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28/01/2021 | FRANCE | N°18/02179

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 28 janvier 2021, 18/02179


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 28 JANVIER 2021

lv

N° 2021/ 43













Rôle N° RG 18/02179 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BB5FA







Syndicat des copropriétaires [Adresse 9]





C/



[S] [C]

SARL IMODA





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ



SCP BA

DIE SIMON-THIBAUD JUSTON









Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 26 Janvier 2018 enregistrée au répertoire général sous le n° 14/00696.





APPELANT



Syndicat des copropriétaires [Adresse 9] Sis [Adresse 5] [Localité 3], représenté ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 28 JANVIER 2021

lv

N° 2021/ 43

Rôle N° RG 18/02179 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BB5FA

Syndicat des copropriétaires [Adresse 9]

C/

[S] [C]

SARL IMODA

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ

SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 26 Janvier 2018 enregistrée au répertoire général sous le n° 14/00696.

APPELANT

Syndicat des copropriétaires [Adresse 9] Sis [Adresse 5] [Localité 3], représenté par son syndic en exercice la SARL GESTION IMMOBILIERE BERTRAND PETIT, lui-même poursuites et diligences de son représentant légal en exercice y domicilié, sis [Adresse 8] - [Localité 1]

représenté par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Antoine ATTIAS de la SCP ATTIAS JAUZE, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

Monsieur [S] [C]

Copropriétaire du lot n°98 Bât A situé au [Adresse 6] au sein de la résidence [Adresse 9] à [Localité 3]

demeurant [Adresse 4] - [Localité 2]

représenté par Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Emmanuelle ZIMMER, avocat au barreau de GRASSE

SARL IMMODA exerçant sous l'enseigne RIVIERA HORIZON, immatriculée au RCS de Cannes sous le n°450.467.246, prise en la personne de son représentant légal en xercice domicilié en cette qualité audit siège

sise [Adresse 6] - [Localité 3]

représentée par Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Emmanuelle ZIMMER, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 17 Novembre 2020 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Laetitia VIGNON, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Marie-Florence BRENGARD, Président

Madame Hélène GIAMI, Conseiller

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 Janvier 2021.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Janvier 2021,

Signé par Madame Marie-Florence BRENGARD, Président et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

M. [S] [C] est propriétaire du lot n° 98, consistant en un local commercial, au sein de l'ensemble immobilier [Adresse 9], sis [Adresse 5] à [Localité 3] et soumis au statut de la copropriété.

M. [C] est également le gérant de la SARL RIVIERA HORIZON qui loue le local commercial.

Une assemblée générale des copropriétaires s'est tenue le 20 septembre 2013 au cours de laquelle M. [C] a présenté ses projets de pose d'enseigne lumineuse et de pose de casquettes sur la devanture du magasin ( résolutions n° 19 et 20).

Lesdites demandes ayant été rejetées, M. [C] et la SARL RIVIERA HORIZON ont, par acte d'huissier en date du 03 janvier 2014, fait assigner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 9], devant le tribunal de grande instance de Grasse, aux fins de dire et juger que le tribunal substitue sa décision à celles de l'assemblée générale concernant les résolutions 19 et 20, de les autoriser à mettre en place tant l'enseigne lumineuse que les casquettes et à les indemniser de leurs différents préjudices.

Par jugement contradictoire en date du 26 janvier 2018, le tribunal de grande instance de Grasse a:

- autorisé M. [S] [C], copropriétaire et la SARL RIVIERA HORIZON, preneur du local commercial, à poser une enseigne et une vitrine à deux portes sur le côté latéral du local commercial, conformément à l'autorisation administrative obtenue et aux plans et documents fournis par M. [C] à l'assemblée générale des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 9] du 20 septembre 2013,

- constaté que la demande d'autorisation judiciaire de la pose de casquettes sur la devanture du magasin est devenue sans objet, en l'état de l'autorisation donnée par l'assemblée générale des copropriétaires,

- débouté M. [C] et la SARL RIVIERA HORIZON du surplus de leurs demandes,

- débouté le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 9] de sa demande de remboursement par M. [C] des frais de constat exposés,

- dit n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 9] aux dépens de la procédure, avec distraction au profit des avocats qui en ont fait la demande,

- dispensé M. [C] de toute participation à la dépense commune des frais de procédure, dont la charge est répartie entre les autres copropriétaires,

- rejeté tous les autres chefs de demandes.

