La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/09/2020 | FRANCE | N°18/08169

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8, 18 septembre 2020, 18/08169


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8



ARRÊT AU FOND

DU 18 SEPTEMBRE 2020



N°2020/.













Rôle N° RG 18/08169 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BCNZG







[F] [E]





C/



Société CAISSE DELEGUEE POUR LA SECURITE SOCIALE DES TRAVAILLEURS INDEPENDANTS PROVENCE-ALPES























Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me Gisèle PORTOLANO

et M

e SOCRATE





















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOUCHES-DU-RHONE en date du 29 Mars 2018,enregistré au répertoire général sous le n° 21304382.





APPELANT



Monsieur [F] [E], demeurant [Adresse 3]



repré...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8

ARRÊT AU FOND

DU 18 SEPTEMBRE 2020

N°2020/.

Rôle N° RG 18/08169 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BCNZG

[F] [E]

C/

Société CAISSE DELEGUEE POUR LA SECURITE SOCIALE DES TRAVAILLEURS INDEPENDANTS PROVENCE-ALPES

Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me Gisèle PORTOLANO

et Me SOCRATE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOUCHES-DU-RHONE en date du 29 Mars 2018,enregistré au répertoire général sous le n° 21304382.

APPELANT

Monsieur [F] [E], demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Gisèle PORTOLANO, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

Société CAISSE DELEGUEE POUR LA SECURITE SOCIALE DES TRAVAILLEURS INDEPENDANTS PROVENCE-ALPES, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Jean-Marc SOCRATE, avocat au barreau de MARSEILLE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Juin 2020, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président de chambre

Madame Marie-Pierre SAINTE, Conseiller

Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Laura BAYOL.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 18 Septembre 2020.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 18 Septembre 2020

Signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président de chambre et Madame Laura BAYOL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Par requête expédiée le 7 septembre 2013, M. [F] [E] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches-du-Rhône d'une opposition à la contrainte émise le 14 août 2013 par la caisse nationale du régime social des indépendants pour un montant de 22.186 euros, signifiée le 21 août 2013.

Par jugement du 29 mars 2018, notifié le 16 avril 2018, le tribunal a déclaré irrecevable pour cause de forclusion, l'opposition de M. [F] [E].

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 14 mai 2018, M. [F] [E] a régulièrement relevé appel de ce jugement.

Reprenant oralement les conclusions d'appel n°3 déposées à l'audience, M. [F] [E] demande à la cour d'annuler la contrainte du 14 août 2013, la signification de la contrainte du 21 août 2013, ainsi que l'ensemble de la procédure.

Au fond, il sollicite la condamnation de la CDSSTI à lui rembourser les sommes de 172 euros et 793 euros représentant le trop-perçu pour les périodes visées par la contrainte (2011 et 2013), outre l'annulation des pénalités de retard pour l'année 2011 à hauteur de 530 euros et pour 2013 à hauteur de 606 euros.

En tout état de cause, il sollicite la condamnation de la CDSSTI à lui payer la somme de 2.400 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens, mais également sa condamnation à réintégrer et comptabiliser les périodes correspondant à l'année 2011 et au 1er trimestre 2013 dans le calcul des retraites, sous astreinte de 100€ par jour de retard à compter du mois suivant la notification du jugement.

Au soutien de ses prétentions, M. [F] [E] fait valoir,

sur la nullité de la mise en demeure, qu'au visa de l'article 4 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 relatif aux actes administratifs, la mise en demeure et la contrainte encourent la nullité faute de signature et d'identification possible de leur auteur.

Il réfute l'application d'arrêts de la Cour de cassation dont se prévaut le RSI, dés lors qu'en l'espèce, la mise en demeure ne mentionne pas la dénomination de l'autorité administrative concernée : il soutient que la dénomination 'RSI PROVENCE-ALPES' ou 'RSI Auvergne', soit par sigle ou acronyme, figurant sur la mise en demeure et la contrainte ne correspond pas à la dénomination de l'autorité administrative chargée à l'époque du recouvrement des créances des salariés indépendants au sens de l'article 54 II ratifiée le 6 mars 2007.

En cas de doute sur l'interprétation de la jurisprudence, il sollicite la saisine de la Cour de cassation pour avis sur une question nouvelle, de pur droit et présentant une difficulté sérieuse susceptible de concerner de nombreux dossiers, en application des articles L.441-1 et suivants, R.441-1 et suivants du code de l'organisation judiciaire et 1031-1 et suivants du code de procédure civile.

Au visa du rapport du conseiller référendaire relatif à l'avis n°40002P de la Cour de cassation, il soutient que la question de l'application de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 est nouvelle, la Cour de cassation n'ayant pas statué sur une contrainte, acte administratif, les mises en demeure étant des décisions unilatérales prises pour l'exécution d'un service public adminitratif et qui met en oeuvre des prérogatives de puissance publique.

Sur l'inopposabilité de la contrainte décernée : il soutient que le signataire de la contrainte ne peut être une autre personne que M. [U] dont la délégation de pouvoir en date du 21 août 2013 était valide au moment de la signification, de sorte que la contrainte signée par M. [O] est inopposable.

