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28/04/2022 | FRANCE | N°17/15886

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-4, 28 avril 2022, 17/15886


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-4



ARRÊT AU FOND

DU 28 AVRIL 2022



N° 2022/

FB/FP-D











Rôle N° RG 17/15886 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BBC5T







[E] [C] épouse [T]





C/



SARL GROUPE TELSIA

























Copie exécutoire délivrée

le :

28 AVRIL 2022

à :

Me Marie-dominique POINSO-POURTAL avocat au barreau de M

ARSEILLE





Me Chloé MARTIN, avocat au barreau d'AIX-EN-

PROVENCE























Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARTIGUES en date du 12 Juillet 2017 enregistré(e) au répertoire général sous le n° F17/00047.





APPELAN...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-4

ARRÊT AU FOND

DU 28 AVRIL 2022

N° 2022/

FB/FP-D

Rôle N° RG 17/15886 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BBC5T

[E] [C] épouse [T]

C/

SARL GROUPE TELSIA

Copie exécutoire délivrée

le :

28 AVRIL 2022

à :

Me Marie-dominique POINSO-POURTAL avocat au barreau de MARSEILLE

Me Chloé MARTIN, avocat au barreau d'AIX-EN-

PROVENCE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARTIGUES en date du 12 Juillet 2017 enregistré(e) au répertoire général sous le n° F17/00047.

APPELANTE

Madame [E] [C] épouse [T], demeurant 20 Ter Avenue Maréchal Juin - Résidence Saint Laurent - 13700 Marignane

représentée par Me Marie-dominique POINSO-POURTAL, avocat au barreau de MARSEILLE,

et par Me Euria THOMASIAN, avocat au barreau d'ALES

INTIMEE

SARL GROUPE TELSIA Prise en la personne de son représentant légal., demeurant 13 Rue du Puits neuf - 13100 Aix-en-Provence

représentée par Me Chloé MARTIN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Janvier 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre

Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller

Madame Catherine MAILHES, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Françoise PARADIS-DEISS.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 Avril 2022.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Avril 2022

Signé par Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre et Madame Françoise PARADIS-DEISS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

Mme [T] (la salariée) a été engagée par la SARL Groupe Telsia (la société) suivant contrat à durée déterminée à temps partiel du 2 avril 2015 au 31 mai 2015 en qualité d'agent de service, échelon 1, au taux horaire de 9,86 euros pour 70 heures par mois.

Par avenant du 1er mai 2015 le contrat a été renouvelé jusqu'au 31 août 2015 et son temps de travail a été porté à 130 heures par mois, aux mêmes conditions de rémunération.

Par avenant du 1er septembre 2015 le contrat a été de nouveau renouvelé jusqu'au 31 octobre 2015 avec maintien du temps de travail à 130 heures par mois.

La salariée a adressé à la société un courrier daté du 26 octobre 2015 lui indiquant mettre fin à sa mission le 31 octobre 2015. La relation de travail a pris fin au terme du contrat le 31 octobre 2015.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective des entreprises de propreté.

La société employait habituellement au moins 11 salariés au moment de la rupture du contrat de travail.

La salariée a saisi le 13 avril 2016 le conseil de Prud'hommes de Martigues d'une demande de demande de requalification du contrat à durée déterminée à temps partiel en contrat à durée indéterminée à temps plein, d'une contestation de la rupture et de demandes subséquentes.

Par jugement du 12 juillet 2017 le conseil de prud'hommes de Martigues a :

- dit et jugé que les contrats de travail de Madame [E] [T] établis par la société Telsia respectent les articles L.1242-2, L.1242-l2 et L.3123-14 du Code du Travail et sont justifiés en raison d'un surcroît temporaire d'activité durant la période estivale,

- en conséquence débouté Madame [E] [T] de l'ensemble de ses demandes,

- débouté la Société Telsia de sa demande au titre de l'article 700 du CPC,

- condamné Madame [E] [T] aux dépens de l'instance.

