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28/04/2022 | FRANCE | N°18/14186

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-1, 28 avril 2022, 18/14186


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1



ARRÊT AU FOND

DU 28 AVRIL 2022



N° 2022/153













N° RG 18/14186 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BC7UV







S.A. TRANSPORTS J.H MESGUEN SA

S.A. HELVETIACOMPAGNIE SUISSE D'ASSURANCES





C/



SA MMA IARD

Société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES

SAS STB







Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me Maud DAVAL-GUEDJ



Me Agnès ERMEN

EUX



Me Marc BERNIE









Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Commerce de TARASCON en date du 30 Juillet 2018 enregistré au répertoire général sous le n°2018000385.





APPELANTES



S.A. TRANSPORTS J.H MESGUEN SA, dont le siège ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1

ARRÊT AU FOND

DU 28 AVRIL 2022

N° 2022/153

N° RG 18/14186 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BC7UV

S.A. TRANSPORTS J.H MESGUEN SA

S.A. HELVETIACOMPAGNIE SUISSE D'ASSURANCES

C/

SA MMA IARD

Société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES

SAS STB

Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me Maud DAVAL-GUEDJ

Me Agnès ERMENEUX

Me Marc BERNIE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de TARASCON en date du 30 Juillet 2018 enregistré au répertoire général sous le n°2018000385.

APPELANTES

S.A. TRANSPORTS J.H MESGUEN SA, dont le siège social est sis [Adresse 6]

S.A. HELVETIACOMPAGNIE SUISSE D'ASSURANCES, dont le siège social est sis [Adresse 2]

toutes représentées par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Christophe RAMBAUD, avocat au barreau de LYON, plaidant

INTIMEES

SA MMA IARD, dont le siège social est sis [Adresse 1]

représentée par Me Agnès ERMENEUX de la SCP ERMENEUX-CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Fabrice RENAUDIN, avocat au barreau de MARSEILLE

Société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES, venant aux droits de la société COVEA FLEET, dont le siège social est sis [Adresse 1]

représentée par Me Agnès ERMENEUX de la SCP ERMENEUX-CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Fabrice RENAUDIN, avocat au barreau de MARSEILLE

SAS STB, dont le siège social est sis [Adresse 3]

représentée par Me Marc BERNIE, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 10 Mars 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Monsieur Pierre CALLOCH, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Pierre CALLOCH, Président

Madame Marie-Christine BERQUET, Conseillère

Madame Stéphanie COMBRIE, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. Alain VERNOINE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 Avril 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Avril 2022,

Signé par Monsieur Pierre CALLOCH, Président et M. Alain VERNOINE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

La société GANDON TRANSPORTS a conclu avec la société ALLOGA en novembre 2015 un contrat de transport de médicaments.

Par ordre de transport daté du 17 février 2016, la société GANDON TRANSPORTS a confié à la société TRANSPORTS J.H MESGUEN, ci après société MESGUEN, le transport de 12 palettes de produits pharmaceutiques de l'entrepôt de la société ALLOGA situé à [Localité 5] à la société SOGIPHAR située à [Localité 4]. La société GANDON TRANSPORT a sous traité ce transport à la société VIDIL.

A la livraison intervenue le 19 février 2016, la société SOGIPHAR a refusé 12 palettes au motif que celles ci étaient livrées avec des produits alimentaires, fruits et légumes frais.

La société GANDON TRANSPORTS ayant demandé le retour de la marchandise, celle ci a été livrée le 22 février 2016, le transport étant assuré par la société STB. A réception, la société GANDON TRANSPORTS a émis des réserves concernant les 12 palettes portant notamment sur l'existence de films arrachés, de pieds de palettes cassés, de colis déchirés et éventrés et de l'absence de bandes de garantie. Ces réserves auraient été réitérées par lettre recommandée datée du même jour.

Par acte en date du 17 février 2017, les sociétés MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES, assureurs de la société GANDON TRANSPORTS, ont fait assigner devant le tribunal de commerce de TARASCON la société MESGUEN et son assureur la société HELVETIA COMPAGNIE SUISSE D'ASSURANCES (société HELVETIA) en remboursement des indemnités versées au titre des dommages subis par la marchandise transportée. Les sociétés MESGUEN et HELVETIA ont appelé en garantie la société STB.

Suivant jugement en date du 30 juillet 2018, le tribunal a condamné solidairement la société MESGUEN et la société HELVETIA à verser aux sociétés MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES la somme en principal de 28 672 € 80, outre 3 447 € au titre des frais d'expertise et 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, les parties condamnées étant déboutées de leur appel en garantie dirigé contre la société STB.

Les sociétés MESGUEN et HELVETIA ont interjeté appel de cette décision par déclaration enregistrée au greffe le 29 août 2018.

