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26/09/2019 | FRANCE | N°17/20951

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 26 septembre 2019, 17/20951


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 26 SEPTEMBRE 2019

LauB



N°2019/ 520













Rôle N° RG 17/20951 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BBQKD







SCI STEFAN-ARNAUD-LUC A BEAUVALLON





C/



[M] [O]

Association GOLF CLUB DE BEAUVALLON SPORTING GOLF CLUB BEAUVAL LON

SA FAIRWAYS DE BEAUVALLON

Société [H]



























Copie exécutoire délivrée le :

à :



MeCOUTURIER



Me GUEDJ



Me POTHET









Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de Draguignan en date du 09 Novembre 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 12/05601.





APPELANTE



SCI STEFAN-...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 26 SEPTEMBRE 2019

LauB

N°2019/ 520

Rôle N° RG 17/20951 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BBQKD

SCI STEFAN-ARNAUD-LUC A BEAUVALLON

C/

[M] [O]

Association GOLF CLUB DE BEAUVALLON SPORTING GOLF CLUB BEAUVAL LON

SA FAIRWAYS DE BEAUVALLON

Société [H]

Copie exécutoire délivrée le :

à :

MeCOUTURIER

Me GUEDJ

Me POTHET

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de Draguignan en date du 09 Novembre 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 12/05601.

APPELANTE

SCI STEFAN-ARNAUD-LUC A BEAUVALLON

sise [Adresse 1]

représentée et assistée par Me Christophe COUTURIER de la SCP COUTURIER ET ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant

INTIMES

Maître [M] [O]

demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assisté par Me François LOUSTAUNAU de la SCP LOUSTAUNAU FORNO, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

Association GOLF CLUB DE BEAUVALLON SPORTING GOLF CLUB BEAUVAL LON pris en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, sise [Adresse 3]

représentée et assistée par Me Alain-David POTHET de la SELAS CABINET POTHET, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, plaidant

SA FAIRWAYS DE BEAUVALLON pris en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, sise [Adresse 3]

représentée et assistée par Me Alain-David POTHET de la SELAS CABINET POTHET, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, plaidant

S.C.P. [H] notaires associes, pris en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualité au siège social sis [Adresse 2]

représentée par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assisté par Me François LOUSTAUNAU de la SCP LOUSTAUNAU FORNO, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785 et 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Juin 2019 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Laure BOURREL, Président, et M. Luc BRIAND, Conseiller, chargés du rapport.

Madame Laure BOURREL, Président, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Laure BOURREL, Président

Madame Hélène GIAMI, Conseiller

Monsieur Luc BRIAND, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Priscilla BOSIO.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 26 Septembre 2019.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 26 Septembre 2019.

Signé par Madame Laure BOURREL, Président et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

****

FAITS, PROCÉDURE, MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

LA SA Société immobilière de la station balnéaire de Beauvallon située sur la commune de [Localité 1] était propriétaire des parcelles cadastrées aujourd'hui section [Cadastre 1] et [Cadastre 2] sur lesquelles se trouvent des cours de tennis, deux des trous du parcours de golf existant sur les parcelles attenantes et une construction qui servait à l'accueil et au rangement du matériel de golf.

Par acte du 28 décembre 1983, la SA Société immobilière de la station balnéaire de Beauvallon a vendu à la SCI Gicapa les deux parcelles. Dans cet acte il était mentionné notamment :

-que l'acquéreur aurait la propriété du bien vendu à compter du jour de la vente en ce qui concernait uniquement la partie achevée sur le plan servant au tennis, l'autre partie à compter du jour où cette zone ne serait plus affectée à usage de golf et utilisée comme telle,

-que l'acquéreur s'oblige à ne rien faire qui puisse nuire à la pratique du golf notamment en respectant le tracé des parcours de golf de part et d'autre des d'autre des cours de tennis et également la construction à usage de club house et de hangar à chariot existant sur les lots acquis, cette construction étant une annexe du golfe et ne deviendra la propriété de l'acquéreur qu'au cas où le golf disparaîtrait.

Le dit plan était joint à l'acte.

Par acte du 18 octobre 1999 reçu par Maître [M] [O], notaire associé de la SCP [H], la SCI Gicapa a vendu les deux parcelles à la SCI Stéphan-Arnaud-Luc à Beauvallon (SALB) acte dans lequel ne sont reproduites que certaines des mentions de l'acte du 28 décembre 1983, et avec une modification de certains termes, ce qui fait litige entre les parties.