- pris acte que la Société Telsia reconnait devoir la somme de 910,93€ (neuf cent dix euros quatre vingt treize) à Madame [E] [T] au titre de l'indemnité de précarité qui ne lui a pas été versée.

La salariée a interjeté appel 'total' du jugement par acte du 17 août 2017 .

PRÉTENTIONS ET MOYENS

Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 29 décembre 2017 Mme [C] épouse [T], appelante, demande de :

INFIRMER le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Et statuant à nouveau :

REQUALIFIER le contrat de travail à durée déterminée à temps partiel de Madame Madame [C] épouse [T] en contrat à durée indéterminée à temps complet,

DIRE ET JUGER que la rupture du contrat de travail doit s'analyser en licenciement sans  cause réelle et sérieuse,

En conséquence,

CONDAMNER la Société Telsia à porter et à payer à Madame [C] épouse [T] les sommes suivantes :

- 1 495.62 € bruts à titre de rappels de salaires entre avril et octobre 2015,

- 149.56 € bruts au titre des congés payés sur rappels de salaire,

- 1 046.82 € bruts à titre d'indemnité de précarité,

- 4 486.38 € brut à titre d'indemnité légale de licenciement,

- 1 495.46 € brut à titre d'indemnités pour non respect de la procédure,

- 2 990.92 € brut à titre d'indemnités de préavis,

- 299.09 € brut à titre de congés payés sur préavis,

- 2 000 € à titre de l'article 700 du CPC.

L'employeur sera également condamné à remettre à la salariée tous les documents  contractuels rectifiés sous astreinte de 50 € par jour de retard à partir de la notification.

L'employeur sera également condamné aux entiers dépens ainsi qu'aux frais de recouvrement

de la créance.

Par ordonnance du 18 mai 2018 le conseiller chargé de la mise en état a prononcé en application de l'article 909 du code de procédure civile, l'irrecevabilité des conclusions et pièces déposées le 26 février 2018 par Maître Gassend, avocat de la SARL Groupe Telsia,

Vu l'article 455 du code de procédure civile,

L'ordonnance de clôture a été rendue le 3 mai 2021.

Par arrêt avant-dire droit du 2 décembre 2021 la cour d'appel d'Aix en Provence a ordonné la réouverture des débats sans révocation de la clôture et renvoyé l'affaire à l'audience de plaidoiries du 26 janvier 2022.

SUR CE

A titre préliminaire la cour rappelle que lorsqu'elle n'est pas saisie de conclusions par l'intimé, comme tel est le cas des conclusions de la société qui ont été déclarées irrecevables, elle doit, pour statuer sur l'appel, examiner les motifs du jugement ayant accueilli les prétentions de cette partie en première instance.

Par ailleurs la cour ne fait droit aux prétentions et moyens de l'appelant que dans la mesure où il les estime réguliers, recevables et bien-fondés.

Sur la demande de requalification à temps complet

En application de l'article L. 3123-14 du code du travail, dans sa version applicable, tout contrat à temps partiel doit notamment mentionner par écrit la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail et sa répartition entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ainsi que les modalités selon lesquelles les horaires de travail pour chaque journée travaillée sont communiqués par écrit au salarié et les limites dans lesquelles peuvent être accomplies des heures complémentaires au delà de la durée fixée par le contrat.

Seule s'impose la répartition de la durée du travail en volume d'heures entre les jours de la semaine pour les contrats prévus sur une base hebdomadaire et entre les semaines du mois pour les contrats prévus sur une base mensuelle.

En l'absence d'un contrat écrit ou de l'une des mentions légales requises, le contrat de travail à temps partiel est réputé à temps plein et il incombe à l'employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d'une part de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle de travail convenue, d'autre part, que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'était pas tenu de se tenir constamment à la disposition de l'employeur.

