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02/07/2020 | FRANCE | N°18/06192

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-4, 02 juillet 2020, 18/06192


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-4



ARRÊT AU FOND

DU 02 JUILLET 2020



N° 2020/

MNA/FP-D











Rôle N° RG 18/06192 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BCID6







[F] [V]





C/



SARL MAIL ORDER PRINT

























Copie exécutoire délivrée

le :

02 JUILLET 2020



à :

Me Catherine LORENZI, avocat au barreau de TOULON






Me Christine GAILHBAUD, avocat au barreau de GRASSE





















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRASSE en date du 14 Mars 2018 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 17/00385.





APPELANTE



Madame [F] [V], demeura...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-4

ARRÊT AU FOND

DU 02 JUILLET 2020

N° 2020/

MNA/FP-D

Rôle N° RG 18/06192 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BCID6

[F] [V]

C/

SARL MAIL ORDER PRINT

Copie exécutoire délivrée

le :

02 JUILLET 2020

à :

Me Catherine LORENZI, avocat au barreau de TOULON

Me Christine GAILHBAUD, avocat au barreau de GRASSE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRASSE en date du 14 Mars 2018 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 17/00385.

APPELANTE

Madame [F] [V], demeurant [Localité 2]

Représentée par Me Catherine LORENZI, avocat au barreau de TOULON

INTIMEE

SARL MAIL ORDER PRINT, demeurant [Adresse 1]

Représentée par Me Christine GAILHBAUD, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

En application des dispositions de l'article 8 de l'ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020, les parties ont été informées que la procédure se déroulerait sans audience et ne s'y sont pas opposées dans le délai de 15 jours.

COMPOSITION DE LA COUR

Madame Marie-Noëlle ABBA, Présidente de chambre

Monsieur Gilles BOURGEOIS, Conseiller

Monsieur Nicolas TRUC, Conseiller

qui en ont délibéré.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 02 Juillet 2020,

Signé par Madame Marie-Noëlle ABBA, Présidente de chambre et Madame Françoise PARADIS-DEISS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCEDURE

Madame [F] [V] a été embauchée suivant contrat à durée indéterminée en qualité de juriste par la société MAIL ORDER PRINT à compter du 1er mars 2016 par la SARL MAIL ORDER PRINT.

Sa rémunération brute mensuelle était fixée à 4 200 euros pour une durée hebdomadaire de travail de 35 heures.

Mme [V] a fait l'objet d'un arrêt de travail le 15 septembre 2016, prolongé plusieurs fois jusqu'à la saisine du conseil de prud'hommes.

Madame [V] a saisi le conseil de prud'hommes de Grasse le 24 mai 2017 pour notamment l'entendre dire la procédure d'inaptitude suivie par la médecine du travail régulière, condamner son employeur au paiement de ses salaires à partir du 10 décembre 2016, et dire que la rupture du contrat de travail s'analyse en une procédure de licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par jugement du 14 mars 2018, le conseil de prud'hommes a dit que la procédure suivie par le médecin du travail est entachée d'irrégularités, qu'il n'y a pas de justification à résiliation judiciaire du contrat de travail, que ce dernier a toujours cours, et l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes.

Il a débouté la société MAIL ORDER PRINT de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [V] a interjeté appel de cette décision par déclaration enregistrée le 9 avril 2018.

Au terme de ses écritures notifiées le 20 avril 2020 Mme [V] demande à la cour de réformer dans son intégralité le jugement déféré, de constater que la procédure d'inaptitude suivie par la médecine du travail est parfaitement régulière, de condamner la société MAIL ORDER PRINT à lui verser la somme de 6 000 euros à titre de dommages-intérêts pour refus de reprendre le salaire, et l'intégralité des salaires qu'elle aurait dû percevoir depuis le 10 décembre 2016 représentant à la date du 31 octobre 2017 la somme de 4 498 euros, condamner la société MAIL ORDER PRINT à lui remettre les bulletins de salaire rectifiés à compter de décembre 2016 sous astreinte, constater que la rupture du contrat de travail s'analyse en une procédure de licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamner la société à lui verser à ce titre la somme de 25 200 euros.

Mme [V] invoque à titre subsidiaire le manquement à l'obligation de sécurité et sollicite la somme de 30 000 euros à ce titre.

