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26/11/2020 | FRANCE | N°16/02802

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 26 novembre 2020, 16/02802


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 26 NOVEMBRE 2020

hg

N° 2020/ 270













Rôle N° RG 16/02802 - N° Portalis DBVB-V-B7A-6DZZ







[N] [H] épouse [W]





C/



[Y] [H] épouse [T]



















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE



SELARL UGGC AVOCATS









Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 01 Février 2016 enregistrée au répertoire général sous le n° 13/11256.





APPELANTE



Madame [N] [H] épouse [W]

demeurant [Adresse 3] - [Localité 2]



représentée par la SELARL LEXAVOUE BOULA...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 26 NOVEMBRE 2020

hg

N° 2020/ 270

Rôle N° RG 16/02802 - N° Portalis DBVB-V-B7A-6DZZ

[N] [H] épouse [W]

C/

[Y] [H] épouse [T]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE

SELARL UGGC AVOCATS

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 01 Février 2016 enregistrée au répertoire général sous le n° 13/11256.

APPELANTE

Madame [N] [H] épouse [W]

demeurant [Adresse 3] - [Localité 2]

représentée par la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Michel HUGUES, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

INTIMEE

Madame [Y] [H] épouse [T]

demeurant [Adresse 3] - [Localité 2]

représentée par Me Clarisse BAINVEL de la SELARL UGGC AVOCATS, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Naïma BELARBI, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 22 Septembre 2020 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Hélène GIAMI, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Marie-Florence BRENGARD, Président

Madame Hélène GIAMI, Conseiller

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 26 Novembre 2020.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 26 Novembre 2020,

Signé par Madame Marie-Florence BRENGARD, Président et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE :

Le bien immobilier cadastré section C n° [Cadastre 1] pour 29 ares 90 centiares, lieudit [Adresse 3] à [Localité 2] où est édifiée la « [Adresse 3] » a fait l'objet d'un état descriptif de division-règlement de copropriété établi par Maître [P] [V], notaire à [Localité 5] le 15 février 1979, publié au bureau des hypothèques de Marseille le 19 avril 1979, volume 4832 numéro 1.

Le bien a été divisé en 3 lots décrits comme suit :

lot n°1 :

la totalité du rez-de-chaussée de la maison comprenant un appartement de trois pièces principales, une cuisine, un hall d'entrée, une salle de bain, une véranda par laquelle on accède audit appartement, une buanderie, un local à usage de chaufferie, une cour avec passage d'accès située à l'Est de la maison, divers débarras au Sud, et un escalier d'accès au débarras situé à l'entresol formant le lot numéro deux ci-après désigné; le tout portant les n°l, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9 et 18 du plan annexé à la minute du règlement de copropriété;

la jouissance privative du jardin situé au Nord de la maison, d'une superficie d'environ

1 416 m², portant le n°20 et ceinturé en rouge sur le plan ;

et 474/1.000èmes indivis du sol ;

lot n°2:

le débarras situé à l'entresol avec un balcon au Nord, auquel on accède par un escalier partant de la cour située au rez-de-chaussée, portant le n°15 du plan ' et ceinturé en rouge sur le plan ;

et 8/1.000èmes indivis du sol ;

lot n°3 :

la totalité du premier étage de la maison, comprenant un appartement de deux pièces principales, une cuisine, une salle de bains, un hall d'entrée avec un escalier d'accès au deuxième étage, une terrasse au Nord, une terrasse dans l'angle Nord-Est, une terrasse dans l'angle Nord-Ouest, une terrasse dans l'angle Sud-Ouest avec escalier d'accès au jardin, portant les n°10, 11, 12, 13 et 14 sur le plan annexé à la minute du règlement de copropriété ;

la totalité du deuxième étage de la maison, comprenant un appartement de trois pièces principales, une cuisine, une salle de bain, un water-closet, un hall d'entrée, escalier d'accès par le premier étage, et une terrasse au Sud, portant les n°16 et 17 du plan;

la jouissance privative du jardin situé au Sud et à l'Ouest de la maison, d'une superficie d'environ 1 110 m² environ, portant le n°19 et ceinturé en jaune sur le plan ;

et 518/1.000èmes indivis du sol.

Par l'acte du 15 février 1979, [N] [H] épouse [W] s'est vu attribuer la nue-propriété des lots 1 et 2 et [Y] [H] épouse [T] s'est vu attribuer la nue-propriété du lot 3.

