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12/12/2019 | FRANCE | N°17/03823

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-1, 12 décembre 2019, 17/03823


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1



ARRÊT AU FOND

DU 12 DECEMBRE 2019



N° 2019/ 429













N° RG 17/03823 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BADH3







SA ENEDIS





C/



Société FLASSANS ENERGY

SA AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE

Compagnie d'assurances COMPAGNIE D'ASSURANCE ALIANZ GLOBAL CORPORATE ET S PECIALTY SE















Copie exécutoire délivrée

le :

à

: Me Alexandra BOISRAME



Me Ludovic ROUSSEAU

Me Pierre-Yves IMPERATORE



Me Philippe BRUZZO























Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Commerce de DRAGUIGNAN en date du 21 Février 2017 enregistré au répertoire général ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-1

ARRÊT AU FOND

DU 12 DECEMBRE 2019

N° 2019/ 429

N° RG 17/03823 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BADH3

SA ENEDIS

C/

Société FLASSANS ENERGY

SA AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE

Compagnie d'assurances COMPAGNIE D'ASSURANCE ALIANZ GLOBAL CORPORATE ET S PECIALTY SE

Copie exécutoire délivrée

le :

à : Me Alexandra BOISRAME

Me Ludovic ROUSSEAU

Me Pierre-Yves IMPERATORE

Me Philippe BRUZZO

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de DRAGUIGNAN en date du 21 Février 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 15/4445.

APPELANTE

SA ENEDIS anciennement ELECTRICITE RESEAU DISTRIBUTION FRANCE - ERDF, dont le siège social est [Adresse 1]

représentée par Me Alexandra BOISRAME, avocat au barreau d'AIX-EN- PROVENCE, assistée de Me Pascal CERMOLACCE, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant

INTIMEES

SAS FLASSANS ENERGY, dont le siège social est sis [Adresse 2]

représentée par Me Ludovic ROUSSEAU de la SCP ROUSSEAU & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me François FERRARI, avocat au barreau de BEZIERS, plaidant

SA AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE, dont le siège social est sis [Adresse 3]

représentée par Me Pierre-Yves IMPERATORE de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN- PROVENCE, assisté de Me Laure-Anne MONTIGNY, avocat au barreau de PARIS, substituée par Me François GAGEY, avocat au barreau de PARIS, plaidant

COMPAGNIE D'ASSURANCE ALIANZ GLOBAL CORPORATE ET SPECIALTY SE, dont le siège social est sis [Adresse 4]

représentée par Me Philippe BRUZZO de l'AARPI BRUZZO / DUBUCQ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Alexandra COHEN- JONATHAN, avocat au barreau de PARIS, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785,786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Septembre 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Pierre PRIEUR, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Pierre CALLOCH, Président

Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller

Monsieur Jean-Pierre PRIEUR, Conseiller

Greffier lors des débats : M. Alain VERNOINE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 12 Décembre 2019.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 12 Décembre 2019

Signé par Monsieur Pierre CALLOCH, Président et M. Alain VERNOINE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DE L'AFFAIRE

Afin de favoriser le développement des énergies renouvelables en France, la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité a institué à la charge d'EDF, producteur d'électricité, l'obligation de conclure avec les producteurs qui en font la demande un contrat d'achat de l'électricité produite par les installations de production d'électricité utilisant l'énergie radiative du soleil, à un prix supérieur à celui du marché.

Le mécanisme d'obligation d'achat de l'électricité photovoltaïque prévoit que la différence entre le prix d'achat par EDF et le prix de revente aux consommateurs est compensé par une taxe, la Contribution au Service Public de l'Electricité .

La loi du 10 février 2000 a notamment donné lieu aux décrets d'application des 6 décembre 2000 et du 10 mai 2001, ainsi qu'aux arrêtés des 10 juillet 2006 et du 12 janvier 2010 qui ont fixé le prix d'achat de l'électricité.

Ce dernier arrêté , qui a réduit le prix d'achat fixé par le précédent arrêté du 10 juillet 2006, est venu fixer le prix d'achat de l'électricité à 31,40 cts, 42 cts et 50 cts le kWh , ce qui induit une aide à la différence entre le tarif réglementé de 12 cts dont le financement est supporté par les consommateurs.

Le raccordement de ces installations au réseau de distribution d'électricité est réalisé par la société Electricité Réseau de France (ERDF) filiale de la SA EDF; ERDF est devenue ENEDIS.

La délibération de la Commission de Régulation de l'Energie (CRE) du 11 juin 2009 a précisé les règles minimum d'élaboration des procédures de traitement de raccordement au réseau public de distribution d'électricité, ainsi que le suivi de leur mise en oeuvre, obligation à la charge de ERDF et qui a pour objet l'exploitation et l'entretien du réseau public de distribution d'électricité. L'annexe 1 de ce document précise que la proposition technique et financière (PTF) établie par ERDF présente les résultats de l'étude de raccordement et la solution technique envisagée pour répondre à la demande de raccordement et qu'elle doit être traitée par ERDF dans un délai ne devant pas excéder trois mois.

