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18/09/2020 | FRANCE | N°19/03827

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-7, 18 septembre 2020, 19/03827


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-7



ARRÊT AU FOND

DU 18 SEPTEMBRE 2020



N° 2020/ 292













Rôle N° RG 19/03827 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BD46N







Association L'UNÉDIC DÉLÉGATION AGS CGEA D'ILE DE FRANCE OUEST





C/



Me [F] [G] - Mandataire liquidateur de [F] [G]

[F] [G]

[S] [O]





















Copie exécutoire délivrée

le : 18 septem

bre 2020 à :

Me Isabelle JOGUET

Me Sarah HABERT

Me Loïc GIAUFFRET































Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE en date du 22 Janvier 2019 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 18/...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-7

ARRÊT AU FOND

DU 18 SEPTEMBRE 2020

N° 2020/ 292

Rôle N° RG 19/03827 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BD46N

Association L'UNÉDIC DÉLÉGATION AGS CGEA D'ILE DE FRANCE OUEST

C/

Me [F] [G] - Mandataire liquidateur de [F] [G]

[F] [G]

[S] [O]

Copie exécutoire délivrée

le : 18 septembre 2020 à :

Me Isabelle JOGUET

Me Sarah HABERT

Me Loïc GIAUFFRET

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE en date du 22 Janvier 2019 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 18/00667.

APPELANTE

Association L'UNÉDIC DÉLÉGATION AGS CGEA D'ILE DE FRANCE OUEST L'Unédic Délégation AGS CGEA d'ILE DE FRANCE OUEST, Association déclarée, représentée par sa Directrice Nationale, Madame [B] [K], domiciliée [Adresse 2], demeurant [Adresse 2]

Représentée par Me Isabelle JOGUET, avocat au barreau de NICE

INTIMES

Maître [F] [G], Mandataire Liquidateur de la SARLU TAKE EAT EASY - Siret 80390544700014 - y demeurant [Adresse 1], demeurant [Adresse 1]

Représenté par Me Sarah HABERT, avocat au barreau de MARSEILLE et plaidant par Me Catherine LAUSSUCQ, avocat au barreau de PARIS

Monsieur [S] [O]

né le [Date naissance 3] 1993 à [Localité 4], demeurant [Adresse 6]

Représenté par Me Loïc GIAUFFRET, avocat au barreau de NICE plaidant par

Me Kevin MENTION, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

En application des dispositions de l'article 8 de l'ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020, les parties ont été informées que la procédure se déroulerait sans audience et ne s'y sont pas opposées dans le délai de 15 jours.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 18 Septembre 2020.

COMPOSITION DE LA COUR

Madame Corinne HERMEREL, Président

Mme Marina ALBERTI, Conseiller

Monsieur Yann CATTIN, Conseiller

qui en ont délibéré.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 18 Septembre 2020,

Signé par Madame Marina ALBERTI, Conseiller, pour le Président empêché et Mme Agnès BAYLE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Exposé des faits

La société Teakeateasy.fr, société intermédiaire de l'économie dite 'collaborative' qui utilisait une plateforme électronique 'web' et une application afin de mettre en relation des restaurateurs partenaires, des clients passant commande de repas par le truchement de la plateforme et des livreurs à bicyclette exerçant leur activité sous un statut d'indépendant, a, courant 2016, souhaité implanter une activité au sein de la ville de [Localité 5].

Par jugement du 30 août 2016, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire de la Sarl Teakeateasy.fr et désigné en qualité de mandataire judiciaire liquidateur la SELAFA MJA prise en la personne de M. [G].

Par requête du 20 juillet 2018, M. [O], se prévalant d'une activité pour le compte de la société Takeeateasy.fr, a saisi le conseil de prud'hommes de Nice aux fins de faire reconnaître l'existence d'un contrat de travail avec ladite société, de dire que la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'obtenir un rappel de salaire, outre congés payés, une indemnité pour travail dissimulé, une indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, des dommages et intérêts, d'ordonner la remise de documents sociaux et d'ordonner la régularisation des cotisations sociales.

