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05/05/2022 | FRANCE | N°18/14708

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-4, 05 mai 2022, 18/14708


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-4



ARRÊT AU FOND

DU 05 MAI 2022



N° 2022/

FB/FP-D











Rôle N° RG 18/14708 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDBHB







[N] [Y]





C/



SASU I T P

























Copie exécutoire délivrée

le :

05 MAI 2022

à :

Me Olivia VORAZ, avocat au barreau de MARSEILLE





Me Jean-c

laude PERIE, avocat au barreau de MARSEILLE























Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de MARTIGUES en date du 06 Août 2018 enregistré(e) au répertoire général sous le n° F16/00174.





APPELANT



Monsieur [N] [Y], demeurant [Adresse ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-4

ARRÊT AU FOND

DU 05 MAI 2022

N° 2022/

FB/FP-D

Rôle N° RG 18/14708 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDBHB

[N] [Y]

C/

SASU I T P

Copie exécutoire délivrée

le :

05 MAI 2022

à :

Me Olivia VORAZ, avocat au barreau de MARSEILLE

Me Jean-claude PERIE, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de MARTIGUES en date du 06 Août 2018 enregistré(e) au répertoire général sous le n° F16/00174.

APPELANT

Monsieur [N] [Y], demeurant [Adresse 3] - [Localité 1]

représenté par Me Olivia VORAZ, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

Société ITP (nom Commercial INTER TRANSIT PHARMA)

, demeurant [Adresse 4] - [Localité 2]

représentée par Me Jean-claude PERIE, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Février 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre

Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller

Madame Catherine MAILHES, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Françoise PARADIS-DEISS.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 05 Mai 2022.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 05 Mai 2022

Signé par Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre et Madame Françoise PARADIS-DEISS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

M. [Y] (le salarié) a été engagé par la SAS Inter Transit Pharma (la société) par contrat à durée déterminée au motif d'un surcroît temporaire d'activité du 20 juin au 20 juillet 2011, prorogé par avenant du 18 juillet 2011, jusqu'au 31 octobre 2011, en qualité d'agent manutentionnaire, statut ouvrier, groupe 2, coefficient 110M.

Par avenant du 31 octobre 2011 la relation de travail s'est poursuivie dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée, moyennant une rémunération brute mensuelle de 1560 euros incluant les heures supplémentaires, outre une prime de 13ème mois pour 39 heures hebdomadaires.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective des transports routiers de marchandises.

Le salarié a fait l'objet d'avertissements le 10 janvier 2014 et le 2 septembre 2015.

Le 25 novembre 2015 le salarié a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour faute grave, fixé le 3 décembre 2015 et a fait l'objet d'une mise à pied conservatoire.

Par lettre du 14 décembre 2015, la société lui a notifié son licenciement pour faute en ces termes:

' Par un courrier du 25/11/2015 nous vous avons notifié une mise à pied conservatoire et convoqué à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement, qui s'est tenu le 03/12/2015, lors duquel vous vous êtes présenté accompagné de votre conseiller dont l'identité a été vérifiée.

Nous vous rappelons les motifs pour lesquels vous avez été convoqué et qui vous ont été exposés lors de l'entretien préalable:

Non respect des consignes d'ouverture des cartons au moyen d'un cutter, qui a causé la destruction de 71 bidons. Ces consignes étaient et sont respectées par l'ensemble de vos collègues de travail depuis le mois de septembre 2015.

Vous avez été embauché le 20/06/2011, en qualité de Magasinier - cariste - manutentionnaire.

A ce titre, vous avez pour missions d'assurer les travaux de manutention au sol, avec utilisation d'engins de manutention motorisés, de préparation de chargements de containers ou de camions, d'étiquetage et généralement toute tâche de manutention confiées par sa hiérarchie, relevant de sa qualification.

A plusieurs reprises, nous vous avons rappelé la procédure d'étiquetage qui devait être respectée, et notamment l'interdiction de procéder à l'ouverture des cartons en les découpant par le milieu à l'aide d'un cutter.

Malgré ces différents rappels, le 24 novembre 2015, nous avons constaté que vous aviez encore une fois utilisé un cutter pour ouvrir des cartons contenant 100 bidons d'huile, de marque Castrol .

