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07/02/2020 | FRANCE | N°17/01132

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-6, 07 février 2020, 17/01132


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-6



ARRÊT AU FOND

DU 07 FEVRIER 2020



N° 2020/ 59













Rôle N° RG 17/01132 - N° Portalis DBVB-V-B7B-74IK







SCP BR et Associés

SELARL [TB] [J]





C/



[XT] [A]

Association AGS - CGEA DE MARSEILLE DELEGATION REGIONAL DU SUD EST











Copie exécutoire délivrée

le :07/02/2020

à :



Me Antoine DONSIMONI,

avoc

at au barreau de MARSEILLE



Me Robert CLAVET, avocat au barreau de TOULON

(Vestiaire 55)



Me Isabelle PIQUET-MAURIN, avocat au barreau de TOULON

(Vestiaire 209)









Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-6

ARRÊT AU FOND

DU 07 FEVRIER 2020

N° 2020/ 59

Rôle N° RG 17/01132 - N° Portalis DBVB-V-B7B-74IK

SCP BR et Associés

SELARL [TB] [J]

C/

[XT] [A]

Association AGS - CGEA DE MARSEILLE DELEGATION REGIONAL DU SUD EST

Copie exécutoire délivrée

le :07/02/2020

à :

Me Antoine DONSIMONI,

avocat au barreau de MARSEILLE

Me Robert CLAVET, avocat au barreau de TOULON

(Vestiaire 55)

Me Isabelle PIQUET-MAURIN, avocat au barreau de TOULON

(Vestiaire 209)

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON en date du 30 Décembre 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 15/01304.

APPELANTES

SCP BR et Associés prise en la personne de Me [Z] [Y] es-qualit de mandataire judiciaire de la SELARL [TB] [J], demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Antoine DONSIMONI, avocat au barreau de MARSEILLE

SELARL [TB] [J], sise [Adresse 2]

représentée par Me Antoine DONSIMONI, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEES

Madame [XT] [A], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Robert CLAVET, avocat au barreau de TOULON

Association AGS - CGEA DE MARSEILLE DELEGATION REGIONAL DU SUD EST, demeurant [Adresse 5]

représenté par Me Isabelle PIQUET-MAURIN, avocat au barreau de TOULON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Novembre 2019 à 14 heures, les avocats ayant été invités à l'appel des causes à demander à ce que l'affaire soit renvoyée à une audience collégiale s'ils n'acceptaient pas de plaider devant les magistrats rapporteurs et ayant renoncé à cette collégialité, l'affaire a été débattue devant Madame Christine LORENZINI, Présidente de Chambre et Madame Solange LEBAILE, Conseiller.

Mme Solange LEBAILE, conseillère de la chambre 4-6, a fait son rapport avant la plaidoirie.

Les magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Christine LORENZINI, Présidente

Monsieur M.Thierry CABALE, conseiller

Monsieur Solange LEBAILE, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Caroline POTTIER.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 07 Février 2020.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 07 Février 2020,

Signé par Madame Christine LORENZINI, Présidente de Chambre et Mme Suzie BRETER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Madame [XT] [A] a été embauchée à compter du 1er septembre 1991 en qualité de préparatrice en pharmacie par Monsieur [N] [U]. A compter du 1er avril 2005, la pharmacie a été reprise par Madame [TB] [J].

Estimant être victime de harcèlement moral, Madame [A] a saisi le conseil de prud'hommes de Toulon qui par jugement en date du 30 décembre 2016 a :

- prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur,

- dit que cette résiliation judiciaire produisait les effets d'un licenciement nul,

- condamné la société à lui payer les sommes suivantes :

* 28800 euros de dommages et intérêts pour licenciement nul,

* 5000 euros de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité de résultat,

* 3000 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral,

* 4794,52 euros d'indemnité de préavis,

* 479,45 euros d'indemnité afférente de congés payés,

* 16039,73 euros d'indemnité légale de licenciement,

* 3455,33 euros de rappel de salaire,

* 345,53 euros d'indemnité afférente de congés payés,

* 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- l'a déboutée du surplus de ses demandes,

- a débouté la société de ses demandes reconventionnelles,

- ordonné l'exécution provisoire en vertu de l'article 515 du code de procédure civile,

- condamné la société aux dépens de l'instance.

Le 17 janvier 2017 , soit dans le délai légal, la 'Selarl [J] [TB]' a relevé appel de ce jugement.

Par jugement en date du 25 janvier 2017, le conseil de prud'hommes de Toulon a rectifié une omission matérielle et ajouté au titre des condamnations prononcées, la somme de 6361,95 euros d'indemnité de congés payés.