Elle sollicite en tout état de cause le paiement des sommes suivantes :

-2 100 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement,

-4 200 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, et 420 euros au titre de l'indemnité de congés afférents,

-3 528 euros au titre des congés payés pour la période du 1er mars 2016 au 15 septembre 2016,

-1 763 euros au titre des heures supplémentaires et 1 612,44 euros au titre des repos compensateurs,

-5 000 euros pour non-respect de la législation sur les repos compensateurs, sur la durée maximale du travail et le repos quotidien,

-2 000 euros à titre de dommages-intérêts pour traitement inégalitaire avec les autres salariés,

-4 000 euros au titre de l'article 700 du code de proédure civile.

Elle sollicite la condamnation de la société à lui remettre un certificat de travail et une attestation Pôle Emploi, et les bulletins de salaire des mois de mars, avril et juillet 2016 rectifiés dans un délai de quinze jours et sous astreinte de 50 euros par jour de retard.

Dans ses conclusions notifiées le 24 avril 2020, la société MAIL ORDER PRINT demande à la cour de dire recevables les conclusions d'intimé notifiées le 2 octobre 2018 et les conclusions d'intimé subséquentes et de confirmer le jugement déféré, de débouter Mme [V] de l'ensemble de ses demandes, et à titre subsidiaire de déduire la somme de 81 177 euros versée à la salariée sur la période de janvier 2017 au 30 octobre 2019 d'une éventuelle condamnation à rappel de salaire et réserver la possibilité à l'employeur de tenir compte de sommes versées jusqu'à la décision à intervenir, sans préjudice de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il est référé aux écritures respectives des parties pour plus ample exposé de leurs moyens et prétentions.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 27 avril 2020.

MOTIFS DE LA DECISION

1- Sur la recevabilité des conclusions de l'intimée

La question de l'irrecevabilité des conclusions notifiées le 12 février 2020 par l'intimée ,évoquée dans la partie 'discussion' des écritures de Mme [V], mais non reprise dans le dispositif, ne saisit pas la cour, conformément aux termes de l'article 954 alinéa 3 du code civil.

2- Sur la régularité de la procédure d'inaptitude suivie par le médecin du travail

Aux termes de l'article L 1226-2 du code du travail, lorsqu'à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou à un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.

Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise.

Aux termes de l'article 1226-4 du même code, lorqu'à l'issue du délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n'est pas reclassé dans l'entreprise ou s'il n'est pas licencié, l'employeur lui verse , dès l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail.

Au termes de l'article R 4624-22 du code du travail, le salarié bénéficie d'une visite de reprise du travail par le médecin du travail (...) après une absence d'au moins trente jours pour cause d'accident du travail, de maladie ou d'accident non professionnel.

Aux termes de l'article R 4624-31 du même code, le médecin du travail ne peut constater l'inaptitude médicale du salarié à son poste de travail que s'il a réalisé :

1°une étude de ce poste

2°une étude des conditions de travail dans l'entreprise,

3° deux examens médicaux de l'intéressé espacés d'au moins deux semaines , accompagnés , le cas échéant, d'examens complémentaires.

En l'espèce, Mme [V] expose que, après avoir fait l'objet d'arrêts de travail successifs à compter du 15 septembre 2016, elle n'a pas fait l'objet, malgré ses demandes, d'un reclassement par son employeur, ou d'un licenciement, alors que le médecin du travail avait conclu, après une visite de reprise intervenue le 25 octobre 2016, à une inaptitude à son poste dans l'entreprise.

Elle produit aux débats notamment :

-Trois' fiches d'aptitude médicale' établies à son nom par le docteur [B], médecin du travail (pièces 5 et 10) :

*la première en date du 25 octobre 2016 dans laquelle la case 'visite de reprise' est cochée, qui est faite 'à la demande de l'employeur', avec pour observations 'à revoir jeudi 27/10 11h15",

*la seconde en date du 27 octobre 2016 , qui est faite 'à la demande du médecin du travail', dans laquelle la case 'visite de reprise' n'est pas cochée, et qui conclut 'Inapte au poste actuel, éventuellement reclassement sur un autre site', portant mention 'étude de poste' le 25 /10/2016",

*la dernière du 10 novembre 2016 , faite 'à la demande du médecin du travail (pièce 10), dans laquelle la case 'visite de reprise' n'est pas cochée, portant mention 'étude de poste le 25 octobre 2016.'