Il en résulte que pas moins de 71 de ces bidons ont subi une importante détérioration.

Nous ne pouvons tolérer ce comportement, dans la mesure où nous vous avons, à de très nombreuse reprises, rappelé la procédure applicable pour l'ouverture de cartons et le dé-filmage de palettes.

Malgré tout, vous vous obstinez à utiliser un cutter, au mépris de tout bon sens, et de nos instructions.

Votre attitude a entraîné un préjudice important pour l'entreprise à savoir:

- Perte financière

- Retard dans le travail

- Surcharge de travail pour vos collègues qui ont été contraints de reporter le chantier en attente de bidons de remplacement.

- Mécontentement du client

- Risque de sécurité lors de l'empotage des containers.

Au mois de janvier 2014, nous avions été contraints de vous notifier un avertissement pour des faits similaires, puisqu'à l'époque lors de l'étiquetage de bidons d'huile Castrol, et bien que nous vous avions rappelé l'interdiction d'utiliser un cutter, vous aviez fait fi de cette consigne.

Dès lors le bidons avaient été découpés, et vous les aviez, malgré tout, remis en cartons, et sur palettes.

Nous vous avions, ainsi, sanctionné en raison de votre comportement fautif, à savoir votre absence de respect des consignes, que nous ne pouvions tolérer.

Malgré cet avertissement, vous n'avez pas modifié votre comportement, et continuez de faire preuve d'une insubordination manifeste en refusant de vous conformer aux instructions qui vous sont données, ce que nous ne pouvons tolérer.

Il s'agit d'un grave manquement à votre contrat de travail.

En outre, cet incident s'inscrit dans un contexte d'attitude désinvolte dont vous faites preuve.

En effet, nous avons récemment été contraints de vous notifier un avertissement, en raison des nombreux manquements à votre contrat de travail, en termes de sécurité.

Nous ne pouvons que regretter que vous n'ayez pas pris la mesure des griefs qui vous été reprochés, et que vous n'ayez absolument pas modifié votre comportement,

Lors de l'entretien préalable, vous avez reconnu avoir ouvert les caltons à l'aide d'un cutter, vous contentant d'indiquer que vous n'étiez pas informés des consignes. Toutefois, en l'état des sanctions notifiées, vous étiez déjà averti sur ce point.

Ainsi, vous ne pouvez soutenir que les consignes ne vous auraient pas été clairement expliquées.

Dès lors l'entretien préalable qui s'est tenu ne nous a pas permis de modifier notre appréciation des faits.

Votre attitude est fortement préjudiciable à notre entreprise, dans la mesure où votre comportement nuit à l'image de notre société, engendre un préjudice commercial important, ce que nous ne pouvons tolérer.

Cette conduite met en cause la bonne marche de l'entreprise, et en conséquence, nous avons pris la décision de vous licencier pour faute simple en raison de votre comportement inacceptable'.

Le salarié a saisi le conseil de Prud'hommes de Martigues le 29 février 2016 d'une demande d'annulation des avertissements, de dommages et intérêts subséquents, d'une contestation du licenciement, de demandes subséquentes.

Par jugement du 6 août 2008, le juge départiteur du conseil de prud'hommes de Martigues a:

- annulé les avertissements en date du 10 janvier 2014 et du 02 septembre 2015,

- dit que le licenciement de M. [N] [Y] est justifié par la faute simple du salarié,

- débouté M. [N] [Y] de ses demandes de dommages et intérêts,

- condamné la société ITP à supporter les dépens de l'instance et à payer à M. [N] [Y] la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- rappelé qu'en application de l'article R 1454-28 du code du travail, l'exécution provisoire est de droit dans la limite maximum de 9 mois de salaire calculés sur la moyenne des 3 derniers mois de salaire pour les sommes allouées à titre de rémunération (rappel de salaire ou accessoires du salaire), d'indemnités de congés payés, de préavis, de licenciement, d'indemnité spéciale de licenciement en cas d'inaptitude médicale et d'indemnité de fin de contrat ou de fin de mission.