Par dernières conclusions en date du 25 octobre 2019, auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens et prétentions, la 'Sarl Pharmacie [J]' et Maître [Z] [Y], ès qualités de mandataire judiciaire, demandent à la cour de :

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Madame [A] produisant les effets d'un licenciement nul et a condamné la société aux sommes suivantes :

* 28800 euros de dommages et intérêts pour licenciement nul,

* 5000 euros de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité de résultat,

* 3000 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral,

* 4794,52 euros d'indemnité de préavis,

* 479,45 euros d'indemnité afférente de congés payés,

* 16039,73 euros d'indemnité légale de licenciement,

* 3455,33 euros de rappel de salaire,

* 345,53 euros d'indemnité afférente de congés payés,

* 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouter Madame [A] de toutes ses demandes,

- condamner reconventionnellement Madame [A] au paiement d'une somme de 15000 euros à titre de dommages et intérêts pour avoir exécuté son contrat de travail de manière déloyale,

- condamner reconventionnellement Madame [A] au paiement d'une somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

L'employeur fait valoir :

- sur les conditions de travail, que les attestations produites de salariés et de clients témoignent des conditions de travail optimales ; que la salariée a fait preuve de mauvaise volonté dans l'accomplissement de ses tâches ; que les attestations adverses sont de pure complaisance ; qu'il a rencontré de graves difficultés avec un client dépendant aux drogues dures ; que contrairement aux allégations de la salariée, Madame [J] n'a jamais entretenu de relations amicales avec ce client contre lequel elle a été amenée à déposer plainte pour vol, extorsion et menaces de mort; que s'agissant de l'altercation du 16 novembre 2015, aucune des salariées présentes ne l'a informé du passage de ce client ni n'a déclenché le bouton de sécurité, contrairement à ses directives; que Madame [J] a été contrainte en raison du danger que représentait ce client qui ce jour-là a été arrêté et placé en garde à vue, de demander aux salariés de quitter leur emploi en leur précisant que leur journée serait rémunérée ; qu'aucun élément ne vient corroborer la thèse de la salariée selon laquelle elle aurait été violemment poussée et insultée par Madame [J] ; que l'attestation des époux [S] devra être rejetée car elle n'émane pas d'eux et ne porte la signature que d'une seule personne ; que l'attestation de Madame [AX] est rédigée en des termes identiques à la précédente ; que les époux [S] étaient les seuls clients présents dans la pharmacie ce jour-là et les seules personnes auditionnées par la Cpam ; que dans attestation, Madame [I] ne confirme pas la version de la salariée selon laquelle Madame [J] aurait jeté ses effets personnels ; que Madame [G] a indiqué dans une seconde attestation avoir rédigé la première sous la pression des trois salariées qui ont saisi le conseil de prud'hommes ; que le fait que les trois salariées aient déclaré un accident de travail ne démontre pas la véracité de leur version ;

- sur l'absence de harcèlement moral et de manquement à l'obligation de sécurité de résultat, que la salariée qui ne s'est jamais plainte et n'a pas saisi l'inspection du travail, se contente de produire des certificats médicaux d'un médecin qui s'est borné à reproduire les dires de sa patiente et qui n'était pas présent à ses cotés sur son lieu de travail ; qu'il produit de nombreuses attestations démontrant que les conditions de travail étaient optimales ; que contrairement à ce qu'affirme la salariée, il s'est toujours acquitté de ses cotisations auprès des services de la médecine du travail ;

- sur la demande de résiliation judiciaire, que même à supposer que les faits reprochés soient établis, les prétendus manquements ont disparu puisque la salariée est en arrêt-maladie depuis le 16 novembre 2015 ; qu'il a contesté devant la commission de recours amiable l'arrêt de travail de la salariée ;

- sur les demandes indemnitaires, que la demande de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité et la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral résultant exclusivement de l'accident du travail du 16 novembre 2015 relèvent de la compétence exclusive du tribunal des affaires de sécurité sociale ;qu'il a relevé appel du jugement du pôle social de [Localité 6] en date du 4 avril 2019 ayant reconnu la faute inexcusable ; que cette décision a débouté la salariée de sa demande d'indemnisation d'un préjudice complémentaire ; qu'à titre infiniment subsidiaire, la salariée n'a jamais fait l'objet de harcèlement moral ; qu'il a toujours respecté son obligation de sécurité, raison pour laquelle il a demandé à ses salariés le 16 novembre 2015 de quitter leur lieu de travail ; que la salariée ne précise pas les termes et les circonstances des insultes qu'elle prétend avoir subi et ne produit aucune pièce de nature à corroborer cette thèse ; que la salariée ne peut solliciter plusieurs fois la condamnation de la concluante à des dommages et intérêts sur la base de faites identiques ; que, concernant les demandes de rappel de salaire et de congés payés afférents, la salariée avait signé un avenant à effet au 5 février 2010 portant la durée de son temps de travail à trente trois heures trente hebdomadaires ; qu'il ressort de la lecture du planning de Madame [A] que cette dernière n'accomplissait pas un temps plein ; que la salariée a elle-même, déclaré à la Cpam travailler trente trois heures quinze ; que concernant l'indemnité compensatrice de congés payés, le jugement entrepris devant être réformé en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, Madame [A] devra être déboutée de sa demande en paiement d'indemnité compensatrice de congés payés ; que, contrairement à ce que soutient la salariée, le fait qu'un jugement en rectification d'erreur matérielle soit intervenu postérieurement à l'appel interjeté et n'ait pas fait l'objet d'un appel ne permet pas de conclure que la somme relative à cette indemnité lui serait définitivement acquise ; qu'en effet, en vertu de l'effet dévolutif de l'appel, ce chef de demande peut être contesté ; que, s'agissant des demandes relatives à la rupture du contrat de travail, le salaire de référence est celui de 2327,26 euros, salaire perçu tous les mois et non celui de 2397,26 euros correspondant à celui perçu en octobre 2015 et comprenant une prime d'équipement ; qu'il emploie habituellement moins de onze salariés ; que la salariée semble avoir retrouvé du travail dans une pharmacie à [Localité 4] ; que la salariée n'ayant pas été déclarée inapte par la médecine du travail, l'indemnité de licenciement ne peut être doublée ;

