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06/05/2022 | FRANCE | N°20/12082

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-7, 06 mai 2022, 20/12082


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-7



ARRÊT AU FOND

DU 06 MAI 2022



N° 2022/98













Rôle N° RG 20/12082 - N° Portalis DBVB-V-B7E-BGTOJ







[J] [V]





C/



S.A.S. CAPGEMINI DEMS





















Copie exécutoire délivrée

le : 20 mai 2022

à :

AARPI ROYERE

SELARL RODET MIREILLE ASSOCIES











Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage d'AIX-EN-PROVENCE en date du 09 Novembre 2020 enregistré au répertoire général sous le n° 17/00073.





APPELANT



Monsieur [J] [V], demeurant [Adresse 2]



représenté par Me Catherine MEYER-ROYERE de l'AARPI ROYERE, av...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-7

ARRÊT AU FOND

DU 06 MAI 2022

N° 2022/98

Rôle N° RG 20/12082 - N° Portalis DBVB-V-B7E-BGTOJ

[J] [V]

C/

S.A.S. CAPGEMINI DEMS

Copie exécutoire délivrée

le : 20 mai 2022

à :

AARPI ROYERE

SELARL RODET MIREILLE ASSOCIES

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage d'AIX-EN-PROVENCE en date du 09 Novembre 2020 enregistré au répertoire général sous le n° 17/00073.

APPELANT

Monsieur [J] [V], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Catherine MEYER-ROYERE de l'AARPI ROYERE, avocat au barreau de TOULON

INTIMEE

S.A.S. CAPGEMINI DEMS, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié es qualités audit siège sis [Adresse 1]

représentée par Me Mireille RODET de la SELARL RODET MIREILLE ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me Frédéric ZUNZ de la SELEURL MONTECRISTO, avocat au barreau de PARIS substituée par Me Fanny DE COMBAUD, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 14 Janvier 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Mme Marina ALBERTI, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Françoise BEL, Président de chambre

Mme Marina ALBERTI, Conseiller

Monsieur Yann CATTIN, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Agnès BAYLE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Mai 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Mai 2022,

Signé par Madame Françoise BEL, Président de chambre et Mme Agnès BAYLE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Faits, procédure, prétentions et moyens des parties:

M. [J] [V] a été embauché selon contrat à durée du 8 décembre 1997 par la société Euriware en qualité de programmeur avec reprise d'ancienneté au 1er février 1993. Au dernier état de la relation contractuelle il occupait les fonctions de consultant manager cadre, position 3.1, coefficient 170 et la relation de travail était régie par les dispositions de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs conseils, sociétés de conseils.

Le salarié a été placé en longue maladie à compter du 23 novembre 2009. Lors de la visite médicale de reprise du 15 avril 2015 il a été déclaré inapte à tous les postes de l'entreprise.

Le salarié a été convoqué pour un entretien préalable de licenciement fixé au 16 juillet 2015.

Par LRAR du 21 juillet 2015, l'employeur a notifié au salarié son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Par acte du 29 janvier 2016, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence à l'encontre de la société Sogeti High Tech venant aux droits de la société Euriware, devenue depuis la Sas Capgemini Dems, pour contester son licenciement.

Par jugement de départage en date du 9 novembre 2020, cette juridiction a dit et jugé que le licenciement contesté repose sur une cause réelle et sérieuse, a rejeté les demandes du salarié et condamné ce dernier aux dépens de l'instance, rejetant le surplus des demandes.

Le jugement a considéré que l'employeur a satisfait à son obligation de recherche de reclassement au vu des échanges téléphoniques attestés par le médecin du travail et des mails adressés aux différentes entités du groupe Capgemini ayant donné lieu à 17 réponses.

Le 7 décembre 2020, le salarié a interjeté appel du jugement l'ayant débouté de ses demandes et condamné à des frais irrépétibles et aux dépens.

