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28/04/2022 | FRANCE | N°17/16097

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-4, 28 avril 2022, 17/16097


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-4



ARRÊT AU FOND

DU 28 AVRIL 2022



N° 2022/

FB/FP-D











Rôle N° RG 17/16097 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BBDOB







[J] [S]





C/



SARL FONTAINE ROTONDE MIRABEAU





















Copie exécutoire délivrée

le :

28 AVRIL 2022

à :

Me Christian SALORD, avocat au barreau d'AIX-EN-

PROVENCE



Me Michel CABRILLAC, avocat au barreau d'AIX-EN-

PROVENCE











Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage d'AIX-EN-PROVENCE en date du 24 Juillet 2017 enregistré au répertoire général sous le n° F13/01595.





APPELANT



Monsieur ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-4

ARRÊT AU FOND

DU 28 AVRIL 2022

N° 2022/

FB/FP-D

Rôle N° RG 17/16097 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BBDOB

[J] [S]

C/

SARL FONTAINE ROTONDE MIRABEAU

Copie exécutoire délivrée

le :

28 AVRIL 2022

à :

Me Christian SALORD, avocat au barreau d'AIX-EN-

PROVENCE

Me Michel CABRILLAC, avocat au barreau d'AIX-EN-

PROVENCE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage d'AIX-EN-PROVENCE en date du 24 Juillet 2017 enregistré au répertoire général sous le n° F13/01595.

APPELANT

Monsieur [J] [S], demeurant Résidence Le Zola - Bât C2- Chemin Gilles Borel - 13100 AIX EN PROVENCE

représenté par Me Christian SALORD, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

SARL FONTAINE ROTONDE MIRABEAU, demeurant 11 rue Victor Leydet, 2A, place Jeanne d'Arc - 13100 AIX EN PROVENCE

représentée par Me Michel CABRILLAC, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

et par Me Philippe CAPANNI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 07 Février 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre

Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller

Madame Catherine MAILHES, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Françoise PARADIS-DEISS.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 Avril 2022.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Avril 2022,

Signé par Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre et Madame Françoise PARADIS-DEISS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

M. [S] (le salarié) a été engagé le 27 octobre 2003 par la SARL Fontaine Rotonde Mirabeau (la société) par contrat à durée indéterminée en qualité de second de cuisine, cadre autonome, niveau 5, échelon 1 moyennant une rémunération mensuelle brute de 2440 euros.

Par avenant du 24 septembre 2009 il a été nommé chef de cuisine, cadre autonome, niveau 5, échelon 2 moyennant une rémunération brute forfaitaire mensuelle de 3600 euros.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective des hôtels, cafés, restaurants.

La société employait habituellement au moins 11 salariés au moment du licenciement.

Le 21 novembre 2013 le salarié a été convoqué à un entretien préalable à sanction disciplinaire, fixé le 29 novembre 2013 et la société lui a notifié un avertissement le 5 décembre 2013.

Le salarié a été placé en arrêt maladie à compter du 30 novembre 2013.

Lors de la visite de reprise du 11 avril 2014 le médecin du travail l'a déclaré définitivement 'inapte à la reprise à la reprise au poste de chef de cuisine' avec mention 'apte à un autre'.

Le 4 juin 2014 le salarié a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé le 12 juin 2014.

Par lettre du 16 juin 2014 la société lui a notifié son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Le salarié a initialement saisi le conseil de Prud'hommes d'Aix en Provence le 27 décembre 2013 d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail, de demandes subséquentes, d'annulation de l'avertissement du 5 décembre 2013, de rappels de congés payés et de RTT.

Dans le dernier état de ses demandes, le salarié a renoncé à sa demande de résiliation judiciaire, d'annulation de l'avertissement et présenté des demandes tendant à juger le licenciement sans cause réelle et sérieuse, à condamner la société à des dommages et intérêts pour la perte de l'emploi et pour préjudice moral. De son côté la société a demandé la résiliation judiciaire du contrat de travail au torts du salarié.