Le 29 juillet 2010 une mission d'information a préconisé une nouvelle baisse immédiate des tarifs.

Par un communiqué de presse en date du 23 août 2010 du ministère de l'écologie, l'ensemble des professionnels des énergies renouvelables a été informé de ce que la baisse de 12 % des tarifs de rachat de l'électricité produite par les professionnels et les grosses installations décidée en janvier 2010 s'inscrivait dans le cadre d'une évolution tarifaire et n'était que la première étape d'une adaptation nécessaire du système de régulation des tarifs de rachat qui serait préparée à l'automne en concertation avec l'ensemble des acteurs de ce secteur.

Un arrêté a été pris le 31 août 2010.

A compter de novembre 2010 toute la filière photovoltaïque, notamment par les indications du 1er décembre 2010 du blog TECSOL, était informée de l'imminence d'un décret conforme à la loi du 10 février 2000 , ayant pour effet de mettre en place un moratoire.

Un décret 2010-1510 du 9 décembre 2010 a suspendu pour une durée de trois mois, à compter de son entrée en vigueur le 10 décembre 2010, l'obligation de conclure un contrat d'achat d'électricité produite par certaines installations photovoltaïques, aucune demande de contrat ne pouvant être déposée pendant la période de suspension et les demandes suspendues devant faire l'objet, à l'issue de la période de suspension , d'une nouvelle demande complète de raccordement au réseau. Cette suspension ne s'appliquait pas aux installations dont le producteur avait notifié au gestionnaire du réseau avant le 2 décembre 2010, son acceptation de la proposition technique et financière de raccordement au réseau en retournant à ERDF la PTF signée avec un chèque d'acompte.

A l'issue de ce moratoire, un décret et deux arrêtés du 4 mars 2011 ont fixé le prix d'achat de cette électricité à des tarifs inférieurs à ceux prévus par les arrêtés antérieurs (28,83 centimes au lieu de 42 ou 50 centimes) et aussi exclu du bénéfice de l'obligation d'achat les installations d'une puissance supérieure à 100kWh pour lesquelles une procédure d'appel d'offres était prévue.

La loi 2010-788 du 12 juillet 2010 dite loi GRENELLE II a validé dans son article 88 l'arrêté du 12 janvier 2010. Dans sa décision du 19 janvier 2011 le Conseil d'Etat a refusé de renvoyer au Conseil Constitutionnel la Question Prioritaire de Constitutionnalité sur l'article 88 de la loi 2010-788 du 12 juillet 2010.

Dans un arrêt du 12 avril 2012 le Conseil d'Etat a statué sur la légalité en droit interne de l'arrêté du 12 janvier 2010, ce qui l'a conduit à annuler pour l'avenir certaines dispositions dudit arrêté.

L'Autorité de la concurrence a été amenée les 14 et 17 décembre 2013 à s'intéresser à la question des pratiques D'ERDF et D'EDF dans le cadre du marché photovoltaïque.

Mais ces procédures n'ont pas donné lieu à sanctions à l'encontre d'ERDF.

L'arrêté tarifaire du 12 juillet 2006 n'a pas été notifié à la Commission européenne, dont les pouvoirs en matière de récupération d'aide d'Etat sont soumis à une prescription de dix ans.

L'arrêté du 12 janvier 2010 n'a pas non plus été notifié à la Commission européenne.

L'arrêté du 4 mars 2011 a été notifié le 22 décembre 2014 à la Commission européenne.

Dans un premier arrêt du 19 décembre 2013 la Cour de justice de l'Union européenne, statuant sur les dispositifs d'aide au développement en matière d'électricité d'origine éolienne a dit que celles ci constituaient une intervention au moyen de ressources d'Etat ; en précisant dans ses motifs qu'il n'y avait dans l'affaire aucun élément de nature à justifier une dérogation au principe selon lequel les effets d'un arrêt d'interprétation remontent à la date d'entrée en vigueur de la règle interprétée.

Par arrêt du 20 septembre 2016 la cour d'appel de Versailles a saisi la Cour de justice de l'Union européenne de la question préjudicielle suivante :

- 1 . L'article 107 paragraphe 1 du Traité de fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), doit il être interprété en ce sens que le mécanisme d'obligation d'achat d'électricité produite par les installations utilisant l'énergie radiative solaire à un prix supérieur à celui du marché et dont le financement est supporté par les consommateurs finals d'électricité , tel que ce mécanisme résulte des arrêtés ministériels des 10 juillet 2006 et 12 janvier 2010, fixant les conditions d'achat de cette électricité, lus en combinaison avec la loi N°2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, le décret 2000-1196 du 6 décembre 2000 et le décret N°2001 410 du 10 mai 2001, constitue une aide d'Etat,

- 2. Et, dans l'affirmative, l'article 108 , paragraphe 3, du TFUE doit il être interprété en ce sens que le défaut de notification préalable à la Commission européenne de ce mécanisme affecte la validité des arrêtés susvisés comportant mise à exécution de la mesure d'aide litigieuse,

Par ordonnance du 15 mars 2017 la Cour de justice de l'Union européenne a répondu ainsi :

1. L'article 107 , paragraphe 1, TFUE, doit être interprété en ce sens qu'un mécanisme , tel que celui instauré par la réglementation nationale en cause au principal d'obligation d'achat de l'électricité produite par les installations utilisant l'énergie radiative solaire à un prix supérieur à celui du marché et dont le financement est supporté par les consommateurs finals d'électricité doit être considéré comme une intervention de l'Etat ou au moyen des ressources d'Etat.