Le tribunal a, pour l'essentiel, retenu que:

- les stipulations du règlement de copropriété exigeaient uniquement, pour l'apposition d'enseigne, une autorisation administrative, qui en l'espèce avait été obtenue par M. [C],

- les parties pouvaient se prévaloir à l'égard du syndicat des copropriétaires d'un ' droit à l'enseigne' ,

- la pose de l'enseigne lumineuse ne porte pas atteinte à l'harmonie, ni à l'esthétique de l'immeuble au regard des enseignes existantes et de celle apposée par le prédécesseur,

- le refus opposé par le syndicat apparaissait abusif,

- le préjudice invoqué par la SARL RIVIERA HORIZON n'est pas justifié , les attestations comptables produites ne démontrant aucune baisse du chiffre d'affaires,

- le préjudice déploré par M. [C] n'est pas davantage établi en ce qu'il, ne démontre ni l'étendue des dommages, ni les travaux nécessaires pour mettre fin aux désordres.

Par déclaration en date du 08 février 2018, le syndicat des copropriétaires [Adresse 9] a interjeté appel de ce jugement.

M. [C] et la SARL RIVIERA HORIZON ont également interjeté appel de ce jugement le 26 avril 2018.

Les procédures ont été jointes par ordonnance en date du 15 mai 2018.

Aux termes de ses dernières conclusions récapitulatives déposées et notifiées le 17 septembre 2018, le syndicat des copropriétaires [Adresse 9], représenté par son syndic en exercice la SARL GESTION IMMOBILIERE BERTRAND PETIT, demande à la cour de:

- débouter M. [C] et la société RIVIERA HORIZON de leurs demandes, fins et conclusions,

- débouter M. [C] et la société RIVIERA HORIZON de leur appel et de leur appel incident,

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a:

* autorisé M. [S] [C], copropriétaire et la SARL RIVIERA HORIZON, preneur du local commercial, à poser une enseigne et une vitrine à deux portes sur le côté latéral du local commercial, conformément à l'autorisation administrative obtenue et aux plans et documents fournis par M. [C] à l'assemblée générale des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 9] du 20 septembre 2013,

* débouté le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 9] de sa demande de remboursement par M. [C] des frais de constat exposés et de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 9] aux dépens de la procédure,

* dispensé M. [C] de toute participation à la dépense commune des frais de procédure, dont la charge est répartie entre les autres copropriétaires,

Et statuant à nouveau de ces chefs,

- déclarer M. [C] et la société RIVIERA HORIZON irrecevables en leurs demandes, à tout le moins mal fondés,

- débouter M. [C] et la société RIVIERA HORIZON de l'intégralité de leurs demandes et particulièrement de la demande d'autorisation de pose d'enseigne,

- le condamner à verser au syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 9] les sommes de:

* 469,68 € au titre des frais de constat établi,

* 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile de première instance et 5.000 € au titre des frais irrépétibles d'appel, outre les entiers dépens.

Il reproche en premier lieu au tribunal d'avoir autorisé les travaux à la SARL RIVIERA et à M. [C] alors que de telles demandes étaient irrecevables:

- seule la société RIVIERA HORIZON, simple locataire et non copropriétaire a sollicité dans ses écritures une autorisation judiciaire visant la pose d'une enseigne lumineuse, à l'exclusion de M. [C],

- le premier juge a donc statué ultra petita et méconnu l'objet du litige en statuant au profit de M. [C] qui n'avait rien demandé,

- la société RIVIERA HORIZON, locataire occupante et non copropriétaire, n'avait pas qualité pour former une telle demande qui était en conséquence irrecevable,

- seul M. [C] avait qualité à porter la demande d'autorisation judiciaire devant le juge, ce

qu'il n'a pas fait dans ses dernières conclusions déposées en première instance,

- la cour ne pourra que réformer le jugement déféré et constater l'irrecevabilité de la demande de la société RIVIERA HORIZON.