Selon l'article L. 3123-17 du code du travail dans sa rédaction applicable, le nombre d'heures complémentaires accomplies par un salarié à temps partiel au cours d'une même semaine ou d'un même mois ou sur la période prévue par un accord collectif conclu sur le fondement de l'article L. 3122-2 ne peut être supérieur au dixième de la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail prévue dans son contrat calculée, le cas échéant, sur la période prévue par un accord collectif conclu sur le fondement de l'article L 3122-2. Les heures complémentaires ne peuvent avoir pour effet de porter la durée du travail accomplie par un salarié au niveau de la durée légale du travail ou à la durée fixée conventionnellement.

Lorsqu'elle est justifiée la requalification du contrat de travail s'opère dès la première irrégularité.

En l'espèce la salariée fait valoir que :

- le contrat de travail ne mentionnait pas la répartition de la durée de travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois;

- le contrat de travail ne mentionnait pas les modalités de communication par écrit de ses horaires de travail;

- le contrat de travail ne précisait pas les limites dans lesquelles des heures supplémentaires pouvaient être effectuées;

- elle effectuait de nombreuses heures complémentaires qui démontrent qu'elle devait se tenir à la disposition permanente de l'employeur. Ainsi son bulletin de salaire d'avril 2015 mentionne 130 heures déclarées comme salaire de base alors que son contrat était conclu pour 70 heures par mois, de sorte que les 60 heures suivantes étaient des heures complémentaires;

- elle a perçu en juin et en août 2015 une prime exceptionnelle qui correspondait au paiement dissimulé d'heures complémentaires.

Elle produit les éléments suivants :

- la première page du contrat de travail à durée déterminée à temps partiel du 2 avril au 31 août 2015, les avenants de renouvellement et d'augmentation d'heures du 1er mai au 31 août 2015 puis du 31 août au 31 octobre 2015;

- ses bulletins de salaire;

- des décomptes manuscrits de ses horaires quotidiens de travail du 2 avril au 30 octobre 2015 mentionnant les heures de début et de fin de travail ainsi que le nombre d'heures accomplies.

Pour rejeter la demande de la salariée, le jugement déféré avait retenu qu'en fixant les journées de travail du lundi au dimanche avec un jour de repos dans la semaine selon le planning établi, un quota d'heures hebdomadaire et mensuel, un horaire de début de travail à 9h en avril puis à 8h30 à partir du mois de mai, les contrats de travail respectaient les dispositions de l'article L.1323-14 du code du travail.

A l'analyse des pièces du dossier la cour constate que :

- le contrat de travail du 2 avril 2015 prévoit une durée hebdomadaire de 16h16, mensuelle de 70 heures et mentionne 'Lundi au dimanche : à partir de 9h avec un jour de repos par semaine en fonction du planning et des besoins';

- les avenants du 1er mai et du 1er septembre 2015 prévoient une durée mensuelle de 130 h par mois et mentionnent 'Lundi au Dimanche (avec un jour de repos suivant planning) à partir de 8h30.'.

Il s'ensuit que le contrat de travail à temps partiel de la salariée prévu notamment sur une base hebdomadaire de travail n'indique pas la répartition en volume d'heures entre les jours de la semaine, la mention d'un début de travail à partir de 9h n'étant pas de nature à établir le volume d'heure effectué chaque jour ni si celui-ci était identique pour tous les jours de la semaine.

De ce seul chef, la cour dit que le contrat de travail est présumé à temps complet.

Or force est de constater que la preuve que la salariée n'était pas placée dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme elle devait travailler et qu'elle n'était pas tenue de se tenir constamment à la disposition de l'employeur, n'est pas rapportée par la société dont les conclusions ont été déclarées irrecevables.