2. L'article 108, paragraphe 3 TFUE, doit être interprété en ce sens qu'en cas de défaut de notification préalable à la Commission européenne d'une mesure nationale constituant une aide d'Etat au sens de l'article 107, paragraphe 1, TUE il incombe aux juridictions nationales de tirer toutes les conséquences de cette illégalité, notamment en ce qui concerne la validité des actes d'exécution de cette mesure.

Sur la seconde question, l'ordonnance du 15 mars 2017 a précisé dans ses motifs qu'il appartenait à la juridiction de renvoi de déterminer préalablement si la mesure nationale en cause constitue une aide d'Etat, en vérifiant si les trois autres conditions visées à l'article 1 paragraphe 1 TFUE sont remplies dans l'affaire avant de répondre à la deuxième question, que sous cette réserve au regard des dispositions de l'article 108, paragraphe 3, TFUE, qui institue un contrôle préventif sur les projets d'aide nouvelle, lequel vise à ce que seules les aides compatibles soient mises à exécution, il en résultait :

* qu'une mesure d'aide au sens de l'article 107, paragraphe1, TFUE, mise à exécution en méconnaissance des obligations découlant de l'article 108, paragraphe 3, TFUE, est illégale,

* que la mise en 'uvre du contrôle préventif instauré à l'article 108, paragraphe 3, TFUE, revient d'une part à la Commission chargée d'apprécier la compatibilité des mesures d'aide avec le marché intérieur et d'autre part aux juridictions nationales , chargées de veiller à la sauvegarde, jusqu'à la décision finale de la Commission, des droits des justiciables face à une méconnaissance éventuelle, par les autorités étatiques, de l'interdiction visée à l'article 108, paragraphe 3, TFUE,

* qu'il incombe aux juridictions nationales de garantir aux justiciables que toutes les conséquences d'une violation de l'article 108, paragraphe 3, TFUE, seront tirées conformément à leur droit national, en ce qui concerne tant la validité des actes comportant mise à exécution des mesures d'aide que le recouvrement des soutiens financiers accordés au mépris de cette disposition ou d'éventuelles mesures provisoires,

* que partant, en cas de défaut de notification préalable à la Commission d'une mesure nationale constituant une aide d'Etat, au sens de l'article 107, paragraphe 1, TFUE, il incombe aux juridictions nationales de tirer toutes les conséquences de cette illégalité, notamment en ce qui concerne la validité des actes d'exécution de cette mesure.

La société FLASSANS ENERGY indique avoir engagé les démarches nécessaires pour la mise en 'uvre d'une centrale photovoltaïque sur la Commune de Flassans sur Isole, avoir constitué un dossier complet et l'avoir adressé à ERDF le 27 août 2010.

La société ERDF a accusé réception de ce dossier et a indiqué à la société FLASSANS ENERGY que le dossier était complet au 27 août 2010.

La société FLASSANS ENERGY reproche à ERDF de ne pas avoir délivré la proposition technique et financière dans le délai d'instruction fixé à trois mois.

Par acte du 10 juillet 2015, la société FLASSANS ENERGY, agissant par son représentant légal en exercice la S.A.S. URBASOLAR et dont elle est une filiale à 100%, et qui a pour activité la production d'électricité d'origine renouvelable, a fait assigner la société ENEDIS devant le tribunal de commerce de Draguignan pour qu'elle soit condamnée à lui payer la somme de 8.079.369 euros à titre de dommages-intérêts.

La société ENEDIS a mis en cause ses assureurs, la société AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCES et la société ALLLIANZ GLOBAL CORPORATE & SPECIALITY pour qu'elles la relèvent et garantissent des condamnations prononcées à son encontre.

Par jugement du 20 février 2017, le tribunal précité a « dit et jugé que la société FLASSANS ENERGY est bien fondée en sa demande d'indemnisation du préjudice subi », et a ordonné une expertise pour évaluer ledit préjudice.

La société ENEDIS a relevé appel de cette décision dont elle sollicite la réformation et expose :

-que le décret n°2010-15-10 du 9 décembre 2010 a suspendu pour une durée de trois mois l'obligation d'achat d'électricité produite par certaines installations utilisant l'énergie radiative du soleil.

-que l'article 3 de ce décret prévoit qu'il est possible d'y déroger dès lors que l'acceptation de la PTF a été retournée avant le 2 décembre 2010 ce qui n'est pas le cas en l'espèce,

-que ce projet était loin d'être réalisé.

