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10/01/2020 | FRANCE | N°18/02187

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-8, 10 janvier 2020, 18/02187


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8



ARRÊT SUR RENVOI DE CASSATION

DU 10 JANVIER 2020



N°2020/35













Rôle N° RG 18/02187 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BB5GL







CPAM DES BOUCHES DU RHONE





C/



Société POLYCLINIQUE [Localité 1]



MNC - MISSION NATIONALE DE CONTROLE ET D'AUDIT DES ORGANISMES DE SECURITE SOCIALE







Copie exécutoire délivrée

le : 10 janvier 2020

à :

CPA

M DES BOUCHES DU RHONE

Me François MUSSET par LRAR

Copie certifiée conforme délivrée à Société POLYCLINIQUE [Localité 1] par LRAR















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale des BOUCHES-...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-8

ARRÊT SUR RENVOI DE CASSATION

DU 10 JANVIER 2020

N°2020/35

Rôle N° RG 18/02187 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BB5GL

CPAM DES BOUCHES DU RHONE

C/

Société POLYCLINIQUE [Localité 1]

MNC - MISSION NATIONALE DE CONTROLE ET D'AUDIT DES ORGANISMES DE SECURITE SOCIALE

Copie exécutoire délivrée

le : 10 janvier 2020

à :

CPAM DES BOUCHES DU RHONE

Me François MUSSET par LRAR

Copie certifiée conforme délivrée à Société POLYCLINIQUE [Localité 1] par LRAR

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale des BOUCHES- -DU-RHONE en date du 15 Décembre 2015, enregistré au répertoire général sous le n° 21207085 après intervention dans la procédure de l'arrêt de la Cour de Cassation du 21 décembre 2017 enregistré sous le numéro de pourvoi 17-10-048 ayant cassé l'arrêt de la 14ème Chambre de la Cour d'Appel d'Aix-en-Provence du 04 novembre 2016 enregistré sous le numéro de RG 15/22984

APPELANTE

CPAM DES BOUCHES DU RHONE, sise [Adresse 1]

représentée par Mme Vanina [Z] en vertu d'un pouvoir spécial

INTIMEE

Société POLYCLINIQUE [Localité 1], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 2]

représentée par Me François MUSSET, avocat au barreau de LYON

PARTIE INTERVENANTE

MNC - MISSION NATIONALE DE CONTROLE ET D'AUDIT DES ORGANISMES DE SECURITE SOCIALE, demeurant [Adresse 3]

non comparante

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Novembre 2019, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Corinne HERMEREL, Président et Madame Marina ALBERTI, Conseiller, chargées d'instruire l'affaire.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Corinne HERMEREL, Président

Mme Marina ALBERTI, Conseiller

Monsieur Yann CATTIN, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Agnès BAYLE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Janvier 2020.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Janvier 2020

Signé par Madame Corinne HERMEREL, Président et Mme Agnès BAYLE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône ( CPCAM des BDR) a procédé à un contrôle de la SA Polyclinique du [Localité 1] les 19 et 20 mai 2011 sur les facturations des médicaments remboursés en sus des prestations hospitalières, durant la période du 1/01 au 31/12/2010.

A l'issue du contrôle, la caisse a notifié à la clinique un indu de prise en charge de molécules onéreuses de 189 784 euros le 16 février 2012.

Après avoir admis partiellement la contestation de la clinique, la caisse a notifié le 25 mai 2012 une mise en demeure de payer la somme de 142 696,55 euros.

Par courrier du 21 août 2012, la SA Polyclinique du [Localité 1] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de sa contestation de la décision du 24 juillet 2012 de la Commission de recours amiable de la CPCAM des BDR qui a refusé d'annuler la mise en demeure du 25 mai 2012.

Par jugement du 15 décembre 2015, le tribunal des affaires de sécurité sociale a :

- débouté la polyclinique de sa demande d'annulation de la mise en demeure du 16 février 2012,

- prononcé la nullité de la mise en demeure du 25 mai 2012,

- dit n'y avoir lieu à appliquer l'article 700 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à statuer sur les dépens.

Le 24 décembre 2015, la CPCAM des BDR a interjeté appel de cette décision .