Par acte de donation-partage entre vifs du 14 décembre 1995, [K] [G] veuve [H] a fait donation de l'usufruit des lots 1 et 2 à [N] [H] épouse [W] et du lot 3 à [Y] [H] épouse [T] .

Par acte d'huissier du 8 janvier 2013, [N] [H] épouse [W] a fait assigner en référé [Y] [H] épouse [T] aux fins de la voir condamner sous astreinte à :

-lui donner une clé de la serrure du portail qu'elle a fait changer,

-faire reprogrammer le système d'ouverture automatique de ce portail de façon à ce que les télécommandes dont elle dispose puissent assurer à nouveau cette ouverture,

-supprimer l'appentis qu'elle a fait édifier entre le portail et l'espace commun de parking et remettre en état son jardin de façon à ce que l'accès à cet espace soit possible

-remettre en état l'assiette du chemin d'accès, figurant sur les plans de la mise en copropriété, afin de lui permettre d'accéder à ses parties privatives avec tous véhicules,

-lui payer 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance de référé du 24 mai 2013, [N] [H] épouse [W] a été déboutée de ses prétentions et condamnée à payer 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile à [Y] [H] épouse [T].

Par acte d'huissier du 28 août 2013, [N] [H] épouse [W] a fait assigner [Y] [H] épouse [T] devant le tribunal de grande instance de Marseille aux fins de :

-voir dire et juger que le portail d'entrée aménagé dans la clôture sur rue est un élément des parties communes de la copropriété,

-voir dire et juger qu'[Y] [H] épouse [T] n'était pas en droit, sans décision préalable de l'assemblée générale, de faire changer la serrure de ce portail et modifier la programmation de son système d'ouverture automatique,

-la voir condamner en conséquence, sous astreinte de 500 € par jour de retard courant à compter de la signification du jugement à :

*lui remettre une clé de la nouvelle serrure du portail

faire reprogrammer le système d'ouverture automatique dudit portail de façon à ce que les télécommandes dont elle dispose puissent assurer à nouveau cette ouverture,

-voir dire et juger qu'[Y] [H] épouse [T] doit la laisser ainsi qu'aux personnes de son chef accéder à pied et par tout véhicule, à travers la partie de terrain à usage de jardin attachée au lot n° 3, à l'espace commun à usage de parking ou garage situé à l'angle Sud Ouest du terrain servant d'assise à la copropriété,

-la voire condamner sous astreinte de 500 € par jour de retard courant à compter de la signification du jugement à intervenir à :

*laisser un tel passage pour y accéder,

*enlever la végétation qu'elle a laissé se développer aux abords de cette aire et qui empêchent d'y accéder en véhicule,

* enlever l'appentis et l'étendage fixe implantés aux abords de la zone

* remettre en état son terrain afin que les véhicules précités puissent accéder à cette aire et en ressortir,

-voir dire et juger qu'elle conserve à tout le moins, sur le jardin attaché au lot n° 3, une servitude de passage sur une largeur de 3 mètres de large suivant le chemin figurant sur le plan de la mise en copropriété, afin de permettre l'accès des véhicules de déménagement au jardin attaché au lot n°1,

-la voir condamner, sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter de la signification du jugement, à remettre en état l'assiette du chemin qui existait avant qu'elle ne le fasse défoncer, de manière à ce que de tels véhicules de déménagement puissent accéder à son jardin,

-entendre dire et juger qu'elle doit, en application des dispositions de l'article 682 du code civil, disposer, au surplus, sur l'assiette du chemin précité, d'un passage pour tous véhicules de son chef et tous véhicules de sécurité civile, afin d'accéder au jardin attaché au lot n°1 dont elle est propriétaire,

-voir dire et juger qu'[Y] [H] épouse [T] devra laisser un tel passage sur le jardin attaché au lot n° 3,

-la voir condamner à lui payer :

* 5 000 € de provision à valoir sur l'indemnisation de son préjudice,

* 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- la voir condamner aux entiers dépens,

- assortir le jugement de l'exécution provisoire.

Par jugement du tribunal de grande instance de Marseille du 1er février 2016 :

- [N] [H] épouse [W] a été déboutée de toutes ses prétentions,

- [Y] [H] épouse [T] a été déboutée de sa demande de dommages et intérêts,

- [N] [H] épouse [W] a été condamnée aux dépens ainsi qu'à payer à [Y] [H] épouse [T] la somme de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 18 février 2016, [N] [H] épouse [W] a relevé appel de cette décision.