Pour rejeter la demande de la salariée, le conseil de Prud'hommes a retenu les attestations produites par la société :

- Mme [F], employée, selon laquelle 'nous arrivons tous les matins à la même heure, puisque le ménage des chambres doit commencer le matin à partir de 9h00.La directrice de l'hôtel nous attendait donc à cette heure là. Puis nous terminions le travail en fin de matinée, sauf en période d'été ou nous pouvions finir aux alentours de 14h00. Nous connaissons donc parfaitement notre rythme de travail puisque nos horaires étaient fixés et étaient toujours les même. Nous avons un jour de repos dans la semaine, on était toujours prévenu une semaine ou quinze jours à l'avance de sorte qu'il était facile de s'organiser en conséquence';

- Mme [X], directrice de la résidence hôtelière, selon laquelle la salariée 'était en binôme avec Madame [F]. Elles arrivaient à la même heure le matin à l'hôtel à partir de 09h00 pour commencer le ménage des chambres. Puis elles terminaient en fin de matinée tous les jours. Les horaires de travail étaient systématiquement les mêmes'.

Toutefois ces attestations sont insuffisantes en l'absence de planning, ou de tout autre élément de nature à démontrer précisément l'existence d'horaires fixes et identiques de travail, à renverser la présomption de temps complet.

En conséquence la cour requalifie, en infirmant le jugement déféré, le contrat de travail à temps partiel en contrat à temps complet à compter du 2 avril 2015.

Sur la demande de requalification en contrat à durée indéterminée

Aux termes de l'article L.1242-12 du code du travail, le contrat de travail à durée déterminée est établi par écrit et comporte la définition précise de son motif.

Selon l'article L.1242-1 du code du travail, un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise.

L'article L.1242-2 du même code prévoit qu'un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire et seulement dans les cas qu'il énumère, parmi lesquels figure l'accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise.

Il résulte de l'article L.1245-1 du code du travail qu'est réputé à durée indéterminée tout contrat conclu en méconnaissance des principe précités.

En cas de litige sur le motif de recours énoncé dans le contrat à durée déterminée, il appartient à l'employeur de rapporter la preuve de la réalité de ce motif.

En l'espèce, la salariée fait valoir à l'appui de sa demande de requalification en contrat à durée indéterminée que le motif du contrat à durée déterminée n'est pas fondé en ce qu'elle a en réalité occupé un poste lié à l'activité permanente de l'entreprise sur une durée qui dépasse la seule saison estivale. Elle souligne que le motif ne se réfère d'ailleurs à aucun caractère temporaire de l'augmentation d'activité alléguée.

La cour constate que le motif du contrat à durée déterminée en cause repose sur 'l'augmentation de l'activité' et que les avenants successifs ayant prolongé son terme ne comportent aucune référence à un motif.

Alors qu'il appartient à l'employeur de rapporter la preuve du motif, force est de constater que cette preuve n'est pas rapportée par la société dont les conclusions ont été déclarées irrecevables.

Pour rejeter la demande de la salariée, le conseil de Prud'hommes s'est appuyé sur les attestations précitées de Mme [F] et de Mme [X], en ce que la première déclarait 'Pour m'aider à faire les chambres de cet hôtel car à compter d'avril, il y a de plus en plus de chambres à faire et sans une personne supplémentaire, je n'aurai jamais pu gérer la charge de travail. Mme [T] a été embauchée que pour faire face à ce travail supplémentaire, ce qu'elle savait parfaitement' et la seconde ' Je certifie ...avoir eu comme employée de la société Telsia Mme [T] pour effectuer les chambres au sein de mon établissement durant la période d'avril à octobre 2015 .....Pour faire face à l'accroissement temporaire d'activité de l'hôtel, sa durée de travail a très vite augmenté, mais rien n'a changé'

Toutefois ces témoignages, dont les propos demeurent généraux, ne permettent pas d'objectiver ni la réalité du surcroît d'activité, ni son caractère temporaire.

En conséquence, et en infirmant le jugement déféré, la cour prononce la requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée à compter du 2 avril 2015.

