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10/10/2019 | FRANCE | N°17/22564

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 10 octobre 2019, 17/22564


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 10 OCTOBRE 2019

bm

N° 2019/ 561













Rôle N° RG 17/22564 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BBU3E







[B] [X] [F]

[I] [F] [I] épouse [F]





C/



[T] [K] épouse [X]





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :





SELARL LSCM & ASSOCIES



SELARL DEBEAURAI

N & ASSOCIES







Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 27 Novembre 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 13/00720.





APPELANTS



Monsieur [B] [X] [F]

demeurant [Adresse 1]



représenté par Me Monika MAHY MA SOMGA de la SE...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 10 OCTOBRE 2019

bm

N° 2019/ 561

Rôle N° RG 17/22564 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BBU3E

[B] [X] [F]

[I] [F] [I] épouse [F]

C/

[T] [K] épouse [X]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SELARL LSCM & ASSOCIES

SELARL DEBEAURAIN & ASSOCIES

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 27 Novembre 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 13/00720.

APPELANTS

Monsieur [B] [X] [F]

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Monika MAHY MA SOMGA de la SELARL LSCM & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant

Madame [I] [F] [I] épouse [F]

demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Monika MAHY MA SOMGA de la SELARL LSCM & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant

INTIMEE

Madame [T] [K] épouse [X]

demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Julien DUMOLIE de la SELARL DEBEAURAIN & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Frédéric BERENGER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 18 Juin 2019 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Bernadette MALGRAS, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Laure BOURREL, Président

Madame Bernadette MALGRAS, Conseiller

Monsieur Luc BRIAND, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Octobre 2019.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Octobre 2019,

Signé par Madame Laure BOURREL, Président et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS et PROCÉDURE ' MOYENS et PRÉTENTIONS DES PARTIES

Madame [X] a acquis le 27 septembre 2012 un ensemble de parcelles cadastrées BH [Cadastre 1] [Cadastre 2] [Cadastre 3] [Cadastre 4] [Cadastre 5], commune [Localité 1] (13). L'acte d'acquisition fait référence à une convention de passage de 1988 ; elle est également propriétaire des parcelles BH [Cadastre 6] et [Cadastre 7].

Monsieur et madame [F] sont propriétaires des parcelles [Cadastre 8] [Cadastre 9] [Cadastre 10] [Cadastre 11].

Se plaignant de la fermeture du chemin d'accès à son fonds, madame [X] a fait assigner monsieur et madame [F], par exploit du 1er février 2017, devant le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence.

Le 10 octobre 2014, une expertise judiciaire a été ordonnée ; monsieur [V] a déposé le rapport de ses opérations le 26 octobre 2016.

Le tribunal, par jugement du 27 novembre 2017, a notamment :

- dit que le chemin s'embranchant depuis la route nationale 7, traversant les parcelles cadastrées BH [Cadastre 11] et [Cadastre 10], propriété des époux [F], puis la parcelle BH [Cadastre 2], propriété de madame [X], constitue un chemin d'exploitation au sens des articles L 162-1 et suivants du code rural

- condamné solidairement monsieur et madame [F] à rétablir le chemin dans son tracé initial, tel que figurant à l'annexe 2 du rapport d'expertise judiciaire de monsieur [V] en date du 26 octobre 2016 ainsi qu'à enlever tout obstacle à la libre circulation aux parcelles cadastrées BH [Cadastre 2] [Cadastre 1] [Cadastre 3] [Cadastre 4] et [Cadastre 5]

- débouté monsieur et madame [F] de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions

- débouté madame [X] de sa demande de dommages-intérêts

- condamné solidairement monsieur et madame [F] à verser à madame [X] la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- rejeté le surplus de toutes les demandes des parties plus amples ou contraires

- condamné solidairement monsieur et madame [F] aux entiers dépens y compris les frais d'expertise judiciaire, et non compris les frais de constat d'huissier en date des 27 août 2014 et 2 octobre 2012.

Monsieur [B] [F] et madame [I] [I] épouse [F] ont régulièrement relevé appel le 19 décembre 2017 de ce jugement en vue de sa réformation.

