La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/05/2020 | FRANCE | N°17/11544

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-1, 28 mai 2020, 17/11544


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1



ARRÊT AU FOND

DU 28 MAI 2020



N° 2020/ 63













N° RG 17/11544 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BAXHU







Compagnie d'assurances CHUBB EUROPEAN GROUP LIMITED





C/



SAS STAR





















Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me Romain CHERFILS



Me Michel MOATTI













Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Commerce de SALON DE PROVENCE en date du 08 Juin 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 2016/00444.







APPELANTE



Compagnie d'assurances CHUBB EUROPEAN GROUP LIMITED (anciennement dénommée ACE EUROPEAN GROUP LIMITED), Compagnie d'a...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1

ARRÊT AU FOND

DU 28 MAI 2020

N° 2020/ 63

N° RG 17/11544 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BAXHU

Compagnie d'assurances CHUBB EUROPEAN GROUP LIMITED

C/

SAS STAR

Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me Romain CHERFILS

Me Michel MOATTI

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de SALON DE PROVENCE en date du 08 Juin 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 2016/00444.

APPELANTE

Compagnie d'assurances CHUBB EUROPEAN GROUP LIMITED (anciennement dénommée ACE EUROPEAN GROUP LIMITED), Compagnie d'assurance de droit anglais, dont le siège social est sis [Adresse 1] (ROYAUME UNI), et dont la succursale pour la France est sise [Adresse 4]

représentée par Me Romain CHERFILS de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Jean-François DELRUE, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Etienne BOYER, avocat au barreau de PARIS, plaidant

INTIMEE

SAS Société Service Travaux Assistance Réalisation (STAR)

dont le siège social est [Adresse 6]

représentée par Me Michel MOATTI, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Boris MANENTI, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 09 Mars 2020 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Pierre CALLOCH, Président

Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller

Madame Marie-Christine BERQUET, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. Alain VERNOINE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 Avril 2020.

A cette date, le prononcé de la décision a été prorogé à ce jour suite aux mesures gouvernementales prévues par la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 relative à l'état d'urgence sanitaire.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Mai 2020,

Signé par Monsieur Pierre CALLOCH, Président et M. Alain VERNOINE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

F A I T S - P R O C E D U R E - D E M A N D E S

La S.A.S. SERVICES TRAVAUX ASSISTANCE REALISATION [] s'est immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés le 8 juin 1988 avec son siège à [Localité 3]. Par l'intermédiaire du Cabinet SIFFREIN BLANC elle a souscrit à compter du 29 octobre 2006, auprès de la société ACE EUROPEAN GROUP LIMITED, une assurance sous le numéro FR 72.016.423 stipulant notamment :

* conditions générales en page 13 que 'La garantie est accordée dans la limite des montants (...) figurant aux conditions particulières' ;

* conventions spéciales :

- en pages 1-2 : 'L'assureur ne garantit pas : (...) les dommages matériels atteignant les biens (...) appartenant à des tiers, que l'assuré (...) [a] en dépôt, en location, en prêt ou qui [lui] sont confiés pour les utiliser, les travailler, les transporter ou dans tout autre but, et les dommages immatériels y consécutifs' ;

- en page 6 : 'Extension biens confiés (acquise seulement si mention en est faite aux conditions particulières) : (...) La présente extension ne s'applique pas : (...) [7ème et dernier point] aux dommages subis par le bien confié sur lequel l'assuré, au moment du sinistre, exécute sa prestation contractuelle et ayant pour cause directe l'exécution même de la prestation sur le bien, sauf dérogation aux conditions particulières' ;

* suite des conditions particulières :

- en page 1 : 'Le présent contrat a pour objet de garantir les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile de l'assuré, résultant des activités décrites ci-dessous (...) : Chaudronnerie, serrurerie, entretien d'usines, mécanique générale, fabrication de charpente métalliques' ;