Sur le rappel de salaire entre avril et octobre 2015

La salariée demande de tirer les conséquences de la requalification du contrat à temps partiel en contrat à temps complet en réclamant le différentiel dû entre les salaire bruts versés à hauteur de 1281,80 euros par mois pour 130 heures et le salaire brut de base à temps plein qu'elle calcule exactement à hauteur de 1495,46 euros pour 151,67 heures sur la base de son taux horaire contractuel de 9,86 euros.

Compte tenu de la requalification opérée ci-dessus, la cour fixe, en infirmant le jugement déféré, à la somme de 1495,62 euros bruts le rappel de salaire dû entre le 2 avril et le 31 octobre 2015 et 149,56 euros de congés payés afférents.

Sur le rappel d'indemnité de fin de contrat

Selon l'article L.1243-8 du code du travail, lorsqu'à l'issue d'un contrat de travail à durée déterminée, les relations contractuelles ne se poursuivent pas par un contrat à durée indéterminée, le salarié a droit, à titre de complément de salaire, à une indemnité de fin de contrat destinée à compenser la précarité de sa situation égale à 10 % de la rémunération totale brute qui lui a été versée et qui s'ajoute à cette rémunération.

Lorsqu'elle est perçue par le salarié à l'issue de son contrat à durée déterminée, l'indemnité de fin de contrat lui reste acquise, nonobstant une requalification ultérieure en contrat à durée indéterminée.

L'indemnité de précarité reste acquise au salarié nonobstant une requalification ultérieure en contrat à durée indéterminée de sorte que l'indemnité de précarité se cumule avec l'indemnité de requalification prévue à l'article L.1245-2 alinéa 2 du code du travail.

Cependant, le cumul ne s'applique pas dès lors que la requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée est demandée en cours d'exécution du contrat.

En l'espèce la salariée demande de condamner l'employeur à lui verser l'indemnité de précarité qu'il avait admis avoir omis de verser à l'issue du contrat à durée déterminée.

Mais dès lors que la demande de la salariée intervient postérieurement à la requalification du contrat de travail, celle-ci n'est pas fondée et seule l'indemnité de requalification qui n'est en l'espèce pas réclamée, pouvait être mise à la charge de l'employeur.

En conséquence, en ajoutant au jugement déféré qui n'était pas saisi de cette demande et s'était limité à prendre acte de la reconnaissance par la société de devoir la somme de 910,93 euros, la cour rejette la demande.

Sur la rupture du contrat de travail et ses conséquences financières

Eu égard à la requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée , la circonstance que la salariée a cessé définitivement sa collaboration au sein de la société le 31 octobre 2015 caractérise à cette date une rupture du contrat de travail qui s'analyse nécessairement en un licenciement sans cause réelle et sérieuse dont il convient d'apprécier les conséquences financières.

1- sur l'indemnité compensatrice de préavis

En application de l'article L.1234-1 du code du travail dans sa rédaction applicable, lorsque le licenciement n'est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit s'il justifie chez le même employeur d'une ancienneté de services continus comprise entre six mois et deux ans, à un préavis d'un mois.

La convention collective applicable ne présente pas de dispositions plus favorables.

En l'espèce la salariée, qui réclame un préavis de deux mois sans préciser sur quel fondement elle se prévaut de cette durée, peut ainsi prétendre à une indemnité compensatrice de préavis avec les congés payés afférents équivalente à un mois de mois de salaire sur la base du salaire que la salariée aurait perçu si elle avait travaillé pendant la durée du préavis, d'où une indemnité compensatrice de préavis qui s'établit à la somme de 1 495,46 euros.

En conséquence, en infirmant le jugement déféré, la cour condamne la société à verser à la salariée la somme de 1 495,46 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et celle de 149,54 euros au titre des congés payés afférents.

2- sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

La salariée, qui disposait de moins de deux ans ancienneté, peut prétendre en application de l'article L. 1235-5 du code du travail dans sa rédaction applicable, à une indemnité calculée en fonction du préjudice subi du fait de la perte de son emploi.

