COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-4
ARRÊT AU FOND
DU 12 MAI 2022
N° 2022/
CM/FP-D
Rôle N° RG 19/03397 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BD3T4
[K] [I]
C/
SA ICTS
Copie exécutoire délivrée
le : 12 MAI 2022
à :
Me Fabio FERRANTELLI, avocat au barreau de NICE
Me Laurent DESCHAUD, avocat au barreau de MARSEILLE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE en date du 29 Janvier 2019 enregistré(e) au répertoire général sous le n° F16/00998.
APPELANT
Monsieur [K] [I], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Fabio FERRANTELLI, avocat au barreau de NICE
INTIMEE
SA ICTS, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Laurent DESCHAUD, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Février 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Catherine MAILHES, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre
Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller
Madame Catherine MAILHES, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Françoise PARADIS-DEISS.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Mai 2022.
ARRÊT
contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Mai 2022
Signé par Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre et Madame Françoise PARADIS-DEISS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
La société ICTS France (la société) est spécialisée dans le secteur d'activité des services auxiliaires des transports aériens et emploie plus de 3000 salariés en France.
M.[I] (le salarié) a été initialement embauché par la société Brink's Security Services dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à temps plein en qualité d'opérateur de sûreté qualifié, du 1er décembre 2011 jusqu'au 15 avril 2012 qui a été prolongé jusqu'au 31 octobre 2012. Le 1er novembre 2012, le salarié a été embauché en contrat à durée indéterminée à temps plein en qualité de coordinateur.
A la suite de la perte du marché de sécurité aéroportuaire par la société Brink's security services, le contrat de travail du salarié a été transféré à la société ICTS France à compter du 1er avril 2016 par l'effet des dispositions conventionnelles de la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité.
Par courrier du 10 mai 2016, le salarié a été convoqué un entretien préalable en vue de son éventuel licenciement et a été mis à pied à titre conservatoire.
Il a été licencié pour faute grave le 21 juin 2016 pour ne pas avoir respecté les règles de sécurité et pour un manque de professionnalisme.
Contestant son licenciement, le salarié a le 29 juillet 2016 saisi le conseil de prud'hommes de Nice aux fins de voir dire que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, et de voir la société ICTS France condamnée à lui payer une indemnité de préavis, les congés payés afférents, une indemnité de licenciement, un rappel de salaire au titre de la mise à pied à titre conservatoire injustifiée et les congés payés afférents, des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse outre une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et la remise des documents sous astreinte.
La société ICTS France s'est opposée aux demandes du salarié et a sollicité à titre reconventionnel une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 29 janvier 2019, le conseil de prud'hommes de Nice a :
dit que le licenciement intervenu pour faute grave est justifié,
débouté le demandeur de l'ensemble de ses demandes,
condamné M.[I] à verser à la société ICTS France la somme de 50 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et l'a condamné aux entiers dépens.
Selon déclaration électronique de son avocat remise au greffe de la cour le 27 février 2019, M.[I] a régulièrement interjeté appel aux fins de réformation du jugement entrepris en ce qu'il a dit que le licenciement intervenu pour faute grave était justifié, en ce qu'il l'a condamné à payer à la société ICTS France la somme de 50 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en ce qu'il l'a débouté de ses demandes tendant à dire que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, à condamner la société ICTS France au paiement des sommes de 2950,27 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied, de 195,0 2 euros au titre des congés payés afférents, 4436,50 euros au titre de l'indemnité de préavis, 443,65 euros au titre des congés payés sur préavis, 1996,42 euros à titre d'indemnité de licenciement, 20'000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, en ce qu'il l'a débouté de sa demande tendant à ordonner sous astreinte de 100 euros par jour de retard la délivrance des documents suivants : certificat de travail, attestation pour le pôle emploi, bulletins de paye, en ce qu'il a rejeté la demande tendant à dire que les créances salariales porteront intérêts au taux légal capitalisé à compter de la demande en justice 'et y ajoutant : condamner la société ICTS France au paiement de la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile'.
Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe de la cour le 9 novembre 2021, M.[I] demande à la cour de :
le dire recevable et bien fondé en son appel,
infirmer le jugement rendu en ce qu'il a dit et jugé que le licenciement intervenu pour faute grave était justifié et en ce qu'il a débouté de toutes ses demandes,
dire et juger que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse,
condamner la société ICTS France à lui payer les sommes de :
2950,27 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied outre 295,0 2 euros au titre des congés payés afférents,
4436,50 euros à titre d'indemnité de préavis outre 443,65 euros au titre des congés payés afférents,
1995 16,42 euros à titre d'indemnité de licenciement,
20'000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
ordonner sous astreinte de 100 euros par jour de retard la délivrance des documents suivants : certificat de travail, attestation pour le pôle emploi, bulletins de paye,
dire que les créances salariales porteront intérêts au taux légal capitalisé à compter de la demande en justice,
condamner la société ICTS France à lui payer la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Selon ses dernières conclusions remises au greffe de la cour le 28 juin 2019, la société ICTS France demande à la cour de confirmer dans son intégralité le jugement entrepris, de dire que le licenciement de M.[I] repose sur une faute grave et à plus forte raison sur une cause réelle et sérieuse, de débouter M.[I] de l'ensemble de ses demandes et de le condamner à lui verser la somme de 1500 euros de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
La clôture des débats est intervenue le 7 février 2022. L'affaire a été évoquée à l'audience du 21 février 2022.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties il est fait expressément référence au jugement entrepris et aux conclusions des parties sus-visées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la rupture du contrat de travail
Le salarié fait grief au jugement de le débouter de sa demande tendant à dire qu'il a fait l'objet d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse en faisant valoir d'une part que le véritable motif de son licenciement tient au fait que la société entrante ne souhaitait pas conserver les salariés de la société sortante et principalement les postes les plus qualifiés, d'autre part, contestant les faits qui lui sont reprochés, que :
- la mauvaise gestion qui lui est imputée relève d'une insuffisance professionnelle et non de la faute grave ; l'employeur n'apporte aucune preuve objective à l'appui de ses accusations ; il n'a jamais fait l'objet du moindre reproche; le non-respect des procédures et les pièces versées aux débats ne sont pas de nature à justifier le grief retenu à son encontre dès lors qu'il n'était pas le responsable en chef ; les surcharges de passagers des 29 avril et 9 mai 2016 ne peuvent lui être imputées s'agissant d'une difficulté liée à l'organisation du temps de travail ; le conseil de prud'hommes a opéré un renversement de la charge de la preuve en exigeant qu'il rapporte la preuve de ce qu'il n'était pas le responsable en poste ces jours là, la preuve tant de la réalité des faits que de leur imputabilité incombant à l'employeur ;
- le manquement à la sûreté ne lui est pas imputable ; il n'a jamais demandé l'ouverture du portique (PIF) n°2, lequel a été mis en service par les agents de filtration alors même qu'ils avaient été avertis du dysfonctionnement de celui-ci ; il a immédiatement refermé le portique n°2 dès qu'il a été averti de l'erreur par l'agent de palpation et n'étant ni cadre ni agent de maîtrise, il ne saurait être tenu disciplinairement responsable des faits d'autrui ; il n'était pas présent sur les lieux lors de l'ouverture du PIF n°2 ; les attestations versées aux débats sont irrégulières au regard des exigences de l'article 202 du code de procédure civile, dès lors qu'aucune pièce d'identité n'y est adjointe et ne viennent pas démontrer l'imputabilité de ce fait à sa personne, précisant que M. [S] et Mme [J] qui ont attesté, sont les seuls responsables du manquement à la sûreté puisque le premier a laissé passer les voyageurs par le portique N°2 et que la première a elle-même ouvert cette ligne alors que tous les signes de hors tension étaient visibles ;
- la mesure de licenciement est disproportionnée avec les faits reprochés.
Le courriel de Mme [B] du 22 mars 2016 adressé au directeur de la Brink's, selon lequel M. [O] dont la cour ignore la qualité, lui aurait indiqué qu'à aucun moment il ne reprendrait un chef d'équipe n'est corroboré par aucun autre élément et est insuffisant pour prouver que le motif réel du licenciement du salarié réside dans la volonté de la société entrante de ne pas reprendre le contrat de travail de ce dernier. Le moyen tiré de ce chef sera rejeté.
Aux termes de la lettre de licenciement du 21 juin 2016 qui fixe les limites du litige, il est reproché au salarié les faits suivants :
'(...)
Mauvaise gestion
Le 29 avril 2016, 11h15 votre supérieur vous a téléphoné en présence de Madame [H], responsable des opérations, afin de faire un point sur les opérations. Vous avez informé votre supérieur que tout se déroulait parfaitement bien sur les opérations et que tout était géré.