Il soutient qu'en tout état de cause, le refus de la copropriété d'autoriser les travaux portant sur la pose d'enseigne lumineuse était parfaitement légitime aux motifs que:

- il n'est débiteur d'aucune obligation consistant à permettre à M. [C] d'apposer deux enseignes, qui sont en réalité des vitrines, qui plus est lumineuses sur les parties communes de l'immeuble et notamment sur le mur mitoyen au hall d'entrée de l'immeuble, le tout nonobstant la destination de haut standing de l'immeuble,

- M. [C] n'a fourni, avec le projet de résolution pour permettre à l'assemblée de se prononcer sur la conformité des travaux sollicités à la destination de l'immeuble, que des informations plus que succinctes, aucune précision n'étant donnée sur les matériaux utilisés, le mode de fixation dans la façade de l'immeuble, ni sur l'impact de la luminosité de l'enseigne sur les copropriétaires concernés, étant souligné qu'il n'incombait pas à la copropriété de prévoir les modalités d' implantation et de dimension de l'ouvrage en cause,

- il ne peut être retenu de ce que la précédent exploitant du local commercial avait apposé une enseigne au même endroit alors que:

* le précédent exploitant n'avait jamais reçu la moindre autorisation en ce sens de l'assemblée générale, une éventuelle tolérance ne pouvant constituer un droit acquis au bénéfice de M. [C],

* le précédent exploitant, lorsqu'il a cédé son local, a retiré la vitrine apposée sans autorisation, confirmant ainsi le caractère illicite de sa construction,

- c'est donc à bon droit que le syndicat des copropriétaires a, souverainement, refusé d'autoriser les travaux sollicités, M. [C] et la société RIVIERA HORIZON ne rapportant pas la preuve d'un quelconque abus de majorité, l'assemblée étant parfaitement en droit de mettre fin à une tolérance, même ancienne.

Il considère, de surcroît, que de tels travaux sont contraires à la destination de l'immeuble de grande standing, en première ligne sur la [Localité 7] à [Localité 3], ce que confirment les stipulations du règlement de copropriété qui comportent une clause d'harmonie extérieure, une interdiction de principe ( sauf autorisation de l'assemblée générale) d'apposition d'enseignes, écriteaux ou plaques et d'importantes restrictions d'activités quant au mode d'occupation des lots à usage de magasins. Il précise que l'enseigne en cause, lumineuse et bleue, sur la façade de l'immeuble en marbre perpendiculaire à sa boutique est totalement contraire à la destination de cet immeuble, qu'il n'en existe d'ailleurs aucune, l'obtention d'une autorisation administrative étant uniquement un préalable à toute demande d'apposition d'une enseigne à l'assemblée générale, la pose d'une enseigne ne pouvant constituer un droit acquis au copropriétaire. Il fait ainsi grief au premier juge d'avoir confondu le droit à l'enseigne, qui concerne les relations bailleurs-locataires et en rien la copropriété avec les travaux d'apposition d'une enseigne.

Il en conclut que l'autorisation judiciaire de travaux donnée par le tribunal ne pourra qu'être infirmée.

Il sollicite en revanche la confirmation du jugement querellé en ce qu'il a débouté M. [C] et la société RIVIERA HORIZON de leurs demandes indemnitaires:

- s'agissant de la demande de la société RIVIERA HORIZON:

* les pièces du dossier établissement qu'entre 2014 et 2015, son chiffre d'affaires a été multiplié par 4, de sorte qu'elle n'a subi aucun désagrément et n'a manifestement pas été empêchée d'acquérir une nouvelle clientèle,

* elle a loué les lieux dans leur configuration actuelle et il lui appartient de rechercher la responsabilité de son bailleur si celui-ci a manqué à son obligation de délivrance,

- s'agissant de la demande de M.[C]:

* aucun travaux n'a été effectué dans son local,

* rien n'explique un montant aussi élevé par rapport aux désordres allégués,

* la facture produite est dépourvue de toute valeur probante.