Par ordonnance en date du 7 février 2022, le conseiller de la mise en état a clôturé l'instruction de l'affaire et l'a renvoyée à l'audience du 10 mars 2022.

A l'appui de leur appel, par conclusions déposées par voie électronique le 9 février 2021, les sociétés MESGUEN et HELVETIA rappellent que la responsabilité de la société MESGUEN est recherchée en sa qualité de commissionnaire de transport. Elle soulève le manquement par la société GANDON TRANSPORT MAYENNE à ses propres obligations de commissionnaire principale, n'ayant pas transmis le cahier des charges la liant à la société ALLOGA à la société MESGUEN. Ils invoquent ensuite le caractère peu lisible de la clause interdisant la sous traitance, qualifiant cette clause de clause de style. Ils indiquent qu'en outre les conditions du transport confié par la société GANDON n'étaient pas précisées et que celle ci ne pouvait ignorer que la société MESGUEN est spécialisée dans le transport de fruits et légumes. Selon eux enfin, le refus de la marchandise par le destinataire n'était pas justifié et ils concluent en conséquence à l'absence de faute personnelle de la société MESGUEN.

Les sociétés MESGUEN et HELVETIA rappellent que la marchandise n'a pas été refusée en raison de l'interdiction de la sous traitance, ni de dommages ou avaries subis par la marchandise. Il n'y aurait en conséquence aucun lien de causalité entre la faute personnelle invoquée et les dommages constatés. Subsidiairement, ils invoquent les dispositions du contrat type de commission de transport qui limite la responsabilité du commissionnaire à 20 € par kilo transporté, ce qui limiterait le montant de la condamnation à la somme de 1 720 €.

Ils soutiennent que les premiers juges n'ont nullement caractérisé l'existence d'une faute délibérée telle que définie par l'article L 133-8 du Code de commerce.

Sur l'appel en garantie dirigée contre la société STB, ils font observer que les désordres sont intervenus lors du transport effectué par celle-ci, rappel étant fait qu'aucun dommage n'a été constaté lors de la livraison du 19 février 2016. Ils contestent que l'action puisse être déclarée forclose en invoquant l'absence de présomption de livraison conforme, la lettre de voiture établie par la société STB n'ayant pas été signée par le destinataire GANDON et n'ayant en conséquence aucune force probante. Ils rappellent en outre que des réserves ont été émises par lettre recommandée datée du 24 février 2016, soit dans les trois jours prévus par l'article L 133-3 du code de commerce et que la société STB a été convoquée à une expertise amiable qui s'est tenue le 3 mars 2016. Ils invoquent enfin la réduction du tiers prévue par l'article 21 du contrat type général en cas de destruction imposée par le donneur d'ordre.

Les sociétés MESGUEN et HELVETIA concluent enfin à la condamnation des sociétés MMA IARD, MMA IARD ASURANCES MUTUELLES et/ou STB au paiement d'une somme de 7 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Les sociétés MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES, par conclusions déposées par voie électronique le 22 novembre 2018, soutiennent que la responsabilité de la société GANDON est engagée en sa qualité de garant de son substitué dès lors qu'il lui a été demandé de ramener la marchandise à l'expéditeur. Elle serait aussi engagée pour faute personnelle dès lors qu'elle a sous traité le transport et n'a pas transmis les consignes concernant l'état du véhicule et ce malgré les instructions portées sur l'ordre de transport. Elles soutiennent que la faute de la société MESGUEN constitue une faute inexcusable au sens de l'article L 133-8 du Code de commerce et que cette faute est bien à l'origine du refus de livraison de la

marchandise. Le montant des dommages serait établi tant par les factures produites aux débats que par le rapport d'expertise amiable. Les sociétés MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES concluent en conséquence à la confirmation de la décision déférée, les appelants étant condamnés à verser une somme de 4 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

La société STB, par conclusions déposées par voie électronique le 24 novembre 2020, soulève la forclusion de l'action en application de l'article L 133-3 du Code de commerce, aucune réserve ne lui ayant été notifiée dans le délai légal. Elle invoque l'absence de bordereau d'envoi de la lettre recommandée datée du 24 février 2016 invoquée par la société MESGUEN ainsi que le caractère imprécis des réserves. Elle demande la confirmation de la décision ayant retenu à son profit la présomption de livraison conforme en l'absence de réserves sur la lettre de voiture et en raison du caractère imprécis des réserves mentionnées dans la lettre du 24 février 2016. Elle fait observer en outre que le sinistre a été déclaré avant qu'elle-même prenne en charge la marchandise et que déjà le destinataire avait exigé la destruction de la marchandise.