- sur la nouvelle demande de la salariée pour résistance abusive, que le juge de l'exécution est seul compétent pour connaître des litiges relatifs aux titres exécutoires ; qu'à titre subsidiaire, les documents de fin de contrat ont été adressés à la salariée ; que cette dernière a fait procéder à une saisie-attribution sur ses comptes bancaires, saisie qui a conduit à l'ouverture de la procédure de sauvegarde ; que la salariée ne rapporte pas la preuve d'une quelconque malice, mauvaise foi ou erreur grossière ;

- sur ses demandes reconventionnelles, que depuis le 16 novembre 2015, date à laquelle elles ne se sont plus présentées à leurs postes, les trois salariées mènent une politique de dénigrement et de diffamation à l'encontre de Madame [J] et de son officine ; qu'une plainte a d'ailleurs été déposée concernant ces faits ; que la société a vu son chiffre d'affaires baisser de manière significative depuis l'arrêt maladie des trois salariées comme en atteste l'expert-comptable ; que la maison de retraite avec laquelle un contrat avait été passé en mars 2015 a décidé de ne pas le renouveler ; qu'en effet le départ soudain de ces trois salariées, formées spécialement pour le suivi de ce contrat, a entraîné de nombreuses erreurs ; que compte tenu du préjudice occasionné par le comportement de la salariée, il est légitime à solliciter une somme de 15000 euros à titre de dommages et intérêts.

Par dernières conclusions en date du 31 octobre 2019, auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens et prétentions, Madame [A] demande à la cour de :

- dire que la Selarl [TB] [J] a commis des manquements graves de harcèlement moral et à l'obligation de sécurité de résultat, faisant obstacle à la poursuite du contrat de travail,

- dire que ces manquements graves de harcèlement moral ne sont pas des actes isolés,

- dire que les sommes dues à Madame [A] sont garanties par les Ags Cgea et les condamner au paiement,

En conséquence,

- confirmer la mise en cause de l'Ags Cgea,

- dire que la Selarl [TB] Bernarini est redevable de la somme de 69276,51 euros,

En conséquence,

- fixer au passif de la Selarl [TB] [J] la totalité des sommes dues à Madame [A], soit 69276,51 euros qui entrent dans la limite du plafond prévu à l'article D 3253-5 du code du travail,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur pour harcèlement moral ayant entraîné la nullité du licenciement,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a constaté les manquements de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la Selarl [TB] [J] aux paiement des sommes suivantes :

* 28800 euros nets de dommages et intérêts pour licenciement nul,

* 5000 euros nets de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité de résultat,

* 3000 euros nets de dommages et intérêts pour préjudice moral,

* 4794,52 euros bruts d'indemnité de préavis,

* 479,45 euros bruts d'indemnité afférente de congés payés,

* 16039,73 euros nets d'indemnité de licenciement,

* 6361,95 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,

* 3455,33 euros de rappel de salaire,

* 345,53 euros d'indemnité afférente de congés payés,

* 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau sur l'indemnité pour non-respect de la procédure,

- fixer au passif de la Selarl [TB] [J] la somme de 2397,26 euros pour non-respect de la procédure,

- fixer au passif de la Selarl [TB] [J] la somme de 5000 euros pour résistance abusive à l'exécution du jugement et la délivrance des documents de rupture,

- fixer au passif de la Selarl [TB] [J] la somme de 3500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens.