La SA Fairways de Beauvallon (SAFB) est propriétaire depuis le 25 juin 1992 des parcelles mitoyennes sur lesquelles elle exploite l'activité du golf et où se trouvent notamment les installations techniques, activité concédée le 27 avril 2006 à l'association Golf Club de Beauvallon Sporting Golf Club Beauvallon (l'association sportive).

Afin de procéder au réaménagement des locaux du golf situé sur la parcelle [Cadastre 1], la SAFB a déposé le 24 novembre 2011 une déclaration préalable de travaux auprès de la mairie de [Localité 1].

La SCI SALB s'est opposé à cette réalisation au motif qu'elle était propriétaire de la parcelle cadastrée section [Cadastre 1].

Par exploit du 27 juin 2012, la SCI SALB a assigné la SAFB afin qu'il soit dit qu'elle était seule propriétaire du bâtiment club house situé sur la parcelle cadastrée section [Cadastre 1], que la société SAFB n'avait qu'un simple droit de jouissance sur le bâtiment club house et sur les deux trous du parcours de golf, que ce droit de jouissance expirerait le 13 janvier 2014 soit au 30e anniversaire de la publication de l'acte de vente du 28 décembre 1983, lequel a été publié le 13 janvier 1984, qu'à cette date, la défenderesse serait occupante des lieux sans droit ni titre, que la défenderesse a effectué des travaux sur le bâtiment contre la volonté et en infraction aux droits du propriétaire, que soit ordonnée la remise en état des lieux, que la défenderesse soit condamnée à lui payer la somme de 50 000 € à titre de dommages et intérêts et 5000 € au titre de l'article 700 du CPC, et ce avec exécution provisoire.

La SAFB a appelé en garantie Maître [M] [O] et la SCP [H] par exploit du 1er juillet 2013.

Puis, par exploit du 6 juin 2014, la SCI SALB a assigné l'association sportive afin que soit ordonnée son expulsion.

Les trois instances ont été jointes.

Par conclusions récapitulatives du 15 novembre 2016, les 30 années étant expirées, la SCI SALB a modifié ses demandes en conséquence soit :

-dire qu'elle est seule propriétaire du bâtiment club house situé sur la parcelle cadastrée section [Cadastre 1],

-constater que l'association a bénéficié d'une tolérance et se trouve occupante sans droit ni titre des parcelles cadastrées section [Cadastre 1] et [Cadastre 2] dont elle est propriétaire,

-dire que la SAFB est occupante sans droit ni titre des mêmes parcelles,

-ordonné l'expulsion immédiate de la SAFB et de l'association sous astreinte de 1000 € par jour de retard à compter de la notification de la décision,

-ordonné la cessation immédiate de l'activité commerciale exercée dans le pro-shop par la SAFB sous astreinte de 1000 € par jour de retard à compter de la décision,

-constater que la SAFB s'est livrée à une activité commerciale sur les parcelles cadastrées section [Cadastre 3] et [Cadastre 2] sans autorisation et à son détriment,

-dire et juger que la SAFB a effectué des travaux sur le bâtiment club house contre la volonté et en infraction aux droits du propriétaire,

-ordonner la remise en état des lieux aux frais exclusifs de la SAFB sous astreinte de 1000€ par jour de retard à compter de la décision à intervenir,

-condamné la SAFB au paiement de 100 000 € à titre de dommages-intérêts, 6900 € à titre de dommages-intérêts en réparation de la coupe d'arbres sans autorisation,

-condamné la SAFB et l'association à lui payer la somme de 1 158 810 € à titre d'indemnité d'occupation depuis le 31 décembre 1985, et 7000 € au titre de l'article 700 du CPC et ce avec exécution provisoire.

La SAFB et l'association ont conclu au débouté de la SCI SALB, et reconventionnellement, elles ont sollicité la somme de 50 000 € à titre de dommages et intérêts et celle de 10 000 € au titre de l'article 700 du CPC. À titre subsidiaire, elles ont sollicité la désignation d'un expert aux fins de chiffrage du préjudice subi et la condamnation de la SCP de notaires au paiement de la somme de 50 000 € à titre de provision.

Maître [M] [O] et la SCP [H] ont conclu au débouté des demandes formées contre eux, et ont sollicité la somme de 4000 € au titre de l'article 700 du CPC.