- en page 2 : 'V/ Montants de garantie et de franchise : (...) dommages matériels et immatériels autres que de pollution : 2 500 000 euros 00 par sinistre avec les sous-limites suivantes : (...) dommages matériels atteignant les objets confiés et dommages immatériels y consécutifs, 50 000 euros 00 par sinistre (...) - franchises par sinistre [pour ces 2 derniers types de dommages] 2 200 euros 00 par sinistre' ;

- en page 3 : 'VI/ Dérogation aux exclusions relatives aux biens confiés Conventions Spéciales R.C. Exploitation : L'exclusion figurant au 7ème et dernier point [ci-dessus] (...) est abrogée. Sont garantis les dommages subis par le bien confié sur lequel l'assuré, au moment du sinistre, exécute sa prestation contractuelle et ayant pour cause directe l'exécution même de la prestation sur le bien'.

L'[2] [] est propriétaire d'une grue portuaire Delattre fabriquée en 1984. Le 14 avril 2014, lors de l'exécution par la société STAR de travaux de remplacement de la demi-bielle droite de liaison contrepoids équipant cette grue, la chute accidentelle de cette demi-bielle a endommagé sur cette grue les balancier gauche et chevalets droits et gauches ainsi que ladite demi-bielle et la bielle gauche. Le lendemain la société STAR a déclaré ce sinistre au Cabinet SIFFREIN BLANC, qui le 18 suivant a ouvert un dossier sinistre sous la référence 9673060540, la compagnie ACE EUROPEAN précisant le jour même à celui-ci que la garantie objet confié est limitée à la somme de 50 000 euros 00 par sinistre sous réserve de l'application de la franchise de 2 200 euros 00.

Ce même 15 avril 2014 l'EPR a commandé à la société STAR la au prix de 23 300 euros 00 H.T.

La société STAR a accepté par un procès-verbal de réception du 31 octobre les travaux de réparation indiqués 'Remplacement suite à incident des deux balanciers, deux bielles, deux têtes de chevalet', et le 23 décembre a chiffré le coût du sinistre à la somme [non contestée par la compagnie ACE EUROPEAN] de 228 724 euros 87 H.T. pour tant la grue que la demi-bielle, après déduction de la commande précitée pour 23 300 euros 00 H.T. Par lettre du 23 février 2015 l'EPR a confirmé à la société STAR avoir clôturé le dossier sinistre, suite aux travaux de remise en état réalisés et pris financièrement en charge par cette dernière.

Le 24 mars 2015 la compagnie ACE EUROPEAN a avisé le Cabinet SIFFREIN BLANC que la garantie objet confié, seule mobilisable au regard des causes et circonstances, est plafonnée à la somme de 50 000 euros 00. Le 6 juillet la société STAR, contestant l'application de ce plafond, a mis son assureur en demeure de lui adresser cette somme à titre de provision, ce qui a été fait en novembre.

Le 12 janvier 2016 la société STAR a fait assigner la compagnie ACE EUROPEAN en paiement de la somme principale de 228 724 euros 87 H.T. devant le Tribunal de Commerce de SALON DE PROVENCE, qui par jugement du 8 juin 2017 a :

* dit que la compagnie ACE EUROPEAN est mal fondée à opposer le plafond de garantie de

50 000 euros 00 applicable aux biens confiés, et condamné la compagnie ACE EUROPEAN à payer à la société STAR la somme de 228 724 euros 87 H.T., augmentée du taux d'intérêt légal à compter de la mise en demeure du 6 juillet 2015, sous déduction de la provision versée d'un montant de 50 000 euros 00 ;

* débouté la société STAR de (...) ses autres demandes dont en dommages et intérêts ;

* condamné la compagnie ACE EUROPEAN à payer à la société STAR la somme de 2 500 euros 00 au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

* ordonné l'exécution provisoire ;

* condamné la compagnie ACE EUROPEAN en tous les dépens.