Or à 11h30, quelques minutes après avoir raccroché avec votre supérieur, il s'est avéré que les postes d'inspection filtrage du terminal T2. 2 étaient complètement saturés. En effet, à 11h30, seulement 4 postes étaient ouverts (au lieu des 6 prévus).
Cela a engendré à 11h44, stagnation des passagers dans le cheminement et dans les escaliers ; et ces derniers attendaient dans le hall du terminal. À aucun moment vous n'avez contacté votre supérieur pour lui rendre compte de la situation.
Nous avons appris ce problème, lorsque notre client nous a fait part de son mécontentement, et nous a notifié une pénalité financière.
Le 9 mai 2016, vous deviez ouvrir ces postes sur les postes d'inspection filtrage de 10 h à 13 h.
À 10 h vous avez ouvert vos 6 postes.
De 10h35 à 11 h malgré la file d'attente importante, vous avez décidé de votre propre initiative de fermer le 6e poste d'inspection filtrage, sans informer votre supérieur hiérarchique.
À cause de la fermeture de ce poste, la file d'attente remonta à 11h20 jusqu'à la 3e ligne en bas des marches.
Encore une fois, notre client nous a fait part de son mécontentement.
En votre qualité de coordinateur, il vous appartenait pourtant de coordonner des ouvertures des postes et d'alerter votre supérieure quand le traitement de la situation excédait vos prérogatives.
Ces manquements qui vous sont imputables, altèrent le niveau de la qualité perçue de nos prestations par nos clients et entraîne des pertes économiques pour notre entreprise.
Manquement à la sûreté
Le 10 mai 2016 vous avait effectué le test de bon fonctionnement des portiques de détecteurs de masse métallique sur le PIF du terminal 2.2. En d'autres termes, vous avez allumé tous les portiques et vérifié leur bon état de fonctionnement.
Lors des tests à 3h45, vous avez constaté que le portique du poste 2 se déclenchait intempestivement sans aucune raison. Vous avez donc pris l'initiative de débrancher ce portique afin que la sonnerie de ce dernier cesse.
Vous avez informé votre chef d'équipe, et lui avez dit que vous avez informé le PCT à 3h50.
Celui-ci vous a donc demandé d'ouvrir les postes 3 et 4 (à la place des postes 1 et 2). Puis ce dernier parti en direction des PIF du terminal T2.1.
À 4 h, contrairement directives de votre supérieur, vous avez décidé d'ouvrir le poste 1, avec les opérateurs arrivant sur poste.
Puis, à 5 h, vous avez demandé à vos collaborateurs d'ouvrir le poste 2 (sans vous assurer que le PCT état ou non intervenu), et n'avez pas informé les opérateurs du dysfonctionnement du portique.
Entre 5h10/5h15, les opérateurs en palpation ont remarqué que le portique n'était pas branché qu'environ 25 passagers étaient donc passés sans aucun contrôle dans l'enceinte sécurisée de l'aéroport.
Ils vous ont alors alerté immédiatement, et ont fermé le poste 2 en abaissant le rideau.
À 5h25, soit environ 15 minutes après l'incident, vous avez décidé de téléphoner à votre chef d'équipe pour lui relaté l'incident.
Du fait de votre négligence, des personnes et des objets sont passés dans l'enceinte sécurisée de l'aéroport sans avoir été contrôlés.
En d'autres termes la chaîne de sûreté a été rompue.
Ainsi, des articles prohibés auraient pu rentrer en zone sécurisée de l'aéroport, ou à bord d'un avion, ce qui aurait pu entraîner des extrêmement graves (...)
En tant que coordinateur, vous devriez pourtant appliquer les consignes de votre chef d'équipe et vous assurez de la bonne application des instructions données.
Vos agissements fautifs ont conduit la police aux frontières adressées un constat de manquement à l'encontre de la société, consécutivement à l'infraction majeure aux règles de sûreté (défaut d'inspection filtrage des passagers et des bagages cabine) portant gravement préjudice à notre société non seulement dans le cas de nos relations contractuelles avec l'aéroport mais également dans le cadre de nos relations avec l'état dans la mesure où nous sommes en charge l'exécution d'une mission de service public visant à préserver la sécurité des personnes et des biens sur le site de l'aéroport.