Vu les dernières conclusions notifiées et déposés le 17 novembre 2021 par le salarié tendant à voir la cour :

Réformer le jugement critiqué,

Dire et juger que l'employeur était informé du statut de handicapé,

Dire que l'accord en faveur de l'emploi des personnes en situation de handicap était applicable à l'espèce,

Dire et juger que la mission handicap aurait du être proposée au salarié en vue de son reclassement,

Dire et juger que l'employeur n'a pas effectué une recherche de reclassement loyale et a violé son obligation de reclassement

Dire et juger que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse,

En conséquence

Condamner l'employeur à lui payer les sommes de :

- 48 684 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 12 171 euros ainsi que les congés payés afférents,(indemnité de préavis)

Débouter l'employeur de toutes ses demandes, fins et conclusions

Condamner l'employeur à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens d'instance.

Il conclut à une recherche de reclassement déloyale dans la mesure où l'employeur bénéficiait au sein du groupe, d'un service 'mission handicap' chargé d'animer et coordonner l'insertion professionnelle de personnes handicapées, que ce service n'a jamais été contacté par l'employeur bien que ce dernier soit informé du handicap du salarié et de sa catégorie d'invalidité.

Il ajoute que les curriculum vitae transmis aux autres entités du groupe pour recherche de reclassement n'étaient pas à jour et soutient que l'employeur n'aurait jamais fait droit à sa demande de bilan de compétence.

Vu les conclusions notifiées et déposées le 8 novembre 2021 par l'employeur tendant à voir la cour:

A titre principal,

Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que le licenciement du salarié est fondé sur une cause réelle et sérieuse, et en ce qu'il l'a débouté de l'intégralité de ses demandes afférentes à la rupture du contrat de travail,

En tout état de cause,

Condamner le salarié au versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner le salarié aux entiers dépens.

Il soutient avoir satisfait à ses obligations de recherche de reclassement en justifiant de différents échanges avec le médecin du travail pour connaître des aménagements possibles ou des postes à proposer compte tenu de l'état de santé du salarié, et en produisant les mails adressés aux différentes entités du groupe et les réponses engendrées, certains postes disponibles ne s'avérant pas compatibles avec les compétences de l'intéressé ou son état de santé. Il argue de curriculum vitae envoyés correspondant au profil et à la carrière du salarié.

Il conteste avoir eu connaissance du statut de handicapé du salarié, à défaut de quelconque mention de cet ordre par le médecin du travail et au regard d'attestations produites aux débats, le défaut de saisine de la mission handicap ne pouvant dès lors lui être reproché. Quant au bilan de compétence demandé par le salarié, il indique produire des échanges de mails établissant qu'il a entamé les démarches et qu'à défaut de réponse de l'intéressé, il a abandonné.

Pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties la cour renvoie à leurs écritures précitées.

Motifs

Selon l'article L. 1226-2 du code du travail applicable à l'espèce :' lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à d'une maladie ou d'un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.

Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise.

L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin, par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail.'

Il appartient à l'employeur de justifier des démarches précises et concrètes qu'il a accomplies pour parvenir au reclassement, au sein de l'entreprise d'abord puis, lorsque celle-ci appartient à un groupe, auprès des autres sociétés du groupe, étant rappelé que le groupe s'entend des entreprises dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel. Cette recherche doit être réelle, sérieuse et loyale et le refus du salarié d'un poste de reclassement n'implique pas à lui seul le respect par l'employeur de son obligation de reclassement et ne constitue pas en soi une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Le point de départ de l'obligation de reclassement est l'avis d'inaptitude définitif émis par le médecin du travail suite à la visite de reprise organisée par l'employeur ou initiée par le salarié qui en avise l'employeur.

En l'espèce, le salarié a été déclaré inapte à la suite d' une visite médicale unique du 15 avril 2015 qui a aboutit aux conclusions suivantes selon la fiche d'aptitude médicale du 17 juin 2015 :' inapte à tous les postes de l'entreprise, procédure d'inaptitude faite en une seule visite (R 4624-31 du code du travail) en raison du danger immédiat pour la santé et la sécurité du salarié'

Le salarié soutient que l'employeur a manqué à son obligation de reclassement au motif qu'aucune offre ne lui aurait été faite alors que cette société fait partie d'un groupe très important.

