afférente, en ce qu'il a condamné Mme [X] aux entiers dépens ;

Statuant à nouveau dans cette limite,

Rejette la fin de non recevoir formulée par l'AGS ;

Fixe la créance de Mme [X] au passif de la liquidation judiciaire de la société Art&Travaux aux sommes de 2.917,95 euros bruts au titre du rappel de salaire (heures supplémentaires du 24 octobre 2016 à avril 2017) outre 291,79 euros bruts au titre de l'indemnité de congés payés afférente ;

Déboute Mme [X] de toute autre demande au titre du rappel de salaire ;

Ordonne à la société BTSG² PACA prise en la personne de M. [U] [P] ès qualités de mandataire liquidateur de la la société Art&Travaux de remettre à Mme [X] les documents de fin de contrat outre un bulletin de salaire rectifiés dans un délai de deux mois à compter de la présente décision ;

Rappelle qu'en application des dispositions de l'article L. 622-28 du code de commerce le cours des intérêts des créances dont l'origine est antérieure au jugement d'ouverture de la procédure collective est arrêté ;

Rappelle que les sommes allouées par la cour sont exprimées en brut ;

Rappelle que l'obligation de l'AGS de faire l'avance de la somme à laquelle est évalué le montant total des créances garanties, compte-tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire, et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement ;

Déclare la décision à intervenir opposable l'AGS dans les limites de sa garantie qui ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L.3253-6 et L.3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L.3253-15, L.3253-18, L.3253-19, L.3253-20, L.3253-21 et L.3253-17 et D.3253-5 du code du travail ;

Déboute les parties de leurs autres demandes ;

Condamne la société BTSG² PACA prise en la personne de M. [U] [P] ès qualités de mandataire liquidateur de la société Art&Travaux aux entiers dépens de première instance ;

Confirme le jugement entrepris sur le surplus,

Y ajoutant,

Déboute les parties de toutes autres demandes ;

Condamne la société BTSG² PACA prise en la personne de M. [U] [P] ès qualités de mandataire liquidateur de la société Art&Travaux aux entiers dépens d'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-4
Numéro d'arrêt : 19/03399
Date de la décision : 12/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-12;19.03399 ?
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