-que la « discrimination '' dont la société FLASSANS ENERGY se dit victime ne repose sur aucun élément tangible,

-qu'il n'existe pas de lien de causalité puisque la société FLASSANS ENERGY ne démontre pas qu'en l'absence de retard d'ENEDIS dans la transmission de la PTF, elle aurait nécessairement matérialisé son accord sur ce document avant le 2 décembre 2010 et que dès lors, il n'existe pas de lien de causalité entre le dépassement du délai de trois mois dans la transmission de la PTF et le préjudice allégué, qui résulte exclusivement de l'application du décret du 9 décembre 2010 au projet,

-que la suspension du projet et la perte de l'ancien tarif d'achat avantageux ont pour cause exclusive l'adoption par le Gouvernement du décret moratoire,

-que la société FLASSANS ENERGY, fonde son préjudice sur l'application à son profit du tarif d'achat de 50 cts €/kWh issu de l'arrêté tarifaire du 12 janvier 2010 lequel est constitutif d'une aide d'Etat contraire au droit de l'Union européenne pour défaut de notification préalable à la Commission européenne.,

-que de par son illégalité, il ne saurait donc servir de fondement à la réparation d'un préjudice en justice.

A titre subsidiaire, la société ENEDIS fait valoir :

-que l'achat de l'électricité produite par les installations utilisant l'énergie radiative du soleil à un prix supérieur à sa valeur de marché, dans les conditions définies par l'arrêté du 12 janvier 2010, a le caractère d'une aide d'Etat et que cet arrêté n'a pas été notifié préalablement à la Commission européenne en violation de l'article 108 paragraphe 3 du TFUE.

-que cet arrêté est illégal et que son application doit, en tout état de cause, être écartée et au besoin, écarter l'application de l'article 88 de la loi du 12 juillet 2010 en raison de sa contrariété avec l'article 108 paragraphe 3 du TFUE.

-que la perte d'une chance inexistante ne peut donner lieu à réparation puisque que le seul préjudice dont pourrait se prévaloir la société FLASSANS ENERGY est la perte d'une chance d'avoir pu. matérialiser son accord sur une PTF avant le le décembre 2010 minuit puis d'avoir obtenu un contrat d'achat après avoir réalisé et mis en service sa centrale dans un délai de 18 mois et enfin d'avoir pu exploiter sur 20 ans sa centrale virtuelle ;

-que les hypothèses de calcul de l'assiette de préjudice sont totalement injustifiées en leur principe et leur quantum.

La société ENEDIS conclut à la réformation de la décision et au rejet des demandes présentées à son encontre.

A titre subsidiaire, la société ENEDIS demande :

-de lui donner acte de son désistement d'instance à l'égard de la compagnie AGCS,

-de condamner la compagnie AXA CORPORATE SOLUTIONS à la garantir de l'ensemble des condamnations mises à sa charge,

-de lui donner acte de son désistement envers la société Allianz Global Corporate & Specialty SE.

La société FLASSANS ENERGY rétorque :

-que la transmission de la PTF devait intervenir dans le délai et que le manquement à cette obligation ouvre droit à réparation,

-que le lien de causalité est établi,

-que ENEDIS a violé l'obligation légale d'instruire les dossiers sans discrimination,

-que ERDF est soumise à une obligation de résultat par l'absence d'aléa sur la réalisation de sa prestation,

-que l'illégalité de l'arrêté du 12 janvier 2010 ne peut avoir pour effet de remettre les contrats conclus en cause puisque que le contrat d'achat aurait nécessairement été conclu en 2011 sans difficulté du fait que l'arrêté n'a fait l'objet d'aucun recours et qu'il est définitif,

-que même dans l'hypothèse d'une invalidation de l'arrêté du 12 janvier 2010, celle-ci ne peut être rétroactive au vu de la jurisprudence de la CJUE,

-que la conformité avec le droit européen de l'aide d'Etat apportée aux énergies renouvelables et au secteur photovoltaïque en particulier exclut que l'arrêté du 12 janvier 2010 puisse être invalidé,

-qu'elle est fondée à invoquée une perte de marge,

-que même en se référant à la théorie de la perte de chance, elle doit obtenir une indemnisation de près de 100% de la perte de marge,

-que la méthode de calcul de la réparation est fixée par la cour de cassation et qu'elle l'applique,

-qu'elle justifie de son préjudice qu'elle fixe à la somme de 8 079 369 € outre intérêts au taux légal à compter de l'assignation.