Par jugement du 24 juillet 2017 le conseil de prud'hommes d'Aix en Provence statuant en départage, a :

'- débouté [J] [S] de sa demande de prononcé de la résiliation judiciaire de son contrat de travail de [J] [S] aux torts exclusifs de la SARL Fontaine Rotonde Mirabeau

- fixé la date de la rupture du contrat de travail de [J] [S] au 16 juin 2014 ;

- débouté [J] [S] de l'intégralité de ses demandes;

- dit n 'y avoir lieu à application de l' article 700 du code de procédure civile;

- dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire de la présente décision.

- condamné [J] [S] aux entiers dépens de la présente instance';

Le salarié a interjeté appel du jugement par déclaration du 21 août 2017 énonçant 'appel total et demande de fixation en collégiale'.

PRÉTENTIONS ET MOYENS

Dans ses dernières conclusions remises au greffe par RPVA le 18 janvier 2022 M. [S], appelant, demande de :

INFIRMER le jugement dont appel, et ce, avec toutes ses conséquences de droit.

CONSTATER le fait que le salarié Monsieur [J] [S] avait renoncé dès le stade du Conseil de Prud'hommes à sa demande de résiliation judiciaire au tort de l'employeur et à l'annulation de l'avertissement pour ne solliciter que les chefs de demandes précités afférents au licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et constater le fait qu'une demande de résiliation du contrat de travail ne peut être demandée que par un salarié à l'encontre de l'employeur et non l'inverse, l'employeur disposant pour sa part du pouvoir disciplinaire lorsque n'étant pas satisfait d'un salarié il est susceptible de lui notifier une sanction allant du simple avertissement au licenciement et en tirer toutes les conséquences de droit.

CONSTATER et en tant que de besoin l'absence totale de tentative de reclassement et/ou l'insuffisance de ce chef

CONSTATER le fait que le licenciement notifié le 16 juin 20 l4 est totalement dépourvu de cause réelle et sérieuse et voir condamner l'employeur la SARL Fontaine Rotonde Mirabeau à verser au salarié Monsieur [J] [S] les sommes suivantes:

- dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse 90.000 €

- dommages et intérêts pour préjudice moral. 10.000€

CONDAMNER l'employeur la SARL Fontaine Rotonde Mirabeau à verser au salarié Monsieur [J] [S] les intérêts au taux légal sur l'ensemble des condamnations à intervenir, et ce à compter de la demande en justice

CONDAMNER l'employeur la SARL Fontaine Rotonde Mirabeau à verser au salarié Monsieur [J] [S] les entiers dépens, ainsi qu'à l'article 700 du CPC 3000 €.

Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 24 mai 2021 la SARL Fontaine Rotonde Mirabeau, intimée, demande de :

CONFIRMER le jugement en ce qu'il déboute M. [S] de l'intégralité de ses demandes tant de sa demande de résiliation judiciaire que de sa demande au titre de manquement à l'obligation de reclassement

REFORMER le jugement en ce qu'il déboute l'employeur de sa demande reconventionnelle

DEBOUTER M [S] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions;

Au principal,

DIRE que la rupture initiée par M. [S] est exclusivement imputable à ce dernier, la résiliation judiciaire doit être prononcée à ses torts exclusifs, toutes conséquence de droit acquises.

Subsidiairement,

CONSTATER que M. [S] a été régulièrement licencié et a été totalement rempli de ses droits;

CONDAMNER M [S] à payer la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 CPC ainsi qu'aux entiers dépens.

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

L'ordonnance de clôture a été rendue le 24 janvier 2022.

SUR CE

Sur la demande de résiliation judiciaire présentée par la société

Il résulte de la combinaison des articles 1184 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 applicable aux contrats conclus avant le 1er octobre 2016 et L.1221-1 du code du travail que le salarié peut demander la résiliation du contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail.

En revanche l'employeur qui dispose du droit de résilier unilatéralement un contrat de travail à durée indéterminée par la voie du licenciement, en respectant les garanties légales, n'est pas recevable, hors les cas où la loi en dispose autrement, à demander la résiliation judiciaire dudit contrat.

