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10/09/2020 | FRANCE | N°19/13088

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 10 septembre 2020, 19/13088


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 10 SEPTEMBRE 2020

lv

N° 2020/ 159













Rôle N° RG 19/13088 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEX6B







[EY] [L]

[H] [L]





C/



[P] [O]

[U] [N] épouse [O]

[M] [L]

[R] [L] épouse [Z]

[VJ] [B] [E] [AP] [X]

[Y] [G] épouse [X]

















Copie exécutoire délivrée

le :

à

:



Me BENEFICE



Me TEBIEL















Sur saisine de la Cour suite à l'arrêt n° 388 F-D rendu par la Cour de Cassation en date du 17 Avril 2019, enregistré sous le numéro de pourvoi U 18-16.534, qui a cassé et annulé l'arrêt n°139 rendu le 14 mars 2018 par la Chambre civile de la Cour...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 10 SEPTEMBRE 2020

lv

N° 2020/ 159

Rôle N° RG 19/13088 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BEX6B

[EY] [L]

[H] [L]

C/

[P] [O]

[U] [N] épouse [O]

[M] [L]

[R] [L] épouse [Z]

[VJ] [B] [E] [AP] [X]

[Y] [G] épouse [X]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me BENEFICE

Me TEBIEL

Sur saisine de la Cour suite à l'arrêt n° 388 F-D rendu par la Cour de Cassation en date du 17 Avril 2019, enregistré sous le numéro de pourvoi U 18-16.534, qui a cassé et annulé l'arrêt n°139 rendu le 14 mars 2018 par la Chambre civile de la Cour d'Appel de BASTIA, enregistré au répertoire général sous le n° 17/00516, sur appel d'un jugement du Tribunal de Grande Instance d'AJACCIO du 14 décembre 2015, enregistré au répertoire général sous le n° 13/00985.

DEMANDEURS SUR SAISINE APRES RENVOI CASSATION

Monsieur [VJ] [D] [L]

demeurant [Adresse 21]

représenté par Me Ludivine BENEFICE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Monsieur [H] [L]

demeurant [Adresse 18]

représenté par Me Ludivine BENEFICE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

DEFENDEURS SUR SAISINE APRES RENVOI CASSATION

Monsieur [P] [O]

demeurant [Adresse 19]

représenté par Me Layla TEBIEL de la SCP BUVAT-TEBIEL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Madame [U] [N] épouse [O]

demeurant [Adresse 19]

représentée par Me Layla TEBIEL de la SCP BUVAT-TEBIEL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Monsieur [VJ] [B] [E] [AP] [X]

demeurant [Adresse 6]

représenté par Me Layla TEBIEL de la SCP BUVAT-TEBIEL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Madame [Y] [G] épouse [X]

demeurant [Adresse 6]

représentée par Me Layla TEBIEL de la SCP BUVAT-TEBIEL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Monsieur [M] [L]

demeurant [Adresse 18]

défaillant

Madame [R] [L] épouse [Z]

assignée le 13.09.19 à personne (déclaration de saisine)

demeurant [Adresse 23]

défaillante

*-*-*-*-*

Les parties ont été avisées de ce que l'affaire serait jugée selon la procédure sans audience prévue par l'article 8 de l'ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020 et ne s'y sont pas opposées dans le délai de quinze jours.

COMPOSITION DE LA COUR

La Cour lors du délibéré était composée de :

Madame Marie-Florence BRENGARD, Président

Madame Hélène GIAMI, Conseiller

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller

ARRÊT

Défaut,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Septembre 2020,

Signé par Madame Marie-Florence BRENGARD, Président et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Par actes d'huissier en date des 25 et 30 septembre 2013, M. [VJ] [X] et Mme [Y] [G] épouse [X] ont fait assigner M. [EY] [L], M. [H] [L], M. [M] [L] et Mme [R] [L] épouse [Z] devant le tribunal de grande instance d'Ajaccio en revendication de la propriété d'un chemin sis sur le territoire de la commune d'[Localité 16], lieu-dit ' [Adresse 20]', cadastré section BL , n° [Cadastre 2], [Cadastre 3] et [Cadastre 4].

Suivant exploit d'huissier en date du 22 juillet 2014, M. [EY] [L] et M. [H] [L] ont fait appeler en intervention forcée M. [P] [O] et Mme [U] [N] épouse [O].

