COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-6
ARRÊT AU FOND
DU 08 NOVEMBRE 2019
N° 2019/464
Rôle N° RG 16/14857 - N° Portalis DBVB-V-B7A-7C5I
SELARL LABORATOIRE SYNERGIE
C/
[E] [V]
Copie exécutoire délivrée
le :13/11/2019
à :
Me Dominique IMBERT-REBOUL, avocat au barreau de TOULON
Me Sophie QUIROUARD-FRILEUSE, avocat au barreau de TOULON
VESTIAIRE 286
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON - section AD - en date du 13 Juillet 2016, enregistré au répertoire général sous le n° 15/1091.
APPELANTE
SELARL SYNERGIE, demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Dominique IMBERT-REBOUL, avocat au barreau de TOULON substitué par Me Séverine CAUMON, avocat au barreau de TOULON
INTIMEE
Madame [E] [V], demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Sophie QUIROUARD-FRILEUSE, avocat au barreau de TOULON
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 10 Septembre 2019 en audience publique devant la Cour composée de :
Madame Christine LORENZINI, Présidente de Chambre
Monsieur Thierry CABALE, Conseiller
Mme Solange LEBAILE, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Mme Suzie BRETER.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Novembre 2019.
ARRÊT
contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Novembre 2019.
Signé par Madame Christine LORENZINI, Présidente de Chambre et Mme Suzie BRETER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Madame [E] [V] a été embauchée par la Scp Boyer Geoffroy en qualité de technicienne préleveuse le 1er juillet 1991 dans le cadre d'un contrat à durée déterminée. La relation de travail s'est poursuivie dans le cadre d'un deuxième contrat à durée déterminée puis dans celui d'un contrat à durée indéterminée le 1er mars 1992.
La convention collective applicable est la convention collective nationale des laboratoires de biologie médicale extra hospitalier.
En avril 1993, suite à une fusion, l'employeur de Madame [V] est devenue la société Toulon-Ouest. Le 22 mai 1993, la société Toulon-Ouest a fait l'objet d'une fusion absorption de la part de la Selarl Synergie.
La salariée a été élue déléguée du personnel en novembre 2009 puis à nouveau en novembre 2013.
Par courrier du 5 août 2015, la salariée a pris acte de la rupture de son contrat de travail.
Saisi par Madame [V], le conseil de prud'hommes de Toulon par jugement en date du 13 juillet 2016, a :
- dit que la rupture de son contrat de travail était la conséquence de manquements graves de son employeur,
- dit que cette rupture avait les effets d'un licenciement nul, en raison de l'absence de demande à l'inspection du travail, conformément aux dispositions de l'article L1235-4 du code du travail,
- ordonné le remboursement des indemnités de chômage à hauteur de 1 euro,
- condamné la Selarl à lui payer les sommes suivantes :
* 13978,81 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,
* 5201,42 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,
* 15604,26 euros au titre de l'indemnité pour licenciement nul,
* 78021,30 euros au titre de l'indemnité forfaitaire due pour violation du statut protecteur,
* 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté la demande d'exécution provisoire,
- débouté Madame [V] de l'ensemble de ses autres demandes,
-ordonné le remboursement des indemnités de chômage à hauteur de 1 euro,
- rejeté la demande reconventionnelle de la Selarl Synergie au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
-condamné la Selarl Synergie aux entiers dépens.
Le 20 juillet 2016, soit dans le délai légal, la Selarl Synergie a relevé appel de ce jugement.
Par des conclusions écrites déposées le jour de l'audience, visées par le greffe, développées oralement et auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens et prétentions, la Selarl Synergie demande à la cour de :
- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que la rupture du contrat de travail de Madame [V] était la conséquence de manquements graves de son employeur, que cette rupture devait produire des effets d'un licenciement nul en raison de l'absence de demande à l'inspection du travail, en ce qu'il a ordonné, en outre, le remboursement des indemnités chômage à hauteur d'un euro et en ce qu'il l'a condamné à verser à Madame [V] la somme de 13978,81 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, la somme de 5201,42 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, la somme de15604,26 euros au titre d'indemnité pour licenciement nul, la somme de 78021,30 euros au titre de l'indemnité forfaitaire due pour violation du statut protecteur, la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
En conséquence,
- dire que les documents suivants ont été remis à Madame [V] :
*bulletin de paie juillet 2015,
* documents relatifs à la déclaration de l'arrêt de travail pour maladie auprès de la Cpam et de l'organisme Klesia,
* fiche d'exposition aux risques professionnels de Madame [V].