La compagnie d'assurances CHUBB EUROPEAN GROUP LIMITED (anciennement la compagnie ACE EUROPEAN GROUP LIMITED) a régulièrement interjeté le 16-19 juin 2017 un appel total du jugement, et concluant le 21 août 2018 soutient notamment que :

- la clause d'exclusion des biens confiés est parfaitement claire et précise, d'autant que la clause garantissant les mêmes est une extension de garantie ;

- le Cabinet SIFFREIN BLANC est le courtier de l'assurée la société STAR c'est-à-dire son mandataire, et toute information communiquée au premier produit ses effets à l'égard de la seconde ; l'éventuelle ignorance par la société STAR du courrier du 18 avril 2014 n'est imputable qu'au Cabinet SIFFREIN BLANC ; la compagnie ACE EUROPEAN a toujours formellement maintenu l'application du plafond de garantie de 50 000 euros 00 ;

- la société STAR se devait de réparer les dommages causés à l'EPR, indépendamment d'une couverture effective par son assureur ;

- la même ne justifie pas sa demande de dommages et intérêts ;

- l'objet confié représente la grue dans son intégralité, et pas simplement la partie (demi-bielle) sur laquelle est intervenue la société STAR ; il est sans importance que cette grue ne pouvait pas être déplacée par cette intervenante ;

- la demi-bielle n'est pas dissociable de la grue, et la société STAR intervenait sur la première en contrôlant également l'ensemble des autres éléments de la seconde.

L'appelante demande à la Cour, vu les articles 1103, 1104 et 1193 du Code Civil (ancien article 1134) ; 910 et 954 du Code de Procédure Civile ; de :

- déclarer la compagnie CHUBB EUROPEAN bien fondée en son appel ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a :

. dit qu'il n'y avait lieu de prononcer la nullité de la clause d'exclusion ;

. débouté la société STAR de sa demande de dommages et intérêts et de ses autres demandes;

- en conséquence : débouter la société STAR des demandes formulées aux termes de son appel incident ;

- dire et juger que l'appel incident interjeté par la société STAR [dans ses conclusions du 27 septembre 2017] est strictement limité à l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts, et que dès lors, par stricte application des dispositions de l'article 910 du Code de Procédure Civile, cette dernière n'est désormais plus recevable à solliciter l'infirmation du jugement en ce qu'il a dit qu'il n'y avait lieu de prononcer la nullité de la clause d'exclusion ;

- réformer le jugement en ce qu'il a condamné la compagnie ACE EUROPEAN à payer à la société STAR la somme de 228 724 euros 87 H.T., augmentée du taux d'intérêt légal à compter de la mise en demeure du 6 juillet 2015, sous déduction de la provision versée d'un montant de 50 000 euros 00 ;

- statuant à nouveau :

- dire et juger que le sinistre intervenu le 14 avril 2014 sur le Port de [Localité 5] relève de la seule garantie de la Police Responsabilité Civile Exploitation n° FR 72.016.423 souscrite par la société STAR auprès de la compagnie CHUBB EUROPEAN ;

- dire et juger que le plafond de garantie de la garantie objet confié est de 50 000 euros 00 tel qu'il résulte de cette Police ;

- débouter la société STAR de toutes ses demandes formulées à l'encontre de la compagnie CHUBB EUROPEAN ;

- condamner la société STAR au paiement de la somme de 6 000 euros 00 au profit de la

compagnie CHUBB EUROPEAN au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Par conclusions du 19 avril 2018 la S.A.S. SERVICES TRAVAUX ASSISTANCE REALISATION [] répond notamment que :

- les travaux causes du sinistre entrent dans le cadre des activités déclarées à la compagnie ACE EUROPEAN ; l'ensemble des dépenses engagées pour la remise en état s'est élevé à la somme de 228 724 euros 87 H.T. ;

- il est déterminant de distinguer d'une part le coût de la remise en état de la grue appartenant à l'EPR qui sera pris en charge dans le cadre de la R.C. de base plafonnée à 2 500 000 euros 00, et d'autre part les travaux de reprise de la demi-bielle (objet de la commande) qui seule peut constituer un bien confié au sens du contrat d'assurance avec plafond de 50 000 euros 00 ; la grue dans son ensemble ne peut être assimilée à un bien confié ; l'assureur a pour obligation essentielle de couvrir les conséquences de l'activité ;