La société FLASSANS ENERGY demande de :

- infirmer partiellement le jugement en ce qu'il a ordonné une expertise pour apprécier le quantum de l'indemnisation,

- la cour usant de son pouvoir d'évocation,

- Condamner la société ERDF devenue ENEDIS à payer à lui payer SAS une indemnité sur la base de la somme de 8 079 369 € outre, intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

- A titre subsidiaire, si la méthode de la VAN devait être retenue, condamner ERDF devenue ENEDIS à lui payer une indemnité sur la base de la somme de 7 790 593 €,

- Jugeant qu'en tout état de cause, si l'arrêté du 12 janvier 2010 ne pouvait servir de base au calcul de l'indemnisation, l'évaluer à titre forfaitaire et non plus consécutivement au calcul lié à l'arrêté, à la somme de 8 079 369€ et condamner ENEDIS sur la base de ce montant,

- Condamner en outre ERDF devenue ENEDIS au paiement de la somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du C.P.C

La société AXA CORPORATE SOLUTION fait valoir :

-que la société FLASSANS ENERGY ne démontre pas l'existence d'un lien de causalité entre la faute reprochée à Enedis et son préjudice allégué,

-que le préjudice invoqué par la société FLASSANS ENERGY au titre de la prétendue perte de marge n'est pas réparable en ce qu'il est calculé sur la base d'un arrêté tarifaire illégal,

-qu'elle n'a pas à garantir la société ENEDIS en application de l'article L. 113-1 alinéa 2 du code des assurances, en raison de sa faute dolosive,

-qu'en tout état de cause, les faits reprochés à Enedis rentrent dans le champ de la clause d'exclusion de garantie prévue dans la police d'assurance à l'article 2.1.8.

Cette société d'assurances sollicite la réformation du jugement attaqué et le rejet des demandes présentées à son encontre.

La société ALLIANZ GLOBAL CORPORATE & SPECIALTY SE (AGCS) conclut ainsi:

A titre liminaire sur le désistement :

- Constater qu'en l'absence d'accord de la concluante, le désistement d'instance d'ENEDIS à son égard n'est pas parfait, et ne peut être constaté d'office ;

- Constater qu'en l'absence de désistement d'action à son bénéfice, la concluante encourt un risque qu'ENEDIS introduise une nouvelle action à son encontre, visant à être garantie des éventuelles condamnations qui seraient prononcées dans la présente instance ;

- En conséquence, dire et juger qu'AGCS est bien fondée à faire valoir ses arguments pour s'opposer auxdemandes du producteur photovoltaïque ;

A titre principal :

- Infirmer la décision du Tribunal de commerce de Draguignan le 21 février 2017 ;

En conséquence :

- Dire et juger que la responsabilité délictuelle d'ENEDIS ne peut pas être engagée ;

- Débouter Flassans Energy de ses demandes, fins et conclusions ;

A titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la Cour n'infirmerait pas la décision du 21 février 2017, il est demandé de :

- Constater l'absence de conformité au droit de l'Union européenne des divers arrêtés ' dont l'arrêté ministériel du 12 janvier 2010 et celui du 10 juillet 2006 ' fixant les tarifs d'achat d'énergie radiative ;

- Constater en conséquence que l'arrêté ministériel du 12 janvier 2010 ' et le cas échéant tous les autres arrêtés antérieurs et notamment l'arrêté ministériel du 10 juillet 2006 ' fixant les tarifs d'achat d'énergie radiative est illégal par voie d'exception, pour défaut de notification préalable à la Commission européenne ;

- Dire et juger que la société FLASSANS ENERGY ne peut justifier d'un dommage réparable dès lors que le texte sur lequel elle fonde l'existence de ce dommage est entaché d'illégalité ;

- Dire et juger qu'en tout état de cause, le préjudice n'est ni certain, ni direct ;

En conséquence :

- Déclarer FLASSANS ENERGY mal fondée en ses demandes et l'en débouter ;

A titre subsidiaire :

- Dire et juger que FLASSANS ENERGY ne justifie pas d'un lien de causalité entre la faute imputée à ENEDIS et le préjudice allégué ;

En conséquence :

- Déclarer FLASSANS ENERGY mal fondée en ses demandes et l'en débouter ;

A titre plus subsidiaire :

- Dire et juger que le préjudice ne peut s'analyser qu'en une perte de chance infime ;

- Renvoyer devant le Tribunal de commerce de Draguignan les demandes relatives au quantum du préjudice et à la question des garanties d'assurance d' ENEDIS ;

A titre subsidiaire sur la garantie :

- Donner acte à la concluante de ce qu'ENEDIS ne présente plus aucune demande à son encontre ;

- Donner acte de ce qu'elle se réserve le droit de contester ultérieurement sa garantie ;

- Mettre AGCS hors de cause ;

En tout état de cause :

- Rejeter l'ensemble des demandes de FLASSANS ENERGY au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Condamner la partie succombante à lui verser la somme de 15.000 euros par application des

dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

La cour renvoie, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties à leurs écritures précitées.

MOTIFS DE LA DECISION

En préliminaire, il convient de relever que la déclaration d'appel de la société ENEDIS ne vise que le jugement rendu le 21 février 2017 par le tribunal de commerce de Draguignan et nullement sur un jugement qui aurait rendu le 6 septembre 2016 par cette même juridiction.

Sur le désistement de la société ENEDIS envers la société Allianz Global Corporate & Specialty SE.