Par arrêt du 4 novembre 2016, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a :

- infirmé le jugement sauf en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles,

- jugé non valide le contrôle effectué par la CPCAM sur la S.A. Polyclinique du [Localité 1]

- débouté la S.A.Polyclinique du [Localité 1] de sa demande au titre des frais irrépétibles en cause d'appel,

- dispensé la CPCAM des BDR, du paiement du droit prévu à l'article R.144-10 du code de la sécurité sociale.

La CPCAM des Bouches-du-Rhône a formé un pourvoi contre cet arrêt.

Par arrêt rendu le 21 décembre 2017, la cour de cassation a statué comme suit :

Vu les articles L 133-4 ; R 162-42-10 ( dans sa rédaction antérieure au décret n° 2011-1209 du 29 septembre 2011); D 162-14 (dans sa rédaction antérieure au décret n° 2013-870 du 27 septembre 2013) applicables au contrôle litigieux

Attendu que le contrôle de la facturation des spécialités, produits et prestations, par un établissement de santé non conforme aux conditions fixées par le contrat de bon usage des médicaments et des produits et prestations, mentionnée à l'article L. 162-22-7 du code de la sécurité sociale, est régi exclusivement par les dispositions de l'article D. 162-14 du code de la sécurité sociale ;

attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à la suite d'un contrôle effectué par le service du contrôle médical, portant sur la facturation de spécialités pharmaceutiques, en sus des prestations d'hospitalisation, par la polyclinique, adhérente au contrat de bon usage des médicaments et des produits et prestations, la caisse primaire centrale d'assurance-maladie des Bouches-du-Rhône a notifié un indu à l'établissement de santé ; que celui-ci a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;

attendu que pour faire droit à ce recours, l'arrêt retient que le contrôle médical effectué par la caisse obéit aux dispositions de l'article R. 162-42-10 du code de la sécurité sociale ; que la caisse ne discute pas l'absence de signature du rapport de contrôle par des médecins chargés de celui-ci ; qu'en conséquence le contrôle n'est pas validé et ne peut servir de fondement à une action en répétition de l'indu ;

qu'en statuant ainsi, alors que le contrôle litigieux se rapportait au respect des prescriptions et facturation en sus du groupe homogène de séjour, de quatre molécules onéreuses dans le cadre du contrat de bon usage des spécialités, produits et prestations compris par la polyclinique, la cour d'appel a violé les textes susvisés les deux premiers par fausse application, le troisème par refus d'application;

Par ces motifs,

la Cour de Cassation, a cassé et annulé en toutes ses dispositions l'arrêt rendu le 4 novembre 2016 entre les parties par la cour d'appel d'Aix-en-Provence et remis en conséquence la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a renvoyés devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

la Cour de Cassation a condamné la société polyclinique du [Localité 1] aux dépens et a rejeté la demande de la société polyclinique sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et a condamné la polyclinique à payer à la caisse primaire centrale d'assurance-maladie des Bouches-du-Rhône la somme de 2800 euros en application de cet article;

Par courrier recommandé du 5 janvier 2018 reçu au greffe le 8 février 2018, la CPCAM des Bouches du Rhône a saisi la Cour d'appel d'Aix-en-Provence, désignée comme cour de renvoi, pour voir statuer sur le recours dirigé contre le jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale des Bouches-du-Rhône du 15 décembre 2015.

L'affaire a été appelée à l'audience le 22 novembre 2019, date à laquelle les parties ont comparu, repésentées par leurs conseils, sauf la mission nationale de contrôle et d'audit des organismes de sécurité sociale qui n'a pas comparu, ni personne pour elle.

Par conclusions déposées et développées à l'audience, la caisse primaire centrale d'assurance-maladie demande à la cour :

-d'infirmer le jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale le 15 décembre 2015

-de dire la procédure d'indu régulière,

-de constater le non-respect par la polyclinique du contrat de bon usage conclu pour 20 dossiers en anomalie,

-de confirmer la décision de la commission de recours amiable du 24 juillet 2012,

-de condamner la polyclinique du parc au paiement de la somme de 144'123,51 euros,

-de condamner la polyclinique du parc à payer à la caisse la somme de 2000 euros,

au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-de débouter la SA Polyclinique du [Localité 1] de ses demandes

Par conclusions déposées et développées à l'audience, la société polyclinique du [Localité 1] demande à la cour :

A titre principal,

-de juger nulles la notification d'indu du 16 février 2012, la mise en demeure du 25 mai 2012, et la notification d'indue rectificative faute de délégation de signature régulière,

-de juger infondée l'action en répétition de l'indu menée à l'encontre de la polyclinique,