Par arrêt mixte et avant dire droit du 5 octobre 2017, la cour a :

- dit que les lots n° 1 et 2 faisant partie de la copropriété cadastrée section C n° [Cadastre 1] pour 29 ares 90 centiares, lieudit [Adresse 3] à [Localité 2] étaient enclavés,

- avant dire droit sur les prétentions des parties,

- désigné [B] [L] en qualité d'expert, avec mission de :

-se rendre sur les lieux, se faire remettre tous documents utiles,

- indiquer si deux emplacements de stationnement peuvent être réalisés à 'angle sud-ouest de la copropriété tel que délimité dans le plan annexé au règlement de copropriété,

- rechercher les solutions possibles pour désenclaver les lots n° 1 et 2 faisant partie de la copropriété cadastrée section C n° [Cadastre 1] pour 29 ares 90 centiares, lieudit [Adresse 3] à [Localité 2], et indiquer le trajet le plus court de la voie publique à l'emplacement de stationnement en le fixant dans l'endroit le moins dommageable au fonds servant;

-indiquer l'assiette, la largeur, le tracé et les conditions d'aménagement du passage ainsi déterminé, et établir le plan, si plusieurs tracés apparaissent possibles,

-fournir toutes précisions permettant de déterminer celui qui serait le plus court et le moins dommageable ;

-préciser en fonction des emprises et des travaux d'aménagement qui seraient nécessaires pour l'établissement de ce passage, les éléments d'évaluation des indemnités proportionnées aux dommages qu'il peut occasionner.

Le pourvoi en cassation contre cette décision a été rejeté par arrêt du 15 novembre 2018.

L'expert a déposé son rapport le 8 octobre 2019 en proposant quatre solutions.

Par ses dernières conclusions remises au greffe et signifiées le 18 mai 2020, auxquelles il convient de se référer pour un exposé détaillé des moyens et prétentions, [N] [H] épouse [W] sollicite :

- le rejet des moyens de défense et de l'appel incident d'[Y] [H] épouse [T],

- la réformation du jugement ;

- le rejet des prétentions adverses,

ajoutant à l'arrêt mixte:

-de voir dire et juger que le portail d'entrée aménagé dans la clôture sur rue est un élément des parties communes de la copropriété,

-de voir dire et juger qu'[Y] [H] épouse [T] n'était pas en droit, sans décision préalable de l'assemblée générale, de faire changer la serrure de ce portail et modifier la programmation de son système d'ouverture automatique,

-la voir condamner en conséquence, sous astreinte de 500 € par jour de retard courant à compter de la signification du jugement à :

-lui remettre une clé de la nouvelle serrure du portail

-faire reprogrammer le système d'ouverture automatique dudit portail de façon à ce que les télécommandes dont elle dispose puissent assurer à nouveau cette ouverture,

-dire et juger que [N] [H] épouse [W] dispose toujours, en conformité avec les termes de l'acte reçu le 15 février 1979 par Me [P] [V], notaire à [Localité 5], d'une double servitude de passage sur le jardin attaché au lot n°3 de la propriété d'[Y] [H] épouse [T],

o l'une, afin de lui permettre d'accéder, à pied, de ses parties privatives en rez-de- chaussée, à l'emplacement commun réservé à usage de parkings ou de garages situé à l'angle Sud-Est de la copropriété et à en revenir également à pied,

o l'autre, destinée à permettre l'accès aux parties privatives de ses lots numéros 1 et 2 à partir du chemin du Roucas Blanc, à tous véhicules de déménagement ou de transport de matériaux de construction, ce sur une longueur de 8 mètres et sur une largeur de trois mètres,

-dire et juger qu'[Y] [H] épouse [T] sera débitrice au profit de [N] [H] épouse [W] d'une astreinte de 500 € pour toute entrave ou gène à l'exercice de ces servitudes,

Dans la mesure où la Cour estimerait que

o elle n'a pas, par son arrêt prononcé le 5 décembre 2017, jugé de façon définitive que la propriété de [N] [H] épouse [W] est enclavée et doit, en conformité avec les dispositions de l'article 682 du code civil, bénéficier d'un accès pour tous véhicules,

o elle n'a pas, en conséquence, rejeté les demandes qui étaient formées par [N] [H] épouse [W] et qui tendaient à se voir reconnaître un tel droit de passage sur d'autres fondements juridiques,