La société ALLIANZ GLOBAL CORPORATE & SPECIALTY SE s'en rapporte et n'a pas expressément accepté le désistement.

En application de l'article 396 du code de procédure civile, la non acceptation du désistement par cette intimée ne reposant sur aucun motif légitime, il convient de constater aue le désistement de la société ENEDIS envers la société ALLIANZ GLOBAL CORPORATE & SPECIALTY SE est parfait et de condamner la société ENEDIS au paiement d'une somme de 2000 euros au titre de l'article 700 eu code de procédure civile.

Sur la faute alléguée à l'encontre de la société ENEDIS

La société FLASSANS établit qu'elle a adressé à la société ENEDIS l'intégralité du dossier de demande de raccordement comprenant notamment :

- l'autorisation d'urbanisme (permis de construire ou déclaration de travaux),

- le plan de localisation,

- les caractéristiques techniques précises de l'installation et des modules.

Ces pièces apportent donc la preuve de la réalité du projet et la société ENEDIS ne peut soutenir que le projet n'était pas abouti et que par le dépôt d'une nouvelle demande de raccordement sur le même site le 29 mars 2011, la société intimée admettait par la même que la réalisation initialement prévue ne pouvait aboutir.

La commission de régulation de l'énergie (ou CRE), par délibération du 11 juin 2009 (et son annexe 1), ayant valeur de décision sur les règles d'élaboration des procédures de traitement des demandes de raccordement au réseau public de distribution d'électricité et le suivi de leur mise en 'uvre, a considéré que la société ERDF, devenue ENEDIS, avait l'obligation de transmettre aux demandeurs une PTF dans un délai n'excédant pas trois mois à compter de la réception de sa demande de raccordement complète.

L'article 7.2.3 de la procédure de traitement des demandes de raccordement individuel d'Enedis applicable à compter du 3 juillet 2010, prévoit qu'à l'issue de cet examen et lorsque le dossier est complet, la demande de raccordement est qualifiée, que la date de qualification de la demande de raccordement est fixée à la date de réception du dossier lorsque celui ci est complet ou à la date de réception de la dernière pièce manquante, puis qu'ERDF confirme par courrier postal ou électronique au demandeur que son dossier est complet et lui communique également à cette occasion la date de qualification de sa demande de raccordement... ainsi que le délai d'envoi de l'offre de raccordement.

Le délai de trois mois dans lequel la PTF devait être transmise à la société FLASSANS court à compter de la réception par le gestionnaire de réseau de la demande de raccordement complétée, s'apprécie à la date de réception de la PTF par le demandeur.

La société ENEDIS devait donc retourner son accord avant l'entrée en vigueur du moratoire et en s'en abstenant, a commis une faute susceptible d'ouvrir droit à réparation.

La faute d'ERDF est constituée par son absence de réponse dans le délai de trois mois.

Faute d'avoir respecté son obligation, la société ENEDIS a fait perdre à la société FLASSANS ENERGY une chance de pouvoir adresser dans le délai qui lui restait, son acceptation de la PTF de sorte que le lien de causalité entre ledit manquement et le préjudice de perte de chance allégué est établi.

Sur la demande d'indemnisation présentée par la société FLASSANS ENERGY

Cette société réclame une indemnisation fondée sur la perte de marge.

Un tel fondement ne peut être retenu du fait d'un prévisionnel de chiffre d'affaires éventuel sur lequel se base la société FLASSANS.

Par contre, il appartient à la société FLASSANS de démontrer que du fait de cette absence de réponse, elle a perdu une chance qui ne soit pas qu'hypothétique de réaliser son projet et de réaliser pendant vingt ans une marge du fait de son exploitation.

Seule constitue une perte de chance réparable la disparition actuelle et certaine d'une éventualité favorable.

La société ENEDIS et la société AXA soutiennent que l'arrêté du 12 janvier 2010 était illégal et que son application doit en tout état de cause être écartée car le tarif fixé par cet arrêté a le caractère d'une aide d'Etat qui n'a pas fait l'objet d'une notification préalable à la Commission européenne en violation de l'article 108 paragraphe 3 du du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE).

En effet, les règles en matière d'aides d'Etat sont posées aux articles 107 à 109 qui (article 107) d'une part, définit les aides d'Etat d'autre part, pose un principe d'incompatibilité des aides avec le marché intérieur.

L'absence de respect de l'article l08§3 du TFUE entraîne l'illégalité de l'aide.

Le Conseil d'Etat dans un arrêt du 15 mai 2012 rappelle qu'une aide d'Etat au sens de l'article l07§1 du TFUE suppose la réunion de quatre conditions :

-qu'i1 y ait une intervention de l'Etat ou au moyen de ressources d'Etat,

-que cette intervention soit susceptible d'affecter les échanges entre les Etats membres,

-qu'elle accorde un avantage sélectif à son bénéficiaire;

-qu'elle fausse ou menace de fausser la concurrence.

Les juridictions nationales ont l'obligation d'écarter le droit interne lorsqu'il est contraire au droit de l'Union européenne.