La société STB conteste l'existence d'un lien de causalité entre la faute invoquée à son encontre et le dommage, ainsi que le quantum même de ce dernier. Elle invoque à titre subsidiaire la limitation de responsabilité en l'absence de faute intentionnelle et demande à la cour de réduire le montant dû à la somme de 1 318 €. Au principal, elle conclut au terme de ses écritures à la confirmation de la décision et sollicite la condamnation de toute partie succombante à lui verser une somme de 6 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il résulte de la confirmation d'ordre de transport datée du 17 février 2018 que la société TRANSPORTS JH MESGUEN s'est engagée à effectuer le transport de 12 palettes de [Localité 5] à [Localité 4] en respectant les consignes suivantes : fourgon propre, pas d'odeurs et pas d'humidité.

La lettre de voiture signée par le destinataire le 17 février 2016 établit que l'ensemble de la marchandise a été refusé par le destinataire en raison de la présence dans le véhicule de transports de fruits et légumes frais ; la cause de ce refus est confirmée par l'expertise amiable versée aux débats ; c'est ce refus de livraison au destinataire qui est à l'origine du dommage indemnisé par les assurances MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES et il importe dès lors peu de déterminer les conditions dans lesquelles lors du transport de renvoi des marchandises, les palettes transportées ont subi des dommages matériels.

Le fait pour la société TRANSPORTS JH MESGUEN de ne pas avoir respecté l'obligation de fournir un fourgon propre, sans odeurs et sans humidité, et donc ne contenant pas des denrées telles que fruits et légumes frais, constitue une faute délibérée au sens de l'article L 133-8 du Code de commerce, cette société ne pouvant ignorer la nature de la marchandise expressément mentionnée dans l'ordre de transport

et les prescriptions formelles de modalité de transport stipulées dans celui-ci ; la circonstance que le transport a été sous traité par une entreprise tierce, la société VIDIL, est sans effet sur la nature de cette faute, une telles sous traitance étant de manière parfaitement lisible interdite par l'ordre de transport et la société J H MESGUEN ne pouvant dès lors invoquer sa propre violation délibérée d'une stipulation ; c'est dès lors à bon droit que les premiers juges ont condamné la société TRANSPORTS JH MESGUEN à rembourser l'intégralité de l'indemnité versée par les assureurs et dont le montant a été fixé par l'expert amiable après vérification des factures.

L'expertise versée aux débats permet de constater que cette indemnité concerne non pas la totalité des palettes, mais seulement trois d'entre elles dépourvues de bandes de garantie ; en raison de la nature de la marchandise, produits pharmaceutiques, l'ordre de destruction par le donneur d'ordre apparaît justifié pour ces trois palettes et il convient de constater que, de fait, l'indemnité allouée est inférieure aux deux tiers de la marchandise refusée ; la réduction du tiers prévue par l'article 21 du contrat type général ne peut dès lors trouver application, la dite réduction ayant été de fait opérée.

Les sociétés MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES justifient avoir réglé au titre du sinistre la somme de 28 672 € 80 en produisant une quittance subrogative datée du 30 janvier 2017 ; ce montant est conforme à l'estimation effectuée par le cabinet d'expertise CRISTALIS en tenant compte de la valeur de la marchandise après remise ainsi que les frais de tri et de destruction ; il convient dès lors de confirmer la décision en ce qui concerne le montant de la somme due aux assureurs.

Ainsi qu'il a été indiqué plus haut, l'origine du dommage réside dans les conditions du transport effectué par le sous traitant de la société TRANSPORTS JH MESGUEN et ce dommage était déjà réel et certain avant que la société STB n'effectue le transport permettant le retour de la marchandise ; l'appel en garantie formé par la société TRANSPORTS JH MESGUEN a été en conséquence à juste titre jugé non fondé.

Les frais d'expertise doivent être supportés par le transporteur à l'origine des dommages ; la décision sera là encore confirmée.

Les sociétés MESGUEN et HELVETIA succombant en leur appel, elles devront verser aux assureurs intimés et à la société STB la somme de 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

- CONFIRME le jugement du tribunal de commerce de TARASCON en date du 30 juillet 2018 dans l'intégralité de ses dispositions,

Y ajoutant,

- CONDAMNE les sociétés TRANSPORTS J H MESGUEN et HELVETIA COMPAGNIE SUISSE D'ASSURANCES pris ensemble à verser aux sociétés MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES ensembles la somme de 1 500 € et à la société STB la somme de 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

- MET l'intégralité des dépens à la charge des sociétés TRANSPORTS J H MESGUEN et HELVETIA COMPAGNIE SUISSE D'ASSURANCES.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 3-1
Numéro d'arrêt : 18/14186
Date de la décision : 28/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-28;18.14186 ?
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