-une lettre du 20 septembre 2016 par laquelle Mme [V] informe son employeur de la prolongation de son arrêt de travail intitial jusqu'au 19 octobre 2016 et lui précise qu'elle se tient à sa disposition pour l'organisation d'une visite de reprise à compter du 19 octobre (pièce 8)

-un mail du 13 octobre 2016 adressé par Mme [V] à son employeur lui rappelant sa lettre, et la réponse de ce dernier par mail contenant en pièce jointe un courrier reçu du service médical de la médecine du travail en date du 4 octobre 2016 mentionnant l'organisation d'une visite concernant Mme [V] le 25 octobre 2016 .(pièce 9)

-une attestation de son médecin traitant en date du 14 avril 2017 , qui 'certifie avoir reçu le soir du 27 octobre 2016 Mme [F] [V] suite à sa visite de reprise avec le médecin du travail et avoir constaté une inaptitude de reprise du travail ce jour.'(pièce 4) .

- une seconde attestation de ce médecin en date du 19 avril 2018 qui écrit : 'je certifie avoir reçu le soir du 27 octobre 2016 Mme [F] [V] et déclare qu'elle n'était plus en arrêt maladie depuis la veille.Au vue de son état lors de cette consultation, j'ai décidé de la remettre en arrêt maladie jusqu'au 16 décembre 2016.'( pièce 41)

La société MAIL ORDER PRINT soutient que la procédure d'inaptitude est irrégulière en raison de l'absence de reprise du travail par Mme [V].

Elle expose qu'aucune visite de reprise n'est intervenue, la visite du 25 octobre 2016 ne pouvant être qualifiée de visite de reprise dès lors que Mme [V] n'a jamais repris son travail, les arrêts de travail se succédant sans interruption entre le 15 septembre 2016 et le 18 mars 2018, et que les fiches d'aptitude établies par le médecin du travail comportent plusieurs incohérences.

Elle en conclut que le contrat de travail de Mme [V] est demeuré suspendu, et qu'il n'y avait lieu ni à reclassement, ni à licenciement de la salariée, ni à versement de salaire.

Elle produit notamment aux débats :

-deux fiches d'aptitude datées du 25 octobre 2016 libellées de manière différente selon que la fiche est adressée à la salariée ou à l'employeur : dans cette dernière la mention 'à revoir jeudi 27/10 11h15" n'y figure pas,

-un courrier du nouveau médecin du travail, le docteur [N], en date du 6 février 2017, indiquant :

'Suite à mon échange téléphonique avec votre service de gestion du personnel le 29 décembre 2016, et à votre courrier recommandé du 1er février 2017, nous arrivons à la même conclusion, l'arrêt sans discontinuité de Mademoiselle [F] [V] ne permet pas de valider la procédure d'inaptitude établie par le Docteur [B].

Aujourd'hui, selon les informations de votre courrier, Mademoiselle [F] [V] est toujours en arrêt maladie et ce jusqu'au 13 février 2017 inclus.Dès la confirmation de la fin de cet arrêt, et en l'absence de prolongation, nous organiserons et réaliserons à votre demande la visite de reprise de travail suite à un arrêt maladie de plus de 30 jours et statuerons alors sur son aptitude au poste de juriste.'(pièce 8)

-un courrier adressé par son employeur à la salariée reprenant les termes du courrier du docteur [N] (pièce 9)

.../...

La cour observe que Mme [V] se contredit en affirmant avoir voulu reprendre son travail à l'issue de la première prolongation de son arrêt de travail le 19 octobre, tout en continuant de bénéficier de prolongations d'arrêts de travail ininterrompues postérieurement à cette date.

La cour fait sien le questionnement du conseil de prud'hommes sur les durées successives des premières prolongations d'arrêt de travail : après un premier arrêt de deux semaines prolongé de trois semaines, la prolongation suivante prononcée le 20 octobre ne dure que cinq jours, soit jusqu'au 24 octobre inclus, et la suivante, prononcée le 24 octobre, ne couvre que deux jours, soit jusqu'au 26 octobre inclus, pour être suivie le 27 octobre 2016 de périodes beaucoup plus longues , de trois à quatre semaines.