Le juge national chargé d'appliquer , dans le cadre de sa compétence, les dispositions du droit de l'Union, a l'obligation d'assurer le plein effet de ces normes en laissant au besoin inappliquée, de sa propre autorité, toute disposition contraire de la législation nationale, même postérieure, sans qu'il ait à demander ou à atteindre l'élimination préalable de celle ci par voie législative ou par tout autre procédé constitutionnel

Il s'en déduit que les moyens de la société FLASSANS selon lesquels l'arrêté du 12 janvier 2010 a été validé par la loi 2010-788 du 12 juillet 2010 sont inopérants.

Le dispositif résultant de l'arrêté du 12 janvier 2010 ne peut bénéficier du règlement n°800/2008 du 6 août 2008, qui prévoit l'exemption de notification, sous conditions, de certaines aides d'Etat, dès lors que l'article 23 réserve l'exemption aux aides environnementales en faveur des investissements dans la promotion de l'énergie produite à partir de sources d'énergie renouvelables, excluant ainsi les aides au fonctionnement telles que l'aide litigieuse, qui garantit l'achat d'électricité à un prix supérieur à celui du marché.

L'illégalité du décret opposée par voie d'exception n'est pas soumise à la prescription édictée par le règlement 659/1999 du 22 mars 1999 qui ne vise que les pouvoirs de la Commission en matière de récupération d'une aide d'État, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Ni l'arrêté tarifaire du 10 juillet 2006, ni l'arrêté tarifaire du 12 janvier 2010 prévoyant au profit des producteurs d'énergie photovoltaïque une rémunération à un tarif supérieur à celui qu'ils auraient pu obtenir sur le marché de l'électricité, dont le financement est supporté par les consommateurs finals d'électricité, n'ont fait l'objet d'une notification préalable à la Commission européenne.

La CJUE dans son ordonnance du 15 mars 2017 a relevé que le mécanisme en cause, instauré par la réglementation nationale, d'obligation d'achat de l'électricité produite par les installations utilisant l'énergie radiative solaire à un prix supérieur à celui du marché doit être considéré comme une intervention de l'Etat ou au moyen des ressources d'Etat.

Cette aide s'adressait uniquement aux producteurs d'électricité utilisant l'énergie radiative du soleil et à aucun autre. Ce traitement avantageux et sélectif faussait donc la concurrence du fait des échanges transfrontières et était susceptible d'affecter les échanges entre Etats membres.

Il est donc établi que le mécanisme prévu par l'arrêté du 12 janvier 2010 tout comme celui prévu par l'arrêté du 10 juillet 2016 constituent des aides d'Etat au sens de l'article 107, paragraphe1, TFUE, mises à exécution en méconnaissance des obligations découlant de l'article 108, paragraphe 3, TFUE car ils devaient faire l'objet de notification préalable.

La Commission européenne dans sa décision du 10 février 2017 intitulée « aide sous la forme de tarifs d'achat pour le développement d'installations photovoltaïques » prise à la suite de la notification de l'arrêté tarifaire du 4 mars 2011 , qui est venu remplacer l'arrêté du 12 janvier 2010 , en prévoyant un tarif beaucoup moins attractif que les précédents pour les producteurs selon les écritures a considéré que ce tarif d'achat constituait une aide d'Etat.

Elle a ainsi autorisé trois régimes français d'aides aux producteurs d'énergie solaire et hydroélectrique après avoir apprécié les trois régimes au regard des règles de [Localité 1] Européenne en matière d'aides d'Etat, qui garantissent un recours limité au fonds publics et l'absence de surcompensation, en veillant à ce que soient limitées les distorsions de concurrence engendrée.

La CJUE n'a pas rejeté la qualification d'aide d'État, mais a jugé que la première condition pour qualifier un dispositif d'aide d'État était remplie, invitant les juridictions nationales à vérifier si les trois autres conditions l'étaient.

En l'espèce, ce dispositif s'applique à des bénéficiaires qui opèrent dans un système d'économie de marché, caractérisé par ses échanges transfrontaliers, en leur procurant un avantage qui garantit la rentabilité de leur investissement et favorise de manière sélective un type de production, l'énergie d'origine photovoltaïque.

Ce dispositif est donc susceptible d'affecter les échanges entre États membres, accorde à ses bénéficiaires un avantage sélectif et fausse ou risque de fausser la concurrence sur le marché intérieur.

Il ne peut être soutenu que les pouvoirs de la Commission en matière de récupération d'aide d'Etat soient soumis à une prescription de dix ans puisque aucun remboursement n'est sollicité, ENEDIS opposant par voie d'exception l'illégalité de ce tarif.

L'arrêté du 12 janvier 2010 est donc illégal pour défaut de notification préalable à la Commission européenne

Le propre de la responsabilité civile est de rétablir l'équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime dans la situation dans laquelle elle se serait trouvée si l'acte dommageable ne s'était pas produit.

Cette règle ne peut conduire à reconstituer un avantage illicite.