La SARL IMMODA , exerçant sous l'enseigne RIVIERA HORIZON et M. [S] [C], suivant leurs dernières conclusions déposées et signifiées le 17 décembre 2018, demandent à la cour de:

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a autorisé M. [S] [C], copropriétaire et la SARL IMMODA, preneur du local commercial, à poser une enseigne et une vitrine à deux portes sur le côté latéral du local commercial, conformément à l'autorisation administrative obtenue et aux plans et documents fournis par M. [C] à l'assemblée générale des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 9] du 20 septembre 2013,

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [C] de sa demande d'indemnisation au visa de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965,

- dire et juger que M. [C] est bien fondé à solliciter l'indemnisation de son préjudice résultant du vice de construction affectant les parties communes de l'immeuble,

- condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 9] à payer à M. [C] la somme de 6.425,15 € en réparation du préjudice matériel subi,

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la SARL IMMODA, exerçant sous l'enseigne RIVIERA HORIZON, de sa demande d'indemnisation de son préjudice économique et de sa perte de chance de gagner une nouvelle clientèle,

- condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 9] à payer à la SARL IMMODA, exerçant sous l'enseigne RIVIERA HORIZON la somme de 97.164,50 € en réparation de ses préjudices économiques,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 9] de sa demande de remboursement par M. [C] des frais de constat exposés et de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fait droit à la demande d'application de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965 au bénéfice de M. [C],

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [C] et la SARL IMMODA, exerçant sous l'enseigne RIVIERA HORIZON de leurs demandes au bénéfice de l'article 700 du code de procédure civile en première instance,

- condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 9] à payer à M. [C] et la SARL IMMODA, exerçant sous l'enseigne RIVIERA HORIZON la somme de 2.000 € chacun en application de l'article 700 du code de procédure civile en première instance,

- condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 9] à payer à M. [C] et la SARL IMMODA, exerçant sous l'enseigne RIVIERA HORIZON la somme de 3.000 € chacun en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

- condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 9] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Ils sollicitent la confirmation du jugement déféré s'agissant de l'autorisation qui leur a été donnée de poser l'enseigne et la vitrine:

- l'enseigne et les vitrines querellées existent depuis plus de 10 ans au soutien de l'activité de l'ancien preneur du local commercial, sans que le syndicat des copropriétaires n'émette la moindre protestation

- des contestations sont apparues à compter de l'exploitation de l'activité d'agence immobilière par la SARL IMMODA, activité concurrente de celle exercée par la société exploitée par le président du conseil syndical,

- les stipulations du règlement de copropriété et plus particulièrement les articles 36 et 37 qui imposent l'obtention d'une autorisation administrative ont été respectées, en l'occurrence une autorisation de la commune de [Localité 3] en date du 23 mai 2013,

- il est établi par la production de photographies des lieux et du procès-verbal de constat d'huissier que la pose de l'enseigne lumineuse envisagée ne porte pas atteinte à l'harmonie et à l'esthétique de l'immeuble au regard des enseignes existantes et de celle apposée par leur prédécesseur, sans aucune objection de la copropriété,

- l'habillage de l'enseigne proposé est d'ailleurs identique à celui qui existait précédemment et correspond à l'aluminium couleur champagne de la résidence,

- les lettres bleues sur fond blanc sont exactement les mêmes que celles reprises par l'agence immobilière voisine dans sa vitrine au sein de la même copropriété, aucune poursuite n'étant pourtant diligentée contre ce propriétaire qui utilise dans sa vitrine des codes couleur identique et sur une surface plus importante,

- le refus apposé par l'assemblée générale est abusif car fondé exclusivement sur les intérêts personnels du président du conseil et non sur la protection des intérêts de la copropriété et elle conduirait en outre, au regard des éléments susvisés, à une rupture d'égalité entre les droits des copropriétaires.