Dans le cadre d'une action en résiliation judiciaire à l'initiative du salarié, l'employeur n'est pas non plus recevable à former une demande reconventionnelle visant à faire prononcer la résiliation aux torts du salarié.

Par ailleurs lorsque le contrat de travail est rompu par le licenciement, la demande de résiliation judiciaire présentée postérieurement par l'employeur est sans objet.

En l'espèce la société demande la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts du salarié.

Elle fait valoir que quand bien même le salarié a renoncé à sa demande de résiliation judiciaire, elle maintient la sienne que la cour doit examiner dès lors que la juridiction prud'homale a été saisie d'une demande de résiliation judiciaire par le salarié antérieurement au licenciement.

Le salarié, qui rappelle avoir abandonné sa demande de résiliation judiciaire en cours d'instance devant le conseil de Prud'hommes, fait valoir que cette voie n'est pas ouverte à la société.

La cour constate que le licenciement a été notifié par la société au salarié le 16 juin 2014 et que les seules pièces qui sont en possession de la cour font état d'une demande reconventionnelle de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts du salarié maintenue par la société à l'audience devant le conseil de Prud'hommes du 3 avril 2017.

La circonstance que le salarié avait initialement saisi le conseil de Prud'hommes d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail le 27 décembre 2013 à laquelle il a ensuite renoncé, est sans incidence sur la propre demande de la société qui se trouve sans objet dès lors qu'elle n'est pas antérieure au licenciement.

En conséquence et en infirmant le jugement déféré, la cour dit que la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail est sans objet.

Sur la rupture du contrat de travail

En application de l'article L. 1235-1 du code du travail, il revient à la cour d'apprécier, au vu des éléments apportés aux débats par l'une et l'autre parties, le caractère réel et sérieux de la cause du licenciement et ce telle qu'elle résulte des deux motifs énoncés dans la lettre de licenciement, à savoir l'inaptitude déclarée par le médecin du travail et une impossibilité de reclassement.

Le licenciement pour inaptitude est sans cause réelle et sérieuse si l'employeur a manqué à son obligation de reclassement.

En application de l'article L. 1226-2 du code du travail dans sa rédaction applicable, l'employeur est tenu, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel et dès lors que le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, de lui proposer un autre emploi approprié à ses capacités. L'emploi proposé doit être aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail. La proposition doit prendre en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il a formulé sur l'aptitude du salarié à exercer une des tâches existantes dans l'entreprise.

Les possibilités de reclassement doivent être étudiées à la date où le licenciement est envisagé.

Seules les recherches de reclassement compatibles avec les conclusions du médecin du travail émises au cours de la visite de reprise et les indications qu'il formule d'une part, et appropriées aux capacités du salarié d'autre part, peuvent être prises en considération pour apprécier le respect par l'employeur de son obligation de rechercher à son salarié un reclassement avant de le licencier éventuellement pour inaptitude.

Lorsque la société appartient à un groupe, les possibilités de reclassement du salarié inapte doivent s'apprécier à l'intérieur du groupe, parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation lui permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel.

L'obligation de reclassement qui pèse sur l'employeur ne porte que sur les emplois salariés, disponibles au jour du licenciement, même d'une durée limité mais sans que l'employeur n'ait l'obligation de créer un nouveau poste de travail ni qu'il soit tenu d'imposer à un autre salarié une modification de son contrat de travail à l'effet de libérer son poste. Le poste proposé doit être en rapport avec les compétences du salarié, l'employeur n'étant pas tenu d'assurer au salarié dont le licenciement est envisagé une formation initiale ou qualifiante.

Antérieurement à la création de l'article L.1226-2-1 du code du travail par la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l'avis du médecin du travail déclarant un salarié inapte à tout poste dans l'entreprise ne dispensait pas l'employeur de son obligation légale de recherche de reclassement au sein de cette entreprise et, le cas échéant, du groupe dont elle fait partie.

II appartient à l'employeur qui prétend s'être trouvé dans l'impossibilité d'effectuer un

tel reclassement d'en rapporter la preuve. Cette recherche de reclassement doit être mise en 'uvre de façon loyale et personnalisée.