Il ajoute que la contrainte ayant été délivrée au visa de l'article L.133-6-4-I et II du Code de la sécurité sociale, non visé dans la délégation de pouvoir, la contrainte est viciée ou, à minima, que le délai pour faire opposition n'a pas couru.

En réponse aux conclusions adverses, il rappelle reprocher à la mise en demeure de ne comporter aucune signature, ni aucune identification de l'agent, au visa de la jurisprudence.

Il soutient que les caisses délégataires ne peuvent s'exprimer en leur nom propre, seul le régime social des indépendants le pouvant, et ce au visa de l'article R.111-1 4° du code de la sécurité sociale.

Sur la procédure et la forclusion, il soutient que :

- la mise en demeure n'est pas suffisamment motivée et que son signataire n'est pas identifiable, au sens de la jurisprudence, notant que l'acte a été délivré par 'RSI PROVENCE ALPES' alors que seul le 'Régime social des indépendants' est visé par les textes sur lesquels le RSI se fonde,

- la signification de la contrainte est viciée, dès lors que la compétence pour 'engager, sursoir, poursuivre ou abandonner toute instance', appartient au directeur de la caisse régionale d'Auvergne,

- la mise en demeure n'est pas précise puisqu'elle ne reprend pas les crédits de remboursement,et son montant diffère de celui de la contrainte ;

- les adresses du TASS sont différentes sur la contrainte et sur la signification de

contrainte.

Il en conclut que le délai pour former opposition n'a pas couru.

Sur les sommes réclamées au titre de l'année 2011, après divers exposés auxquels il convient de renvoyer, il conclut être créancier et non débiteur, compte tenu des versements non pris en compte et d'un trop-perçu relatif à un moratoire et sollicite donc la restitution de sommes par le RSI.

S'appuyant sur la fiche de cotisations annuelles du site RSI notamment, estimant illégitimes les majorations de retard, et compte tenu des versements effectués, il se considère également créancier vis à vis du RSI.

Il justifie le remboursement des frais irrépétibles par l'obligation d'organiser sa défense, en recourant à un expert comptable et un avocat.

Dans les dernières conclusions déposées à l'audience et à laquelle elle se réfère oralement, l'URSSAF demande à la cour de confirmer le jugement dans toutes ses dispositions, de débouter M. [F] [E] et de le condamner au paiement d'une amende civile de 1.000 euros au titre de l'article 32-1 du Code de procédure civile.

L'URSSAF fait valoir, au visa de l'article R. 133-3, alinéa 3, du code de la sécurité sociale, la forclusion du recours de M. [F] [E] en ce que la contrainte en litige a été signifiée le 21 août 2013 de sorte que le délai légal d'opposition expirait le 5 septembre 2013 à minuit conformément aux dispositions des articles 641 et 642 du code de procédure civile.

Après avoir rappelé, au visa des articles 656 et 664-1 du code de procédure civile que la date de signification d'un acte d'huissier est celle du jour où elle est faite à personne, à domicile, à résidence ou à celle de l'établissement du procès-verbal et que celle-ci est réputée avoir été faite à domicile ou à résidence lorsque personne ne peut ou ne veut recevoir copie de l'acte, elle considère que l'opposition formée par l'appelant le 7 septembre 2013, est hors délai.

Elle indique qu'elle n'entend soulever aucun autre moyen que l'exception d'irrecevabilité et demande à la cour de ne statuer que sur celui-ci.

Toutefois, l'URSSAF précise par ailleurs, au fond, répondre aux moyenx soulevés par l'appelant.

Ainsi, s'agissant de la nullité prétendue de la mise en demeure, elle rappelle que même si, selon la jurisprudence la mise en demeure adressée à l'assuré doit préciser la dénomination de l'organisme de sécurité sociale qui l'a émise, aucun texte n'exige, en revanche, qu'elle soit signée par le directeur de l'organisme. Elle précise de plus, que si l'article 4 de la loi du 12/04/2000 dispose que toute décision prise par une autorité administrative doit comporter la signature de son auteur, la mention, en caractére lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci, l'omission d'une de ces mentions n'est pas de nature à justifier l'annulation.

Par ailleurs, elle rappelle qu'au 1er juillet 2006, le Régime Social des Indépendants s'est substitué aux différents régimes antérieurs (AVA CANCAVA, ORGANIC et AMPI) et que celui-ci, conformément à l'article R. 111-1 du code de la sécurité sociale, est constitué d'une caisse nationale et des caisses de base au nombre desquelles se trouve la caisse RSI PROVENCE ALPES de sorte que l'argumentation de l'appelant sur ce point est inopérante.