Par jugement réputé contradictoire en date du 14 décembre 2015, le tribunal de grande instance d'Ajaccio a:

- déclaré l'action de M. [VJ] [X] et Mme [Y] [G] épouse [X] recevable,

- dit que M. [VJ] [X] et Mme [Y] [G] épouse [X] sont propriétaires en commun des parcelles sises sur le territoire de la commune d'[Localité 16], cadastrées lieu-dit ' [Adresse 20]', section BL , n° [Cadastre 2], [Cadastre 3] et [Cadastre 4],

- ordonné la publication du jugement à la conservation des hypothèques d'Ajaccio aux frais des propriétaires ci-avant désignés,

- condamné M. [EY] [L], M. [H] [L], M. [M] [L] et Mme [R] [L] aux dépens,

- condamné M. [EY] [L], M. [H] [L], M. [M] [L] et Mme [R] [L] à verser chacun à M. [VJ] [X] et Mme [Y] [G] épouse [X] la somme de 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

M. [EY] [L] et M. [H] [L] ont relevé appel dudit jugement le 19 janvier 2016 intimant devant la cour d'appel de Bastia, les consorts [X]- [N]- [O] ainsi que M. [M] [L] et Mme [R] [L].

Suivant ordonnance en date du 20 juin 2017, le conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Bastia a déclaré nulle la déclaration d'appel formé par M. [EY] [L] et M. [H] [L], dit que la nullité de la déclaration d'appel emporte extinction de l'instance, a rejeté les autres demandes et condamné MM. [L] au paiement d'une indemnité de procédure.

Cette ordonnance a été déférée par M. [EY] [L] et M. [H] [L] à la cour d'appel de Bastia qui, suivant arrêt du 14 mars 2018, a rejeté leur requête et les a condamnés au paiement d'une somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

La Cour de cassation, par son arrêt en date du 17 avril 2019, a cassé et annulé en toutes ses dispositions l'arrêt rendu le 14 mars 2018 et a renvoyé la cause et les parties devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence aux motifs que:

' Vu l'article 815-2 du code civil, ensemble l'article 117 du code de procédure civile,

Attendu que pour rejeter leur recours contre l'ordonnance du conseiller de la mise en état ayant annulé leur déclaration d'appel, l'arrêt retient que l'appel a été formé par deux des quatre indivisaires qui ne détiennent pas la majorité des deux tiers des droits indivis , que MM. [EY] et [H] [L] ne justifient pas d'un mandat ni d'une autorisation judiciaire et que les deux autres indivisaires ont acquiescé au jugement;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'exercice, par MM. [EY] et [H] [L] , d'une voie de recours contre un jugement reconnaissant le droit de propriété d'un tiers sur un bien qu'ils prétendaient leur appartenir en indivision, avait pour objet la conservation des droits des indivisaires, la cour d'appel a violé les textes susvisés.'

Par déclaration du 08 août 2019, M. [EY] [L] et M. [H] [L] ont saisi la cour d'appel d'Aix-en-Provence, cour d'appel de renvoi.

Par ordonnance en date du 02 mars 2020, le conseiller de la mise en état a:

- débouté M. [P] [O], Mme [U] [N] épouse [O], M. [VJ] [X] et Mme [Y] [G] épouse [X] de l'ensemble des causes de leur incident,

- condamné M. [P] [O], Mme [U] [N] épouse [O], M. [VJ] [X] et Mme [Y] [G] épouse [X], ensemble, à payer à M. [EY] [L] et M. [H] [L] la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens du présent incident.

Suivant leurs dernières conclusions notifiées par RPVA le 16 mars 2020, M. [EY] [L] et M. [H] [L] demandent à la cour de:

- déclarer recevable et bien fondée la déclaration de saisine formée par M. [EY] [L] et M. [H] [L] contre le jugement rendu 14 décembre 2015,

- réformer le jugement en toutes ses dispositions en ce qu'il a:

* déclaré l'action de M. [VJ] [X] et Mme [Y] [G] épouse [X] recevable,

* dit que M. [VJ] [X] et Mme [Y] [G] épouse [X] sont propriétaires en commun des parcelles sises sur le territoire de la commune d'[Localité 16], cadastrées lieu-dit ' [Adresse 20]', section BL , n° [Cadastre 2], [Cadastre 3] et [Cadastre 4],