La salariée soutient :

- in limine litis, sur la demande de mise hors de cause de l'Ags Cgea, que l'article L625-3 du code de commerce ne prévoit pas cette mise hors de cause en cas d'ouverture d'une procédure de sauvegarde ; que les sommes dues sont exécutoires en vertu d'un jugement antérieur au jugement d'ouverture ; que le caractère exécutoire a été confirmé par une ordonnance du premier président en date du 26 juin 2017 ; que les arrêts de la cour de cassation cités par l'Ags Cgea font référence à des procédures prud'homales en cours au jour du jugement prononçant la mesure de sauvegarde ;

- sur la résiliation judiciaire, qu'elle a subi durant plusieurs années ainsi que ses collègues des agissements répétés de harcèlement moral qui l'ont contrainte à déclarer un accident de travail; que de nombreuses attestations démontrent les agissements de Madame [J] ; que son dossier médical établit l'antériorité du comportement de cette dernière ; que, concernant les faits du 16 novembre 2015, elle a été agressée par Madame [J] qui lui a reproché de ne pas avoir déclenché l'alarme lors de la venue de Monsieur [K] alors que dernier était reçu quasiment tous les jours pour boire le café dans son bureau ; que Madame [J] l'a poussée violemment en lui indiquant qu'elle ne faisait plus partie du personnel tout en la traitant de 'pute, connasse, salope'; que par la suite, Madame [J] a pris ses effets personnels pour les jeter dans la rue, a mis les autres salariés et les clients dehors et a tiré le rideau ; qu'elle a déposé plainte auprès des services de police après s'être rendue chez son médecin ; que le certificat médical établi ce jour-là a constaté des douleurs du membre supérieur droit et un état de stress post traumatique majeur et prescrit un arrêt de travail de trois jours ; que dans le cadre de l'enquête de la caisse primaire d'assurance maladie diligentée suite à la déclaration d'accident du travail, les procès-verbaux d'audition révèlent que Madame [J] a fait une crise d'hystérie et hurlait sur tout le monde en les insultant ; que le 4 janvier 2016, la caisse primaire d'assurance maladie a notifié la prise en charge au titre de l'accident du travail ; que le pôle social du tribunal de grande instance de Toulon a dans un jugement en date du 4 avril 2019 reconnu la faute inexcusable de l'employeur suite à l'accident dont elle a été victime le 16 novembre 2015 ; qu'il y a donc une corrélation directe entre les faits de harcèlement qui se sont produits le 16 novembre 2015 et la prise en charge au titre de l'accident du travail ; que, dans un rapport médical en date du 17 mai 2017 portant sur l'évaluation du taux d'incapacité permanente, il est fait état de graves conséquences médicales sur son état de santé ; que les manquements de l'employeur à son obligation de sécurité ont eu des répercussions sur l'état de santé puisqu'elle n'a pas pu reprendre son poste ; qu'en outre, l'employeur n'assure pas la surveillance de ses salariés auprès de la médecine du travail depuis plusieurs années, ne réglant pas les cotisations ; que ce manquement à l'obligation de sécurité justifie la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur ; qu'en cause d'appel, l'employeur a tenté de faire pression sur elle en déposant plainte pour fausses attestations émanant des époux [S] ; que l'enquête a démontré qu'il ne s'agissait pas de fausses attestations ;que l'employeur produit deux attestations en cause d'appel qui ne peuvent apporter la preuve que les faits rapportés par elle seraient totalement faux;

- sur les conséquences de la résiliation judiciaire du contrat de travail, qu'elle justifie d'une ancienneté de vingt-six ans et a été placée en arrêt de travail pour accident de travail durant près de deux ans ; qu'elle a subi un préjudice spécifique lié au manquement de l'employeur à son obligation de sécurité ; qu'elle a également subi un préjudice moral résultant des insultes et des violences de la part de son employeur ; que ce comportement n'est pas un fait isolé puisqu'une autre salariée ainsi que les clients de la pharmacie ont subi également le comportement de Madame [J] ; qu'en raison de la nullité du licenciement, elle a droit à une indemnité de licenciement, deux mois de préavis, une indemnité pour non respect de la procédure de licenciement ainsi qu'une indemnité compensatrice de congés payés ; que son salaire contractuel est basé sur 151,67 heures par mois alors que sa rémunération a été calculée sur la base de 145,17 heures ; que malgré l'exécution provisoire accordée, l'employeur ne lui a versé aucune somme et doit être condamné à des dommages et intérêts pour résistance abusive.

Par dernières conclusions en date du 2 janvier 2019, auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens et prétentions, l'Unedic Délégation Ags Cgea de Marseille demande à la cour de :

- in limine litis, le mettre hors de cause en l'état de la procédure de sauvegarde en date du 4 avril 2017 et du plan de sauvegarde en date du 15 novembre 2018 conformément aux dispositions des articles L625-3 du code de commerce et L3253-8 2°) du code du travail,

En toute hypothèse,

- dire qu'en l'état de la procédure de sauvegarde et du plan de sauvegarde, la Selarl [J] [TB] est in bonis,

- dire exclues de la garantie de l'Ags les sommes réclamées par Madame [A] en l'absence de licenciement pour motif économique prononcé dans les périodes visées par l'article L3253-8 2° a) et b),

- dire que les demandes fondées sur la résistance abusive et les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ne rentrent pas dans la cadre de la garantie de l'Ags,

Au fond,

A titre principal,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Madame [A] de sa demande d'indemnité pour irrégularité de procédure,