S'agissant de la nullité de la contrainte, l'URSSAF précise que s'il résulte de l'article R. 133-4 du code de la sécurité sociale que les contraintes sont décernées par le directeur de tout organisme de sécurité sociale, il découle des articles L. 122-1 et R. 611-16 du code de la sécurité sociale que celui-ci peut déléguer sa signature ou ses pouvoirs à certains collaborateurs de l'organisme. Or, en l'occurrence, la contrainte émise le 14 août 2013 comporte bien le nom et la signature de la personne qui l'a délivrée à savoir Mme [M] [L] qui a bien reçu délégation de pouvoir de M. [T] [U] selon délégation de pouvoir n°2013/CTX009 du 26 juillet 2013 antérieure à l'émission de la contrainte.

Elle conclut ainsi à la régularité de la contrainte.

S'agissant des cotisations appelées, l'URSSAF détaille le calcul effectué ainsi que les versements faits par le cotisant. Elle rappelle ainsi que pour l'année 2011, il avait sollicité un échéancier qui lui a été accordé et comprenant cinq mensualités dont il n'en a réglé que deux. Elle conclut au bien-fondé de la mise en recouvrement de la somme de 22.186 euros au titre des cotisations de l'année 2011 et du premier trimestre 2013.

S'agissant de la demande de versement d'une astreinte à hauteur de cent euros par jour de retard à compter du mois suivant la notification du jugement, elle rappelle que l'astreinte est une somme d'argent qu'une personne débitrice d'une obligation de faire ou de ne pas faire, doit payer au créancier de la prestation jusqu'à ce qu'elle soit exécutée. Elle rappelle que M. [F] [E] est débiteur de cotisations sociales au profit de la caisse et non l'inverse.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs écritures déposées et soutenues oralement lors de l'audience.

MOTIFS DE LA DECISION

Il résulte des articles L.244-9 et R.133-3 du Code de la sécurité sociale, dans leur version applicable au cas d'espèce, que la contrainte décernée par le directeur d'un organisme de sécurité sociale pour le recouvrement de cotisations et majorations de retard emporte, à défaut d'opposition du débiteur devant le Tribunal des affaires de sécurité sociale, dans le délai et les conditions règlementaires, tous les effets d'un jugement.

Dès lors qu'il a été dûment informé des voies et délais de recours qui lui sont ouverts devant les juridictions du contentieux de la sécurité sociale, à défaut d'opposition dans le délai de 15 jours suivant notification ou signification de la contrainte, par inscription au secrétariat du Tribunal des affaires de sécurité sociale ou par lettre recommandée avec accusé de réception adressée au secrétariat, le débiteur est irrecevable à contester la régularité et le bien-fondé des cotisations et majorations réclamées dans la contrainte.

En l'espèce, il ressort de la signification de la contrainte établie le 14 août 2013 par la caisse du RSI à l'encontre de M. [E], en date du 21 août 2013, qu'il est expressément indiqué les délais et voies du recours en ces termes : 'si vous voulez contester cette CONTRAINTE, vous pouvez former OPPOSITION dans le délai de QUINZE JOURS de la date figurant en tête du présent acte auprès du secrétariat du TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DES BOUCHES-DU-RHONE Caserne du Muy [Adresse 1].'

Il n'est pas discuté que M. [E] a formé opposition par courrier recommandé expédié le 7 septembre 2013, postérieurement au délai de 15 jours expirant le 5 septembre à minuit.

C'est donc à bon droit que les premiers juges ont déclaré l'opposition irrecevable.

Il importe peu que l'adresse indiquée sur la contrainte pour faire opposition soit différente de celle indiquée sur la signification, dans la mesure où l'expédition du courrier par lequel M. [E] forme opposition, quelle que soit l'adresse de destination, est tardive.

En outre, l'insuffisance de motivation de la mise en demeure, la difficulté d'identifier l'auteur de la mise en demeure, et le défaut de pouvoir du signataire de la contrainte constituent des moyens au soutien de l'irrégularité de la procédure de recouvrement, qui sont inopérants dés lors que l'opposition est irrecevable.

En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions.

Par ailleurs, en vertu des dispositions de l'article 32-1 du Code de procédure civile, et à défaut pour l'Urssaf de justifier de l'abus du droit de former opposition à une contrainte par M. [E], en rapportant la preuve de la multiplicité des recours dans la seule intention de nuire comme elle l'énonce dans ses conclusions, elle sera déboutée de sa demande de condamnation au paiement d'une amende civile.

M. [E], succombant au principal, supportera les dépens de l'instance, étant précisé que l'article R 144-10 du code de la sécurité sociale a été abrogé par le décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018 relatif au contentieux de la sécurité sociale et de l'aide sociale, dont l'article 17 III prévoit que les dispositions relatives à la procédure devant les juridictions sont applicables aux instances en cours.

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement par décision contradictoire,

Confirme le jugement rendu le 29 mars 2018 par le Tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches-du-Rhône sous le n° RG 21304382 en toutes ses dispositions,

Rejette la demande de condamnation à une amende civile présentée par l'Urssaf,

Déboute M. [E] de l'ensemble de ses prétentions,

Condamne M. [E] aux dépens de l'appel.

Le GreffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8
Numéro d'arrêt : 18/08169
Date de la décision : 18/09/2020

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 14, arrêt n°18/08169 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-09-18;18.08169 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award