Ainsi que déjà constaté par le premier juge, l'employeur sur lequel pèse la charge de la preuve de l'obligation de reclassement, justifie par un courrier du 24 janvier 2017 du médecin du travail, de plusieurs échanges téléphoniques avec le service Ressources Humaines pour rechercher des solutions d'aménagements ou de retour à l'emploi pour ce salarié compte tenu de son état de santé, dans la mesure où les déplacements, les trajets domicile-travail et la station assise prolongée lui étaient fortement déconseillés.

Il justifie également d'une douzaine de courriels envoyés le 24 juin 2015 à différentes sociétés du groupe pour recherche de reclassement, avec en retour des réponses négatives, établissant ainsi les recherches de reclassement effectuées.

Le salarié invoque également l'absence de saisine par l'employeur du service 'mission handicap' existant au sein du groupe, qu'il aurait dû contacter pour toute aide au reclassement, compte tenu de son handicap, l'employeur répliquant avoir ignoré la situation de handicap de l'appelant.

Or, de première part, selon les dispositions en vigueur, aucun caractère impératif de saisine de la mission handicap ne pèse sur l'employeur.

Ensuite, le salarié produit aux débats les documents concernant la reconnaissance de son statut de travailleur handicapé du 18 mars 2013 au 17 mars 2018 et la pension qu'il perçoit, ainsi que deux mails échangés sur ce statut avec des salariés de la société, et une attestation de M. [L] [M], délégué syndical, en date du 1er avril 2021 relatif à une réunion au domicile de l'intéressé en date du 7 décembre 2012 pour discuter de ses problèmes de santé et sa situation de handicap, l'attestant s'engageant à cette occasion de prévenir les responsables de la société.

Pour autant, il n'est aucunement justifié que le salarié a informé son employeur de sa situation de handicap et de son statut ou de sa reconnaissance de travailleur handicapé, de son degré d'invalidité, de la durée de cette invalidité.

Ni la fiche d'aptitude médicale du médecin du travail en date du 17 juin 2015, ni le courrier adressé à l'employeur en date du 24 janvier 2017, ne mentionnent un quelconque handicap ou statut d'handicapé présenté par le salarié. Enfin il est produit aux débats les attestations de trois salariés aux ressources humaines, notant que l'appelant n'a jamais effectué de déclaration auprès de son employeur concernant son handicap.

S'agissant de la rente d'invalidité versée par l'organisme de prévoyance, le salarié produit aux débats un échange de mails datant d'avril 2013 avec Mme [T] responsable de l'administration du personnel au sein de l'entreprise qui lui demande de lui adresser le courrier de notification de cette invalidité pour l'aider dans le calcul de cette rente, et des échanges en janvier 2015 pour le maintien d'une garantie santé dont bénéficie le salarié liée à cette rente. S'il y a bien eu une rente d'invalidité versée par l'organisme de prévoyance, les éléments produits ne caractérisent pas une notification à la société d'un statut particulier justifiant de recourir pour son reclassement à la mission handicap.

Enfin le salarié prétend que le curriculum vitae communiqué lors des recherches de reclassement n'était pas à jour sans pour autant établir cette allégation ni justifier du préjudice que cela pouvait engendrer, compte tenu notamment des emplois exercés mentionnés et de la situation médicale de l'intéressé.

Il allègue également d'une demande de bilan de compétence auquel l'employeur n'aurait pas donné suite. L'employeur justifie d'un mail et d'un devis concernant ce bilan de compétence auxquels le salarié n'a pas répondu.

Il résulte des éléments précités que l'employeur n'a pas méconnu les exigences d'une recherche loyale et sérieuse dans son obligation de reclassement du salarié.

Par ces motifs

La cour,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [J] [V] de toutes ses demandes,

Y ajoutant,

Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [J] [V] à payer à la société Capgemini Dems la somme de 2 000 euros,

Condamne M. [J] [V] aux dépens d'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-7
Numéro d'arrêt : 20/12082
Date de la décision : 06/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-06;20.12082 ?
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