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06/05/2022 | FRANCE | N°21/03628

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8, 06 mai 2022, 21/03628


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8



ARRÊT AU FOND

DU 06 MAI 2022



N°2022/.



Rôle N° RG 21/03628 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHCYG





CPAM DU VAUCLUSE





C/



[U] [J]







Copie exécutoire délivrée

le :

à :





- CPAM DU VAUCLUSE



- Me Fabien BOUSQUET















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Pole social du tribunal jud

iciaire de Marseille en date du 01 Février 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 18/09571.





APPELANTE



CPAM DU VAUCLUSE, demeurant [Adresse 2]



représenté par Mme [N] [T] en vertu d'un pouvoir spécial





INTIME



Monsieur [U] [J], demeurant [Adresse 1]



repré...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8

ARRÊT AU FOND

DU 06 MAI 2022

N°2022/.

Rôle N° RG 21/03628 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHCYG

CPAM DU VAUCLUSE

C/

[U] [J]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- CPAM DU VAUCLUSE

- Me Fabien BOUSQUET

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Pole social du tribunal judiciaire de Marseille en date du 01 Février 2021,enregistré au répertoire général sous le n° 18/09571.

APPELANTE

CPAM DU VAUCLUSE, demeurant [Adresse 2]

représenté par Mme [N] [T] en vertu d'un pouvoir spécial

INTIME

Monsieur [U] [J], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Fabien BOUSQUET, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Mars 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Mme Catherine BREUIL, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Isabelle LAURAIN.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Mai 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Mai 2022

Signé par Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre et Madame Séverine HOUSSARD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le 6 avril 2016, M. [U] [J], né le 17 juin 1975, agent de fabrication au moment des faits, a sollicité auprès de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Vaucluse, la prise en charge selon la législation sur les risques professionnels d'une hernie discale droite inscrite sur le tableau n°98 des affections chroniques du rachis lombaire provoquées par la manutention manuelle de charges lourdes.

Son état a été consolidé le 24 avril 2018 avec des séquelles d'un lombo-sciatique droite sur hernie L4 L5 responsable d'une impotence fonctionnelle légère et des douleurs résiduelles.

Par décision du 12 juillet 2018, la caisse primaire d'assurance maladie de Vaucluse lui a reconnu un taux d'incapacité permanente partielle de 4%.

Par requête du 21 juillet 2018, M. [J] a saisi le tribunal du contentieux de l'incapacité de Marseille, considérant que son incapacité n'avait pas été correctement appréciée.

Par jugement du 1er février 2021, notifié le 9 février suivant, après consultation confiée au docteur [K], le tribunal judiciaire de Marseille ayant repris l'instance, a déclaré son recours recevable, a fait droit à sa demande et dit que le taux d'IPP résultant de la maladie professionnelle dont il a été victime le 6 avril 2016 est porté à 7%, a annulé la décision de la CPAM de Vaucluse du 12 juillet 2018 et l'a condamnée aux dépens.

Par déclaration au greffe de la cour du 8 mars 2021, l'organisme de sécurité sociale a interjeté appel.

A l'audience du 3 mars 2022, la caisse primaire d'assurance maladie de Vaucluse se réfère aux conclusions transmises au greffe de la cour par mail le 2 mars 2022 et demande de :

- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Marseille le 1er février 2021,

- avant dire droit nommer un expert médical judiciaire pour déterminer le taux d'IPP dont M. [J] est atteint des suites de sa maladie professionnelle du 6 avril 2016 à la date impartie du 24 avril 2018, date de consolidation des séquelles.

Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir que le docteur [K], médecin consultant désigné en première instance, a préconisé un taux d'IPP à 5%, que son avis était clair, argumenté et dépourvu d'ambiguïté, et que le tribunal judiciaire a surévalué le taux d'IPP en le portant à 7% sans pour autant justifier médicalement sa décision. Elle ajoute que compte tenu des divergences médicales subsistant dans ce dossier, il convient de nommer un expert judiciaire aux fins de déterminer le taux d'IPP dont M. [J] est atteint des suites de sa maladie professionnelle du 6 avril 2016 à la date impartie, soit le 24 avril 2018, date de consolidation des séquelles.