Ils demandent à la cour, selon conclusions déposées le 28 mai 2019 par RPVA, de :

- infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions

A titre principal,

constater que madame [X] n'a pas appelé à la procédure l'ensemble des propriétaires riverains du chemin sur lequel elle revendique un passage

En conséquence

la déclarer irrecevable en toutes ses demandes, fins et conclusions

Subsidiairement,

constater l'absence d'existence d'un chemin d'exploitation

En conséquence

infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions

débouter madame [X] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions

Subsidiairement encore,

constater que le fonds de madame [X] n'est pas enclavé

En conséquence

débouter madame [X] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions

A titre encore plus subsidiaire, si par extraordinaire la cour de céans devait considérer que le fonds de madame [X] est enclavé,

dire et juger qu'il y a lieu d'appliquer la solution A préconisée par monsieur [V] dans son rapport d'expertise et décrite en page 28 dudit rapport, illustrée en annexe 3, s'agissant du trajet le plus court puisqu'il ne traverse aucune autre propriété que la propriété [X]

A titre infiniment plus subsidiaire, si par encore plus extraordinaire, la cour de céans devait non seulement considérer que le fonds de madame [X] est enclavé mais également qu'il y aurait lieu d'appliquer la solution B décrite en page 29 du rapport de l'expert,

dire et juger en ce cas que les travaux d'aménagement de cette solution seraient à la charge de madame [X]

condamner madame [X] à verser à monsieur et madame [F] une indemnisation qui ne saurait être inférieure à la somme de 30.000 euros

En tout état de cause,

débouter madame [X] de ses demandes en condamnation et fixation d'une astreinte

la débouter de sa demande en dommages et intérêts totalement infondée

recevoir les époux [F] en leur demande reconventionnelle

condamner madame [X] à leur verser une somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts

condamner madame [X] à leur verser la somme de 5000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

la condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel y compris les frais de constats d'huissiers.

Formant appel incident, madame [X] sollicite de voir, selon conclusions déposées par RPVA le 31 mai 2019 :

Ordonner le rabat de l'ordonnance de clôture et prendre en compte des conclusions récapitulatives et responsives des concluants au visa de l'article 16 du code de procédure civile

déclarer irrecevable et infondée la demande d'irrecevabilité formée par les époux [F] au titre de leurs conclusions du 28 mai 2019

A défaut, condamner solidairement les époux [F] au visa de l'article 123 du code de procédure civile à la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts

Au visa des articles L 162-1 et suivants du code rural et des articles 682 et suivants du code civil

A titre principal

dire et juger que le chemin s'embranchant depuis la route nationale 7, traversant la parcelle cadastrée section BH [Cadastre 11], BH [Cadastre 10] (fonds [U]) puis la parcelle cadastrée section BH [Cadastre 2] (propriété [X]), constitue un chemin d'exploitation au sens de l'article L 162-1 du code rural

dès lors, condamner sous astreinte et solidairement madame [I] [I] épouse [F] ainsi que monsieur [B] [F] à rétablir le chemin dans son tracé initial tel que figurant à l'annexe 2 du rapport d'expertise de monsieur [V], ainsi qu'à enlever tout obstacle à la libre circulation aux parcelles cadastrées section BH [Cadastre 2], [Cadastre 1], [Cadastre 3], [Cadastre 4] et [Cadastre 5]

dès lors, confirmer le jugement entrepris sur ces points

condamner monsieur [B] [F] et son épouse, solidairement, sous astreinte de 300 euros par jour de retard, et par infraction constatée à compter de la signification de l'arrêt à intervenir

A titre subsidiaire

si la cour ne retenait pas la qualification de chemin d'exploitation

dire et juger que les parcelles cadastrées section BH [Cadastre 2], [Cadastre 1], [Cadastre 3], [Cadastre 4] et [Cadastre 5] sont enclavées

dès lors, prononcer leur désenclavement par les parcelles cadastrées section BH [Cadastre 11] et [Cadastre 10] conformément à la solution B du rapport d'expertise de monsieur [V] et de son annexe 3

dire et juger que les frais de rétablissement du chemin dans la partie disparue seront à la charge des époux [F]

en tout état de cause condamner solidairement les époux [F] à une somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement des dispositions de l'article 1382 du code civil

dès lors réformer le jugement sur ce point

les condamner aux entiers dépens, y compris les frais d'expertise judiciaire, ainsi qu'aux frais des constats d'huissiers des 27 août 2014 et 2 octobre 2012

outre la somme de 4000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

C'est en l'état que l'instruction a été clôturée par ordonnance du 4 juin 2019.

Le 6 juin 2019, monsieur et madame [F] ont déposé et notifié des conclusions récapitulatives d'appelants N°2.

Le 7 juin 2019, madame [X] a sollicité le rejet des écritures du 6 juin 2019, postérieures à la clôture.