Au motif que l'activité de golf n'avait jamais cessé, que la société Gicapa n'était jamais devenue propriétaire du club house, que dès lors elle n'avait pu transmettre à la SCI SALB des droits qu'elle ne détenait pas, que la SCI n'est pas propriétaire du bâtiment club house situé sur la parcelle cadastrée section [Cadastre 1], par jugement du 9 novembre 2017, le tribunal de grande instance de Draguignan a :

-débouté la SCI SALB de ses demandes tendant à'

-condamné la SAFB à payer à la SCI SALB la somme de 6900 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par la coupe d'arbres sur les parcelles dont elle est propriétaire sans son autorisation,

-déclaré sans objet le recours en garantie formé par la SAFB et l'association contre la SCP [H] et Maître [M] [O],

-rejeté les demandes formées par la SAFB et l'association tendant à l'octroi de dommages-intérêts à titre provisionnel et d'organisation d'une mesure d'expertise,

-débouté la SAFB et l'association de leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,

-dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du CPC,

-dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire de la décision,

-rejeté tout autre demande.

La SCI SALB a relevé appel de cette décision par déclaration du 21 novembre 2017.

Par conclusions du 20 mai 2019, qui sont tenues pour entièrement reprises, la SCI SALB demande à la cour de :

« Vu les articles 1134 et 1165 anciens du Code civil,

Vu l'arrêt rendu par la troisième chambre civile de la Cour de Cassation en date du 31 octobre 2012,

Vu l'arrêt rendu par la cour d'appel d'Aix-en-Provence en date du 23 mai 1991,

Vu le jugement rendu le 9 novembre 2017 par le tribunal de grande instance de Draguignan,

Déclarer recevables les demandes de la SCI SALB.

Réformer partiellement le jugement rendu le 9 novembre 2017 par le tribunal de grande instance de Draguignan.

Donner acte à la SCI SALB qu'elle est seule propriétaire du bâtiment sis sur sa parcelle cadastrée [Cadastre 1], [Cadastre 4], sise à [Localité 2], sur la commune de [Localité 1].

Constater que l'association sportive Golf Club de Beauvallon se trouve occupante sans droit ni titre des parcelles [Cadastre 1] et [Cadastre 2] appartenant à la SALB depuis le 31 décembre 1985.

Constater que la SAFB est occupante sans droit ni titre des parcelles [Cadastre 1] et [Cadastre 2] appartenant à la SALB depuis toujours.

Ordonner l'expulsion immédiate de la SAFB des parcelles [Cadastre 1] et [Cadastre 2], sous astreinte de 1000 € par jour de retard à compter de la notification de la décision à venir.

Ordonner l'expulsion immédiate de l'association sportive Golf Club de Beauvallon des parcelles [Cadastre 1] et [Cadastre 2], sous astreinte de 1000 € par jour de retard à compter de la notification de la décision à venir.

Ordonner la cessation immédiate de l'activité commerciale exercée dans le pro-shop par la SAFB, ce sous astreinte du paiement de la somme de 1000 € par jour de retard à compter de la décision à venir.

Vu l'article 1382 du Code civil,

Confirmer partiellement le jugement rendu le 19 novembre 2017 par le tribunal de grande instance de Draguignan.

Condamner la SAFB au paiement de la somme de 6900 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi par la SCI SALB du fait de la coupe illégale de ses arbres.

Réformer partiellement le jugement rendu le 9 novembre 2017 par le tribunal de grande instance de Draguignan.

Constater que la SAFB, occupante sans droit ni titre, s'est livrée à une activité commerciale sur les parcelles [Cadastre 1] et [Cadastre 2] appartenant à la SALB, sans autorisation et au détriment de cette dernière.

Dire et juger que cette activité cause à la SALB un préjudice réel est certain.

Dire et juger que la SAFB a effectué des travaux sur le bâtiment d'accueil contre la volonté en infraction aux droits du propriétaire, la SCI SALB.

Ordonner la remise en état des lieux aux frais exclusifs de la SAFB, ce sous astreinte du paiement de la somme de 1000 € par jour de retard à compter de la décision à venir.

Condamner la SAFB au paiement de la somme de 100 000 € à titre de dommages et intérêts.

Condamner solidairement la SAFB et l'association Golf Club de Beauvallon au paiement de la somme de 1 158 810 € à la SCI SALB à titre d'indemnité d'occupation depuis le 31 décembre 1985, à parfaire au jour du prononcé de l'arrêt à venir.