- dire que Madame [V] à les griefs invoqués à la vie de sa prise d'acte de la rupture que ces derniers sont infondés,
- dire qu'elle n'a commis aucun manquement grave permettant de faire produire à la prise d'acte de rupture du contrat de travail les effets d'un licenciement nul,
-dire que la prise d'acte produit les effets d'une démission,
en conséquence,
- débouter Madame [V] de l'ensemble de ses demandes,
- condamner Madame [V] à lui verser la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner Madame [V] aux entiers dépens.
L'employeur fait valoir qu'aucune modification des contrats de travail n'a été imposée aux salariés mais seulement une modification de leurs horaires de travail qui ne constituait qu'un simple changement des conditions de travail, qu'il était convenu que l'aménagement permettant à la salariée de terminer son travail à 17heures 40 n'était que provisoire, qu'à compter de septembre 2013, la répartition des horaires de travail restait la même mais la salariée devait finir à 18 heures, heure de fermeture du laboratoire comme les autres salariés, que Madame [V] a été élue au mois de novembre 2013 déléguée du personnel puis au mois d'avril 2014, déléguée syndicale, qu'au cours d'une réunion en date du 19 septembre 2014, les délégués du personnel ont sollicité l'aide d'un technicien supplémentaire sur le site [Localité 1] le samedi matin, site sur lequel travaillait la salariée, raison pour laquelle la direction a prévu que Madame [V] travaillerait tous les samedis matins, que le 23 octobre 2014, il a pris acte de ce que Madame [V] refusait de travailler le samedi matin et l'a accepté mais a indiqué à la salariée qu'il ne pouvait pas faire droit à sa demande concernant sa fin de poste à 17heures 40 pour des raisons d'organisation interne, qu'il a proposé à la salariée de ne travailler que le matin du lundi au vendredi et ce, afin de tenir compte de ses obligations familiales, que la salariée l'a informé de ce que le second technicien refusait de travailler toutes les après-midis, que Madame [V] lui a alors proposé d'inverser avec son collègue au besoin deux après-midis par semaine, que par courrier du 10 novembre 2014, il a accepté cette proposition en demandant seulement à la salariée de bien vouloir respecter un délai de prévenance suffisant, qu'il a toujours apporté des réponses circonstanciées aux courriers du syndicat Force Ouvrière et de Madame [V] et que les prétendus manquements n'ont jamais existé, qu'il a fait l'objet d'un contrôle de l'inspection du travail le 8 juin 2015 à l'issue duquel des observations ont été émises, qu'il a répondu à chacun des points évoqués par courrier du 10 juillet 2015, que l'inspection du travail ne s'est par la suite, plus manifestée, que concernant l'incident entre Madame [V] et Madame [N], Madame [C] a reçu en entretien ces deux salariées afin d'apaiser les tensions qui résultaient d'un malentendu entre elles, lors de cet entretien, Madame [V] a également évoqué un mal être engendré par ses relations avec les autres salariés et indiqué que des propos calomnieux circulaient à son égard, soucieux du bien être de sa salariée, il a sollicité auprès du médecin du travail une visite médicale qui a abouti à un avis d'aptitude sans réserve, l'enquête diligentée suite à 'l'agression' qu'aurait commis Madame [M] sur Madame [V] a révélé que cette dernière avait seulement réagi de manière disproportionnée face à une demande légitime d'une supérieure hiérarchique, que le 1er juillet 2013, la salariée a sollicité une rupture conventionnelle en raison de la dégradation des rapports professionnels sans toutefois donner d'éléments concrets, que concernant la demande de communication de son bulletin de paie de juillet 2015 et de sa fiche d'exposition aux risques professionnels, ces documents ont été communiqués le 25 mars 2015, qu'il a bien procédé dès le 4 août 2015, à la déclaration de son arrêt de travail du 1ER août 2015, que les griefs invoqués par la salariée sont infondés et ne sauraient justifier une prise d'acte aux torts de l'employeur et que celle-ci sera déboutée de l'ensemble de ses demandes indemnitaires puisque sa prise d'acte doit s'analyser comme une démission et qu'elle n'a subi aucune entrave dans l'exercice de son mandat.