Le 12 juin 2019, monsieur et madame [F] ont sollicité le rabat de l'ordonnance de clôture.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la clôture de la procédure et la recevabilité des conclusions

L'article 783 du code de procédure civile dispose que : Après l'ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office. Sont cependant recevables les demandes en intervention volontaire, les conclusions relatives aux loyers, arrérages, intérêts et autres accessoires échus et aux débours faits jusqu'à l'ouverture des débats, si leur décompte ne peut faire l'objet d'aucune contestation sérieuse, ainsi que les demandes de révocation de l'ordonnance de clôture. Sont également recevables les conclusions qui tendent à la reprise de l'instance en l'état où celle-ci se trouvait au moment de son interruption.

Aux termes de l'article 784 du code de procédure civile, l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue ; la constitution d'avocat postérieurement à la clôture ne constitue pas, en soi, une cause de révocation...L'ordonnance de clôture peut être révoquée, d'office ou à la demande des parties, soit par ordonnance motivée du juge de la mise en état, soit, après l'ouverture des débats, par décision du tribunal.

En l'espèce, les appelants ont conclu le 28 mai 2019, veille du week-end de l'Ascension et trois jours avant la clôture prévue depuis le 1er mars 2019 à la date du 4 juin 2019, en soulevant l'irrecevabilité des prétentions adverses, plus de 11 mois après les écritures d'intimée.

L'intimée a légitimement répliqué le 31 mai 2019.

Les nouvelles écritures de monsieur et madame [F] déposées et notifiées le 6 juin 2019, soit deux jours après l'ordonnance de clôture, sont tardives et par suite irrecevables, au regard de l'article 783 du code de procédure civile, en l'absence dans ce contexte, de toute cause grave de nature à entraîner la révocation de la clôture.

Il sera donc statué au vu des conclusions d'appelants déposées et notifiées le 28 mai 2019, ainsi que des conclusions d'intimée déposées et notifiées le 31 mai 2019.

Sur la qualification de chemin d'exploitation

En vertu de l'article L 162-1 du code rural et de la pêche maritime, les chemins et sentiers d'exploitation sont ceux qui servent exclusivement à la communication entre divers fonds, ou à leur exploitation. Ils sont, en l'absence de titre, présumés appartenir aux propriétaires riverains, chacun en droit soi, mais l'usage en est commun à tous les intéressés. L'usage de ces chemins peut être interdit au public.

Ces dispositions consacrent le droit de propriété des riverains, le bénéfice de la présomption étant limité aux seuls propriétaires riverains pour la partie qui borde ou traverse leurs fonds.

En l'espèce, les époux [F] soulèvent l'irrecevabilité de la demande tendant à la qualification du chemin litigieux en chemin d'exploitation, au motif que madame [X] n'a pas attrait à la procédure tous les propriétaires riverains.

L'irrecevabilité soulevée pour ce motif par les époux [F] est parfaitement recevable, au regard de l'article 123 du code de procédure civile qui prévoit que les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, sauf la possibilité pour le juge de condamner à des dommages-intérêts ceux qui se seraient abstenus, dans une intention dilatoire, de les soulever plus tôt.

De plus, il n'est pas établi que les époux [F] auraient attendu abusivement dans une intention dilatoire de soulever cette irrecevabilité ; ils soulignaient d'ores et déjà dans leurs premières conclusions d'appelants du 19 mars 2018, en préalable de la discussion juridique, (page 5) que madame [X] n'avait pas attrait à la procédure les riverains ; par suite, il ne saurait être fait droit à la demande de dommages-intérêts présentée par madame [X] au titre de l'article 123 du code de procédure civile.

Cependant, aucune disposition n'oblige celui qui veut faire reconnaître un chemin d'exploitation à attraire l'ensemble des riverains dudit chemin.

La demande de madame [X] tendant à voir reconnaître la qualification de chemin d'exploitation est donc recevable.

Sur le fond, l'expert judiciaire mentionne que depuis une date postérieure à 1954 et antérieure à 1967 la propriété de monsieur [X] était desservie par un chemin traversant la propriété [F] dans le sens Nord-Sud et aboutissant à la propriété [X]. En 1988, ce chemin a été modifié par une convention sous-seing privée à laquelle l'auteur de monsieur [X] n'est pas intervenu ; l'expert fonde ses affirmations sur le fait que le chemin est représenté sur la carte IGN et sur le plan de bornage de monsieur [J] réalisé en 1995 ; il ajoute que le chemin litigieux est issu d'une modification de l'assiette d'un chemin ayant été créé dans les années 60 et que ce chemin desservait plusieurs propriétés et aboutissait à un fonds terminus : la propriété [X] ; il en déduit que ce chemin avait les caractéristiques d'un chemin d'exploitation.