-dire et juger que [N] [H] épouse [W] a acquis un tel droit de passage par prescription acquisitive ou par destination du père de famille, que l'assiette de ce droit de passage correspond au tracé hachuré en bleu figurant sur le plan constituant l'annexe 4 du rapport de M. [B] [L] et qu'[Y] [H] épouse [T] devra laisser un tel passage sur l'assiette ainsi définie,

-condamner, dès lors, [Y] [H] épouse [T], sous astreinte de 500 € par jour de retard courant à compter de la signification de l'arrêt à intervenir à remettre 1'assiette du passage en état de servir de voie d'accès, selon les dimensions figurant sur ce plan, sous réserve de toute demande ultérieure d'élargissement.

-la condamner aussi, sous l'astreinte précitée, à :

o Supprimer tous les obstacles qu'elle a créés pour empêcher un tel passage

o Démolir ainsi la zone du jeu de boules qu'elle a irrégulièrement aménagée

o Supprimer les dénivelés de terrain créés et remettre le terrain à son niveau antérieur en restituant à la voie d'accès la planéité et la pente dont disposait son assiette.

-dans la mesure où la Cour estimerait que, par son arrêt prononcé le 5 décembre 2017, elle a jugé de façon définitive que la propriété de [N] [H] épouse [W] est enclavée et doit, en conformité avec les dispositions de l'article 682 du code civil, bénéficier d'un accès pour tous véhicules,

-dire et juger [N] [H] épouse [W] a prescrit l'assiette de la servitude de passage dont elle doit bénéficier, réserve de toute demande ultérieure d'élargissement.

-la condamner ainsi, sous l'astreinte précitée, à :

o Supprimer tous les obstacles qu'elle a créés pour empêcher un tel passage

o Démolir ainsi la zone du jeu de boules qu'elle a irrégulièrement aménagée

o Supprimer les dénivelés de terrain créés et remettre le terrain à son niveau antérieur en restituant à la voie d'accès la planéité et la pente dont disposait son assiette,

-dire et juger, au surplus, que [N] [H] épouse [W] est en droit d'obtenir, sous réserve de l'obtention des autorisations administratives requises, la création à son profit de deux emplacements de parking, dans la zone jouxtant le [Adresse 4], prévue lors de la mise en copropriété, située à l'angle Sud-Ouest du terrain servant d'assise à cette copropriété

-dire et juger que l'arrêt à intervenir sera publié au deuxième bureau de la Conservation des Hypothèques de Marseille.

-condamner [Y] [H] épouse [T] à lui payer :

35 000 € en indemnisation du préjudice qu'elle lui a causé

' 8 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

-la-condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel, y compris les frais de l'expertise, avec distraction pour ceux d'appel dans les conditions prévues par l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 2 décembre 2019, auxquelles il convient de se référer pour un exposé détaillé des moyens et prétentions, [Y] [H] épouse [T] entend, au visa de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, des articles 682, 692 à 695, 703, 1103, 1104 et 1193 du code civil :

-être déclarée recevable et bien fondée dans ses conclusions,

Sur l'absence de servitude légale :

- voir relever qu'en application de l'article 682 du code civil, l'enclave volontaire ne peut aucunement donner lieu à réclamation d'un droit de passage.

- voir dire et juger qu'il n'existe aucune servitude légale en véhicule grevant son fonds au profit du fonds de [N] [H] épouse [W],

- voir confirmer le jugement de première instance sur ce point.

Sur l'absence de servitude conventionnelle :

- voir relever que la servitude conventionnelle réclamée par [N] [H] épouse [W] n'existe plus du fait des travaux que cette dernière a réalisé,

- voir relever qu'en l'état actuel des choses il est impossible d'user de la servitude conventionnelle,

- voir dire et juger que la servitude conventionnelle réclamée par [N] [H] épouse [W] est éteinte,

- voir infirmer le jugement de 1ère instance sur ce point et statuant à nouveau dire et juger que la servitude conventionnelle de passage pour déménagement et travaux est éteinte,

Si par extraordinaire la Cour devait considérer que la servitude n'était pas éteinte :

- voir dire et juger que cette servitude est strictement limitée au passage de véhicules de déménagement ou de transport de matériaux de construction et qu'elle est limitée à une largeur de trois mètres et une longueur de huit mètres et ne peut être utilisée quotidiennement par tous véhicules.