-d'annuler l'action en répétition de l'indu menée à l'encontre de la polyclinique,

- de débouter la caisse primaire centrale d'assurance-maladie des Bouches-du-Rhône de l'intégralité de ses demandes,

- de condamner ladite caisse à payer à la société polyclinique du [Localité 1] la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

A titre subsidiaire,

-d'ordonner, aux frais de la caisse primaire centrale d'assurance-maladie, une mesure d'expertise portant sur lesdits dossiers médicaux litigieux, afin d'examiner si les prescriptions réalisées aux fins de traitement des cancers étaient ou non justifiées.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs écritures déposées et soutenues devant la cour.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la régularité de la notification de l'indu et de la mise en demeure faute de délégation de pouvoir régulière

La société Polyclinique du [Localité 1] soutient que les signataires de la notification d'indu du 16 février 2012, 'pour le directeur général, par délégation [C] [U]'' et de la mise en demeure du 25 mai 2012, '[F] [H], responsable du service gestion du risque et établissements' et de la notification d'indu rectifiée, ' Pour le directeur général, par délégation [H] [S]', n'étaient pas pourvus d'une délégation de pouvoir ou de signature régulière émanant du directeur de la caisse primaire.

La cour relève, d'une part que les délégations de pouvoirs des trois agents concernés figurent au nombre des pièces communiquées par la caisse et qu'il résulte, d'autre part, de l'article R. 133- 9 - 1 du code de la sécurité sociale que la notification de payer prévue à l'article L. 133 - 4 du même code est adressée aux professionnels de santé par le directeur de l'organisme d'assurance-maladie sans toutefois exiger à peine de nullité que la lettre soit signée par le directeur ou par un agent de l'organisme titulaire d'une délégation de pouvoir de signature de celui-ci.

Ainsi la notification d'indu, la notification d'indu rectifiée et la mise en demeure de payer sont-elles régulières.

Le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a annulé la mise en demeure du 25 mai 2012 pour défaut d'habilitation du signataire.

Sur la régularité de l'action en recouvrement

La société Polyclinique du [Localité 1] met en cause la régularité de la procédure au motif qu'était jointe à la mise en demeure du 25 mai 2012 une notification d'indu qui annulait et remplaçait la notification d'indu du 16 février 2012.

La cour constate qu'une notification d'indû a été faite pour un montant de 189 784,40 euros le 16 février 2012 et que c'est après prise en compte des observations faites en réponse par la Polyclinique du [Localité 1] qu'une mise en demeure de payer portant sur une somme rectifiée de 142 696,55 euros( d'où la rectification de la première notification d'indû) a été adressée à la polyclinique du [Localité 1].

Aucune confusion ne pouvait naître de l'envoi simultanné de la mise en demeure de payer et de la notification d'indu rectificative, l'établissement ayant antérieurement fait usage de son droit de produire des observations à la suite de la notification d'indû, dont la caisse a au surplus tenu compte.

La procédure est sur ce plan régulière.

Sur l'insuffisance de motivation de la notification d'indûs et de la mise en demeure de payer

La polyclinique du [Localité 1] se prévaut des articles L.115-3 du code de la sécurité sociale, 3 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et 25 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, pour soutenir que la caisse est soumise à une obligation légale de motivation et se prévaut également de la jurisprudence pour soutenir que la charge de la preuve est supportée par la caisse et qu'en l'espèce, cette dernière n'a pas indiqué dans les courriers litigieux les motifs de la répétition de l'indû.

La cour observe en premier lieu que l'article 6 de la loi du 11 juillet 1979 vise l'obligation pour l'organisme social de motiver vis à vis des assurés sociaux, à raison du refus d'un avantage qui constitue un droit pour la personne, ou du refus d'une aide ou subvention. Tel n'est pas le cas en l'espèce.

Par ailleurs, les motifs de la récupération de l'indu ont été explicités à l'établissement de santé.

Ainsi, le courrier en date du 16 février 2012 mentionne que le motif de la répétition est le suivant: ' Prescriptions et facturations de molécules onéreuses en sus du GHS: Herceptin et Avastin'.

Motif :

'Non respect du résumé des caractéristiques du produit repris dans le Vidal,

- le non respect des recommandations de bon usage de l'Institut [Établissement 1], de la HAS, de l'AFSSAAPS,

- le non respect du décret 2008-1121 du 31 octobre 2008".

