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19/11/2020 | FRANCE | N°18/07032

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-4, 19 novembre 2020, 18/07032


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-4



ARRÊT AU FOND

DU 19 NOVEMBRE 2020



N° 2020/

MNA/FP-D











Rôle N° RG 18/07032 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BCKUY







SA SOCIETE MARSEILLAISE DE CREDIT





C/



[K] [W]

























Copie exécutoire délivrée

le :

19 NOVEMBRE 2020

à :



Me Fabien GUERINI, avocat au barreau d

e TOULON





Me Fabio FERRANTELLI, avocat au barreau de NICE



















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de NICE en date du 15 Mars 2018 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 16/00409.





APPELANTE



SA SOCIETE MARSE...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-4

ARRÊT AU FOND

DU 19 NOVEMBRE 2020

N° 2020/

MNA/FP-D

Rôle N° RG 18/07032 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BCKUY

SA SOCIETE MARSEILLAISE DE CREDIT

C/

[K] [W]

Copie exécutoire délivrée

le :

19 NOVEMBRE 2020

à :

Me Fabien GUERINI, avocat au barreau de TOULON

Me Fabio FERRANTELLI, avocat au barreau de NICE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de NICE en date du 15 Mars 2018 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 16/00409.

APPELANTE

SA SOCIETE MARSEILLAISE DE CREDIT (SMC), demeurant [Adresse 1] / FRANCE

représentée par Me Fabien GUERINI, avocat au barreau de TOULON

INTIMEE

Madame [K] [W], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Fabio FERRANTELLI, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Septembre 2020, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-Noëlle ABBA, Présidente de chambre, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Noëlle ABBA, Présidente de chambre

Monsieur Gilles BOURGEOIS, Conseiller

Madame Catherine MAILHES, Conseillère

Greffier lors des débats : Madame Françoise PARADIS-DEISS.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Novembre 2020.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Novembre 2020

Signé par Madame Marie-Noëlle ABBA, Présidente de chambre et Madame Françoise PARADIS-DEISS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Madame [K] [W] a été embauchée par la Société Marseillaise de crédit (SMC) dans le cadre d'un contrat de professionnalisation d'un an en date du 29 juillet 2013, et affectée à l'agence de [Localité 3] [Adresse 4].

A l'issue, elle a effectué deux missions de remplacement temporaire, puis a conclu un contrat à durée indéterminée à temps complet le 13 avril 2015, dans le cadre duquel elle exerçait les fonctions de Conseiller de clientèle (chargé d'accueil), sur l'agence de [Adresse 5].

Les relations de travail sont régies par la Convention Collective des Banques.

Mme [W] a fait l'objet d'un licenciement pour faute grave, l'employeur lui reprochant d'avoir falsifié des justificatifs d'une note de frais afin de faire supporter à la banque des dépenses personnelles.

A la suite de la saisine par Mme [W] de la commission paritaire, la faute grave était qualifiée de cause réelle et sérieuse dans un avis du 14 janvier 2016 et en conséquence la société SMC notifiat à Mme [W] son licenciement pour cause réelle et sérieuse le 18 janvier 2016.

Mme [W] a saisi le conseil de prud'hommes de Nice pour contester son licenciement et obtenir, outre une indemnité au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse, et pour résistance abusive, des rappels de salaires sur la clause de non concurrence.

Par jugement de départage du 15 mars 2018, le conseil de prud'hommes a dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et a condamné la SMC à payer à Mme [W] la somme de 12 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 5 433 euros au titre de l'indemnité de salaire pour la clause de non-concurrence, et 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société SMC a interjeté appel de cette décision suivant déclaration reçue le 23 avril 2018.

Aux termes de ses conclusions notifiées le 23 juillet 2018, la SMC demande à la cour de réformer le jugement et de débouter Mme [W] de l'ensemble de ses demandes, et de la condamner au paiement de la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il est expressément référé aux écritures respectives des parties pour plus ample exposé du litige.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 24 février 2020.

MOTIFS DE LA DECISION

1- Sur le licenciement

La lettre de licenciement du 18 janvier 2016 est ainsi motivée :

Les faits qui sont à l'origine de cette mesure peuvent se résumer comme suit :

L'examen de votre note de frais, reçue le 21 octobre et établie à la suite d'un déplacement réalisé dans le cadre d'une formation, montre que vous avez falsifié des justificatifs afin de faire supprimer par l'entreprise certaines dépenses que vous aviez engagées à titre personnel.