Sur l'absence de servitude par destination du père de famille (article 692 à 694 C.civ.)

- voir relever que les actes de donation ont prévu des accès différents que ceux existants initialement.

- voir dire et juger que les conditions de division du fonds prévu par les actes de donation ont écarté le maintien des accès pré-existants.

- voir dire et juger que l'existence d'une servitude par destination du père de famille est écartée par des dispositions contraires de l'acte de division.

- voir confirmer le jugement entrepris sur ce point.

Sur l'absence de servitude par prescription acquisitive

- voir relever qu'il n'existe aucune prescription acquisitive s'agissant de servitude.

- voir relever que même un usage prolongé dans le temps du droit litigieux ne suffit pas pour se prévaloir d'une servitude de passage.

- voir relever que les servitudes ne peuvent être établies que par titre.

- voir dire et juger que [N] [H] épouse [W] ne peut se prévaloir d'aucune servitude sur le fonds de [Y] [H] épouse [T] qu'elle aurait acquis par l'usage.

- voir confirmer le jugement entrepris sur ce point.

Sur l'utilisation par [N] [H] épouse [W] du portail d'accès à son lot :

- relever que la demande de [N] [H] épouse [W] d'obtenir les clés et/ou une télécommande d'ouverture de son portail afin de pouvoir passer par ledit portail, à pied ou en véhicule, est infondée.

- relever que le portail ne peut constituer une partie commune puisqu'il ne dessert que le jardin dont la jouissance privative lui a été attribuée,

- voir rejeter la demande de [N] [H] épouse [W] d'obtenir un droit de passage quotidien et par tous véhicules par son portail,

- voir confirmer le jugement sur ce point,

Sur sa demande de dommages et intérêts :

- relever que [N] [H] épouse [W] fait preuve de mauvaise foi et est animée d'attention malveillante à son égard,

- voir dire et juger que la procédure engagée par [N] [H] épouse [W] présente les caractères d'une procédure abusive,

- voir dire et juger que [N] [H] épouse [W] devra lui verser la somme de

10 000 € en compensation du préjudice causé par le caractère abusif de la procédure engagée par [N] [H] épouse [W].

- infirmer le jugement et condamner [N] [H] épouse [W] à lui payer

10 000 € de dommages et intérêts,

Sur la demande de dommages et intérêts de [N] [H] épouse [W] :

- relever que [N] [H] épouse [W] n'a subi aucun préjudice,

- relever que [N] [H] épouse [W] fait preuve de carence dans l'établissement de la preuve de son préjudice,

- voir dire et juger que les demandes de dommages et intérêts de [N] [H] épouse [W] pour le montant de 20 000 € sont infondées.

- voir confirmer le jugement entrepris sur ce point.

- voir débouter [N] [H] épouse [W] de son appel et de l'ensemble de ses demandes en les disant mal fondées,

- voir condamner [N] [H] épouse [W] à lui payer 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- la voir condamner aux entiers dépens.

à titre subsidiaire :

- voir dire et juger que la solution 2 proposée par l'expert est la solution pour désenclaver le lot n°l ;

- voir désigner un expert afin d'estimer l'indemnité devant lui être versée ;

- enjoindre à Madame [W] de déposer une demande d'autorisation auprès des services instructeurs de la mairie de [Localité 2] reprenant la solution n°2 exposée dans le rapport d'expertise déposé le 2 octobre 2019.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 26 mai 2020.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur l'existence d'une servitude de passage :

Par l'arrêt mixte et avant dire droit du 5 octobre 2017, la cour a définitivement jugé que les lots n°1 et 2 faisant partie de la copropriété cadastrée section C n° [Cadastre 1] pour 29 ares 90 centiares, lieudit [Adresse 3] à [Localité 2] étaient enclavés.

[N] [H] épouse [W] soutient avoir prescrit l'assiette de la servitude de passage dont elle doit bénéficier et qui est figurée par le tracé hachuré en bleu sur le plan, annexe 4 du rapport de [B] [L].

A ce propos, [Y] [H] épouse [T] réplique qu'on ne peut prescrire une servitude de passage et que même un usage prolongé ne permet pas de se prévaloir d'une servitude de passage.