A défaut, quoique reposant sur une inaptitude régulièrement constatée par le médecin du travail, le licenciement est privé de cause réelle et sérieuse.

En l'espèce, lors du deuxième examen de la visite de reprise du 11 avril 2014, le médecin du travail a conclu, après une première visite et une étude de poste le 27 mars 2014, que le salarié était 'inapte à la reprise au poste de chef de cuisine' et 'apte à un autre'.

Le salarié demande à la cour de dire que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse pour manquement à l'obligation de reclassement en ce que cet employeur n'a fait aucune recherche de reclassement ni en interne, ni au sein du groupe auquel elle appartient et qui est composé des sociétés exploitant les restaurants La Voile à Bonifacio, La Rotonde à Aix en Provence et les Artistes à Aix en Provence .

Il fait valoir que la lettre de convocation à l'entretien préalable au licenciement fait mention expresse d'un groupe, et il produit un procès-verbal d'assemblé générale extraordinaire du 31 mars 2018 ainsi qu'un acte de cession du fonds de commerce du restaurant La Rontonde à la Société de Restauration Aixoise du 31 mars 2018.

La société intimée conteste le moyen et fait valoir d'une part qu'elle n'appartient à aucun groupe en soulignant que la seule détention d'une part du capital social n'implique pas en soi la possibilité d'effectuer entre elles la permutation de leur personnel, ce faisant de groupe de reclassement, d'autre part qu'elle a respecté son obligation de reclassement.

Elle verse aux débats :

- le courrier du médecin du travail du 15 mai 2014 qui indique qu'en réponse à sa demande d'information, il confirme que le salarié est inapte à tous les postes de l'entreprise tel qu'il l'en a informé lors de l'étude de poste;

- les Kbis des sociétés SARL 'Les Voiles de Bonifacio' à Bonifacio exerçant une activité d'enseignement de la voile et de la plaisance, SAS 'La baie des Voiles' à Porto Vecchio ayant notamment une activité de camping, de vente d'articles de sport, de pêche, SASU 'Les Artistes' à Aix en Provence ayant une activité de café, bar restaurant.

Il ressort de l'analyse des pièces versées par le salarié que:

- la lettre de convocation à l'entretien préalable en date du 4 juin 2014 indique: ' Pour répondre à l'obligation de reclassement qui pèse sur nous, nous avons tout mis en 'uvre pour rechercher un possible reclassement au sein de notre entreprise et au sein des autres établissements de notre groupement d'entreprises, en tenant compte des restrictions du médecin du travail'.

- le procès-verbal d'assemblée extraordinaire, ainsi que de l'acte de cession du 31 mars 2018, indiquent que les associés de la société intimée sont depuis le 10 novembre 2010 la SA Sextius (majoritaire) et la SARL Le Voilier et qu'elle a elle-même une filiale dont elle détient 100 % du capital la SARL Les Artistes.

Le salarié se prévaut donc de faits précis auxquels la société peut répondre pour soutenir une absence de recherches de reclassement au sein du groupe auquel elle appartient.

La société quant à elle se limite à verser les extraits K-bis de trois sociétés, en soulignant que leurs dirigeants sont inconnus à la procédure et à procéder par seule affirmation pour se dire étranger à ces sociétés.

Ainsi, la société ne s'explique ni sur ses liens, ni sur les activités des SA Sextius, SARL Le Voilier qui détiennent son capital social ni sur la SASU Les Artistes qui est sa filiale et dont l'activité est bien l'exploitation d'un restaurant susceptible de permettre la permutation du personnel.

Au vu de l'ensemble des ces éléments, la cour dit que la société appartient à un groupe composé de la SA Sextius, la SARL Le Voilier et la SASU Les Artistes .

Force est de constater que la société ne verse aucun élément justifiant de recherches de reclassement dans le groupe auquel elle appartient.

Et la société ne justifie pas plus de recherche de reclassement en interne dès lors qu'elle ne produit pas son registre du personnel, ni tout autre élément permettant de vérifier l'existence de postes disponibles au temps du reclassement dans une société qui employait quarante-cinq salariés comme il résulte de l'attestation Pôle Emploi.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, la cour dit que la société n'a pas respecté l'obligation de reclassement mise à sa charge.