Le salarié a interjeté appel du jugement par déclaration du 11 septembre 2018 énonçant :

' Objet/Portée de l'appel : L'appel partiel interjeté porte sur la critique des chefs de jugement suivants :

-Dit que le licenciement de M. [N] [Y] est justifié par la faute simple du salarié

-Déboute M. [N] [Y] de ses demandes de dommages et intérêts'

PRÉTENTIONS ET MOYENS

Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 10 décembre 2018 M. [Y], appelant, demande de :

CONFIRMER partiellement et réformer pour le surplus la décision rendue par la juridiction de 1ère instance.

Sur l'annulation des avertissements, il conviendra de confirmer la décision de 1ère instance et de:

CONSTATER que l'employeur ne rapporte aucune preuve des faits allégués à l'appui de

l'avertissement du 10.01.2014.

CONSTATER que l'employeur ne rapporte aucune preuve des faits allégués.

PRONONCER l'annulation de l'avertissement du 10.01.2014.

PRONONCER l'annulation de l'avertissement du 2.09. 2015.

CONDAMNER l'employeur à verser au salarié la somme de 1.000,00 € pour usage abusif du pouvoir disciplinaire.

Sur le caractère abusif du licenciement intervenu, il conviendra de réformer la décision de 1ère instance et de :

CONSTATER le caractère parfaitement abusif du licenciement prononcé, le doute subsistant au profit du salarié.

CONDAMNER l'employeur à verser au salarié la somme de 14.720,00 €uros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif.

En tout état de cause,

CONDAMNER l'employeur à verser à Monsieur [N] [Y]:

- une somme de 1.000,00 € relatif à la décision rendue par la juridiction de 1ère instance.

- une somme de 2.500,00 € relatif à la présente instance devant la Cour d'Appel.

ORDONNER les intérêts légaux à compter du jour de la demande en justice et leur

capitalisation.

CONDAMNER aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 28 février 2019 la SASU Inter Transit Pharma, intimée, demande de :

REFORMER le jugement en ce qu'il a annulé les avertissements du 10 janvier 2014 et du 2 septembre 2015.

CONFIRMER le jugement, en ce qu'il a considéré que le licenciement était justifié.

Et,

En conséquence,

DEBOUTER Monsieur [Y] de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions

LE CONDAMNER au versement de 1500 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile

LE CONDAMNER aux entiers dépens

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

L'ordonnance de clôture a été rendue le 11 janvier 2021.

Par arrêt avant-dire droit du 2 décembre 2021 la cour a ordonné la réouverture des débats sans révocation de l'ordonnance de clôture et renvoyé l'affaire à l'audience de plaidoiries du 9 février 2022.

SUR CE :

Sur la demande d'annulation des avertissements et la demande de dommages et intérêts subséquente

Aux termes des articles L.1333-1 et L.1333-2 du code du travail, le juge du contrat de travail peut, au vu des éléments que doit fournir l'employeur et de ceux que peut fournir le salarié, annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

La réparation d'un préjudice résultant d'un manquement de l'employeur suppose que le salarié qui s'en prétend victime produise en justice les éléments de nature à établir d'une part la réalité du manquement et d'autre part l'existence et l'étendue du préjudice en résultant.

L'article L.1471-1 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n°2013-504 du 14 juin 2013 dispose que toute action portant sur l'exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit.

1° l'avertissement du 10 janvier 2014

En l'espèce le salarié demande l'annulation de l'avertissement qui lui a été notifié le 10 janvier 2014 et qui repose sur des faits portant sur le non respect des instructions pour la pose d'étiquettes en ce qu'il a le 6 janvier 2014 à nouveau procédé sans précaution en dégradant la marchandise, en l'occurrence usé d'un cutter pour ouvrir les cartons occasionnant des dommages sur des bidons d'huile Castrol, puis rangé ces cartons sur palettes dans l'entrepôt en dépit de coulages, sans avertir le chef de quai.

Il fait valoir que le grief procède d'une appréciation subjective et que la preuve n'est pas rapportée par la société qu'il avait connaissance de consignes proscrivant l'utilisation d'un cutter et des dégâts allégués.

La société oppose une fin de non-recevoir tirée de la prescription, et soutient sur le fond que la sanction est justifiée.