S'il est exact qu'en application de l'article 691 du code civil, une servitude de passage, discontinue, ne s'acquiert que par un titre, en cas d'état d'enclave, établi en l'espèce, l'assiette ( et le mode) de la servitude de passage peut se prescrire par trente ans d'usage continu, en vertu de l'article 685 du code civil.

Lorsque la copropriété a été créée le 15 février 1979, il existait un chemin figuré sur la plan 0 du rapport d'expertise qui a été utilisé depuis l'origine par [N] [H] épouse [W] dans son tracé figuré par hachures bleues sur le plan-annexe 4 du rapport de [B] [L], pour accéder à ses lots à partir du portail ouvrant au niveau du [Adresse 3], jusqu'à ce qu'[Y] [H] épouse [T], qui avait tenté en vain de trouver un accord sur d'autres solutions, change les serrures du portail et interdise l'accès par cette entrée à sa soeur en 2012, puis entreprenne des travaux sur le passage utilisé jusque là.

C'est dès lors à juste titre que [N] [H] épouse [W] revendique la prescription acquisitive de l'assiette de passage utilisée entre 1979 et 2012 pendant plus de 30 ans, au cours desquels les parties n'ont pas mis en place les autres solutions de stationnement et cheminements prévues par le règlement de copropriété, étant précisé que [N] [H] épouse [W] stationne ses véhicules sur son terrain dans les conditions qui lui appartiennent.

Il convient en conséquence de faire droit à ses demandes tendant à se voir reconnaître le bénéficie d'une servitude de passage, suivant le tracé figuré en hachures bleues sur le plan-annexe 4 du rapport d'expertise, et de condamner [Y] [H] épouse [T] à supprimer tous les obstacles installés sur ledit passage et à remettre la clé et/ou les télécommandes du portail ouvrant sur le chemin au niveau du [Adresse 3], en tant qu'accessoire de la servitude, et bien que le portail ne puisse être considéré comme une partie commune puisqu'il dessert la partie privative d'[Y] [H] épouse [T].

Il n'y a pas lieu de préciser quels travaux sont utiles à la suppression des obstacles alors qu'aucun document précis ne permet de situer la zone du jeu de boules ou les dénivelés de terrain qu'il est demandé de supprimer.

[Y] [H] épouse [T] devra respecter les obligations mises à sa charge dans un délai de deux mois à compter de la signification de cette décision, sous astreinte passé ce délai de 100 euros par jour de retard pendant trois mois.

La prescription de l'assiette de la servitude de passage exclut le droit à indemnisation du fonds servant, en application des articles 682 et 685 du code civil.

Cette prescription étant acquise, les demandes subsidiaires d'[Y] [H] épouse [T] tendant à voir retenir la solution 2 de l'expert, à désigner à nouveau un expert pour estimer l'indemnité lui revenant ou à enjoindre à Madame [W] de déposer une demande d'autorisation auprès des services instructeurs de la mairie de [Localité 2] reprenant la solution n°2 du rapport d'expertise ne peuvent qu'être rejetées.

De même, ses demandes tendant à voir dire et juger qu'elle dispose toujours, en conformité avec les termes de l'acte reçu le 15 février 1979 par Me [P] [V], notaire à [Localité 5], d'une double servitude de passage sur le jardin attaché au lot n°3 de la propriété d'[Y] [H] épouse [T], ne peuvent qu'être rejetées dès lors que par l'arrêt avant dire droit devenu définitif, elle a été reconnue enclavée.

Sur la demande de [N] [H] épouse [W] relative à la création des deux emplacements de parking prévus par le règlement de copropriété :

Il sera simplement précisé que si les emplacements de parkings avaient été créés comme prévu au règlement de copropriété, [N] [H] épouse [W] n'aurait pu bénéficier que des servitudes prévues audit règlement de copropriété, et n'aurait pas été reconnue enclavée.

Il n'appartient pas à une juridiction de se substituer aux copropriétaires pour aménager leur bien conformément aux stipulations du règlement de copropriété qu'elles n'ont pas mises en 'uvre pendant plus de 40 ans, et il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de [N] [H] épouse [W] tendant à ce qu'il soit « dit et jugé qu'elle est en droit d'obtenir, sous réserve de l'obtention des autorisations administratives requises, la création à son profit de deux emplacements de parking, dans la zone jouxtant le [Adresse 4], prévue lors de la mise en copropriété, située à l'angle Sud-Ouest du terrain servant d'assise à cette copropriété ».