Nos investigations ont par ailleurs permis d'établir que, par le passé, vous aviez déjà falsifié le justificatif joint à l'une de vos notes de frais.

Ces agissements qui sont constitutifs de fraude, ne peuvent être acceptés de la part de l'une de nos collaboratrices, a fortiori dans le métier qui est le vôtre et qui exige, pour la sécurité de nos clients et celle de l'entreprise, une honnêteté et un eprobité sans faille.

La société SMC reproche dans ses écritures à Mme [W] d'avoir présenté un dossier de remboursement de ses frais qui comportait des justificatifs de frais falsifiés :

- frais de transport par achat d'un PASS NAVIGO valable du lundi 5 au dimanche 11 octobre 2015, d'un ticket MOBILIS PARIS valable pour la journée du samedi 3 octobre, alors que sa formation se limitait à la période du 6 au 9 octobre 2015, d'une facture de taxi pour un trajet le 11 octobre 2015, présentée deux fois ,

-frais de restauration pour trois restaurants : pour un dîner au restaurant HIPPO OPERA le 5 octobre 2015, un dîner au restaurant Indiana Bastille le 4 octobre 2015, deux notes de frais au café LAFAYETTE GOURMET le 8 octobre 2015, un diner au restaurant PIETRO le 9 octobre pour deux couverts à 22 h36 (alors que les frais de restauration ne sont pas pris en charge le dernier jour après la fin de la formation en fin d'après midi).

La lettre de licenciement ne faisant mention que de 'falsifications', il n'y a pas lieu de prendre en compte les factures non falsifiées, telles que la note de restaurant PIETRO présentée certes pour un repas non remboursable (deux couverts, date postérieure à la fin de la formation) mais qui pouvait être écartée par l'employeur.

De même les factures pour frais de taxi, ne présentant pas de trace de falsification (l 'hypothèse que Mme [W] aurait déchiré le haut d'une des factures pour ne pas laisser apparaître la date étant trop ténue pour être retenue) et pouvant aussi, comme l'ont noté les juges du fond, être refusées par l'employeur si elles ne recouvraient pas exactement la période considérée.

S'agissant des autres frais de restauration, Mme [W] a reconnu dans sa lettre à la Commission Paritaire (pièce 11) avoir modifié trois dates sur ses tickets de restaurant : elle a ainsi reconnu avoir tenté de se faire rembourser un repas pris le dimanche 4 octobre au restaurant Indiana Bastille en transformant la date du 4 en 8 octobre ;

elle a également reconnu avoir transformé la date du 5/10/15 en 08/10/15 en profitant d'un second diner au même établissement HIPPO OPERA le 8 octobre 2015.

S'il peut être admis que pour la facture de cet établissement elle a voulu compenser la perte du ticket de restaurant et obtenir par ce subterfuge remboursement d'un repas qu'elle avait pris le 5 octobre 2015 comme semble le laisser entendre l'attestation de Mme [O] (pièce 17), en revanche, ainsi que l'ont constaté les premiers juges en évoquant une 'irrégularité', il y a bien eu fraude pour la facture du dimanche 4 octobre pris hors période de formation.

De même, s'agissant des deux factures du café LAFAYETTE GOURMET, correspondant à deux collations (pâtisseries et boissons) , éditées l'une à 17 h 35 et l'autre à 17h37 le 8 octobre 2015, la fraude n'est pas contestable, le chiffre 8 apparaissant contrefait sur l'une des factures.

Il ne peut toutefois être retenu, contrairement à ce qu'ont indiqué les premiers juges, que la 'note de frais de Mme [W] a été validée par l'autorité hiérarchique sans aucune réserve de sa part': en effet la société SMC se réfère au guide de formation lequel, en page 12 (pièce 4) précise que la note de frais formation, qui comprend la fiche de remboursement et, dans un enveloppe agrafée à celle-ci, les justificatifs, est validée par le manager avant envoi au Correspondant formation.