La cour relève que le salarié a saisi la juridiction prud'homale le 29 février 2016 d'une action en contestation de l'avertissement du 10 janvier 2014, soit plus de deux ans après sa notification de sorte que la prescription était acquise à cette date.

Il convient dès lors de faire droit à la fin de non recevoir tirée de la prescription.

En conséquence, la cour, en infirmant le jugement déféré, dit que le salarié est irrecevable en sa demande d'annulation de l'avertissement du 10 janvier 2014.

2° l'avertissement du 2 septembre 2015

En l'espèce le salarié demande l'annulation de l'avertissement qui lui a été notifié le 2 septembre 2015 et qui repose sur des faits de dégradation du bardage de façade au niveau du quai n°1 en tentant volontairement de forcer la fermeture de la porte d'un container le 30 juillet 2015 et ce dans un contexte de manquements généralisés aux règles de sécurité (vitesse excessive dans la conduite du chariot élévateur, non port du gilet jaune) et aux consignes d'utilisation des outils de manutention.

Le salarié conteste les faits, y compris en ce qui concerne la reconnaissance que lui prête la société lorsqu'elle l'a questionné après avoir constaté les dégâts le 17 août 2015 et fait valoir que non seulement la société ne rapporte aucune preuve du grief énoncé mais elle lui avait soumis un cliché photographique, qui au demeurant ne démontrait pas son implication, issu d'un système de vidéo-surveillance dont il n'avait pas été préalablement informé.

La société conteste la demande en soutenant que la sanction est justifiée, que le salarié a reconnu les faits lors de 'l'entretien préalable' et qu'il tente de déplacer le débats sur la vidéo-surveillance sur laquelle ne reposait pas l'imputation des faits et dont au demeurant il avait été informé.

A l'analyse des pièces du dossier, force est de constater que la société ne produit aucun élément de nature à établir la matérialité des faits énoncés dans l'avertissement.

L'avertissement n'étant pas justifié, la cour confirme le jugement déféré en ce qu'il a annulé l'avertissement du 2 septembre 2015.

3° la demande de dommages et intérêts

En l'espèce le salarié demande réparation du préjudice nécessairement causé par l'usage abusif du pouvoir disciplinaire en ce qu'il a fait l'objet de deux sanctions non fondées sans que la société n'ait pris en compte ses explications dans les courriers de contestations qu'il lui a adressé.

Il résulte des énonciations précédentes qu'un seul avertissement nul a été notifié au salarié, ce dont il résulte que l'abus allégué n'est pas établi.

Au surplus, le salarié ne produit aucun élément de nature à justifier l'étendue, ni même l'existence d'un préjudice résultant du prononcé de cet avertissement nul.

En conséquence, la cour dit que la demande n'est pas fondée de sorte que le jugement déféré est confirmé en ce qu'il l'a rejetée.

Sur le licenciement

Aux termes de l'article L.1232-1 du code du travail, le licenciement pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse.

En application de l'article L.1235-1 du code du travail, il revient à la cour d'apprécier, au vu des éléments apportés aux débats par l'une et l'autre parties, le caractère réel et sérieux de la cause du licenciement et ce telle qu'elle résulte des motifs énoncés dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige.

Les motifs de faute doivent contenir des griefs précis, objectifs et matériellement vérifiables.

En l'espèce il ressort de la lettre de licenciement dont les termes ont été restitués ci-dessus que la société reproche au salarié d'avoir détérioré 71 bidons d'huile Castrol en ouvrant les cartons avec un cutter en violation des consignes plusieurs fois rappelées et malgré un avertissement notifié en janvier 2014 pour des faits similaires, ce qui constitue une insubordination manifeste de se conformer aux instructions données, cette faute ayant occasionné un important préjudice à l'entreprise et ce, dans un contexte général de désinvolture dans l'exécution de son contrat de travail.