- la définition du bien confié est imprécise, et en outre non limitée vu les mots 'ou dans tout autre but' des pages 1-2 des conditions spéciales ; l'assimilation de la grue à un bien confié fait appliquer à cet objet un plafond de garantie d'un montant dérisoire ; cette grue n'a pas été confiée à elle-même 'en dépôt, en location, en prêt' pour son utilisation, son travail, son transport ; la grue et la demi-bielle ne forment pas un tout indissociable, constitutif d'un bien confié ;

- son assureur lui a toujours laissé penser que les travaux de reprise concernant la grue étaient couverts, et aucune réserve n'a été formulée sur l'application à eux du plafond de garantie égal à 50 000 euros 00 ; la déclaration de sinistre du 15 avril 2014 vise expressément la bielle de liaison contrepoids, tandis que le courrier de la compagnie ACE EUROPEAN du 18 suivant la visant également a été envoyé au Cabinet SIFFREIN BLANC et non à l'assurée ;

- les manquements de la compagnie ACE EUROPEAN ont été la cause des tensions importantes de trésorerie subies par la société STAR.

L'intimée demande à la Cour, vu les articles 1134 et suivants du Code Civil (devenus 1103 et suivants) ; L. 113-1 du Code des Assurances ; de :

- débouter la compagnie ACE EUROPEAN devenue CHUBB EUROPEAN de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- déclarer recevables et bien fondées les demandes de la société STAR ;

- adjuger de plus fort à la société STAR le bénéfice de ses précédentes écritures ;

I.

- confirmer le jugement en ce qu'il a fait droit à la demande de prise en charge du sinistre en RC de base, et alloué à la société STAR la somme de 228 724 euros 87 H.T., augmentée du taux d'intérêt légal à compter de la mise en demeure du 6 juillet 2015, sous déduction de la provision versée d'un montant de 50 000 euros 00 ;

* à titre principal :

- rejeter le moyen de la compagnie ACE EUROPEAN devenue CHUBB EUROPEAN tiré du caractère strictement limité de l'appel incident de d'elle-même au rejet de sa demande de dommages et intérêts ;

- dire et juger que la clause d'exclusion litigieuse n'est pas précise et limitée au sens de l'article L. 113-1 du Code des Assurances ;

- dire et juger que l'interprétation de la clause par la compagnie ACE EUROPEAN devenue CHUBB EUROPEAN conduit à vider le contrat d'assurance de sa substance ;

- dire et juger que, en tout état de cause, la nécessaire interprétation des termes de la

clause conduit à considérer que la grue Delattre n'est pas assimilable dans son ensemble à un

bien confié au sens de la police d'assurance ;

en conséquence :

- dire et juger que la compagnie ACE EUROPEAN devenue CHUBB EUROPEAN est mal fondée à opposer à la réclamation financière de la société STAR le plafond de garantie applicable aux , et qu'il convient d'appliquer la garantie de base responsabilité civile plafonnée à 250 000 000 euros 00 ;

* à titre subsidiaire :

- dire et juger que la compagnie ACE EUROPEAN devenue CHUBB EUROPEAN, parfaitement informée de l'évolution de la situation concernant le coût des travaux de réparation de la grue Delattre, a maintenu fautivement pendant plusieurs mois son assuré dans la croyance erronée que les conséquences du sinistre seraient intégralement prises en charge et n'a, en outre, jamais attiré 1'attention de la société STAR sur l'application de la garantie et ses conséquences en terme de dépassement du plafond de garantie de

50 000 euros 00, manquant ainsi à ses obligations essentielles d'information, de conseil et de mise en garde ;

- en conséquence : dire et juger que la compagnie ACE EUROPEAN devenue CHUBB EUROPEAN a engagé sa responsabilité contractuelle et doit indemniser la société STAR des préjudices en découlant, chiffrés dans sa réclamation financière ;

* en tout état de cause :

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la compagnie ACE EUROPEAN devenue CHUBB EUROPEAN à payer à la société STAR la somme de 228 724 euros 87 H.T., augmentée du taux d'intérêt légal à compter de la mise en demeure du 6 juillet 2015, sous déduction de la provision versée d'un montant de 50 000 euros 00 ;

- y ajoutant, condamner la compagnie ACE EUROPEAN devenue CHUBB EUROPEAN à payer à la société STAR la somme de 6 000 euros 00 en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile au titre des frais exposés en cause d'appel ;

II.

- infirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société STAR de sa demande de dommages et intérêts à hauteur de 20 000 euros 00 ;

- dire et juger que ces dommages et intérêts sont en lien avec le retard dans la mobilisation de la garantie et le remboursement des frais avancés ;

- statuant à nouveau, condamner la compagnie ACE EUROPEAN devenue CHUBB EUROPEAN à payer à la société STAR la somme de 20 000 euros 00 en réparation de son préjudice financier.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 février 2020.

----------------------

M O T I F S D E L ' A R R E T

Sur l'appel incident de la société STAR :

Cette intimée avait dans ses premières conclusions du 27 septembre 2017, soit dans le délai de 3 mois à compter des conclusions de l'appelante du 31 juillet précédent, c'est-à-dire conformément à l'article 909 alors en vigueur du Code de Procédure Civile, demandé à la Cour de notamment :

- dire et juger que la clause d'exclusion litigieuse n'est pas précise et limitée au sens de l'article L. 113-1 du Code des Assurances ;

- dire et juger que l'interprétation de la clause par la compagnie ACE EUROPEAN devenue CHUBB EUROPEAN conduit à vider le contrat d'assurance de sa substance ;

- dire et juger que, en tout état de cause, la nécessaire interprétation des termes de la clause conduit à considérer que la grue Delattre n'est pas assimilable dans son ensemble à un bien confié au sens de la police d'assurance.

Ce faisant elle est donc aujourd'hui recevable à soutenir ces 3 points, contrairement à ce que prétend la compagnie ACE EUROPEAN devenue CHUBB EUROPEAN.

La garantie , stipulée par la police d'assurance n° FR 72.016.423 souscrite à compter du 29 octobre 2006 par la société STAR auprès de la compagnie ACE EUROPEAN par l'intermédiaire de son courtier le Cabinet SIFFREIN BLANC, pour laquelle les conditions générales renvoient aux conventions spéciales, a été exclue par les pages 1-2 et 6 de ces dernières ; mais elle a finalement été retenue dans la page 3 des conditions particulières dérogeant expressément aux conventions spéciales et précisant 'L'exclusion figurant [dans celles-ci] (...) est abrogée. Sont garantis les dommages subis par le bien confié sur lequel l'assuré, au moment du sinistre, exécute sa prestation contractuelle et ayant pour cause directe l'exécution même de la prestation sur le bien'. Par suite les dommages survenus au bien de l'EPR, confié à la société STAR pour son intervention contractuelle du14 avril 2014 (exécution de travaux de remplacement), sont garantis par la compagnie ACE EUROPEAN devenue CHUBB EUROPEAN.

Le jugement est donc confirmé pour avoir conclu qu'il n'y a pas lieu de prononcer la nullité de la clause de la police d'assurance de la compagnie ACE EUROPEAN excluant prétendument les biens confiés à son assurée.

Sur le montant de l'indemnisation due à la société STAR :

Le bien confié à cette société par l'EPR est une grue composée de divers éléments dont les bielles, demi-bielles, balanciers et chevalets, et cet ensemble constitue une réalité matérielle indissociable ; il est donc impossible de séparer d'une part la demi-bielle gauche ainsi que les bielles, balanciers et chevalets, et d'autre part la demi-bielle droite même si la société STAR n'est intervenue que sur cette dernière ; en effet le sinistre résultant de cette intervention a endommagé également ces premiers éléments qui étaient donc inséparables du second.