Par jugement réputé contradictoire du 22 janvier 2019, le conseil de prud'hommes de Nice, retenant sa compétence, a :

- dit qu'il y a un contrat de travail à temps plein,

- fixé la créance de M. [O] au passif de la société Teakeateasy.fr représentée par M. [G], ès qualités de mandataire liquidateur, aux sommes suivantes :

6 362 euros brut de rappel de salaire, outre 636 euros de congés payés,

8 796 euros d'indemnité pour travail dissimulé,

1 466 euros de dommages et intérêts pour absence de visite médicale,

1 466 euros d'indemnité de préavis, outre 147 euros de congés payés afférents,

6 450 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- ordonné la remise des bulletins de salaires de mars à juillet 2016 et une attestation Pôle emploi,

- ordonné la régularisation des cotisations sociales,

- dit opposable le jugement au CGEA délégation régionale Ile-de-France Ouest et à l'AGS, dans la limite des plafonds légaux,

- mis les dépens à la charge de la société Teakeateasy.fr représentée par M. [G], ès qualités de mandataire liquidateur.

Par déclaration du 6 mars 2019, l'Unedic délégation AGS CGEA d'Ile-de-France Ouest a interjeté appel de cette décision.

Vu les conclusions de l'AGS CGEA d'Ile-de-France Ouest notifiées le 11 juillet 2019,

Vu les conclusions de M. [G], ès qualités de mandataire liquidateur de la société Teakeateasy.fr notifiées le 19 septembre 2019,

Vu les conclusions de M. [O] notifiées le 20 janvier 2020,

Vu l'ordonnance de clôture de la procédure rendue le 6 février 2020,

Vu la fixation de l'affaire à l'audience du 14 février 2020, renvoyée à l'audience du 3 avril 2020, à la demande des avocats en raison d'un mouvement de grève, audience qui n'a pu être tenue en raison de la déclaration d'état d'urgence sanitaire issue de l'article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 pour faire face à l'épidémie de Covid-19,

Vu l'information donnée aux parties le 6 mai 2020 du recours à l'article 7 de l'ordonnance 2020-304 du 25 mars 2020 et l'absence d'opposition des parties dans le délai de 15 jours,

Vu l'avis notifié aux parties par RPVA de la date de mise à disposition au greffe du présent arrêt.

Prétentions des parties

Dans ses dernières écritures, l'AGS CGEA demande à la cour, infirmant le jugement, de dire et juger qu'il n'existe aucune relation salariale entre les parties et de débouter M. [O] de l'ensemble de ses demandes.

Subsidiairement, si la cour reconnaît la qualité de salarié de M. [O], elle sollicite de constater que ce dernier a travaillé moins de quatre mois pour la société Teakeateasy.fr, de débouter M. [O] de ses demandes au titre des rappels de salaire et congés payés calculées sur un temps plein, au titre de l'indemnité pour travail dissimulé, de dommages et intérêts divers et d'indemnité compensatrice de préavis et de réduire l'indemnité pour licenciement abusif à de plus justes proportions.

En tout état de cause, elle demande de :

- dire et juger que l'obligation du Cgea de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement,

- dire et juger que l'Ags ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L. 3253-6 à 8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-19, L. 3253-20, L. 3253-21 et L. 3253-17 du même code.

Dans ses dernières écritures, la SELAFA MJA prise en la personne de M. [G] ès qualités de mandataire judiciaire liquidateur Sarl Teakeateasy.fr, conclut à l'irrecevabilité de la demande nouvelle présentée par M. [O] de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Elle demande à la cour de :

- constater que M. [O] ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un lien de subordination entre lui et la société Takeeateasy et en particulier qu'il ne prouve pas avoir reçu des ordres et directives de cette entreprise,

- constater l'absence de contrat de travail entre la société Takeeateasy et M. [O],

- se déclarer incompétente au profit du tribunal de commerce de Paris,

- déclarer irrecevable M. [O] de l'ensemble de ses demandes,

- dire et juger que les demandes de dommages et intérêts pour absence de compte personnel formation, absence de visite médicale, irrespect de l'obligation de sécurité, absence d'application d'une convention collective et d'indemnisation des frais kilométriques, irrespect du repos hebdomadaire, absence de mise en place de comité d'entreprise, d'instances représentatives du personnel, absence de mise en place d'une mutuelle obligatoire et retard dans le versement de la paie et de congés payés sont prescrites,

- débouter M. [O] de l'intégralité de ses demandes,

- condamner M. [O] à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- le condamner aux dépens.

Dans ses dernières écritures, M. [O] demande la confirmation du jugement déféré et, y ajoutant, sollicite la condamnation solidaire de l'AGS CGEA et la SELAFA MJA, à titre personnel, à lui payer les sommes de 2 000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive et de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour plus ample relation des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, il y a lieu de se référer à la décision attaquée et aux conclusions susvisées.