Elle observe à ce sujet que les deux périodes courtes se situent au moment de la 'visite de reprise ' du 25 octobre et de la visite du 27 octobre,

En outre, ni Mme [V] ni son médecin traitant n'expliquent pourquoi celle-ci aurait, après un mois d'arrêt de travail expirant le 26 octobre, repris son poste le lendemain 27 octobre pour se trouver le soir même à nouveau en arrêt de travail, arrêt prolongé ensuite jusqu'à ce jour.

La cour constate ensuite certaines incohérences dans le libellé des 'fiches d'aptitude' :

-alors que Mme [V] qualifie la visite du 25 octobre 2016 de 'visite de reprise', la fiche correspondante ne porte pas la mention 'à revoir le 27/10/2016 dans la version produite par l'employeur; en outre la rubrique 'date de l'étude de poste' n'est pas renseignée, de sorte que la cour n'est pas en mesure de savoir si cette étude de poste a été faite et quand.

-la fiche du 27 octobre 2016 porte mention d'une 'étude de poste ' datée du 25 octobre, ce qui est contradictoire avec les mentions de la fiche précédente, étant observé que l'employeur conteste, sans être contredit, que le médecin du travai ait effectué une étude de poste dans l'entreprise le 25 octobre 2016.

La fiche datée du 10 novembre 2016, qualifiée de 2e visite, et sur laquelle Mme [V] s'appuie pour dater la déclaration d'insaptitude définitive, ne peut être davantage considérée comme correspondant à la seconde visite réglementaire, et comme la véritable 'visite de reprise', dès lors que la visite correspondante est intervenue au cours d'une nouvelle prolongation d'arrêt de travail au cours de laquelle Mme [V] n'a pas manifesté de volonté de reprendre son poste.

Dès lors, les incohérences et imprécisions contenues dans le cadre de cette procédure, et soulevées par le médecin succédant au docteur [B], ne peuvent qu'être confirmées et induire que la visite du 25 octobre 2016 ne saurait être considérée comme une visite de reprise.

Mme [V] soutient que la société MAIL ORDER PRINT n'a pas exercé le recours administratif contre l'avis du médecin du travail visé par l'article L 4624-1 du code du travail applicable aux faits de l'espèce de sorte que l'avis d'inaptitude s'impose à l'employeur.

Toutefois, ces dispositions visent la contestation par l'employeur de l'avis médical rendu par le médecin du travail, et non la régularité de la procédure suivie.

En l'espèce, la cour observe que l'employeur ne conteste pas les avis médicaux, mais la régularité de la procédure d'inaptitude suivie .

En conséquence, la procédure d'inaptitude étant irrégulière et inopposable aux parties, la cour, adoptant les motifs retenus par les premiers juges, confirmera leur décision, tant en ce qui concerne l'irrégularité de la procédure d'inaptitude que les conséquences qu'en tire Mme [V] en matière de rupture du contrat de travail.

3- Sur la demande subsidiaire formée par Mme [V]

Mme [V] reproche à son employeur de ne pas s'être inquiété de la santé de sa salariée en arrêt de travail et n'avoir pas organisé de nouvelle visite de reprise, ni permis à Mme [V] de reprendre son travail, et qu'il a ainsi manqué à son obligation de sécurité et d'organisation de la visite de reprise la concernant, ce manquement devant être indemnisé en termes de dommages-intérêts.

Elle expose en outre que l'employeur a manqué à son obligation de rémunération des heures supplémentaires et du repos compensateur.

Elle en conclut que l'ensemble de ces manquements justifie la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur.

-Sur le manquement à l'obligation de sécurité :

Il résulte des débats que, à la suite de la demande de la salariée, l'employeur a sollicité une visite de reprise, puis que Mme [V] a fait parvenir à son employeur une succession d'arrêts de travail sans manifester la volonté de reprendre son poste.

Ayant continué à percevoir ses indemnités journalières de sécurité sociale ainsi qu'un complément de salaire de son employeur, elle ne justifie en outre d'aucun préjudice qui résulterait d'un éventuel manquement à l'obligation de sécurité incombant à l'employeur.