Les fautes que vous avez commises constituent des manquements graves à vos obligations professionnelles rendant nécessairement impossible votre maintien au sein de l'entreprise, étant rappelé que le contexte professionnel spécifique à notre activité exige un respect strict absolu des procédures de sûreté aéroportuaire auxquelles nous sommons soumis. (')
Des éléments apportés lors de notre entretien, ne nous ayant pas permis de modifier notre proposition quant à la gravité des faits susmentionnés, nous avons pris la décision aux termes de la présente lettre de vous notifier votre licenciement pour faute grave concernant les faits énumérés ci-dessus en violation avec notre règlement intérieur, vos obligations contractuelles et nos procédures de travail (...)'
Aux termes de l'article L. 1235-1 du code du travail, il appartient au juge d'apprécier le caractère réel et sérieux des griefs invoqués et de former sa conviction au vu des éléments fournis pas les parties, le doute profitant au salarié.
Toutefois, la charge de la preuve de la gravité de la faute privative des indemnités de préavis et de licenciement incombe à l'employeur et tel est le cas d'espèce.
La faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.
-a- sur la mauvaise gestion
Aux termes de l'acte matérialisant le transfert conventionnel du contrat de travail, signé par les parties, il a été stipulé que le salarié devra notamment dans le cadre de ses attributions participer en sa qualité de coordinateur de sûreté à toute mission de sûreté (à savoir prévenir toute intrusion... dans des zones déterminées) en se conformant rigoureusement aux instructions de travail précises et détaillées qui lui seront données ainsi qu'aux informations sur les méthodes à employeur et les objectifs à atteindre (...) Il coordonnera techniquement le travail réalisé dans le cade des instructions données et alertera son encadrement quand le traitement d'une situation excédera ses prérogatives.
Il est avéré par la lettre du 4 mai 2016 adressée par le responsable sûreté des passagers des aéroports de la Côte d'Azur que le 29 avril 2016 aux alentours de 11h30, les postes d'inspection filtrage du terminal 2.2 avaient été saturés en raison de l'armement de quatre postes seulement au lieu des six préconisés contractuellement, entraînant un temps de traitement supérieur aux dix minutes contractuelles, outre par le courriel du 10 mai 2016 de M. [G], chef d'équipe du salarié que ce dernier était en poste le 29 avril, en charge de coordonner les postes d'inspection filtrage du terminal en cause.
Il est ainsi établi que le salarié n'a ouvert que quatre postes en méconnaissance des instructions habituellement données d'en ouvrir six et ce dernier n'apporte aucun élément de preuve au soutien de ce qu'il avait des instructions différentes ce jour-là ou que l'organisation du travail ne lui permettait pas d'ouvrir six postes sur six.
Il ne justifie pas plus avoir averti son supérieur de la saturation des postes d'inspection filtrage alors que le contrat de travail lui en fait l'obligation lorsque le traitement de la situation excède ses prérogatives.
Il est également avéré par le courriel du 9 mai 2016 de la chargée de méthodes sûreté des aéroports de la Côte d'Azur qu'une saturation de l'aéroport a été observée le même jour de 11h à 12h au terminal T22, que le 6ème poste d'inspection filtrage avait été fermé à 10h36 malgré une file d'attente de passagers en bas des marches et rouvert à 11h avec une persistance de cette queue jusqu'au bas des marches, qu'à 11h20 la file d'attente remontait sur trois lignes en bas des marches et l'attente était de 13 minutes, outre du courriel de M. [G], sus-visé, que c'était le salarié en cause qui assurait le poste de coordinateur des postes d'inspection filtrage du dit terminal au moment des faits.
Il est ainsi établi que le salarié a fermé un poste d'inspection filtrage en méconnaissance des instructions habituellement données d'en ouvrir six et ce dernier n'apporte aucun élément de preuve au soutien de ce qu'il avait des instructions différentes ce jour-là ou que l'organisation du travail ne lui permettait pas d'ouvrir six postes sur six, pas plus qu'il ne justifie avoir averti son supérieur de la saturation des postes d'inspection filtrage alors que le contrat de travail lui en fait l'obligation lorsque le traitement de la situation excède ses prérogatives.
Ces faits caractérisent un manquement de sa part aux obligations contractuelles qui lui incombent en sa qualité de coordinateur et le moyen tiré de ce qu'ils relèvent d'une insuffisance professionnelle en dehors de tout caractère fautif sera rejeté.