* ordonné la publication du jugement à la conservation des hypothèques d'Ajaccio aux frais des propriétaires ci-avant désignés,

* condamné M. [EY] [L], M. [H] [L], M. [M] [L] et Mme [R] [L] aux dépens,

* condamné M. [EY] [L], M. [H] [L], M. [M] [L] et Mme [R] [L] à verser chacun à M. [VJ] [X] et Mme [Y] [G] épouse [X] la somme de 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Et statuer à nouveau,

A titre principal,

- déclarer irrecevable l'action en revendication de propriété de M. [VJ] [X] et Mme [Y] [G] épouse [X] pour défaut du droit d'agir et notamment d'intérêt à agir,

- dire et juger que M. [EY] [L], M. [H] [L] sont seuls propriétaires indivis des parcelles sises sur le territoire de la commune d'[Localité 16], cadastrées lieu-dit ' [Adresse 20]', section BL , n° [Cadastre 2], [Cadastre 3] et [Cadastre 4], depuis la vente conclue avec Mme [J] 1935,

- débouter M. [P] [O], Mme [U] [N] épouse [O], M. [VJ] [X] et Mme [Y] [G] épouse [X] de l'ensemble de leurs demandes,

A titre subsidiaire,

- dire et juger que M. [EY] [L], M. [H] [L] sont seuls propriétaires indivis des parcelles sises sur le territoire de la commune d'[Localité 16], cadastrées lieu-dit ' [Adresse 20]', section BL , n° [Cadastre 2], [Cadastre 3] et [Cadastre 4], par usucapion depuis la vente conclue avec Mme [J] 1935,

- ordonner la publication de l'arrêt à la conservation des hypothèques d'Ajaccio,

En tout état de cause,

- condamner solidairement tous succombants à verser à M. [EY] [L], M. [H] [L] la somme de 10.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens en ce compris des trois premières instances,

- rejeter toutes demandes, fins et conclusions contraires aux présentes écritures.

Ils considèrent que les époux [X] n'ont pas d'intérêt à agir à leur encontre comme n'ayant jamais été propriétaires des parcelles, objets du litige, expliquant leur incapacité à communiquer des éléments probants pour étayer l'existence de leur droit de propriété. Ils soulignent que ces derniers agissent en réalité dans les intérêts des consorts [O], lesquels leur ont intenté de nombreux procès aux termes desquels ils ont revendiqué la propriété des parcelles en cause.

Sur le fond, ils affirment que l'origine de leur propriété remontant au 21 mai 1935, lorsque Mme [SE] [J] a cédé à [EY] [L] le chemin en question, la venderesse s'étant uniquement réservée le droit de cueillir des olives de part et d'autre de ce chemin, qui n'est grevé d'aucune servitude de passage. Ils précisent être par la suite devenus propriétaires par suite des différentes dévolutions successorales.

Ils ajoutent que:

- leur droit de propriété a été reconnu expressément par M. [O] en décembre 1995,

- les époux [X] n'ont pas vendu aux consorts [O] le chemin litigieux car ils n'en étaient pas propriétaires,

- les époux [X] ont fait l'objet d'une expropriation partielle en 1980 d'une partie de leurs parcelles, qu'ils ne se sont cependant pas manifestés à cette époque pour revendiquer leur droit de propriété à l'encontre de M. [PO] [L],

- les consorts [O] ont engagé plusieurs actions à leur encontre pour revendiquer la propriété des parcelles considérant qu'elles leur barraient l'accès à leur propriété et ont été systématiquement déboutés de leurs demandes,

- l'action en revendication de propriété des époux [X] consiste seulement à servir de manière détournée les intérêts des consorts [O] qui ne peuvent plus directement s'opposer au bornage des parcelles en cause et qui ont été reconnue comme propriété [L].

Ils font en outre valoir que:

- les consorts [X] sont dépourvus de tout titre de propriété incontestable, ces derniers ne rapportant la preuve que Mme [J] aurait conservé la propriété du chemin après la vente intervenue en 1935 au profit de [EY] [L], étant précisé qu'elle n'a pas pu céder deux fois les mêmes parcelles,

- ils sont propriétaires desdites parcelles par usucapion depuis 1935, s'étant toujours considérés comportés comme tels, excluant toute possession équivoque.