Par des conclusions écrites déposées le jour de l'audience, visées par le greffe, développées oralement et auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens et prétentions, Madame [V] demande à la cour de :
-prendre acte de la remise tardive des documents suivants :
* la demande de règlement des prestations Klesia maladie (et non accident du travail),
* le bulletin de paie de juillet 2015,
* la fiche d'exposition aux risques professionnels,
- constater l'existence de manquements graves de la part de la société Synergie,
- dire que les manquements graves sont tels qu'ils empêchent la poursuite du contrat de travail,
- dire la prise d'acte justifiée,
- dire que la prise d'acte produit les effets d'un licenciement nul s'agissant d'une salariée protégée,
- dire le préjudice subi au titre du licenciement nul justifié dans sa réalité et son quantum à hauteur de 31208,52 euros,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Synergie à payer les sommes suivantes :
* 5201,42 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
* 13978,81 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,
* 78021,30 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour violation du statut protecteur au titre de la rémunération qu'elle aurait dû percevoir du jour de la rupture, 5 août 2015, jusqu'au terme de protection, 28 mai 2018 et dans le limite de 30 mois de salaire,
* 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- réformer le jugement entrepris quant au montant accordé au titre du licenciement nul,
- condamner la société Synergie à lui payer la somme de 31208,52 euros au titre du licenciement illicite,
- condamner la Selarl Synergie à payer la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.
La salarié soutient :
- sur les 'demandes provisionnelles', que du fait de la déclaration d'accident du travail au lieu de maladie par la société Synergie et du retard pris dans l'établissement de l'attestation Klesia, elle a été privée de toute ressource durant six semaines, que l'employeur n'a payé les sommes dues au titre du reçu pour solde de tout compte que le 18 septembre 2015, qu'elle n'a reçu le complément des indemnités journalières de sécurité sociale, que le 5 octobre 2015, au titre de la portabilité, puis le 9 octobre 2015, le complément des indemnités journalières de sécurité sociale rétribué par la société Synergie ; qu'au surplus, la déclaration d'accident du travail faite à son insu l'a obligée à diverses démarches et courriers auprès de la Caisse primaire d'assurance maladie [Localité 2] et que ce n'est que le 25 mars 2016 que l'employeur lui a adressé son bulletin de paie de juillet 2015 ainsi que la fiche d'exposition aux risques professionnels ;
- sur les manquements graves commis par la société Synergie, que l'employeur a, à plusieurs reprises, modifié ses horaires, que si elle a accepté la première modification, elle a refusé la troisième consistant à finir à 18 heures et à travailler tous les samedis, qu'à compter du 1er septembre 2014, l'employeur est ainsi revenu sur l'autorisation accordée de finir à 17 heures 40, que par courrier recommandé en date du 4 mai 2015, elle a demandé à son employeur en qualité de déléguée syndicale, de se conformer à ses obligations légales en matière d'horaires de travail, de modification des conditions de travail, de préparation des tournées sur les heures de repos et l'a alerté sur des agissements de harcèlement moral subis par plusieurs salariés ainsi que par elle, que le moyen invoqué par l'employeur selon lequel l'autorisation de finir à 17 heures 40 ne devait être que temporaire, n'autorisait pas celui-ci, à imposer de nouveaux changements, qu'en toute hypothèse, l'employeur lui a imposé des modifications de ses conditions de travail et n'a pas tenu compte de son refus et qu'il s'agit d'un manquement suffisamment grave envers une salariée protégée puisqu'en effet, aucune modification de son contrat de travail ni aucun changement de ses conditions de travail ne peut , qu'elle qu'en soit la cause, être imposé à un salarié protégé sans son accord, qu'elle a également subi à plusieurs reprises, des difficultés et des entraves dans la disposition de