Ce motif est expressément repris dans le courrier de mise en demeure de payer daté du 25 mai 2012.

Il avait par ailleurs déjà été explicité dans des courriers antérieurs à la notification de l'indu, à savoir notamment un courrier du 9 novembre 2011 intitulé 'courrier de notification de griefs suite à contrôle', qui était accompagné de deux tableaux listant les dossiers des patients, les molécules litigieuses visées, et permettant le calcul de l'indû, puis un courrier du 22 septembre 2011 de la CPCAM des BDR qui a soumis à la Polyclinique du [Localité 1] les tableaux et tables de concordance pour transmission aux médecins prescripteurs concernés afin que ces derniers puissent y répondre, ce qui a été fait par courrier du 26 octobre 2011.

C'est seulement dans la suite de cet échange contradictoire que la notification de l'indu est intervenue, pour des motifs repris expressément mais qui étaient au surplus déjà connus de la polyclinique du [Localité 1].

La société polyclinique du [Localité 1] ne peut dès lors soutenir que la notification de l'indu n'était pas motivée.

Aux termes de l'article L 162-22-7 du code de la sécurité sociale, l'Etat fixe la liste des spécialités pharmaceutiques bénéficiant d'une AMM dispensées aux patients hospitalisés dans les établissements de santé mentionnés à l'article L. 162-22-6 qui peuvent être prises en charge, ainsi que les conditions dans lesquelles certains produits et prestations mentionnées à l'article L.165-1 peuvent faire l'objet d'une prise en charge en sus des prestations d'hospitalisation sus-mentionnées.

Bénéficient d'un remboursement intégral de la part prise en charge par les régimes obligatoires d'assurance maladie, les établissements qui ont adhéré au contrat de bon usage des médicaments et des produits et prestations établi conjointement par le directeur général de l'agence régionale de santé et d'assurance-maladie dans des conditions définies par décret.

Lorsque l'établissement adhérent ne respecte pas les stipulations de ce contrat et après qu'il a été mis en demeure de présenter ses observations, ce remboursement peut être réduit dans la limite de 30 % de la part prise en charge par l'assurance-maladie et en tenant compte des manquements constatés '

Aux termes de l'article D.162-14 du code de la sécurité sociale, 'lorsque l'arrêté d'inscription d'une spécialité pharmaceutique, d'un produit ou d'une prestation sur la liste visée à l'article L. 162 -22-7 prévoient une limitation du champ de la prise en charge, si la caisse d'assurance-maladie compétente constate une facturation en sus des prestations d'hospitalisation non conforme à cette limitation, elle procède sans délai à la récupération de l'indu auprès de l'établissement de santé concernée et signale cet incident à l'agence régionale de santé dont il relève. Si plus de 3 signalements ont été enregistrés pour un établissement donné par l'agence régionale de santé au cours d'un exercice, le taux de remboursement ..../...'

Aux termes de l'article L. 165 ' 1 du code de la sécurité sociale :

'le remboursement par l'assurance-maladie des dispositifs médicaux à usage individuel, des .../... produits de santé autre que les médicaments visés à l'article L. 162-17 et des .../...est subordonné à leur inscription sur une liste établie après avis d'une commission de la Haute Autorité de Santé mentionnée à l'article L. 161-37.

L'inscription est effectuée soit par la description générique de tout ou partie du produit concerné, soit sous forme de marque ou de non commercial. L'inscription sur la liste peut elle-même être subordonnée au respect des spécifications techniques, d'indication thérapeutique diagnostique et de conditions particulières de prescription et d'utilisation.

Aux termes de l'article L. 133- 4 du code de la sécurité sociale , en cas d'inobservation des règles de tarification de facturation,

1° des actes, prestations et produits figurant sur les listes mentionnées aux articles L.162-1-7, L.162-17, L.165-1, L. 162-22-7 ou relevant des dispositions des articles L.162 - 22- 1 et L.162 - 22 - 6, l'organisme de prise en charge recouvre l'indu correspondant auprès de l'établissement à l'origine du non respect de ces règles, et ce, que le paiement ait été effectué à l'assuré ou un établissement.