Elle soutient ainsi , sans être utilement contredite, que cette 'validation' vaut simple accusé de réception et que la Correspondante formation est la seule personne habilitée à étudier les demandes de remboursements professionnels.

S'agissant de l'existence d'un antécédent pour des faits de même nature, la cour fera siennes les observations du conseil de prud'hommes qui a souligné que l'employeur n'en rapportait pas la preuve.

Elle concluera également, par adoption de motifs, que les irrégularités qui ont été mises en évidence, non contestées par Mme [W], même si elle ne concède que des 'erreurs', sont réelles, mais ne sont pas suffisamment importantes pour constituer une cause sérieuse de licenciement, au regard notamment de l'absence de toute sanction disciplinaire antérieure.

La décision déférée sera donc confirmée sur ce point, de même que le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse , soit la somme de 12 000 euros correspondant à sept mois de salaire, Mme [W] justifiant d'une anciennneté de deux ans et demie dans une entreprise employant habituellement plus de dix salariés, et ayant retrouvé un emploi dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée en juillet 2017.

2- Sur la clause de non-concurrence

L'employeur soutient que la clause de non-concurrence visée à son contrat de travail ne s'applique pas à Mme [W] dès lors que cette dernière n'était pas affectée à l'un des postes donnant lieu à l'application de cette clause et détaillés ainsi :

*Conseiller en patrimoine, Animateur financier, Gestionnaire de portefeuille, Spécialiste patrimonial;

* Directeur d'agence ( quelle que soit la clientèle affectée à l'agence)

*Directeur adjoint d'agence

*sous-directeur d'agence

*Conseiller de clientèle Entreprises

*Conseiller de clientèle Institutionnels

*Conseiller de clientèle Professionnels

*Conseiller de clientèle Particuliers et Professionnels

*Métiers de la Direction des Affaires Financières,

et qu'elle n'était que conseiller de clientèle, chargée de l'accueil en agence, avec vocation à évoluer vers les postes ainsi définis.

Cependant , ainsi que l'ont relevé les premiers juges, cette clause fait référence à des métiers et non à une classification précise, qui aurait pour effet d'exclure Mme [W], de même qu'il est établi par les fiches de paie (qui mentionnent à partir de 2015 une affectation au poste de conseiller de clientèle, après un premier poste de conseiller commercial), que Mme [W] exerçait des fonctions de conseiller de clientèle et disposait d'un portefeuille de clients; les échanges de courriels entre la salariée et sa hiérarchie (pièce 15) font d'ailleurs référence à des 'rendez vous professionnels : ainsi le 22 septembre 2015 : 'deux actions prioritaires : prendre en main le portefeuille et continuer à assainir les DPR.(...) Ta cible clients est le Vivier et le Gd public.'

C'est donc par des motifs pertinents que la cour adopte que les premiers juges ont dit que la clause de non concurrence visée au contrat de travail de Mme [W] lui est applicable, et que par conséquent la contrepartie financière de cette clause lui est due, les conditions d'ouverture de l'obligation de non-concurrence et celles de son indemnisation ne pouvant être dissociées.

La cour confirmera a décision qui a alloué à Mme [W] la somme de 5 433 euros , soit trois mois de salaire , à titre de rappel de salaire, conformément aux conditions indiqués au contrat de travail.

3 - Sur la demande de dommages-intérêts pour résistance abusive

Mme [W] ne démontrant pas en quoi le refus de l'employeur de régler la contrepartie financière de la clause de non-concurrence, constituerait une résistance abusive de sa part, et ne justifiant pas d'un quelconque préjudice de ce fait, la cour confirmera la décision qui a débouté Mme [W] de sa demande.

4- Sur les autres demandes

Il n'est pas inéquitable de condamner la société SMC à verser à Mme [W] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de pemière instance et d'appel .

Les créances salariales porteront intérêt au taux légal capitalisé à compter de la saisine du conseil de prud'hommes le 25 mars 2016.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par l'article 450 du code de procédure civile :

Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Nice en date du 15 mars 2018 en toutes ses dispositions,

Condamne la société SMC à verser à Mme [W] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel .

La condamne aux dépens.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-4
Numéro d'arrêt : 18/07032
Date de la décision : 19/11/2020

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 17, arrêt n°18/07032 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-11-19;18.07032 ?
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