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a fait droit à la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail de Madame [A] aux torts exclusifs de l'employeur et lui a fait produire les effets d'un licenciement nul,

- en conséquence, débouter Madame [A] de ses demandes au titre de la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur, des dommages et intérêts pour nullité du licenciement, pour manquement à l'obligation de sécurité de résultat, pour préjudice moral, d'indemnité de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis outre congés payés y afférents, d'indemnité compensatrice de congés payés et d'indemnité pour irrégularité de la procédure,

- débouter Madame [A] de ses demandes de rappel de salaire outre congés payés afférents,

Subsidiairement,

- débouter Madame [A] de ses demandes au titre des dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité de résultat, pour préjudice moral, pour irrégularité de procédure,

- débouter Madame [A] de ses demandes de rappel de salaire outre congés payés afférents,

- réduire les sommes allouées à titre d'indemnité de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis outre congés payés afférents et d'indemnité compensatrice de congés payés,

- dire que la garantie de l'Ags ne pourra être que subsidiaire, l'employeur étant in bonis,

En tout état de cause,

- fixer toutes créances en quittance ou deniers,

- dire et juger que l'Ags ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L 3253-6 à 8 du code du travail que dans les termes et les conditions résultant des dispositions des articles L 3253-15 et L 3253-17 du code du travail,

- dire et juger que la garantie de l'Ags est plafonnée, toutes créances avancées pour le compte du salarié, à un des trois plafonds définis à l'article D 3253-5 du code du travail,

- dire et juger que l'obligation du Cgea de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement.

L'Ags fait valoir :

- in limine litis, sur sa mise hors de cause, que l'article L625-3 du code de commerce ne prévoit pas sa mise en cause en cas d'ouverture d'une procédure de sauvegarde au cours de l'instance prud'homale ; que par ailleurs, suivant jugement en date du 15 novembre 2018 un plan de sauvegarde a été adopté de sorte que l'employeur est in bonis ; que, selon l'article L3253-8 2°, seules sont garanties les créances résultant des ruptures intervenues pendant la période d'observation et dans le mois suivant le jugement qui arrête le plan de sauvegarde ; qu'en effet les sommes dues aux salariés à la date d'ouverture d'une procédure de sauvegarde ne sont pas couvertes par l'Ags, l'entreprise ne se trouvant pas en état de cessation de paiement ; qu'aucun licenciement n'ayant été prononcé dans ces périodes, les sommes sollicitées par la salariée ne rentrent pas dans sa garantie ;

- subsidiairement sur le fond, que la salariée ne rapporte pas la preuve de faits précis et concordants concernant le harcèlement moral dont elle s'estime avoir été victime, les violences en date du 16 novembre 2015 et le manquement de l'employeur à son obligation de sécurité ; que les certificats médicaux ne font que reprendre ses dires ; que la salariée n'a jamais adressé la moindre réclamation à son employeur ; que, s'agissant de l'incident du 16 novembre 2015, il ressort des pièces versées aux débats qu'en raison de la venue d'un client dangereux, l'employeur a décidé de fermer la pharmacie afin de préserver la sécurité de son personnel ; que les attestations versées aux débats par Madame [A] émanent de salariés en litige avec l'employeur ; que dans l'hypothèse où il serait fait droit à la demande de résiliation judiciaire aux torts de l'employeur produisant les effets d'un licenciement nul, la somme allouée pour nullité de licenciement sera réduite ; que les dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité font double emploi avec la nullité de la rupture ; que la salariée ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un préjudice distinct ouvrant droit à des dommages et intérêts pour préjudice moral ; que l'indemnité de licenciement ne pourra pas excéder la somme de 16290,82 euros bruts compte tenu du salaire de référence et de l'ancienneté de la salariée ; que l'indemnité compensatrice de congés payés compte-tenu du salaire de référence ne peut être supérieure à 4305,68 euros bruts, outre congés payés afférents ; qu'en raison de l'effet dévolutif de l'appel, la cour est saisie de la question de l'indemnité compensatrice de congés payés nonobstant le fait que le jugement en omission de statuer ayant statué sur ce point soit intervenu après l'appel interjeté par l'employeur et que cette décision ne soit pas elle-même frappée d'appel ; que compte-tenu du salaire de référence, cette indemnité ne peut excéder la somme de 6176,19 euros bruts; que s'agissant d'une demande de résiliation judiciaire, aucune indemnité pour non-respect de la procédure n'est due ; que, s'agissant de la demande de rappel de salaire, il ressort des pièces versées aux débats qu'un avenant en vue de la réduction du temps de travail a été signé entre les parties ; que les bulletins de paie n'ont pas fait l'objet de contestation ; que dans ses propres déclarations à la Cpam, Madame [A] indique qu'elle travaillait trente trois heures quinze par semaine;

- sur les dommages et intérêts pour résistance abusive, que la salariée ne rapporte aucune preuve au soutien de cette demande ; qu'en toute hypothèse cette prétention ne rentre pas dans le cadre de sa garantie.