L'article 7 du contrat de bon usage des médicaments, contrat type annexé au décret 2008-1121 du 31 octobre 2008, établi entre la polyclinique et la caisse primaire suppose, de la part de l'établissement de santé, l'engagement dès la signature du contrat, de faire une utilisation des produits visés à l'article L 162-22-7 du code de la sécurité sociale conforme, dès la signature du contrat :

1 Soit à l'autorisation de mise sur le marché pour les spécialités pharmaceutiques, soit aux conditions de prise en charge prévues par la liste mentionnée à l'article L. 165 -1 du code de la sécurité sociale pour les produits et prestations ;

2 Soit à un protocole thérapeutique temporaire et établi par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, la Haute autorité de santé ou l'institut national du cancer ;

3 A défaut, et par exception en l'absence d'alternative pour le patient, lorsque le prescripteur ne se conforme pas aux dispositions précédentes, il porte au dossier médical l'argumentation qui l'a conduit à prescrire, en faisant référence aux travaux des sociétés savantes ou aux publications des revues internationales à comité de lecture.

En contrepartie du respect de ces règles, la caisse prend en charge certains médicaments en sus des prestations d'hospitalisation.

Lors du contrôle effectué par la caisse il a été constaté des anomalies quant à la prescription de molécules onéreuses qui ont été facturées à la caisse. Les anomalies étaient listées comme suit:

- le non respect du résumé des caractéristiques du produit repris dans le Vidal

- le non respect des recommandations de bon usage de l'Institut [Établissement 1], de la HAS, de L'AFAAPS

- le non respect du décret 2008-1121 du 31 octobre 2008.

Le seul constat de ces anomalies ( réalisé en l'espèce après échange avec les médecins concernés par les prescriptions litigieuses), qui concernaient une vingtaine de dossiers de patients auxquels l'AVASTIN ou l'HERCEPTIN avait été prescrit, a justifié que la caisse récupère l'indu sans délai conformément à l'article D 162-14 du code de la sécurité sociale( texte rappelé dans l'article 1 du contrat de bon usage des médicaments annexé au décret 2008-1121) et c'est à l'établissement de santé prescripteur, qui a facturé la prise en charge du médicament à la caisse, de prouver que la prescription et facturation en sus du GHS a été faite conformément au contrat de bon usage et qu'en conséquence les griefs qui ont été listés dans les courriers de notification puis de mise en demeure sont erronés ou inopérants.

Il résulte de cette analyse que les courriers de notification d'indu et de mise en demeure sont suffisamment motivés et que la charge de la preuve du respect du contrat de bon usage incombe à l'établissement de santé.

***

La polyclinique du [Localité 1] a adhéré au contrat de bon usage des médicaments et des produits et prestations, et avait ainsi droit au remboursement intégral de la part prise en charge par les régimes obligatoires d'assurance maladie des spécialités pharmaceutiques et des produits et prestations mentionnées à l'article L. 162 ' 22 ' 7 du code de la sécurité sociale.

Le contrôle sur site auquel a procédé la caisse primaire les 19 et 20 mai 2011 avait notamment pour objet de vérifier les facturations de médicaments, en sus des prestations d'hospitalisation, durant la période du 1er janvier au 31 décembre 2010. Le contrôle portait ainsi sur l'adéquation entre la prescription de certaines molécules onéreuses et les conditions fixées par l'article 7 du contrat de bon usage susvisé.

En l'espèce, la caisse a constaté que l'utilisation des molécules d'AVASTIN et d'HERCEPTIN, qui a été faite de manière non conforme aux indications de l'autorisation de mise sur le marché et hors protocole thérapeutique temporaire, ne remplissait pas les conditions posées par l'article 7, à savoir :

« à défaut, et par exception en l'absence d'alternative pour le patient, lorsque le prescripteur ne se conforme pas aux dispositions précédentes, il porte au dossier médical l'argumentation qui l'a conduit à prescrire, en faisant référence aux travaux des sociétés savantes ou aux publications des revues internationales à comité de lecture.'

Tous les dossiers litigieux( 10 relèvent du régime général) concernent la prescription d'AVASTIN et un seul dossier la prescription d'HERCEPTIN.

Il n'est pas contesté par la polyclinique que ces prescriptions litigieuses ont été faites en dehors des indications de l'autorisation de mise sur le marché des molécules en question.

Il n'est pas contesté non plus qu'il ne s'agissait pas pour la polyclinique de suivre pour les patients concernés un protocole thérapeutique spécifique établi par l'Institut [Établissement 1], la Haute autorité de santé ou par l'AFSSAPS.