Ils ajoutent que la demande est parfaitement recevable pour avoir été présentée par M. [C], copropriétaire, qui a sollicité l'autorisation de porter à l'ordre du jour de l'assemblée la question de la pose de cette enseigne, ce dernier était par ailleurs partie en première instance comme en cause d'appel.

Ils reprochent en revanche au premier juge d'avoir rejeté leurs demandes d'indemnisation quant à leurs différents préjudices:

- sur le préjudice de M. [C]:

* celui-ci a exposé des frais à raison d'un sinistre inhérent au vice de construction affectant les parties communes,

* il ressort d'un rapport d'expertise amiable que la responsabilité de l'appelant est entière mais celui-ci persiste à refuser de prendre en charge les frais de réparation de son local suite à cette infiltration,

* il justifie que les travaux ont bien été réalisés et payés contrairement aux allégations adverses,

- sur le préjudice de la SARL IMMODA:

* l'opposition abusive du syndicat d'autoriser la pose de l'enseigne lumineuse est à l'origine d'un défaut de publicité et par là du'ne baisse du chiffre d'affaires ainsi que d'une perte de chance de gagner une nouvelle clientèle, comme l'attestent les pièces comptables,

* elle évalue son préjudice à 50 % du chiffre d'affaires.

La procédure a été clôturée par ordonnance en date du 03 mars 2020.

MOTIFS

Sur la procédure :

Le syndicat des copropriétaires prétend que les demandes d'autorisation seraient irrecevables en rappelant la qualité de copropriétaire de M. [S] [C] et celle de locataire de la SARL IMMODA , exerçant sous l'enseigne commerciale SARL RIVIERA HORIZON.

Si les qualités juridiques des parties au procès ne peuvent être méconnues, la distinction opérée par le syndicat est purement artificielle. En effet, M. [S] [C], dont il convient de rappeler qu'il est aussi gérant de la SARL IMMODA, ne poursuit pas l'annulation de la délibération n° 20 refusant la pose d'une enseigne et vitrine mais tirant les conséquences de ce refus, a saisi le tribunal de grande instance de Grasse sur le fondement de l'article 30 de la loi du 10 juillet 1965 autorisant le juge à passer outre dans les conditions qu'il fixe.

Or M. [S] [C], copropriétaire, est bien l'auteur de la demande d'autorisation adressée au syndicat, destinataire du refus de l'assemblée générale, partie demanderesse en première instance et appelante principale devant la cour elle-même saisie de l'entier litige par le double appel et auquel elle doit mettre un terme définitif, de sorte qu'il importe peu que le premier juge ai statué ou non ultra petita.

Sur la demande d'autorisation de travaux :

Selon l'article 25 b de la loi du 10 juillet 1965, ne sont adoptées qu'à la majorité des votes de tous les copropriétaires, les décisions concernant l'autorisation donnée à certains copropriétaires d'effectuer à leurs frais des travaux affectant les parties communes ou l'aspect extérieur de l'immeuble et conformes à la destination de celui-ci.

En vertu de l'article 30 alinéa 4 du même texte, lorsque l'assemblée générale refuse l'autorisation prévue à l'article 25 b, tout copropriétaire ou groupe de copropriétaires peut être autorisé par le tribunal de grande instance à exécuter, aux conditions fixées par le tribunal.

L'article 36 du règlement de copropriété précise que la destination de l'immeuble [Adresse 9] est à usage principal d'habitation, que l'exercice de professions libérales est autorisé, de même que l'exercice de commerces dans les lots n° 98 et 99.

L'article 37- I, relatif à l'harmonie de l'immeuble, énonce que ' l'aspect extérieur des choses et parties communes devra être respecté sauf décision de l'assemblée des copropriétaires à la majorité des voix de tous les copropriétaires.'