M. [J] se réfère à ses conclusions transmises par RPVA le 1er mars 2022, par la voix de son conseil, Maître [O] [R], et demande de confirmer le jugement entrepris, de rejeter la demande d'expertise et de condamner la CPAM de Vaucluse au paiement d'une somme de 1.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions, il fait valoir à titre principal que l'appelante n'a formulé aucune demande d'expertise judiciaire en première instance, et s'agissant d'une nouvelle demande au sens de l'article 564 du code de procédure civile, il convient de la déclarer irrecevable. Il considère que cette demande ne tend en aucun cas aux mêmes fins que celle soumise au premier juge, qui consistait à dire que le taux retenu par son médecin-conseil était correct.

A titre subsidiaire, il fait valoir que le juge du fond a estimé dans le cadre de son pouvoir d'appréciation souverain que nonobstant la consultation du docteur [K], son taux devait être porté à 7% et que la consultation est un élément d'appréciation pouvant être confirmé ou infirmé par tout moyen. Il soutient que le barème indicatif des maladies professionnelles ne prévoit pas l'évaluation de cette affection, seul le barème des accidents du travail prévoit en cas de persistance de douleurs et une gêne fonctionnelle, un taux compris entre 5 et 15, de sorte que le taux retenu de 7% se situe dans la fourchette basse du barème indicatif et que dès lors qu'aucun manquement ou irrégularité n'est démontré par l'appelante au soutien de sa demande celle-ci apparaît injustifiée.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé du litige. L'affaire a été mise au délibéré par mise à disposition au greffe, la date fixée ayant été communiquée aux parties présentes.

MOTIFS DE LA DECISION

Aux termes de l'article L.434-2 du code de la sécurité sociale, le taux de l'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d'un barème indicatif d'invalidité.

L'article R.434-32 du même code prévoit qu'au vu de tous les renseignements recueillis, la caisse primaire se prononce sur l'existence d'une incapacité permanente et, le cas échéant, sur le taux de celle-ci et sur le montant de la rente due à la victime ou à ses ayants droit.

Les barèmes indicatifs d'invalidité dont il est tenu compte pour la détermination du taux d'incapacité permanente d'une part en matière d'accidents du travail et d'autre part en matière de maladies professionnelles sont annexés au présent livre. Lorsque ce dernier barème ne comporte pas de référence à la lésion considérée, il est fait application du barème indicatif d'invalidité en matière d'accidents du travail.

Les annexes I et II au code de la sécurité sociale prises en application de cet article définissent les barèmes indicatifs d'invalidité applicables en matière d'accidents du travail et de maladie professionnelle et rappellent que le barème n'a qu'un caractère indicatif. Les taux d'incapacité proposés sont des taux moyens, et le médecin chargé de l'évaluation garde, lorsqu'il se trouve devant un cas dont le caractère lui paraît particulier, l'entière liberté de s'écarter des chiffres du barème ; il doit alors exposer clairement les raisons qui l'y ont conduit.

[Ce] barème indicatif a pour but de fournir les bases d'estimation du préjudice consécutif aux séquelles des accidents du travail et, éventuellement, des maladies professionnelles dans le cadre de l'article L. 434-2 applicable aux salariés du régime général et du régime agricole. Il ne saurait se référer en aucune manière aux règles d'évaluation suivies par les tribunaux dans l'appréciation des dommages au titre du droit commun.

Le taux d'incapacité permanente partielle doit s'apprécier à la date de consolidation du 24 avril 2018 et les situations postérieures ne peuvent être prises en considération.

Seules les séquelles résultant des lésions consécutives à l'accident du travail pris en charge par la caisse primaire doivent être prises en compte pour l'évaluation du taux d'incapacité permanente attribué à la victime en application de l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale.

En l'espèce, il est constant que le médecin conseil de la caisse a fixé le taux d'incapacité permanente partielle de M. [J] à 4% dont 0% pour le taux professionnel.