Eu égard au montant de la rémunération mensuelle brute devant être retenue (1 495,46 euros), de son ancienneté au sein de l'entreprise et de sa capacité à retrouver un emploi, il apparaît au vu des pièces et des explications fournies que le préjudice subi par le salarié du fait de la perte de son emploi doit être fixé à la somme de 2 000 euros.

En conséquence, en infirmant le jugement déféré, la cour condamne la société à verser à la salariée la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur la procédure de licenciement

Il résulte de la combinaison des articles L.1235-2 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n°2017-1718 du 20 décembre 2017 et L.1235-5 du même code, dans sa rédaction antérieure à la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, que l'indemnisation prévue par l'article L.1235-2 du code du travail en cas d'inobservation de la procédure de licenciement, qui ne peut être supérieure à un mois de salaire, ne peut se cumuler avec l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse que si le salarié a moins de deux ans d'ancienneté ou travaille dans une entreprise de moins de onze salariés.

En l'espèce, comme il a été précédemment dit, le licenciement sans cause réelle et sérieuse est intervenu en méconnaissance des règles de la procédure de licenciement et la salariée a moins de deux d'ancienneté au sein de la société.

Il convient donc de faire droit à la demande de la salariée qui a été privée des garanties légales et de la possibilité de s'expliquer en lui allouant la somme de 500 euros.

En conséquence, en infirmant le jugement déféré, la cour condamne la société à verser à la salariée la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement.

Sur la remise des documents de fin de contrat

La cour ordonne, en infirmant le jugement déféré, à la société de remettre à la salariée les documents de fin de contrat rectifiés et un bulletin de paie conformes au présent arrêt dans un délai de deux mois à compter du prononcé du présent arrêt. Il n'est produit aucun élément de nature à justifier le prononcé d'une astreinte.

Sur les dispositions accessoires

II résulte de l'application des articles R. 444-52, R. 444-53, 3°et R. 444-55 du code de commerce, que lorsque le recouvrement ou l'encaissement est effectué sur le fondement d'un titre exécutoire constatant une créance née de l'exécution d'un contrat de travail, le versement d'une provision avant toute prestation de recouvrement ne peut pas être mise à la charge du créancier, de sorte qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande tendant à faire supporter par l'employeur en cas d'exécution forcée du présent arrêt le droit proportionnel dégressif mis à la charge du créancier.

En application de l'article 700 du code de procédure civile il est équitable que l'employeur contribue aux frais irrépétibles que la salariée a exposés en première instance et en appel. La société sera en conséquence condamnée à lui verser la somme de 2 000 euros.

En application de l'article 696 du même code, il échet de mettre les dépens de première instance et d'appel à la charge de la société qui succombe.

PAR CES MOTIFS

statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire, en dernier ressort après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a débouté la SARL Groupe Telsia de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

Requalifie le contrat à durée déterminée à temps partiel en contrat à durée indéterminée à temps complet à compter du 2 avril 2015,

Dit que la rupture s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse à effet du 31 octobre 2015,

Condamne la SARL Groupe Telsia à verser à Mme [C] épouse [T] les sommes suivantes :

- 1495,62 euros bruts à titre de rappel de salaire du 2 avril au 31 octobre 2015 et 149,56 euros de congés payés afférents,

- 1 495,46 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 149,54 euros de congés payés afférents,

- 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 500 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement,

Dit que les sommes allouées par le présent arrêt sont exprimées en brut,

Ordonne à la SARL Groupe Telsia de remettre à Mme [C] épouse [T] les documents de fin de contrat rectifiés et un bulletin de paie conformes au présent arrêt dans un délai de deux mois à compter du prononcé du présent arrêt,

Rejette la demande d'astreinte,

Y ajoutant,

Rejette la demande d'indemnité de précarité,

Rejette la demande au titre de l'exécution forcée,

Condamne la SARL Groupe Telsia à verser à Mme [C] épouse [T] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SARL Telsia à supporter les dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-4
Numéro d'arrêt : 17/15886
Date de la décision : 28/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-28;17.15886 ?
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