Condamner solidairement la SAFB et l'association Golf Club de Beauvallon au paiement de la somme de 9000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamner solidairement la SAFB et l'association Golf Club de Beauvallon au paiement des entiers dépens, directement distraits au profit de la SCP Couturier & Associés sur ses offres de droit. »

Par conclusions du 5 mars 2019, qui sont tenues pour entièrement reprises, la SAFB et l'association Golf Club de Beauvallon Sporting Golf Club Beauvallon demandent à la cour de :

« Vu le jugement entrepris et rendu le 9 novembre 2017 par le tribunal de grande instance de Draguignan, RG n° 12/05601, minute n° 2017/429,

À titre principal,

Le confirmer en toutes ses dispositions, à l'exception de la condamnation sur la coupe d'arbres et des dommages et intérêts à la SCI Stéphan-Arnaud-Luc à Beauvalon.

En conséquence, débouter la SCI Stéphan-Arnaud-Luc à Beauvalon de ses demandes afférentes.

Condamner la SCI Stéphan-Arnaud-Luc à Beauvalon à payer à la SA Fairways de Beauvallon et à l'association Golf Club de Beauvallon Sporting Golf Club Beauvallon à chacune d'entre elles la somme de 50 000 € au titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, outre à chacune d'entre elles 10 000 € de frais irrépétibles sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

À titre subsidiaire, et si par extraordinaire la cour réformait la décision entreprise,

Recevoir dans le cadre de leur appel incident, la SA Fairways de Beauvallon et l'association Golf Club de Beauvallon Sporting Golf Club Beauvallon de leur action en relevé et garanti contre Maître [M] [O] et la SCP [H], notaires associés.

À titre infiniment subsidiaire et en l'état de l'appel en cause, et si par extraordinaire la juridiction de céans faisait droit en tout ou partie aux demandes formulées par la SCI Stéphan-Arnaud-Luc à Beauvalon du fait de l'erreur contenue dans l'acte de Maître [O],

Constater la faute de Maître [M] [O], notaire rédacteur de l'acte du 18 octobre 1999 par la modification du terme « jouissance » en lieu et place du terme « propriété » et en conséquence,

Condamner Maître [M] [O] et la SCP [H] à relever et garantir la SA Fairways de Beauvallon et l'association Golf Club de Beauvallon Sporting Golf Club Beauvallon de toutes condamnations qui pourraient être mises à sa charge, y compris les condamnations pécuniaires suite aux démolitions des ouvrages sollicités par la SCI Stéphan-Arnaud-Luc à Beauvalon.

Désigner tel expert qu'il plaira à la Cour aux fins de chiffrer exactement le préjudice subi par la SA Fairways de Beauvallon et l'association Golf Club de Beauvallon Sporting Golf Club Beauvallon.

Condamner au titre du préjudice subi Maître [M] [O] et la SCP [H] conjointement et solidairement à payer à la SA Fairways de Beauvallon et l'association Golf Club de Beauvallon Sporting Golf Club Beauvallon à titre provisionnel la somme de 50 000 € à titre de dommages et intérêts, à parfaire à dire d'expert.

Débouter Maître [M] [O] et la SCP [H] de toutes demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre de la SA Fairways de Beauvallon et l'association Golf Club de Beauvallon Sporting Golf Club Beauvallon.

Condamner tous succombants aux entiers dépens tant de première instance que d'appel qui comprendront la contribution à hauteur de 225 € et dire que la Selas Cabinet Pothet, avocat, pourra recouvrer directement ceux dont elle aurait fait l'avance sans avoir reçu provision conformément à l'article 699 du code de procédure civile. »

Par conclusions du 27 avril 2018, qui sont tenues pour entièrement reprises, Maître [M] [O] et la SCP [H] demandent à la cour de :

« Confirmer le jugement.

Débouter la SA Fairways de Beauvallon de ses demandes, fins et conclusions, de son appel en garantie, même à titre subsidiaire, de ses demandes directes formées à l'encontre des concluants.

Réformant le jugement,

La condamner, ou tout contestant ou tout succombant, au paiement de la somme de 4000 € par application de l'article 700 du CPC.

La condamner, ou tout contestant ou tout succombant, aux entiers dépens distraits au profit de la SCP Cohen Guedj Montero Daval-Guedj. »

L'instruction de l'affaire a été close le 21 mai 2019.

MOTIFS

Sur les droits des parties

L'article 1156 du Code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, et applicable aux actes soumis à l'appréciation de la cour, énonce qu'on doit dans les conventions rechercher quelle a été la commune intention des parties contractantes, plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes.