ses heures de délégation, que ces difficultés proviennent de l'incapacité de la société Synergie à s'organiser afin d'assurer son remplacement, que par courrier en date du 10 juin 2015, l'inspecteur du travail a rappelé à la société Synergie qu'elle ne pouvait s'opposer à la prise d'heures de délégation sous peine de commettre un délit d'entrave, que par ailleurs, le fait de lui imposer la présence de deux biologistes directeurs au cours des réunions de délégués du personnel et d'afficher 'beaucoup d'agressivité' à l'occasion des réunions est une atteinte manifeste à son statut, que le fait de ne pas donner suite à sa demande de voir les délégués du personnel consultés sur des questions attribuées au Chsct démontre que son employeur n'a pas pris la mesure de l'étendue de ses attributions, que l'employeur n'a pas fait en sorte d'organiser des réunions mensuelles ce qui constitue un délit d'entrave caractérisé, qu'il n'y a en effet pas eu de réunion entre juillet 2013 et avril 2014, ni en octobre 2014, ni en février 2015, ni en mai 2015, que par ailleurs, elle a dénoncé à plusieurs reprises la dégradation de ses conditions de travail et les pressions psychologiques notamment du fait des incidents survenus avec Mesdames [N] et [M], qu'elle n'a jamais manqué de respect ou tenu les propos que lui attribue son employeur et qu'elle a pris acte de la rupture de son contrat de travail du fait :
- de se voir imposer d'importantes modifications dans ses horaires malgré son refus,
- d'être prise à partie par l'employeur afin qu'elle explique les raisons pour lesquelles le cahier de liaison ne circulait plus dans les laboratoires et qu'elle trouve une solution,
- de devoir justifier par téléphone chaque heure supplémentaire malgré la remise de justificatifs écrits,
- pour l'employeur de revenir en cours d'année sur l'autorisation qu'il lui a accordée de quitter son travail à 17h40,
- de nier et de donner aucune suite aux agissements de harcèlement moral dénoncés sur les salariés et sur elle-même,
- de persister dans des erreurs de planning conduisant la salariée à être régulièrement seule au laboratoire,
- de voir sur le compte rendu d'entretien individuel la mention 'DP' sur les caractéristiques du poste et la mention 'participe à des formations Fo en qualité de DP' sur l'analyse de compétences dans le poste, d'entretenir l'ostracisme voire l'agressivité de certains membres du personnel à son égard ;
- sur les conséquences pécuniaires du licenciement nul, que l'article 21 de la convention collective nationale des laboratoires de biologie médicale extra-hospitalière prévoit que la durée de préavis est de deux mois dès lors que le salarié justifie d'une ancienneté supérieure à deux ans, qu'aux termes de ce même article, l'indemnité conventionnelle de licenciement pour une ancienneté de vingt-trois ans et huit mois s'établit à la somme de 13 978,81 euros, que concernant les indemnités dues au titre du licenciement illicite et de l'atteinte au statut protecteur, elle sollicite la confirmation de l'évaluation de l'atteinte au statut protecteur et la réformation du jugement entrepris en ce qu'il a limité à six mois de salaire brut l'indemnisation au titre du licenciement nul, elle bénéficiait d'une ancienneté de vingt-trois ans et huit mois, à compter de la fusion par la société Synergie, ses conditions de travail se sont trouvées profondément modifiées puis dégradées à tel point qu'elle a subi trois arrêts maladie en dix mois, elle n'a retrouvé un emploi après sa prise d'acte, que dans le cadre d'un contrat à durée déterminée, par la suite et en l'état d'un chômage prolongé, elle a décidé de suivre une formation pour préparer un diplôme de cadre de santé et après obtention d udit diplôme, elle a été embauchée dans le cadre d'un contrat à durée déterminée à compter du 17 septembre 2018.
A l'audience du 10 septembre 2019, sur question de la cour, le conseil de Madame [V] a confirmé que la réintégration de la salariée n'était pas sollicitée.
MOTIFS :
Sur les demandes dites 'provisionnelles':
Il n'entre pas dans l'office du juge en l'absence de demande de condamnation à ce titre de prendre acte de la remise tardive de documents.