M. [P] [O], Mme [U] [N] épouse [O], M. [VJ] [X] et Mme [Y] [G] épouse [X], suivant leurs dernières conclusions déposées et signifiées le 31 mars 2020, demandent à la cour de:

- déclarer l'appel des consorts [L] infondé,

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de grande instance d'Ajaccio du 14 décembre 2015,

- voir condamner les appelants à verser aux intimés la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à assumer les entiers dépens des procédures de première instance et d'appel.

Ils s'opposent à la fin de non recevoir tirée d'un prétendu défaut d'intérêt à agir des époux [X] en rappelant que:

- leur intérêt à agir réside dans le fait de se faire reconnaître la qualité de propriétaires des parcelles litigieuses,

- ils agissent ainsi puisqu'ils n'admettent pas la prétention contraire des consorts [L], qui depuis le début de la procédure de bornage, se disent propriétaires,

- leur intérêt à agir apparaît donc dans leur prétention relative à un droit de propriété qu'ils ont immanquablement intérêt à faire reconnaître,

- un tel intérêt n'est pas subordonné au bien fondé de leur action, les consorts [L] confondant les conditions préalables à l'action et les conditions de son succès.

Ils soutiennent que le droit de propriété des époux [X] a pris naissance dans l'acte de vente du 28 août 1961 passé entre Mme [SE] [J] et M. et Mme [PO] [V] [G] et que par suite des différentes dévolutions successorales à la mort des époux [G],ils sont devenus titulaires du droit de propriété sur les parcelles constitutives du chemin querellé.

Ils précisent que:

- les époux [X] n'ont jamais cédé leurs droits sur ce chemin et ont uniquement vendu aux consorts [O] d'autres parcelles leur appartenant,

- ils n'ont pas davantage renoncé à leur droit, une telle renonciation au demeurant devant être expresse et ne saurait se déduire d'un simple silence,

- ils n'étaient pas partie aux deux autres procédures invoquées par les appelants et qui les ont opposées aux consorts [O], l'une étant relative à la protection possessoire et l'autre consistant en une action en bornage, de sorte que la question de la propriété n'a jamais été tranchée.

Ils en concluent que le chemin appartient bien aux consorts [X] en vertu de titres de propriété anciens, publiés à la conservation des hypothèses et mentionnant les références cadastrales correspondant aux références cadastrales actuelles.

Ils font valoir que les éléments produits par les appelants sont dépourvus de toute pertinence dès lors que:

- ils s'appuient sur plusieurs actes qui se succèdent entre 1974 et 1999 qui sont des actes de partage ou de donation-partage, à savoir des actes déclaratifs,

- l'acte de 1935 qu'ils présentent comme leur titre de propriété originel concerne en réalité une seule et unique parcelle qui ne peut pas être le chemin litigieux, M. [D] [L] s'étant en réalité vu octroyer uniquement un droit de passage sur ledit chemin, la venderesse ( Mme [J]) conservant en revanche la propriété de l'assiette de ce chemin,

- la finalité du chemin milite en faveur de l'existence d'une telle servitude de passage, ce qui est corroboré par d'autres éléments (actes antérieurs notamment).

Ils contestent toute acquisition de ce chemin par les consorts [L] par usucapion, leur possession étant équivoque, l'utilisation de ces parcelles résultant du droit de passage qui avait été accordé par l'acte de 1935.

M. [M] [L], cité par dépôt de l'acte à l'étude de l'huissier instrumentaire et Mme [R] [L], citée à personne, n'ont pas constitué avocat.

Le présent arrêt sera rendu par défaut.

La procédure a été clôturée le 11 mai 2020.

En application de l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020, les parties ont été régulièrement avisées du déroulement de la procédure sans audience.

A défaut d'opposition dans le délai de quinze jours, les parties ayant déposé leurs dossiers de plaidoirie, l'affaire a été mise en délibéré.

MOTIFS

Sur la recevabilité de l'action en revendication de propriété des époux [X]

Les consorts [L] concluent à l'irrecevabilité de l'action en revendication de propriété des époux [X] pour défaut du droit d'agir et notamment d'intérêt à agir aux motifs qu'ils n'ont jamais été propriétaires des parcelles, objets du litige, expliquant le défaut d'éléments probants à l'appui de leur demande, et qu'ils agissent en réalité dans l'intérêt des consorts [O].