La clôture de l'instruction est intervenue le 7 novembre 2019.

MOTIFS :

Sur la mise hors de cause de l'Ags Cgea de Marseille :

En application des dispositions de l'article L.3253-8 du code du travail, les créances dont Mme [A] demande le paiement sont antérieures à l'ouverture de la procédure collective de la Selarl [TB] [J] ; elles doivent être garanties par l'Ags, quand bien même, en l'état de la procédure de sauvegarde, sa garantie n'est que subsidiaire ; en conséquence, le Cgea ne peut être mis hors de cause ab initio et sera débouté de sa demande en ce sens.

Sur le harcèlement moral :

Selon l'article L 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

En vertu de l'article L 1154-1 du même code, la salariée doit présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement, et il incombe à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

S'agissant des faits du 16 novembre 2015, la salariée produit sa plainte déposée le jour même dans laquelle elle déclare que Madame [J] l'a poussée violemment, l'a informée qu'elle ne faisait plus partie du personnel en la traitant de 'pute connasse salope', a pris son sac et ses affaires et les a jetées dans la rue puis a fait sortir les clients en disant qu'elle était en chômage technique. Elle verse également aux débats un certificat médical du même jour du docteur [O], médecin généraliste, qui constate l'existence de lésions compatibles avec la description des faits de violence physique décrits par la salariée, à savoir une douleur du membre supérieur droit et un état de stress post traumatique majeur ainsi qu'une prescription médicamenteuse d'anti-dépresseurs. Sont également produits un certificat du docteur [P], psychiatre, en date du 1er décembre 2015, qui atteste avoir reçu en consultation la salariée pour un syndrome anxio-dépressif sévère, et deux autres du 22 décembre 2015 et du 3 mars 2016 dans lesquels il indique 'donner ses soins à Madame [XT] [A] qui présente un état dépressif réactionnel avec dégradation de ses relations avec son employeur et un traumatisme psychologique subi sur son lieu de travail le 16 novembre 2015". Dans le cadre de l'enquête de la caisse primaire d'assurance maladie suite à la déclaration d'accident du travail, Madame [I], orthopédiste salariée de la pharmacie, présente ce jour-là confirme l'altercation entre Madame [A] et Madame [J], l'énervement de cette dernière et le fait qu'elle ait jeté les effets personnels de la salariée dehors. Dans le cadre de cette même enquête, Monsieur et Madame [S], clients présents ce jour-là dans l'officine affirment avoir entendus des cris, des hurlements et du vocabulaire déplacé ('salope, connasse') de la part de Madame [J] qu'ils ont également vue bousculer l'une de ses employées et précisent que le personnel était en pleurs et choqué. Dans son attestation, Monsieur [M] [L] écrit '...Madame [J] a commencé à me délivrer l'ordonnance lorsque soudainement elle s'est mise à hurler contre son personnel obligeant [XT] [A] à monter dans son bureau en la tirant par le bras. Elles sont redescendues rapidement, l'employée était bouleversée, Madame [J] a continué à crier sur ses employés Madame [GK] [LB], [XT] [A] et [I] [B] avec des propos déplacés (insultes, menace de chômage technique...) et leur hurlant de sortir de la pharmacie. Elle a pris leurs affaires personnelles et les a jetés à l'extérieur de la pharmacie. Le personnel était choqué et en pleurs, puis elle a demandé à nous, clients de 'dégager de la pharmacie que nous avions cas aller nous servir ailleurs et nous disant 'vous êtes des cons' Je précise que de ce fait je n'ai pas pu prendre le traitement de ma fille malade et que j'ai trouvé choquant le comportement hystérique de la patronne. Depuis ce jour, je ne suis plus client de cette officine.'.

S'agissant du comportement général de Madame [J] avant cette altercation, plusieurs attestations de clients et de salariés témoignent du comportement désagréable voire agressif, de ses humeurs changeantes et de son caractère colérique. Une ancienne apprentie préparatrice, Madame [V] [VJ] atteste que ' ....Madame [J] avait des humeurs très changeantes envers les commerciaux, la clientèle et nous mêmes. J'étais stressée le matin rien qu'à l'idée d'aller travailler. Je l'ai plusieurs fois vue en crise d'hystérie moment très désagréable et très angoissant pour mes collègues et pour moi-même...'Ce comportement est confirmé par l'attestation de Madame [C] [R], préparatrice en pharmacie dans cette officine de 2010 à 2014 qui écrit : '...nous devions également subir régulièrement les changements d'humeur intempestif de Mme [J] qui pouvait s'en prendre aussi bien à son personnel qu'aux clients de la pharmacie ou aux représentants. Tout cela a été très déstabilisant pour moi, j'ai donc perdu confiance et fait une dépression suite à ça, je me suis donc mise en arrêt de travail et par la suite j'ai démissionnée car je ne supportais plus le comportement irresponsable de ma titulaire qui me donnais un sentiment d'insécurité.' Enfin, la salariée produit son dossier médical lequel porte trace en 2007 et en 2008 des dires de la salariée qui évoque un problème d'ambiance avec une 'pression commerciale' et des remarques 'souvent déplacées' de la part de l'employeur qui est décrit comme une personnalité 'changeante' et 'harceleuse'. Le dossier médical ne porte plus par la suite, soit jusqu'en 2014 mention de difficultés de ce type rencontrées par la salariée dans le cadre de son travail.