La décision qui a débouté Mme [V] de sa demande de dommages-intérêts à ce titre sera dès lors confirmée.

-Sur le paiement d'heures supplémentaires :

L'article L 3171-4 du code du travail dispose qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Il résulte de ce texte que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et qu'il appartient au salarié de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande mais il incombe aussi à l'employeur de fournir les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Pour le calcul des heures supplémentaires, la durée du travail à prendre en compte s'entend des heures de travail effectif.

La durée de travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles.

Le temps habituel de trajet entre le domicile et le lieu de travail ne constitue pas en soi un temps de travail effectif .

En l'espèce, Mme [V] expose avoir effectué des heures supplémentaires pendant les mois de mars, avril et juillet à hauteur de 48 heures non payées, en effectuant des déplacements en avion entre son domicile et le siège de l'entreprise selon le tableau suivant :

-8 mars 2016: 14h30 ( 8h-22h30) soit 6h45 d'heures supplémentaires,

-10 mars 2016: 14h30 ( 8h-22h30 ) soit 6h45 d'heures supplémentaires

-11mars 2016: 13h30 (8h-21h30 ) soit 9h30 d'heures supplémentaires

-21 avril 2016:15h30 ( 5h-20h30 ) soit 7h45 d'heures supplémentaires

-28 juillet 2016: 13 h ( 8h30 -21h30 ) soit 5h15 d'heures supplémentaires

-29 juillet 2016: 16 h (8h-minuit ) soit 12 h d'heures suppélmentaires.

Elle produit aux débats des billets d'avion :

-du 8 mars 2016 [Localité 5] -[Localité 4]-[Localité 5] départ 9h25 , retour 21h35

-du 21 avril 2016 [Localité 5] [Localité 4] -[Localité 5], départ 6h40, retour 19h50

-du 29 juillet '[Localité 6]-[Localité 3] 20h30"

Cependant les pièces versées sont incomplètes.

En outre , ainsi que l'a relevé le conseil de prud'hommes, Mme [V] étant domiciliée à [Localité 2] dans le Var et travaillant à [Localité 4], le temps de trajet entre le siège de l'entreprise et le domicile de Mme [V] n'est pas du temps de travail effectif et Mme [V] n'opère aucune distinction au sein de la plage horaire invoquée (temps de pause notamment).

Dès lors, il y a lieu de confirmer la décision déférée qui a estimé que les décomptes produits n'étaient pas probants et a débouté Mme [V] de sa demande au titre des heures supplémentaires et du repos compensateur qui en est la conséquence.

-Sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail :

Faute pour Mme [V] de rapporter la preuve des manquements ci-dessus invoqués, la décision déférée sera confirmée en ce qu'ele n'a pas fait droit à cette demande.

4- Sur la demande de dommages-intérêts pour -non respect de la législation sur les repos compensateurs, sur la durée maximale et sur le repos quotidien

Mme [V] ne justifiant pas d'un manquement de son employeur sur ces points, la décision déférée qui a rejeté cette demande sera confirmée.

5- Sur la demande de dommages-intérêts pour traitement inégalitaire avec les autres salariés

Mme [V] expose que son employeur ne lui a accordé le bénéfice de tickets-restaurants qu'à partir du mois de juin 2016, alors qu'il n'existait pas de cantine sur son lieu de travail et que son domicile se situait à plus de 1h15 de son lieu de travail.

Cependant elle ne verse aucune pièce démontrant que les autres salariés auraient été traités différemment d'elle.

La décision déférée sera confirmée sur ce point.

6- Sur l'article 700 du code de procédure civile

Il n'est pas inéquitable de condamner Mme [V], qui succombe en ses demandes, à verser à la société MAIL ORDER PRINT la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour :

Se déclare non saisie par la demande d'irrecevabilité des conclusions de la société MAIL ORDER PRINT formée par Mme [V],

Confirme en toutes ses dispositions le jugement du conseil de prud'hommes du 14 mars 2018.

Condamne Mme [V] à verser à la société MAIL ORDER PRINT la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La condamne aux dépens.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-4
Numéro d'arrêt : 18/06192
Date de la décision : 02/07/2020

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 17, arrêt n°18/06192 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-07-02;18.06192 ?
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