MOTIFS DE LA DECISION

- Sur la demande d'incompétence.

La SELAFA MJA, ès qualités de mandataire liquidateur de la société Takeeateasy.fr, demande à la cour de se déclarer incompétente au profit du tribunal de commerce de Paris.

Le conseil de prud'hommes a retenu sa compétence et a fixé au passif de la procédure collective de la société Takeeateasy.fr des sommes dues à M. [O] après requalification du contrat de travail.

Hormis les demandes de condamnation personnelle présentées par M. [O] à l'encontre de la SELAFA MJA et de l'AGS CGEA pour procédure abusive et au titre de l'article 700 du code de procédure civile, sur le bien-fondé desquelles il sera statué après examen au fond de l'affaire, le présent litige porte sur l'existence d'un contrat de travail et vise à voir fixer en conséquence au passif de la liquidation judiciaire de la société Takeeateasy.fr diverses sommes. Ce litige relève des juridictions prud'homales et le conseil de prud'hommes a retenu, à bon droit, sa compétence.

- Sur l'existence d'une relation salariale.

Les parties s'opposent essentiellement sur l'existence d'une relation de travail et l'existence ou non d'un lien de subordination entre l'intimé et la société Takeeateasy.fr.

L'existence d'une relation de travail salariée ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention, mais dépend des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs ; le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

Le fait que le travail soit effectué au sein d'un service organisé peut constituer un indice de l'existence d'un lien de subordination lorsque l'employeur en détermine unilatéralement les conditions d'exécution.

Il convient donc en l'espèce de rechercher, en considération des conditions de fait, si une activité de travail effectuée dans un lien de subordination est caractérisée.

Il est établi et non contesté que la société Takeeateasy.fr a souhaité implanter à compter de 2016 une activité de livraison de repas dans la ville de [Localité 5] et que, dans ce cadre, ladite société et M. [O], ainsi que d'autres postulants, se sont rapprochés en mars, avril, mai de cette année. Selon l'attestation de M. [N], chargé de formation pour le compte de la société Takeeateasy.fr, lesdits postulants, dont M. [O], ont reçu du matériel et une tenue pour participer à cette activité de livraison de repas et ont été informés des conditions fixées par cette société. Au-delà de ces éléments factuels, et des modes opératoires mis en place, en général, par la société, M. [O], lequel soutient avoir exercé un travail dans le cadre d'un lien de subordination, ne produit, pour ce qui le concerne, aucun élément sur une activité effective pour le compte de la société Takeeateasy.fr telle que la livraison de repas, la réception de commande de client, d'ordre ou de directive de la part de celle-ci, ni sur l'existence d'une quelconque convention entre les parties, alors pourtant qu'il soutient avoir accompli un travail pour le compte de cette société de mars à juillet 2016. La seule perception d'un matériel et d'une tenue d'enseigne, ainsi que le bénéfice d'une formation théorique et pratique librement suivie et la communication par la société des modes de rétribution mis en place, sans autre élément relatif à une activité effective exercée sous l'autorité d'un employeur, ne permet pas de retenir l'existence d'une relation de travail. En conséquence, faute pour M. [O] de justifier d'une activité réelle pour le compte de la société Takeeateasy.fr, il ne peut être retenu l'existence d'un lien de subordination et donc d'un contrat de travail avec la société Takeeateasy.fr et le jugement dont appel sera infirmé en ce sens et M. [O] sera débouté de l'intégralité de ses demandes en résultant.

- Sur l'irrecevabilité de la demande pour procédure abusive.

M. [O] étant débouté de l'intégralité de ses prétentions, l'irrecevabilité de la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive est sans objet.

- Sur les frais irrépétibles et les dépens.

En équité, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens de première instance et d'appel seront laissés à la charge de M. [O] qui succombe.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant après en avoir délibéré conformément à la loi, publiquement par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoirement, en matière prud'homale,

Infirme le jugement du conseil de prud'hommes sauf en ce que la compétence a été retenue,

Statuant à nouveau,

Déboute M. [S] [O] de l'intégralité de ses demandes,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

Condamne M. [S] [O] à supporter les dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIERLE CONSEILLER

Pour le Président empêché


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-7
Numéro d'arrêt : 19/03827
Date de la décision : 18/09/2020

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-09-18;19.03827 ?
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