De son coté, l'employeur produit les attestations de plusieurs salariées. Madame [X] [NK] atteste que ' ...Madame [J] [TB] est une personne sympathique, présente et surtout à l'écoute de son équipe professionels. Elle nous surprend souvent à nous offrir des vienoiseries pour le café du matin. Je suis préparatrice depuis bientôt 10 ans et j'ai rarement eu autant de plaisir a venir travaillé a l'officine'. Dans son attestation, Madame [IT] [F] indique que '...les conditions de travail et la sécurité sont bonnes avec un travail dans des conditions harmonieuses et une sécurité optimale...'. De son coté, Madame [W] [G] écrit : ' Je travaille à la pharmacie [J] depuis le mois d'août 2015, j'ai donc commencé à travailler avec l'ancienne équipe. Mes premières impressions ont été de penser que l'ambiance était bonne et que les employées s'entendaient correctement avec Mme [J], n'ayant pas constaté personnellement de paroles ou d'actions déplacées. J'ai été embauché pour soutenir l'équipe en sous-effectif avec l'arrivée de la maison de retraite 'Le Saphir' qui a amené des tensions très rapidement avec la charge du travail supplémentaire. Il fallait en effet être rigoureuses, dynamiques et efficaces pour la préparation et la gestion des piluliers quotidiens. J'ai pu constater que Mr [K] venait quotidiennement harceler Mme [J] dans l'officine, même si elle ne l'exprimait pas clairement, sûrement pour ne pas nous inquiéter. Elle nous avait prévenu qu'il fallait appuyer sur le bouton d'alarme s'il venait poser problèmes. Je n'étais pas présente le jour où il a fait irruption le 16 novembre 2015. Je travaillais à 13 heures ce jour là. Mme. [J] m'a appelé pour ne pas venir travailler car la pharmacie était fermée exceptionnellement pour notre sécurité et pour essayer de régler l'affaire devant la police. Depuis ce jour, la sécurité est améliorée grâce aux caméras de surveillance et le bouton panique. Il y a aussi la possibilité d'avoir un soutien grâce à une antenne téléphonique. Le métier de préparatrice est difficile, majoritairement féminin où nous sommes quotidiennement harcelées par certains patients aux traitements lourds mais pas par Mme [J] qui essaie de mettre notre sécurité avant tout.' Madame [E] [EC], salariée de la pharmacie en 2016 atteste 'avoir eu des relations sans pression ni harcèlement au sein de son entreprise. Madame [J] [TB] a toujours eu une attitude correcte et respectueuse à mon égard. Je ne peux que constater que durant mon travail, Madame [J] [TB] facilite le travail de ses employés par son soutien qu'elle leur apporte, la confiance qu'elle donne et la sécurité de l'entreprise dans laquelle elle a investi pour un travail serein'. L'employeur verse également aux débats l'attestation de Madame [H] [D], commerciale qui affirme connaître Madame [J] ainsi que son équipe depuis très longtemps et ne jamais avoir ressenti de malaise ou d'animosité dans la pharmacie.

Il s'évince de ces éléments regardés ensemble qu'à l'exception d'un fait unique, à savoir l'épisode du 16 novembre 2015 à l'occasion duquel Madame [J] a fait preuve de violence verbale et physique envers sa salariée qu'elle a également insultée sans que ce comportement puisse se justifier par un impératif de mise en sécurité du personnel en l'absence de danger imminent caractérisé, les attestations produites par la salariée qui décrivent de manière générale un comportement de Madame [J] très changeant et un caractère colérique sans relater de faits précis concernant Madame [A], attestations elles-mêmes contredites par celles versées aux débats par l'employeur qui décrivent Madame [J] comme une personne respectueuse et attentive au bien être et à la sécurité de son personnel, ne permettent pas de présumer de l'existence d'agissements répétés à l'égard de la salariée susceptibles de constituer un harcèlement moral.

Sur la demande de résiliation judiciaire produisant les effets d'un licenciement nul :

La salariée fonde sa demande de résiliation judiciaire uniquement sur l'existence du harcèlement moral, dont il résulte de ce qui précède qu'il n'est pas établi, en sollicitant qu'il produise les effets d'un licenciement nul et, si elle invoque des manquements de l'employeur à son obligation de sécurité, ceux-ci, à les supposer établis, ne pourraient produire que les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, lequel n'est pas sollicité dans les prétentions qui seules saisissent la cour.