L'article 1161 du même code, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, ajoute que toutes les clauses des conventions s'interprètent les unes par les autres, en donnant à chacune le sens qui résulte de l'acte entier.

Dans la présente instance, la SA Société immobilière de la station balnéaire de Beauvallon était propriétaire des terrains sur lesquels est installé le golf de Beauvallon, sur la commune de [Localité 1].

Il résulte de l'arrêt du 23 mai 1991 de la cour d'appel de céans, que suivant convention du 16 avril 1974, la Société immobilière de la station balnéaire de Beauvalon (SISBB) avait laissé la jouissance pour une durée de 12 ans commençant à courir le 31 décembre 1985 à l'association sportive Sporting Golf Club de Sainte Maxime et Beauvallon. Aux termes de cet arrêt, le congé donné par la SISBB à l'association sportive le 15 décembre pour le 31 décembre 1985 avait été délivré à bon droit, et cette dernière a été déclarée occupante sans droit ni titre depuis cette date.

Antérieurement, par acte du 28 décembre 1983 établi par Maître [D] [W], notaire, avec le concours de Me [O] [T], notaire associé, la SISBB a vendu à la SCI Gicapa les lots [Cadastre 5], [Cadastre 6], [Cadastre 7], [Cadastre 8] et [Cadastre 9] du lotissement dénommé [Localité 2], soit les parcelles cadastrées section [Cadastre 10] à [Cadastre 11], qui seront postérieurement regroupées et numérotées [Cadastre 4] et [Cadastre 12], puis [Cadastre 1] et [Cadastre 2]. Cet acte précise que sur la parcelle [Cadastre 11] figure une petite construction édifiée depuis plus de 30 ans, et qu'aucune servitude ne grève l'immeuble vendu, alors qu'en page 5, il est écrit :

« D'autre part, la parcelle vendue étant concernée par les tennis existants et les parcours de golf (trou 6 et 7) ainsi que par la construction du club house dépendant du golf.' »

Ces deux trous deviendront ultérieurement les trous 1 et 2 du golf de Beauvallon.

Le paragraphe Propriété-Jouissance, page 7, est ainsi libellé :

« L 'acquéreur aura la propriété de l'immeuble vendu à compter d'aujourd'hui et il en aura la jouissance à partir de ce jour également par la prise de possession en ce qui concerne la partie hachurée sur le plan servant au tennis, l'autre partie à compter du jour où cette zone ne serait plus affectée à l'usage de golf et utilisée comme telle. »

Pages 9 et 10 au paragraphe Conditions Particulières, l'acquéreur s'est obligé notamment:

« 5°) de ne rien faire qui puisse nuire à la pratique du golf notamment en respectant le tracé des parties de golf de part et d'autre des courts de tennis et également la construction à usage de club house et de hangar chariot existant sur les lots acquis.

Cette construction étant une annexe du golf et ne deviendra la propriété de l'acquéreur qu'au cas où le golf disparaîtrait.

6°) de faire son affaire personnelle de l'adhésion au syndicat des copropriétaires du lotissement et d'en payer les charges et cotisations à dater de la signature du présent acte, sans pouvoir arguer de prise de jouissance incomplète compte tenu de la servitude du golf grevant les lots vendus. »

Cet acte ne mentionne nullement le bail consenti à l'association sportive Sporting Golf Club de Sainte Maxime et de Beauvallon, et a fortiori, cette association n'intervient pas à l'acte.

Par ailleurs, les parties ne contestent pas qu'il n'existe aucune servitude grevant les parcelles vendues, régulièrement établie par acte authentique et publiée au service de la publicité foncière, contrairement à ce qui est indiqué au 6°) du paragraphe Conditions Particulières de cet acte du 28 décembre 1983.

Ceci démontre que l'on ne doit pas s'arrêter aux termes utilisés qui l'ont été manifestement de façon erronée.

Le principe directeur édicté par cet acte et qui résulte du premier paragraphe de la page 7, est que l'acquéreur à la propriété de l'immeuble vendu à compter du jour de la signature de l'acte.

En ce qui concerne la partie du parcours de golf se trouvant sur les parcelles vendues, la volonté des parties clairement exprimées a été que l'acquéreur n'entrera en jouissance que lorsqu'elles ne seront plus utilisées pour le golf.

En ce qui concerne la construction qui se trouve sur les parcelles vendues, elle était utilisée à la date de cette vente comme club house et hangar à chariots par le golf, et depuis est devenue son bureau d'accueil et son pro-shop.