L'article 37- II ' Enseignes et publicité' stipule que ' Tous écriteaux, plaques ou enseignes visibles de l'extérieur et décorations extérieures sont interdits sauf obligation légale ou décision de l'assemblée générale des copropriétaires, prise à la majorité des voix de tous les copropriétaires et sauf les exceptions ci-dessous '

Les exceptions mentionnées sont les suivantes:

1. La mise en vente ou location,

2. La pose d'une plaque à l'entrée du bâtiment dans les appartements dans lesquels est exercée une activité professionnelle,

3. Les locaux commerciaux, l'article 37- III précisant à cet égard que ' Les propriétaires des magasins au rez-de-chaussée, leurs locataires, preneurs ou occupants, devront obligatoirement pour l'apposition des écriteaux, plaques, enseignes et décorations extérieures, obtenir au préalable les autorisations nécessaires'.

C'est donc à, juste titre que le tribunal a retenu qu'au regard de ces stipulations, le principe est l'interdiction des enseignes, hormis, notamment, pour les locaux commerciaux du rez-de-chaussée, pour lesquels seule l'autorisation administrative ad hoc est exigée préalablement à la pose, sous réserve de respecter ' l'aspect extérieur des choses et parties communes' conformément à l'article 37-I.

Le règlement de copropriété autorise donc expressément la pose d'une enseigne pour les locaux commerciaux sous certaines conditions dont il convient de vérifier si elles sont remplies.

Il est constant que M. [S] [C] a réclamé expressément une telle autorisation de l'assemblée générale, qui si elle n'a pas à motiver son refus à une demande de réalisation de travaux, le syndicat cependant doit justifier de motifs sérieux et légitimes lorsque ce refus est soumis à la censure du juge dans les conditions prévues à l'article 30 de la loi du 10 juillet 1965, étant précisé que le juge qui statue en lecture de l'article 25 b) doit vérifier que les travaux sont conformes à la destination de l'immeuble. Or il ressort des pièces figurant aux dossiers respectifs des parties que:

-M. [S] [C] dispose des autorisations d'urbanisme visées au règlement de copropriété;

-il se propose de reprendre les aménagements réalisés en fin de l'année 2003 par la société Bourniquel Yachts, ancienne exploitante du local, travaux envers lesquels la copropriété n'a rien trouvé à redire ;

-quand bien même, celle-ci plaide que la tolérance n'est pas créatrice de droits, force est de constater qu'il est néanmoins justifié d'une tolérance décennale et donc d'une longueur certaine;

-les aménagements en façade sont identiques dans leurs couleurs et consistance à ceux de l'agence immobilière voisine exploitée dans l'immeuble par la famille [K],

-la copropriété n'explique pas en quoi l'enseigne et la vitrine telles que proposées seraient contraires à l'harmonie de la façade et à la destination de l'immeuble, fût-il « de grand standing », alors que le constant d'huissier versé aux débats par les intimés ainsi que les photographies démontrent que la pose de l'enseigne lumineuse envisagée ne porte pas atteinte à l'harmonie et l'esthétique de l'immeuble au regard notamment des enseignes qui existent déjà et de celle apposée par son prédécesseur,

-le vote de l'assemblée générale a été obtenu dans des circonstances tout à fait particulières sur lesquelles la copropriété demeure muette à savoir que M. [I] [K] disposait de 7 pouvoirs et que son conseil, également avocat du syndicat disposait de 3 pouvoirs, nonobstant une contradiction d'intérêt évidente.

Bien que la nullité de la délibération n'est pas en cause ici puisque la demande tend à palier un refus acquis et constaté, il convient de rappeler que l'abus de majorité procède d'un vote manifestement contraire à l'intérêt général adopté dans l'intérêt exclusif du groupe majoritaire au détriment du groupe minoritaire rompant ainsi l'équilibre entre les copropriétaires ou un vote effectué dans l'intention de nuire à certains d'entre eux ; le vote dont s'agit relève ainsi manifestement d'un tel abus tant la différence de traitement entre deux copropriétaires exerçant la même activité est flagrante et c'est avec pertinence que M. [S] [C] rappelle que les « contestations sont apparues étrangement à compter de l'exploitation de l'activité d'agence immobilière par la SARL IMMODA, activité concurrente de celle exercée par la société exploitée par le président du conseil syndical » (cf conclusions page 9).