A l'appui du grief la société produit les attestations de:

- M. [U], responsable d'entrepôt, qui déclare que 'Lors de l'exécution d'étiquetage M. [Y] [N] a bien coupé les cartons Castrol au cutter en atteignant les bidons de lubrifiant donc de nombreux bidons en coulage, le 14.11.2015 vers 16h. Il n'a pas respecté les instructions qui avaient été donné et annoncé à plusieurs reprises : découper les cartons en bordure et non dans son centre';

- M. [O], responsable étiquetage, qui rapporte ' le 24.11 vers 16h M. [Y] lors d'un étiquetage de produit Huile en forme de bidon plastique n'a pas respecté les consignes données et a ainsi crevé 71 bidons. Les consignes étaient de couper les cartons au bord et non plus au milieu';

- M. [E], auxiliaire transit, selon lequel 'Lors de l'étiquetage mis en place le 24.11 vers 16h d'un lot de bidons d'huile 'Castrol', M.[Y] n'a pas suivi les nouvelles instructions mises en place en septembre 2015 et respectées par ses collègues de travail et intérimaires : 'NE PLUS DECOUPER AU CUTTER LES CARTONS EN LEUR MILIEU MAIS SUR LES TROIS BORDS LATÉRAUX'. Cet incident génère la destruction de 71 bidons et nous devons indemniser notre client pour le produit et le préjudice commercial subi'.

La société verse également aux débats une note de service du 10 janvier 2014 intitulée 'Constats et observations générales pour équipe du magasin'dans laquelle elle alertait l'ensemble des salariés des dysfonctionnements constatés dans l'exécution des tâches de chargement/déchargement des marchandises dans l'entrepôt comme dans l'utilisation des matériels en dressant une liste des manquements relevés, des correctifs à apporter et des procédures à respecter.

Le salarié conteste les faits et fait valoir une carence de la société dans l'administration de la preuve tant de l'existence d'une nouvelle procédure d'ouverture des cartons que de la matérialité des faits reprochés.

Il ne verse pour sa part aucun élément aux débats.

A l'analyse des pièces du dossier, la cour relève que bien que ne soit pas produit de consignes écrites portant sur les modalités concrètes de la procédure d'étiquetage et d'ouverture des cartons, la réalité de telles consignes est rapportée par les attestations précises, convergentes et conformes aux exigences de l'article 202 du code de procédure civile, de M. [U], M. [O] et M. [E] sur le découpage des cartons en bordure et non au milieu.

Si l'un des témoins précise que ce procédé résulte de nouvelles instructions données en septembre 2015, dès la note de service circulaire du 10 janvier 2014, la société rappelait notamment qu'il appartient au personnel d''apporter une attention rigoureuse à la manutention de ces marchandises qui nous sont confiées : ...trop de coups de cutter sur les marchandises'. Au surplus le salarié avait été personnellement sanctionné le 14 janvier 2014 pour avoir détérioré des bidons d'huile par l'usage du cutter.

Il s'en suit que le grief d'insubordination, en ce que le salarié a persisté à enfreindre les consignes de l'employeur dans l'exécution de ses tâches, est caractérisé.

Quant à la matérialité de la dégradation de 71 bidons d'huile, elle est établie par les attestations ci-dessus retranscrites de M. [U], M. [O] et M. [E].

Dans ces conditions la cour dit que les faits ainsi établis, caractérisent une violation du salarié des obligations découlant de son contrat de travail, conférant une cause réelle et sérieuse au licenciement.

En conséquence la cour confirme le jugement déféré en ce qu'il a dit le licenciement pour faute justifié et a débouté le salarié de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur les dispositions accessoires

En application de l'article 696 du même code, il échet de mettre les dépens d'appel à la charge du salarié qui succombe à titre principal.

L'issue de l'appel et les circonstances de l'espèce justifient que le salarié contribue aux frais irrépétibles qu'il a contraint la société à exposer en cause d'appel. Il sera en conséquence condamné à lui verser la somme de 700 euros et sera débouté de sa demande à ce titre.

PAR CES MOTIFS

statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire, en dernier ressort après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a annulé l'avertissement du 10 janvier 2014,

Statuant sur le chef infirmé,

Déclare M. [Y] irrecevable en sa demande d'annulation de l'avertissement du 10 janvier 2014,

Confirme le jugement déféré en toutes ses autres dispositions,

Y ajoutant,

Condamne M. [Y] à verser à la SASU InterTransit Pharma la somme de 700 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais d'appel,

Condamne M. [Y] aux dépens d'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-4
Numéro d'arrêt : 18/14708
Date de la décision : 05/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-05;18.14708 ?
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