Les consorts [L] opèrent une confusion manifeste entre la recevabilité de l'action et son bien fondé.

En effet, l'intérêt à agir des époux [X] apparaît dans leur prétention relative à un droit de propriété sur les parcelles querellées qu'ils ont immanquablement intérêt à se faire reconnaître. Ils agissent en conséquence dès lors qu'ils n'admettent pas la prétention adverse des consorts [L], la défense du droit de propriété étant un intérêt insuffisant.

En conséquence, le défaut de qualité et d'intérêt à agir invoqués par ces derniers tirés de l'absence d'éléments probants produits par les époux [X] ou d'une action par 'procuration' en faveur des consorts [O] ne sont des conditions préalables à l'action engagée mais des conditions de son succès et ne constituent donc pas des fins de non recevoir.

Sur le bien fondé de l'action en revendication de propriété des époux [X]

En vertu des articles 711 et 712 du code civil, la propriété s'acquiert et se transmet par succession, par donation entre vifs ou testamentaire, par l'effet des obligations, par accession ou incorporation, et, enfin, par prescription.

Le droit de propriété à l'appui d'une action en revendication peut être prouvée par tous moyens et à défaut de prescription acquisitive, il se déduit de présomptions et d'indices divers et doit être attribué en cas de contestation, en fonction des présomptions les meilleures et les plus caractérisées.

Il n'est pas contesté que la propriété revendiquée porte sur un chemin aujourd'hui cadastré section BL n° [Cadastre 2],[Cadastre 3] et [Cadastre 4], anciennement cadastré section BL n° [Cadastre 1] et [Cadastre 7] et figurant au cadastre napoléonien sous les références [Cadastre 9] , [Cadastre 10] et [Cadastre 11].

Il ressort par ailleurs de l'extrait du plan cadastral qui figure au dossier que ledit chemin débute de la [Adresse 24] ( n° [Cadastre 2]), passe sous un aqueduc et se déroule ensuite en longeant plusieurs parcelles ( n° [Cadastre 3] et [Cadastre 4]).

S'agissant de la naissance du droit de propriété des époux [X], ces derniers se prévalent d'un acte de vente en daté du 28 août 1961, publié à la conservation des hypothèques, en vertu duquel Mme [SE] [J] a cédé à M. et Mme [PO] [V] [G] la nue-propriété des parcelles [Cadastre 9] à [Cadastre 12], les acquéreurs recevant la totalité de la propriété de la venderesse en 1971 comme l'atteste la fiche de cette dernière publiée à la conservation des hypothèques.

Au cadastre rénové d'[Localité 16], sont indiquées, au compte de M. [PO] [V] [G] les parcelles BL [Cadastre 1] et [Cadastre 7] ( nouvelle numérotation des parcelles constitutives du chemin).

Il est par ailleurs établi que:

- à la mort de M. [PO] [V] [G] en 1989 puis de son épouse en 1997, leurs deux filles, Mme [K] [G] épouse [A] et Mme [Y] [G] épouse [X] recueillent leur succession,

- au décès de Mme [K] [G] épouse [A] le 18 novembre 2011, sa soeur, Mme [Y] [G] épouse [X] recueille sa succession,

- M. [VJ] [X] et son épouse, Mme [Y] [G] épouse [X], ayant opté pour la communauté universelle, ils sont tous deux devenus titulaires du droit de propriété sur les parcelles désormais cadastrées section BL [Cadastre 2], [Cadastre 3] et [Cadastre 4].

Les époux [X] justifient donc que le chemin litigieux est entré, soit par vente, soit par succession, dans le patrimoine de leurs auteurs et que depuis la vente intervenue le 28 août 1961 entre Mme [SE] [J] et M. et Mme [PO] [V] [G], celui-ci n'a jamais quitté le patrimoine de leurs auteurs successifs.

Les consorts [L], pour leur part, soutiennent que leur origine de propriété remonte à un acte de vente en date du 21 mai 1935 par lequel Mme [SE] [J] a cédé à M. [EY] [L], une ' parcelle de terre, située à [Localité 16], lieu dénommé [Adresse 22]. Cette parcelle de terre située dans le bas fonds de la propriété où se trouve un moulin à huile hydraulique est limitée:

- au Sud par la propriété [I],

- à l'Est par la propriété [T],

- à l'Ouest par le ruisseau,

- au Nord par la propriété de la venderesse.'