Le moyen est ainsi fondé.

En conséquence et en infirmant le jugement déféré, la cour dit que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences financières de la rupture

En l'espèce, le salarié forme d'une part une demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'autre part une demande de dommages et intérêts pour préjudice moral.

A l'examen de ses écritures la cour observe qu'il présente indistinctement des développements au titre du préjudice pour les deux demandes.

1° les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

En application de l'article L.1235-3 du code du travail dans sa version applicable, le salarié peut prétendre à une indemnité en réparation du préjudice résultant de la perte de l'emploi qui ne peut être inférieure aux six derniers mois de salaire.

En cas d'arrêt de travail durant la période précédant la rupture, ce sont les salaires des derniers mois précédents ces arrêts qui doivent être pris en compte.

Le salarié fait valoir qu'il a subi un préjudice financier en ce qu'il n'a retrouvé un emploi qu'en mars 2015 et a perçu entre-temps les seules indemnités chômage alors qu'il a des charges familiales et un préjudice moral en ce qu'il a présenté un état dépressif ayant nécessité une médication, ce dont il justifie.

Au vu de son ancienneté, de son salaire de référence (3676,78 euros), de sa capacité à retrouver un emploi et des éléments qu'il produit sur l'étendue de son préjudice, la cour fixe à 33 000 euros le montant des dommages et intérêts qui l'indemniseront intégralement.

En conséquence et en infirmant le jugement déféré, la cour condamne la société à verser au salarié la somme de 33 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

2° les dommages et intérêts pour préjudice moral

Au soutien de sa demande le salarié fait valoir qu'il a 'mal vécu cette situation après dix années au sein de l'entreprise' ce qui l'a plongé dans un état dépressif médicalement constaté et ayant nécessité la prise d'anti-dépresseurs.

Toutefois la cour relève qu'il n'est justifié ni d'une faute dans les circonstances ou les conditions de cette rupture ni de l'existence d'un préjudice distinct de celui résultant de la rupture elle-même.

En conséquence, la cour dit que la demande n'est pas fondée de sorte que le jugement déféré est confirmé en ce qu'il l'a rejetée.

Sur le remboursement des indemnités chômage

En application de l'article L.1235-4 du code du travail dans sa rédaction applicable, il convient en ajoutant au jugement déféré, d'ordonner d'office le remboursement par l'employeur aux organismes intéressés des indemnités de chômage versées au salarié licencié du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de trois mois d'indemnisation.

Sur les intérêts

En infirmant le jugement déféré, la cour dit que la créance indemnitaire est productive d'intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

Sur les dispositions accessoires

En application de l'article 700 du code de procédure civile il est équitable que l'employeur contribue aux frais irrépétibles que le salarié a exposés en première instance et en cause d'appel. La société sera en conséquence condamnée à lui verser la somme de 3 000 euros et déboutée de sa demande à ce titre.

En application de l'article 696 du même code, il échet de mettre les dépens de première instance et d'appel à la charge de l'employeur qui succombe à titrer principal.

PAR CES MOTIFS

statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire, en dernier ressort après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a dit que la rupture du contrat de travail est en date du 16 juin 2014, débouté M. [S] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral et dit qu'il n'y avait pas lieu à exécution provisoire,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

Dit que la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail par la SARL Fontaine Rotonde Mirabeau est sans objet,

Dit que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse,

Condamne la SARL Fontaine Rotonde Mirabeau à verser à M. [S] la somme de 33 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Dit que la somme est exprimée en brut,

Dit que la créance indemnitaire produira intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

Y ajoutant,

Ordonne le remboursement par l'employeur aux organismes intéressés des indemnités de chômage versées à M. [S] du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de trois mois d'indemnisation,

Condamne la SARL Fontaine Rotonde Mirabeau à verser à M. [S] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais de première instance et d'appel,

Condamne la SARL Fontaine Rotonde Mirabeau à supporter les dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-4
Numéro d'arrêt : 17/16097
Date de la décision : 28/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-28;17.16097 ?
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