Le syndicat ne peut donc sérieusement reprocher au premier juge d'avoir considéré que son refus était abusif ; en tout cas, au visa de l'ensemble des éléments qui viennent d'être exposés, il ne justifie pas de motif sérieux et légitimes au soutien de sa décision, ce qui conduit à la confirmation du jugement autorisant les travaux.

Sur les demandes indemnitaires des intimés :

1/sur le préjudice économique :

L'enseigne, élément essentiel d'un fonds de commerce en assure la publicité auprès du chaland et participe nécessairement à son activité ; son absence peut occasionner la perte d'une chance d'un meilleur développement de la clientèle. Cependant cette affirmation de principe ne suffit pas à caractériser le préjudice économique invoqué par la SARL IMMODA dont la charge de la preuve lui incombe.

Elle produit des attestations de son expert-comptable (cf pièces n° 8 et 23 de son dossier) extrêmement succinctes limitées au résultat net comptable des exercices 2014, 2015 ,2016 et 2017 sans explication, commentaire ou analyse. Le syndicat observe que le chiffre d'affaires est en augmentation depuis la création de l'activité ; la SARL IMMODA ne produit pas d'éléments nouveaux en appel permettant une meilleure approche.

C'est donc à bon droit que le premier juge a considéré que le préjudice économique n'était pas objectivé ; le rejet de la demande en paiement de dommages-intérêts de ce chef est confirmé.

2/sur le préjudice matériel :

Il est admis que le local de M. [S] [C] a subi des infiltrations d'eau en provenance de la façade et qu'en suite des rapports d'expertise des experts d'assurances intervenus dans les lieux, la copropriété a finalement autorisé M. [S] [C] à faire poser en façade une casquette de protection.

Les parties débattent de la pertinence d'une facture de travaux internes de réfection à concurrence de 6415,25 € émanant d'une entreprise radiée du registre du commerce depuis un an avant l'émission de la facture.

Cependant, la cour ne trouve au dossier de M. [S] [C] qu'un devis en date du 11 mai 2016 pour ce montant et un extrait de compte bancaire de la SARL IMMODA pour la période du 1er au 30 juin 2016 duquel le virement à titre de paiement ne figure aucunement (cf pièces n°9 et 10) ; le rapport d'expertise amiable de l'assureur en date du 26 avril 2016 (cf pièce n° 19) ne renseigne aucunement sur la nature et l'ampleur des dommages ; le procès-verbal de constat du 20 mars 2017 (pièce n° 20) ne le fait pas plus.

Le dommage matériel n'étant pas plus caractérisé, le jugement mérite également confirmation de ce chef.

Sur le surplus des demandes :

La preuve des faits étant libre, les pièces qui les établissent sont laissées à la discrétion des parties de telle sorte qu'un constat d'huissier réalisé à la seule initiative de l'une d'elles ne relève pas des dépens énumérés à l'article 695 du code de procédure civile ; par contre son coût peut être retenu au titre des frais visés à l'article 700 du même code.

La dispense de participation d'un copropriétaire aux charges communes issues des frais de procédure lorsque le bien-fondé de son action est reconnu par la juridiction est la stricte application des dispositions de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965.

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Vu l'article 696 du code de procédure civile,

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Grasse déféré en toutes ses dispositions;

Y ajoutant,

Condamne le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 9] à payer à M. [S] [C] et à la SARL IMMODA, exerçant sous l'enseigne RIVIERA HORIZON la somme de 3.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile en appel ;

Le condamne aux dépens d'appel avec faculté de recouvrement direct dans les termes de l'article 699 du même code.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 18/02179
Date de la décision : 28/01/2021

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 4A, arrêt n°18/02179 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2021-01-28;18.02179 ?
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