-b- sur le manquement à la sûreté
Il ressort de la notification du manquement à personne morale établie le 20 mai 2016 par la direction centrale de la police aux frontières à l'encontre de la société ICTS France domiciliée à l'aéroport de Nice, que le 10 mai 2016 à 5h45 un défaut d'inspection filtrage au terminal T 2.2 a été constaté.
Il est d'ailleurs constant que ce jour là alors que M.[I] était de service, que des passagers sont passés sous le portique 2 qui était éteint.
Les attestations versées aux débats par l'employeur ne comportent pas de justificatif d'identité. Toutefois le salarié ne conteste pas l'identité de leurs auteurs et ne formule aucune demande aux fins de les voir écarter des débats. La cour appréciera donc leur valeur probante.
Il ressort de l'attestation de Mme [M], coordinatrice au T2.1 qui aidait pour l'ouverture du poste au Terminal 2.2 le 10 mai 2016 à 3h45, corroborant le rapport spécial et l'attestation établis par le supérieur hiérarchique M. [G], que le 10 mai 2016 à 3h45, le portique n°2 n'arrêtait pas de sonner, que M.[I] l'a désactivé et que M. [G] lui a précisé de ne surtout pas l'ouvrir et d'ouvrir à sa place les portiques 3 et 4. Ces faits sont également corroborés par l'attestation de Mme [X], qui précisant avoir été par la suite affectée au terminal 2.1, a induit qu'elle avait personnellement constaté que le coordinateur M.[I] avait fait les tests et avait débranché le portique n°2 qui dysfonctionnait en raison de signaux sonores intempestifs.
Les attestations concordantes et circonstanciées de M. [S] et Mme [J] qui ont pris leur poste postérieurement aux tests de fonctionnement, à 4h30 et 5h et qui ne sont pas utilement remises en cause par l'appelant au moyen du rapport qu'il a établi le 13 mai 2016 postérieurement à sa mise à pied et à sa convocation à entretien préalable à éventuel licenciement et des explications confuses selon lesquelles M. [G] lui aurait ordonné de modifier la fiche de test de fonctionnement des portiques, établissent que ce dernier qui était seul sur le poste de coordinateur, leur a demandé d'ouvrir les portiques 1 et 2 au T2.2, que lorsque Mme [J] s'est installée à l'écran du poste d'inspection filtrage 2 et a ouvert le rideau, elle n'avait pas été informée par le coordinateur de ce que ce poste d'inspection filtrage était hors service, que M. [S] n'avait entendu à aucun moment M.[I] dire à qui que ce soit de ne pas ouvrir le rideau du portique 2.
Il s'ensuit que les faits reprochés consistant à ne pas avoir respecté les directives de son supérieur hiérarchique M. [G] sur la nécessité de ne pas ouvrir le portique n°2 et de ne pas avoir informé les opérateurs du dysfonctionnement de celui-ci sont établis et caractérisent un manquement à ses obligations issues du contrat de travail qui lui est personnellement imputable.
Ces faits caractérisent au regard des enjeux de sûreté aéroportuaires et aéronautiques, dans un contexte prégnant de risque d'attentats, malgré l'ancienneté du salarié un manquement à ses obligations issues du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, et justifiant son licenciement pour faute grave privative des indemnités de rupture.
Le moyen tiré de la disproportion de la sanction avec la nature des griefs sera rejeté.
Le jugement entrepris sera en conséquence confirmé en ce qu'il a déclaré fondé le licenciement pour faute grave et débouté ce dernier de l'intégralité de ses demandes subséquentes.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
M.[I] succombant sera condamné aux entiers dépens de l'appel et sera débouté de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
L'équité commande de faire bénéficier la société de ces mêmes dispositions et de condamner le salarié à lui verser une indemnité de 50 euros au titre de la première instance outre une indemnité de 500 euros au titre de l'appel.
Le jugement entrepris sera confirmé sur ce chef. Il y sera ajouté en ce qui concerne l'indemnité au titre de l'appel.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Statuant contradictoirement et publiquement par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile;
Confirme le jugement entrepris dans la limite de la dévolution,
Y ajoutant,
Déboute M.[I] de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M.[I] à verser à la société ICTS France une indemnité complémentaire de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M.[I] aux entiers dépens de l'appel.
LE GREFFIERLE PRESIDENT