Sur la demande de dommages et intérêts de [N] [H] épouse [W] :

[N] [H] épouse [W] entend obtenir 35 000 € en indemnisation du préjudice causé par l'impossibilité d'accéder chez elle en voiture et de devoir louer des parkings depuis 2012.

Elle justifie avoir supporté 10 774,62 € de frais de location de parking entre le 21 décembre 2012 et le 31 décembre 2019.

Ce préjudice est une conséquence directe de la privation de l'accès qui lui a été imposée par [Y] [H] épouse [T] en 2012 alors qu'elle avait à cette date prescrit l'assiette d'une servitude de passage lui permettant de stationner sur son terrain.

Sa demande indemnitaire sera satisfaite à hauteur de 20 000 € pour le coût des locations rendues nécessaires et la privation d'une possibilité de stationnement à proximité immédiate de son habitation depuis la fin de l'année 2012.

Sur la demande de dommages et intérêts d' [Y] [H] épouse [T] :

Cette demande fondée sur un abus de procédure ne peut aboutir dès lors que [N] [H] épouse [W] est reconnue fondée en une partie de ses prétentions et qu'il n'est pas justifié d'un abus quand bien même, elle n'a pas adhéré aux solutions amiables proposées.

PAR CES MOTIFS

La Cour, par arrêt contradictoire

Vu l'arrêt mixte et avant dire droit,du 5 octobre 2017 ayant dit que les lots n° 1 et 2 faisant partie de la copropriété cadastrée section C n° [Cadastre 1] pour 29 ares 90 centiares, lieudit [Adresse 3] à [Localité 2] étaient enclavés,

dit que [N] [H] épouse [W], propriétaire des lots n° 1 et 2 dans la copropriété cadastrée section C n° [Cadastre 1] pour 29 ares 90 centiares, lieudit [Adresse 3] à [Localité 2], bénéficie, par prescription acquisitive de son assiette, d'une servitude de passage grevant le lot n°3 de la même copropriété appartenant à [Y] [H] épouse [T], suivant le tracé figuré en hachures bleues sur le plan-annexe 4 du rapport d'expertise de [B] [L], daté du 3 octobre 2019,

Condamne [Y] [H] épouse [T] à supprimer tous les obstacles installés sur ledit passage et à remettre la clé et/ou les télécommandes du portail ouvrant sur le chemin au niveau du [Adresse 3], et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard pendant trois mois, passé le délai de deux mois à compter de la signification de cette décision,

Dit qu'aucun droit à indemnisation ne découle de la reconnaissance de cette servitude de passage pour [Y] [H] épouse [T],

Rejette les demandes subsidiaires d'[Y] [H] épouse [T] tendant à voir retenir la solution 2 de l'expert, à désigner à nouveau un expert pour estimer l'indemnité lui revenant ou à enjoindre à Madame [W] de déposer une demande d'autorisation auprès des services instructeurs de la mairie de [Localité 2] reprenant la solution n°2 du rapport d'expertise,

Rejette la demande de [N] [H] épouse [W] tendant à ce qu'il soit « dit et jugé qu'elle est en droit d'obtenir, sous réserve de l'obtention des autorisations administratives requises, la création à son profit de deux emplacements de parking, dans la zone jouxtant le [Adresse 4], prévue lors de la mise en copropriété, située à l'angle Sud-Ouest du terrain servant d'assise à cette copropriété »

Condamne [Y] [H] épouse [T] à payer à [N] [H] épouse [W] la somme de 20 000 € à titre de dommages et intérêts,

Rejette la demande de dommages et intérêts d'[Y] [H] épouse [T],

Vu les articles 696 à 700 du code de procédure civile,

Condamne [Y] [H] épouse [T] aux entiers dépens de première instance et d'appel, y compris les frais de l'expertise, avec distraction pour ceux d'appel dans les conditions prévues par l'article 699 du code de procédure civile

Condamne [Y] [H] épouse [T] à payer 4 000 euros à [N] [H] épouse [W] en application de l'article 700 du code de procédure civile, au total pour la procédure de première instance et d'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 16/02802
Date de la décision : 26/11/2020

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 4A, arrêt n°16/02802 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-11-26;16.02802 ?
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