Du fait de l'illégalité du tarif institué par l'arrêté du 12 janvier 2010 pour n'avoir pas fait l'objet de notification préalable à la Commission européenne, la société FLASSANS ne peut obtenir réparation d'un préjudice né de son impossibilité de bénéficier dudit tarif consécutif à un retard d'ENEDIS dans le traitement de sa demande de PTF, calculé, même subsidiairement, uniquement par référence à un arrêté illégal au regard du droit communautaire.

Etant démontré qu'il s'agissait d'une aide d'État. Elle devait faire l'objet d'une notification préalable à la Commission en application de l'article 108 § 3.

Il n'est pas contesté que l'arrêté du 12 janvier 2010, comme celui du 10 juillet 2006, n'a jamais été notifié à la Commission, préalablement à sa mise en 'uvre, dans les conditions de ce texte.

IL ne peut être soutenu que la Commission aurait pu avoir connaissance de ces textes puisqu'aucune notification n'a été effectuée.

Le règlement d'exemption CE 800/2008, applicable au jour du décret du 12 janvier 2010, ne concernait que les aides transparentes, c'est-à-dire dont il est possible de calculer précisément et préalablement l'équivalent-subvention brut au moment de l'octroi de l'aide, ce qui n'est pas le cas du régime d'aides accordées aux producteurs d'électricité photovoltaïque et les régimes d'aide devaient contenir une référence expresse au règlement par la citation de son titre, ce qui n'est aucunement le cas pour les décrets litigieux.

Il ne peut être soutenu que les dispositions de l'article 88 de la loi de 12 juillet 2010 qui valide l'arrêté du 12 janvier 2010, serait une disposition du droit interne écartant l'application du droit de l'Union en vertu du principe de primauté du droit de l'Union sur le droit national, ou les décisions du Conseil d'État, lequel n'a pas statué sur la violation de l'obligation de notification préalable, ou les décisions ultérieures de la Commission, concernant des régimes d'aide différents, plus contraignants et qui instauraient des tarifs inférieurs à ceux des arrêtés de 2006 et 2010.

Les arrêtés de 2006 et 2010 ayant été abrogés et remplacés par l'arrêté du 4 mars 2011, lequel a d'ailleurs fait l'objet d'une procédure de notification à la Commission, aucune régularisation n'est possible.

Si les juridictions nationales sont compétentes pour apprécier le respect par les États membres de la procédure de notification, seule la Commission européenne est compétente pour statuer sur la compatibilité d'une aide d'État avec le marché intérieur et il n'appartient donc pas à une juridiction nationale d'opérer un tel contrôle. Le fait que la Commission a déclaré compatibles les mécanismes d'aide à la production d'électricité photovoltaïque postérieurs est sans incidence sur la validité des dispositifs antérieurs. Il est tout aussi inopérant d'invoquer l'absence de saisine d'office par la Commission européenne pour procéder à un examen de la compatibilité, l'absence de décision sur ce point ne signifiant pas que le décret litigieux bénéficie d'une reconnaissance tacite de compatibilité.

L'arrêté du 12 janvier 2010, tout comme celui du 10 juillet 2006, qui n'ont pas été notifiés à la Commission européenne préalablement à leur mise en 'uvre, sont par conséquent illégaux et cette illégalité fait obstacle, à elle seule, à la demande d'indemnisation formée.

Le principe de réparation intégrale du préjudice subi à raison d'une faute commise ne peut trouver à s'appliquer dès lors qu'il s'agit de réparer la perte d'un avantage résultant d'une aide illégale.

En conséquence, le jugement attaqué est infirmé.

Les demandes présentées par la société ENEDIS envers la société AXA s'avèrent être sans objet.

Il convient de condamner la société FLASSANS, dont les demandes sont rejetées à payer à la société ENEDIS une somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur ce même fondement la société ENEDIS est condamnée à payer à la société ALLIANZ GLOBAL CORPORATE & SPECIALTY SE une indemnité de 2000 euros.

Il n'y a lieu de faire droit à la demande formulée sur ce fondement par la société AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE et à la demande présentée envers cette société d'assurances par la société ENEDIS.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Déclare parfait le désistement de la société ENEDIS envers la société ALLIANZ GLOBAL CORPORATE & SPECIALTY SE,

Condamne la société ENEDIS à payer à la société ALLIANZ GLOBAL CORPORATE & SPECIALTY SE une somme de 2000 euros au titre de l'article 700 eu code de procédure civile,

Infirme le jugement attaqué,

Statuant à nouveau,

Déboute la société FLASSANS ENERGY de ses demandes,

Condamne la société FLASSANS ENERGY, dont les demandes sont rejetées à payer à la société ENEDIS une somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties de leurs demandes autres ou plus amples,

Condamne la société FLASSANS ENERGY aux dépens de première instance et d'appel, recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Le GREFFIER Le PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 3-1
Numéro d'arrêt : 17/03823
Date de la décision : 12/12/2019

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-12-12;17.03823 ?
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