Néanmoins, c'est à bon droit que monsieur et madame [F] concluent à l'inexistence d'un chemin avant 1988 ; à cet égard, l'expert judiciaire, en page 12 de son rapport, lorsqu'il procède à l'analyse des pièces fournies par les parties indique lui-même que les photos IGN de 1980 et 1984 présentent une mauvaise qualité ne lui permettant pas de distinguer le chemin partant de la parcelle BH [Cadastre 2].

De plus, ni madame [X], ni ses auteurs ne sont riverains du chemin créé en 1988 ; le chemin n'a jamais desservi la parcelle BH [Cadastre 2] de madame [X] ; les limites n'étaient pas matérialisées à cet endroit puisque les époux [X] ont demandé en 2012 à monsieur [J] de réimplanter les limites; ce qui a été fait le 11 décembre 2012.

Ils exposent à juste titre que si le chemin avait bien desservi la parcelle BH [Cadastre 2], soit les auteurs de madame [X] (les consorts [B]) auraient demandé à faire partie de la convention de servitude et à participer aux frais d'entretien du chemin sur la portion empruntée, soit les autres propriétaires auraient sollicité qu'ils interviennent dans le cadre de la convention passée.

Cette absence de riveraineté ressort également du constat d'huissier daté du 27 mars 2017 à la requête des époux [F] ; l'huissier indique : «  nous constatons également que le chemin, au niveau du chêne planté que la parcelle de nos requérants se situe à une distance d'environ 15 m de l'angle de la parcelle cadastrée BH [Cadastre 2] appartenant à madame [X] et matérialisé par un piquet sur lequel une corde délimitant la parcelle a été installée. » ; ce qui se trouve corroboré par plusieurs photographies annexées au constat ; un précédent constat dressé le 12 novembre 2013, relevait d'ailleurs qu'à cet endroit la propriété [F] est « travaillée » (page 4).

Par conséquent, la qualification de chemin d'exploitation ne peut être retenue, contrairement à ce qui a été jugé en première instance.

Il s'ensuit que les demandes de rétablissement du chemin et d'enlèvement d'obstacles sous astreinte présentées par madame [X] ne sont pas fondées.

Le jugement sera réformé de ce chef.

Sur la demande subsidiaire de désenclavement

Subsidiairement, madame [X] demande à la cour de prononcer le désenclavement de sa propriété par le fonds [F] (parcelles [Cadastre 10]-[Cadastre 11]), aux frais de ces derniers.

Au préalable, les époux [F] soutiennent que madame [X] n'a pas attrait à la procédure tous les propriétaires concernés.

L'irrecevabilité soulevée pour ce motif par les époux [F] est parfaitement recevable, au regard de l'article 123 du code de procédure civile qui prévoit que les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, sauf la possibilité pour le juge de condamner à des dommages-intérêts ceux qui se seraient abstenus, dans une intention dilatoire, de les soulever plus tôt.

Madame [X] ne saurait solliciter la condamnation des appelants à lui verser des dommages-intérêts, pour abstention dilatoire ; en effet, il n'est pas établi que les époux [F] auraient attendu abusivement dans une intention dilatoire de soulever cette irrecevabilité ; ainsi que relevé précédemment, ils avaient d'ores et déjà mis en exergue dans leurs premières conclusions, l'absence d'appel en cause à la procédure de l'ensemble des riverains.

En outre, la fin de non-recevoir soulevée par les époux [F] doit être accueillie favorablement ; en effet, il est de droit que tous les propriétaires concernés doivent être appelés à la procédure en désenclavement ; or tel n'est pas le cas, ainsi que le relève l'expert judiciaire lui-même en page 19 de son rapport ; il indique que le chemin revendiqué par madame [X] débute sur la parcelle d'un propriétaire qui n'est pas dans la cause ; il n'a par ailleurs étudié aucun autre tracé que celui passant par le fonds [F], en l'absence de toute mise en cause, alors que la propriété [X] est bordée par d'autres parcelles que celles de monsieur et madame [F].

Par suite, l'action en désenclavement diligentée à titre subsidiaire par madame [X] et sa demande subséquente relative aux frais de désenclavement sont irrecevables.