En conséquence, la demande de voir prononcer la résiliation judiciaire produisant les effets d'un licenciement nul ainsi que les demandes de dommages et intérêts pour licenciement nul, d'indemnité de licenciement, d'indemnité de préavis et congés payés y afférents, tous fondés sur cette nullité, doivent être rejetées, le jugement entrepris étant infirmé sur ces points.

En raison de l'effet dévolutif de l'appel, la cour se trouve saisie même en l'absence d'appel interjeté sur le jugement du 25 janvier 2017, de l'entier litige y compris la demande d'indemnité compensatrice de congés payés. La demande de résiliation aux torts de l'employeur ayant été rejetée, la salariée sera déboutée de cette demande.

Sur les dommages et intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité :

La salariée soutient que l'employeur a manqué à son obligation de sécurité puisqu'elle a été victime de violence physique ou morales et qu'il n'a pas assuré la surveillance de ses salariés auprès de la médecine du travail en raison du non paiement de ses cotisations. Or, il résulte de ce qui précède que l'existence d'un harcèlement moral n'est pas établi. Concernant les faits de violence verbale et physique imputables à l'employeur qui se sont produits le 16 novembre 2015, la salariée, sous couvert d'une demande des dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité, sollicite en réalité l'indemnisation des dommages résultant d'un accident de travail, indemnisation qui relève de la compétence exclusive du pôle social du tribunal judiciaire ; elle sera déboutée de cette demande, le jugement étant de nouveau infirmé.

Enfin, la salariée ne démontre ni l'existence ni l'étendue d'un préjudice résultant de l'absence de mise en place par l'employeur de surveillance de ses salariés auprès de la médecine du travail.

En conséquence, la salariée sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts à ce titre, le jugement entrepris étant infirmé sur ce point.

Sur les dommages et intérêts pour préjudice moral distinct :

Le préjudice invoqué par la salariée à l'appui de cette demande étant relatif aux faits du 16 novembre 2015 reconnu comme accident de travail, son indemnisation éventuelle relève de la compétence exclusive du pôle social du tribunal judiciaire. Cette demande sera donc rejetée, le jugement entrepris étant infirmé sur ce point.

Sur la demande de rappels de salaire et congés payés y afférents :

Il ressort de l'avenant en date du 31 décembre 2009, signé par les parties, que le temps de travail de la salariée est passé à compter du 5 février 2010, de trente cinq heures à trente trois heures trente de sorte que le nombre d'heures payées correspond à l'horaire contractuel. La demande de rappels de salaire sur la base de 151,67 heures par mois au lieu de 145,17 heures pour une période postérieure à la signature de cet avenant sera rejetée, le jugement entrepris étant infirmé sur ces points.

Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive :

La salariée qui ne démontre pas l'existence d'un préjudice distinct du retard apporté au paiement par l'employeur des condamnations prononcées par le jugement entrepris ou à la remise des documents de rupture et causé par sa mauvaise foi, sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive.

Sur la garantie de l'Ags :

Mme [A] étant débouté de ses demandes, il n'y a pas lieu à garantie de l'Ags, la demande étant sans objet.

Sur la demande reconventionnelle :

Les attestations produites par l'employeur émanant de salariées qui font état de déclarations de certains clients selon lesquels Madame [A] aurait dénigré Madame [J] et la pharmacie n'émanent pas de personnes ayant elles-mêmes constaté les faits de déloyauté reprochés à la salarié. L'attestation de Monsieur [T] qui indique 'j'ai constaté personnellement que les employés Madame [A] et Madame [GK] étaient très manipulatrice envers le client afin de causer des désagréments à leur employeur Madame [J]' n'est pas suffisamment circonstanciée pour permettre d'établir l'intention de nuire de la salariée. Enfin, il ne s'évince pas des éléments d'appréciation que le départ soudain de la salariée ait engendré de nombreuses erreurs dans le traitement du travail confié par la maison de retraite ni que ces erreurs soient à l'origine de la perte de ce client de la pharmacie.

L'employeur sera par conséquent débouté de sa demande reconventionnelle et le jugement entrepris confirmé sur ce point.

Sur les frais irrépétibles :

Il n'apparaît pas inéquitable de dire que chacune des parties gardera à sa charge ses frais irrépétibles.

Sur les dépens :

Les entiers dépens de l'instance seront mis à la charge de Madame [XT] [A] qui succombe pour l'essentiel.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud'homale et par mise à disposition au greffe :

Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a débouté la Selarl [TB] [J] de sa demande reconventionnelle et mis les dépens de première instance à sa charge,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à mise hors de cause du Cgea - Ags de Marseille,

Déboute Madame [XT] [A] de l'ensemble de ses demandes,

Dit sans objet la demande de garantie du Cgea,

Dit n'y avoir lieu à l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne Madame [XT] [A] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIERLA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-6
Numéro d'arrêt : 17/01132
Date de la décision : 07/02/2020

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 18, arrêt n°17/01132 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-02-07;17.01132 ?
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