Comme le soulignent à juste titre M. et Mme [X], cette vente porte sur une seule et unique parcelle de terre, laquelle n'est pas désignée par un numéro cadastral.

Surtout, ledit acte comporte le paragraphe suivant ' M. [L] aura le droit de faire construire à ses frais, pour l'exploitation de sa propriété située lieudit [Adresse 17], un chemin carrossable tracé d'un commun accord entre les parties aboutissant sur la place du moulin et de là empruntant, le chemin existant conduisant à la [Adresse 24]. Ce chemin ne sera carrossable que pour les parties soussignées et leurs héritiers. M. [L] aura le droit d'interdire aux propriétaires limitrophes l'usage de ce nouveau chemin par charrettes et voitures.'

Cet acte distingue donc bien d'une part, la vente d'une parcelle de terre et d'autre part, la création d'un droit de passage au profit de M. [EY] [L] sur le chemin querellé, les conditions financières de cette cession corroborant une telle analyse puisque les parties ont convenu d'un prix de ' 2.500 francs s'appliquant 300 francs pour la parcelle de terre et 2.200 francs pour le droit d'établissement d'un chemin carrossable dont il est question plus haut'.

Il apparaît qu'en 1935, Mme [J] a cédé effectivement à M. [L] une parcelle de terre mais qui n'est pas l'assise du chemin puisqu'elle ne peut à la fois vendre un terrain tout en autorisant à l'acquéreur à réaliser un chemin pour passer sur ce terrain.

Il est de surcroît établi que:

- la parcelle cédée par Mme [J] à M. [L], sans aucune numérotation cadastrale, de part sa description dans l'acte comparée aux archives départementales, a pu être localisée avec les propriétés voisines ( [I] et [T]) et ne correspond pas aux parcelles aujourd'hui cadastrées section BL [Cadastre 2],[Cadastre 3] et [Cadastre 4],

- M. [L] s'est effectivement rendu acquéreur de parcelles lieudit [Adresse 17] par actes du 23 août 1935 et du 11 mai 1940 qui sont précisément situées sous la parcelle [Cadastre 9] et deviennent ainsi accessible à la route grâce au chemin prévu dans l'acte du 21 mai 1935, ce qui milite d'autant plus en faveur de l'octroi d'une servitude de passage,

- l'acte de vente du 19 avril 1926 contenant mutation entre Mme [W] veuve [JL] et Mme [SE] [J] d'une propriété cadastrée sous les numéros [Cadastre 8] à [Cadastre 13] et [Cadastre 14] à [Cadastre 15] mentionne aux charges et conditions de cette vente:

* l'existence d'une servitude de passage au profit de M. [T] conférée par acte sous seing privé du 04 décembre 1886 comportant l'autorisation pour ce dernier de construire à ses frais un chemin pour l'exploitation de son fonds,

* l'existence ' d'un droit de passage au profit de divers propriétaires sur le chemin passant devant le moulin et allant jusqu'à l'extrémité de la propriété ,

les termes de ce acte rejoignant ceux contenus dans l'acte de 1935 , à savoir ' un chemin carrossable tracé d'un commun accord entre les parties aboutissant sur la place du moulin et de là empruntant le chemin déjà existant conduisant à la [Adresse 24]'

Il s'ensuit que la cession intervenue le 28 août 1961 par Mme [SE] [J] au profit des auteurs des époux [X] ne contredit pas cet acte opposé par les consorts [L] en date du 21 mai 1935 puisqu'il ressort des développements qui précèdent que Mme [J] a manifestement vendu à M. [D] [L] une partie des parcelles acquises en 1926 et qui ne comprennent pas les parcelles aujourd'hui revendiquées, sur lesquelles l'acquéreur s'est uniquement vu octroyer un droit de passage.

Au demeurant et comme l'a souligné à juste titre le tribunal, les consorts [L] se sont toujours opposés à la désignation d'un expert judiciaire qui aurait permis d'analyser cet acte du 21 mai 1935 eu égard aux dispositions des lieux de l'époque.

Cet acte ne saurait en conséquence constituer un titre de propriété sur les parcelles litigieuses au profit de M. [D] [L] et ne comporte que la création d'une servitude de passage.