Sur la demande de dommages-intérêts de madame [X]

Madame [X] demande à la cour de condamner les appelants au paiement de 15 000 euros sur le fondement de l'article 1382 du code civil.

Le premier juge a procédé à une analyse détaillée et circonstanciée des éléments de fait et de droit débattus et développé des motifs pertinents qu'il y a lieu d'adopter pour confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de dommages-intérêts.

Sur la demande reconventionnelle de dommages-intérêts

Monsieur et madame [F] reprochent à madame [X] sa volonté de leur causer une gêne dans la jouissance normale de leur fonds ; ils sollicitent à cet effet la somme de 5 000 euros de dommages-intérêts, faisant valoir qu'ils souhaitent procéder sur leurs parcelles à des plantations et qu'ils ont effectué à cette fin les labours nécessaires.

Rien n'établit cependant la volonté de madame [X] de leur nuire, la mauvaise appréciation de ses droits ne revêtant aucun caractère fautif ; au demeurant, les intéressés ont labouré leur fonds ainsi qu'ils le mentionnent et ainsi que cela ressort d'une photographie insérée au rapport d'expertise judiciaire ; ils ne démontrent pas avoir été privés ensuite de la possibilité d'effectuer des plantations sur les terres labourées.

La demande est infondée.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Aucune considération d'équité ne justifie l'octroi d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au profit des parties tant en première instance qu'en appel, la présente instance résultant d'une mésentente plus ancienne entre voisins.

Succombant en cause d'appel, madame [X] doit être condamnée aux dépens de première instance et d'appel y compris les frais de constats d'huissiers datés des 12 novembre 2013 et 27 mars 2017 et, les frais d'expertise judiciaire.

Le jugement sera réformé de ces chefs.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Vu l'ordonnance de clôture de la procédure du 4 juin 2019,

Rejette la demande de révocation de ladite ordonnance et déclare irrecevables les conclusions récapitulatives d'appelants numéro 2 déposées et notifiées le 6 juin 2019,

Réforme le jugement du tribunal de grande instance d'Aix en Provence en date du 27 novembre 2017, sauf en ce qu'il a débouté madame [T] [X] de sa demande en paiement de la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article 1382 du code civil,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que la fin de non-recevoir soulevée par monsieur et madame [F] au titre de la demande tendant à la qualification du chemin litigieux en chemin d'exploitation est recevable,

Rejette la demande de dommages-intérêts de ce chef formée par madame [T] [X] et fondée sur l'article 123 du code de procédure civile,

Dit que madame [T] [X] est recevable en sa demande tendant à voir reconnaître la qualification de chemin d'exploitation,

Rejette les demandes de madame [T] [X] tendant à :

- dire et juger que le chemin s'embranchant depuis la route nationale 7, traversant la parcelle cadastrée section BH [Cadastre 11], BH [Cadastre 10] (fonds [U]) puis la parcelle cadastrée section BH [Cadastre 2] (propriété [X]), constitue un chemin d'exploitation au sens de l'article L 162-1 du code rural,

- condamner sous astreinte et solidairement madame [I] [I] épouse [F] ainsi que monsieur [B] [F] à rétablir le chemin dans son tracé initial tel que figurant à l'annexe 2 du rapport d'expertise de monsieur [V], ainsi qu'à enlever tout obstacle à la libre circulation aux parcelles cadastrées section BH [Cadastre 2], [Cadastre 1], [Cadastre 3], [Cadastre 4] et [Cadastre 5],

- condamner solidairement sous astreinte monsieur [B] [F] et madame [I] [I] épouse [F] pour toute infraction constatée,

Dit que la fin de non-recevoir soulevée par monsieur et madame [F] au titre de la demande subsidiaire en désenclavement est recevable,

Rejette la demande de dommages-intérêts de ce chef formée par madame [T] [X] et fondée sur l'article 123 du code de procédure civile,

Dit madame [T] [X] irrecevable en sa demande subsidiaire de désenclavement, et en sa demande subséquente relative aux frais de désenclavement,

Déboute monsieur et madame [F] de leur demande en paiement de la somme de 5 000 euros de dommages-intérêts,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,

Condamne madame [T] [X] aux dépens de première instance et d'appel y compris les frais de constats d'huissiers datés des 12 novembre 2013 et 27 mars 2017 et, les frais d'expertise judiciaire,

Dit que les dépens d'appel seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du même code.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 17/22564
Date de la décision : 10/10/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 4A, arrêt n°17/22564 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-10-10;17.22564 ?
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