Sur la prise d'acte :
Il ressort des échanges de courriers et courriels entre les parties que l'employeur a modifié unilatéralement les horaires de travail de Madame [V] en lui imposant de finir à 18 heures au lieu de 17 heures 40 et ce, alors qu'aucune modification de son contrat de travail ni aucun changement de ses conditions de travail, quelle qu'en soit la cause, ne peut être imposé à un salarié protégé sans son accord.
Il ressort des mails produits par la salariée que cette dernière malgré le fait qu'elle avait informé son employeur plusieurs jours à l'avance, n'a pas été mise en mesure de prendre les heures de délégation sollicitées et ce, à plusieurs reprises, et notamment les 30 décembre 2014, 26 février et le 2 juillet 2015.
Enfin l'absence de réunion mensuelle des délégués du personnel entre juillet 2013 et avril 2014, en octobre 2014, en février et en mai 2015 n'est pas contestée.
L'employeur qui a imposé une modification de ses horaires de travail à une déléguée du personnel et qui a entravé l'exercice de son mandat en ne lui permettant pas à plusieurs reprises, de prendre ses heures de délégation et en ne réunissant pas de manière régulière les délégués du personnel, a commis des manquements suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail.
Il y a lieu d'en déduire que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par Madame [V], salariée protégée, par courrier du 5 août 2015, produit les effets d'un licenciement nul en l'absence d'autorisation de rupture du contrat de travail par l'inspecteur du travail.
Sur les dommages et intérêts pour nullité du licenciement :
Le licenciement de Madame [V] ayant été déclaré nul, il sera alloué à cette dernière qui justifiait au moment du licenciement d'une ancienneté de plus de vingt-trois ans et qui était âgée de quarante cinq ans et compte tenu de la période de chômage ultérieure, la somme de 31208,52 euros nets à titre de dommages et intérêts.
Sur l'indemnité compensatrice de préavis :
En application des dispositions de l'article L1234-5 du code du travail, Madame [V] a droit à une indemnité compensatrice de préavis d'un montant de 5201,42 euros bruts.
Sur l'indemnité conventionnelle de licenciement :
En application des dispositions de l'article 21 de la convention collective applicable, la salariée a droit à une indemnité conventionnelle de licenciement de 13 978,81 euros nets.
Sur l'indemnité forfaitaire pour violation du statut protecteur :
La déléguée du personnel, dont la prise d'acte produit les effets d'un licenciement nul, a droit à une indemnité pour violation du statut protecteur égale à la rémunération qu'elle aurait perçue depuis son éviction jusqu'à l'expiration de la période de protection dans la limite de deux ans, durée minimale légale de son mandat, augmentée de six mois. La Selarl Synergie sera condamnée à lui verser la somme de 78021,30 euros nets.
Sur le remboursement des indemnités chômage :
Le licenciement de Madame [V] ayant été déclaré nul pour un motif autre que ceux visés aux deux premiers alinéas de l'article L1235-10 du code du travail, il n'y a pas lieu d'ordonner le remboursement par l'employeur des indemnités chômage.
Sur les frais irrépétibles :
En considération de l'équité, il sera alloué à Madame [V] la somme de 2000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Sur les dépens :
Les entiers dépens seront mis à la charge de la Selarl Synergie qui succombe pour l'essentiel.
PAR CES MOTIFS :
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud'homale et par mise à disposition au greffe :
Réforme partiellement le jugement entrepris et statuant à nouveau sur le tout pour une meilleure compréhension et y ajoutant,
Déclare bien fondée et justifiée la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par Madame [E] [V] par lettre en date du 05 août 2015 et que cette prise d'acte produit les effets d'un licenciement nul.
Condamne le Selarl Synergie à payer à Madame [E] [V] les sommes suivantes :
- 31208,52 euros nets à titre de dommages et intérêts pour nullité du licenciement,
- 5201,42 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
-13978,81 euros nets à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,
- 78021,30 euros nets au titre de l'indemnité forfaitaire pour violation du statut protecteur,
- 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Déboute les parties du surplus.
Condamne la Selarl Synergie aux entiers dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIERLA PRESIDENTE