S'agissant de situations exceptionnelles prévues par l'article 7 du contrat de bon usage, il incombait au prescripteur de la polyclinique du [Localité 1], de 'porter au dossier médical l'argumentation qui l'a conduit à prescrire, en faisant référence aux travaux des sociétés savantes ou aux publications des revues internationales à comité de lecture' .

La cour n'a pas ici à porter une appréciation sur l'opportunité ou la pertinence de telle prescription ou sur l' intérêt thérapeutique de l'administration de la molécule au regard de la situation présentée mais seulement de vérifier si le choix du prescripteur est a minima étayé, dans le dossier du patient, par une référence utile aux travaux des sociétés savantes ou aux publications des revues internationales à comité de lecture.

S'agissant des dossiers litigieux, la cour observe qu'alors que l'utilisation de la molécule est non conforme aux indications de l'AMM ( par exemple prescription de l'AVASTIN pour des patientes atteintes d'un cancer de l'utérus dossiers 15, 21, 22, 28..), les références bibliographiques versées aux dossiers médicaux pour justifier de la prescription:

- sont parfois inexistantes (dossier 23, dossier 27),

- ou concernent des protocoles sans rapport avec la situation présentée par le patient de la polyclinique ( ex patiente atteinte de cancer de l'utérus et publication relative au cancer du col de l'utérus ou publications relatives au cancer de l'ovaire, dossiers 15, 21,22,,28)

- ou concernent des protocoles qui ne correspondent pas à celui qui a été prescrit au patient ( dossier 7, dossier 25)

- ne sont pas pertinentes au regard de la spécificité de l'utilisation de la molécule en association avec telle ou telle chimiothérapie( exemple :l'autorisation de mise sur le marché de l'Avastin a été faite le 12 janvier 2005 dans le cadre du traitement du cancer colo-rectal métastatique. Cette autorisation a été étendue au traitement du cancer de l'ovaire en 2012 mais en association au carboplatine et au paclitaxel: traitement de première ligne des stades avancés du cancer épithélial de l'ovaire. Dossiers 2 et 10).

Il en résulte que les publications scientifiques figurant dans les dossiers médicaux litigieux ne permettent pas d'étayer l'argumentation qui a conduit la polyclinique du [Localité 1] à prescrire la molécule onéreuse et de justifier que la polyclinique se trouvait ainsi dans la situation exceptionnelle prévue par l'article 7 du contrat de bon usage.

L'établissement de santé n'ayant pas respecté les termes du contrat, la caisse primaire devait, conformément aux dispositions de l'article D.162-14 sus-cité, récupérer l'indu auprès de la polyclinique du [Localité 1] sur la base de l'article L 133-4 du code de la sécurité sociale, cité plus haut, soit la somme de 142 696,55 euros outre la majoration de 10 % ( 1426,96 euros).

Le jugement sera infirmé en ce sens.

L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et d'allouer à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône la somme de 2000 euros.

Les dépens seront supportés par la société Polyclinique du [Localité 1].

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe, par arrêt réputé contradictoire , en matière de sécurité sociale, sur renvoi après cassation, après en avoir délibéré conformément à la loi :

Vu jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale des Bouches-du-Rhône en date du 15 décembre 2015 et l'arrêt de la Cour d'Appel d'Aix-en-Provence en date du 4 novembre 2016,

Vu l'arrêt de la Cour de Cassation en date du 21 décembre 2017 rendu sur le pourvoi formé

contre l'arrêt de la Cour d'Appel d'Aix-en-Provence en date du 4 novembre 2016,

Infirme le jugement en ce qu'il a prononcé la nullité de la mise en demeure du 25 mai 2012,

Confirme le jugement sur les frais irrépétibles et les dépens de première instance,

Statuant à nouveau et y ajoutant

Dit que la procédure de récupération d'indu diligentée par la CPAM des Bouches-du-Rhône est régulière,

Condamne la SA Polyclinique du [Localité 1] à verser à la Caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône la somme de 144 123,51 euros,

Condamne la SA Polyclinique du [Localité 1] à verser à la Caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône la somme de 2 000 euros,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne la SA POLYCLINIQUE DU [Localité 1] qui succombe, aux dépens d'appel postérieurs au 1er janvier 2019, conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-8
Numéro d'arrêt : 18/02187
Date de la décision : 10/01/2020

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 14, arrêt n°18/02187 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-01-10;18.02187 ?
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