Aucune des parties ne conteste que le docteur [K], consulté en première instance en qualité d'expert, le 19 janvier 2021, s'est déterminé en fonction du barème applicable en appréciant in concreto la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle et a fixé à 5 % son taux d'IPP, compte tenu des séquelles de la lombosciatique droite sur hernie en L4 L5 avec impotence fonctionnelle légère et des douleurs résiduelles.

L'article 3-2 du barème indicatif d'invalidité relatif au rachis dorso-lombaire prévoit qu'en cas de persistance de douleurs notamment et de gêne fonctionnelle (qu'il y ait ou non séquelles de fracture), le taux d'incapacité est fixé entre :

- 5 et 15 si elles sont discrètes,

- 15 et 25 si elles sont importantes,

- entre 25 et 40 s'il s'agit de très importantes séquelles fonctionnelles et anatomiques.

Il s'en suit qu'en retenant une impotence fonctionnelle légère et des douleurs résiduelles, il ne pouvait être retenu un taux inférieur à 5%.

La caisse reprend dans ses conclusions l'argumentaire médical rédigé par son médecin conseil en indiquant que le taux d'incapacité de 4% est motivé par l'absence d'aggravation suite à la rechute de l'accident du travail initial, l'absence de traitement médicamenteux ou par kinésithérapie et par le fait que l'état clinique de la victime lui a permis de continuer son activité professionnelle.

Cependant, rien dans l'argumentaire médical ne faisant référence aux douleurs et à la gène fonctionnelle de la victime permettant d'apprécier le taux d'incapacité au regard du barème d'invalidité, l'appréciation de l'expert n'est pas sérieusement contredite par le service médical de la caisse.

Les premiers juges ont fixé le taux d'incapacité à 7% au regard des pièces du dossier et des échanges de l'audience sans aucune précision sur ce qui a spécifiquement motivé l'augmentation de deux points de l'évaluation faite du taux par rapport à celle de l'expert consulté.

C'est en vain que M. [J] produit l'analyse médico-légale du docteur [D] en date du 14 février 2019 selon laquelle la persistance de douleurs notamment nocturnes avec restriction de la médecine du travail pour le port de charge et un signe de souffrance radiculaire avec un lasègue à 30° lui permettent d'évaluer le taux d'incapacité entre 10 et 12%. En effet, l'analyse antérieure de deux ans à la consultation de l'expert a pu être soumise à celui-ci et les éléments pris en compte sont identiques à ceux pris en compte lors de la consultation sous les termes de gène fonctionnelle légère et douleurs résiduelles de sorte qu'il n'est pas démontré que l'expert a omis de prendre en compte un quelconque élément dans son appréciation du taux.

Il s'en suit que la fixation du taux d'incapacité à 7% par les premiers juges n'est pas justifiée et le jugement sera infirmé.

En outre, la demande d'expertise présentée par la caisse ne saurait être qualifiée de prétention nouvelle dès lors qu'elle tend à faire fixer le taux d'incapacité permanente de la victime, objet du litige ayant donné lieu au jugement déféré. La fin de non recevoir soulevée par la partie intimée sera rejetée.

Néanmoins, aucune véritable divergence médicale susceptible de rendre nécessaire une expertise n'est établie, de sorte que sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle mesure d'instruction, le taux fixé par l'expert consulté en première instance, conforme au barème, clair, dépourvu d'ambiguïté et non sérieusement contredit par les parties, sera entériné.

M. [J] succombant à l'instance sera condamné au paiement des dépens de l'appel en vertu de l'article 696 du CPC.

En outre, il sera débouté de sa demande en frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement par décision contradictoire,

Infirme le jugement rendu le 1er février 2021 par le tribunal judiciaire de Marseille en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Déclare recevable mais mal fondée la demande d'expertise présentée par la caisse,

Fixe le taux d'incapacité permanente résultant de la maladie professionnelle dont est atteint M. [J] le 6 avril 2016 à 5%,

Déboute M. [J] de sa demande en frais irrépétibles,

Condamne M. [J] au paiement des éventuels dépens de l'appel.

Le Greffier La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8
Numéro d'arrêt : 21/03628
Date de la décision : 06/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-06;21.03628 ?
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