Dès le 18 avril 2014, soit 4 jours seulement après la survenance des dommages, la compagnie ACE EUROPEAN a clairement notifié au Cabinet SIFFREIN BLANC la limitation de sa garantie à la somme de 50 000 euros 00, et ce destinataire en sa qualité de courtier c'est-à-dire de mandataire de la société STAR avait l'obligation de transmettre à celle-ci cette information ; l'existence de ce mandat fait obstacle à l'argument de cet assurée reprochant uniquement à son assureur d'avoir manqué à ses obligations essentielles d'information, de conseil et de mise en garde, un tel manquement ne pouvant être invoqué qu'à l'encontre du Cabinet SIFFREIN BLANC qui pourtant n'a pas été assigné par la société STAR.

C'est par suite de manière infondée que le Tribunal a conclu que, à tout le moins, il y a doute sur le fait que la grue puisse être considérée comme un bien confié, et a dit que la compagnie ACE EUROPEAN est mal fondée à opposer le plafond de garantie applicable aux biens confiés soit la somme de 50 000 euros 00. Cette dernière constitue ainsi la seule indemnité due à la société STAR en vertu de la police d'assurance.

Sur les autres demandes :

Le préjudice de trésorerie invoqué par la société STAR sera réparé par les intérêts au taux légal courant sur cette indemnité, qui courent depuis sa mise en demeure à la compagnie ACE EUROPEAN du 6 juillet 2015 comme l'a justement jugé le Tribunal. Les relevés bancaires de la société CIC LYONNAISE DE BANQUE aux 28 février, 20 août et 22 décembre 2014 ainsi que 30 juin 2015 ne démontrent pas que la société STAR ait subi un préjudice supplémentaire à celui que répare ladite indemnité de 50 000 euros 00.Le jugement est donc confirmé pour avoir débouté cette société de sa demande de dommages et intérêts.

L'équité fait obstacle à la demande en appel de la compagnie ACE EUROPEAN devenue CHUBB EUROPEAN au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Enfin le bien-fondé de l'appel de la compagnie ACE EUROPEAN devenue CHUBB EUROPEAN conduit la Cour à mettre les dépens d'appel à la charge de la société STAR.

---------------------

D E C I S I O N

La Cour, statuant en dernier ressort et par arrêt contradictoire.

Infirme le jugement du 8 juin 2017 pour avoir dit que la société ACE EUROPEAN GROUP LIMITED est mal fondée à opposer le plafond de garantie de 50 000 euros 00 applicable aux biens confiés, et pour avoir condamné la société ACE EUROPEAN GROUP LIMITED à payer à la S.A.S. SERVICES TRAVAUX ASSISTANCE REALISATION [] la somme de 228 724 euros 87 H.T., augmentée du taux d'intérêt légal à compter de la mise en demeure du 6 juillet 2015, sous déduction de la provision versée d'un montant de 50 000 euros 00.

Statuant à nouveau sur ces points :

* juge que l'indemnité due par la compagnie d'assurances CHUBB EUROPEAN GROUP LIMITED anciennement la société ACE EUROPEAN GROUP LIMITED à la S.A.S. SERVICES TRAVAUX ASSISTANCE REALISATION [] est contractuellement plafonnée à la somme de 50 000 euros 00 ;

* condamne la compagnie d'assurances CHUBB EUROPEAN GROUP LIMITED anciennement la société ACE EUROPEAN GROUP LIMITED à payer à la S.A.S. SERVICES TRAVAUX ASSISTANCE REALISATION [] la somme de

50 000 euros 00, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 6 juillet 2015, avec déduction de la provision versée d'un montant de 50 000 euros 00.

Confirme tout le reste du jugement.

Condamne la S.A.S. SERVICES TRAVAUX ASSISTANCE REALISATION [] aux entiers dépens de première instance et d'appel, avec application de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

Rejette toutes les autres demandes.

Le GREFFIER Le PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 3-1
Numéro d'arrêt : 17/11544
Date de la décision : 28/05/2020

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 02, arrêt n°17/11544 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-05-28;17.11544 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award