Dans ces conditions, la contradiction soulevée par les consorts [L] qui existe dans les actes du 21 mai 1935 ( au profit de leurs auteurs ) et du 28 août 1961 ( au profit des auteurs des époux [X]) s'agissant de l'origine de propriétés des parcelles par Mme [SE] [J] est sans emport puisqu'il ressort des développements qui précèdent que la vente intervenue en 1935 porte sur une autre parcelle que les parcelles litigieuses mais qu'en revanche, c'est bien en sa qualité d'unique propriétaire qu'elle les a cédées à M. et Mme [G] en 1961.

Force est de constater que les consorts [L] ne rapportent aucun acte de cession mentionnant les parcelles dont la propriété est présentement revendiquée, que la vente alléguée du 23 août 1935 ( consorts [S]/ M. [D] [L]) ne fait aucune référence aux parcelles litigieuses, de même que l'acte du 06 mai 1940 ( vente [I]/ M. [D] [L]) concerne également une autre parcelle.

Enfin, les différents actes de donation- partage successifs qui se sont succédés depuis 1974 au sein de la famille [L] ne sauraient légitimer la propriété des consorts [L] sur les parcelles querellées, s'agissant d'actes déclaratifs qui n'ont pas pu transférer plus de droits au donataire que le donateur en avait.

C'est également en vain que ces derniers invoquent l'existence d'actions judiciaires en expropriation lesquelles ne peuvent avoir une incidence sur les droits de propriété revendiqués par les époux [X] et ne sauraient s'analyser en toute hypothèse en une renonciation par ces derniers laquelle doit être expresse et non déduite d'un silence. Quant aux procédures les ayant opposées les appelants aux consorts [O] et auxquelles les époux [X] n'étaient pas partie ( protection possessoire pour l'une, bornage pour l'autre), elles n'ont pas tranché la question de la propriété des trois parcelles en cause.

Les consorts [L] invoquent également:

- des cessions de parcelles des époux [X] au profit des consorts [O] mais qui ne concernent pas les parcelles, objets du litige, de sorte que les premiers en ont bien conservé la propriété,

- l'acte notarié en date du 11 mai 1195 par lequel les consorts [O] et M. [C] et [F] [L] ont échangé, pour le premier, la parcelle BL [Cadastre 5] et, pour les seconds, une servitude de passage sur la parcelle BL [Cadastre 2] au profit de la parcelle BL [Cadastre 5] n'a, comme l'a relevé à juste titre le tribunal, jamais concerné les époux [X], de sorte que l'éventuelle reconnaissance d'un droit de propriété au bénéfice des consorts [L] par les consorts [O] ne saurait entraîner la reconnaissance par les demandeurs à l'action ( ou leurs auteurs) d'un tel droit de propriété.

Il s'ensuit que M. et Mme [X] justifient être propriétaires des parcelles litigieuses en vertu de titres de propriété notariés, publiés et mentionnant des références cadastrales qui correspondent en tout point aux références cadastrales actuelles.

Les consorts [L] soutiennent, à titre subsidiaire, être propriétaire desdites parcelles depuis 1935 par usucapion, s'étant toujours comportés comme tel. Il leur appartient de démontrer l'existence d'une possession publique, paisible, continue et non équivoque.

Or, force est de constater que la possession non équivoque fait incontestablement défaut dès lors que M. [EY] [L] passait régulièrement sur ce chemin en vertu du droit de passage qui lui a été accordé par l'acte de 1935 mais non parce ce qu'il se considérait comme en étant le véritable propriétaire. Cette seule circonstance suffit à rendre la possession équivoque, de sorte que l'usucapion ne peut être utilement invoquée par les appelants, qui au demeurant, n'apportent strictement aucun élément de nature à établir que les conditions sont réunies.

En définitive, le jugement entrepris sera confirmé en toutes ses dispositions.

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Vu l'article 696 du code de procédure civile,

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par défaut et en dernier ressort,

Déboute M. [H] [L] et M. [EY] [L] des fins de leur recours et confirme le jugement du tribunal de grande instance d'Ajaccio déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne M. [H] [L] et M. [EY] [L] à payer à M. [P] [O], Mme [U] [N] épouse [O], M. [VJ] [X] et Mme [Y] [G] épouse [X] la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [H] [L] et M. [EY] [L] aux dépens de la procédure d'appel.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 19/13088
Date de la décision : 10/09/2020

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 4A, arrêt n°19/13088 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-09-10;19.13088 ?
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