Eu égard d'une part au transfert de propriété à l'acquéreur de la totalité des parcelles vendues le jour de l'acte avec une entrée en jouissance de l'acquéreur différée en ce qui concerne les infrastructures liées à l'activité golfique au jour où celle-ci cesserait, la volonté des parties a été que l'acquéreur n'aura la jouissance de cette construction qu'en cas de disparition du golf.

Quelque soit les procédures qui ont émaillé les relations entre les auteurs des parties, il n'est pas contestable que le golf n'a jamais cessé de fonctionner, même si les entités utilisatrices, associations sportives ou autres, ont parfois exploité le golf sans droit ni titre.

Dans la mesure où la volonté des parties dans l'acte du 28 décembre 1983 a été de favoriser le golf sans précision des personnes ou des biens immeubles bénéficiant dans l'immédiat de ces dispositions, et sans mention de la convention liant la SISBB à l'association sportive, elles ont eu la volonté de constituer un droit d'usage au bénéfice des exploitants successifs du golf.

De ce fait, l'arrêt du 23 mai 1991 ayant déclaré que l'association sportive était occupante sans droit ni titre depuis le 31 décembre 1985 est sans emport dans la solution du présent litige.

Par acte authentique du 25 juin 1992 établi par Maître [E] [I], la SISBB a vendu à la SAFB (SA Fairways de Beauvallon) les dernières parcelles qu'elle détenait sur laquelle sont installés les locaux techniques du golf soit le club house et les vestiaires. Cet acte mentionne précisément que le parcours du golf traverse des terrains appartenant à divers propriétaires, et retranscrit les passages intéressants le golf contenu dans les divers actes de vente, dont entre autres, certains paragraphe l'acte du 28 décembre 1983 signé avec la SCI Gicapa.

Il résulte du courrier du 6 juin 1992 de la SAFB à Me [E] [I] que celui-ci a attiré l'attention de l'acquéreur sur l'incertitude juridique des droits de passage sur la propriété d'autrui existant sur l'emprise du golf.

Cet acte et ce courrier confirment l'analyse ci-dessus développée selon laquelle par l'acte du 28 décembre 1983 il y a eu transfert immédiat de propriété des parcelles vendues à la SCI Gicapa.

Surtout, la lecture de cet acte confirme que la société SAFB est dépourvue de droit réel sur les parcelles traversées par le golf, et ne détient qu'un droit d'usage.

Par acte authentique du 15 avril 1999 établi par Maître [M] [O], la SCI Gicapa a vendu les parcelles litigieuses cadastrées [Cadastre 4] et [Cadastre 12], aujourd'hui [Cadastre 1] et [Cadastre 2], à la SCI Stéphan-Arnaud-Luc à Beauvallon (SALB) en retranscrivant les Conditions Particulières contenues dans l'acte du 28 décembre 1983.

Toutefois, la transcription n'a pas été parfaite dans la mesure où la dernière phase du 5°) est ainsi reprise : « Cette construction étant une annexe du golf et ne deviendra la jouissance de l'acquéreur qu'au cas où le golf disparaîtrait. »

Maîtres [O] a donc substitué le mot jouissance au terme propriété. Il n'a en fait que traduit ce que le bon sens commande de comprendre de l'acte du 28 décembre 1983.

Enfin, ce n'est que par convention sous seing privé du 27 avril 2006, que la SAFB a consenti à l'association sportive Golf de Beauvallon l'utilisation des installations de golf en se disant propriétaire entre autres du parcours de 18 trous, ce qui est inexact.

En conséquence, la société SAFB et l'association sportive qui utilise les installations du golf de Beauvallon ont un droit d'usage sur la parcelle [Cadastre 13] sur laquelle se situent les trous numéro 1 et 2 du parcours de golf, ainsi que la construction dans laquelle sont installés le bureau d'accueil et le pro-shop.

Cependant, aux termes de l'article 625 du Code civil, les droits d'usage et d'habitation s'établissent et se perdent de la même manière que l'usufruit et l'article 619 du même code énonce que l'usufruit qui n'est pas accordé à des particuliers ne dure que 30 ans.

Il a été souligné ci-dessus que l'acte du 28 décembre 1983 ne désigne aucunement les bénéficiaires, personne physique ou personne morale, du droit d'usage créé. Ce droit d'usage n'a donc pas été accordé à un ou des particuliers.

Dès lors, s'appliquent les dispositions de l'article 619 ci-dessus rappelées : le droit d'usage s'est éteint 30 ans après la publication dudit acte du 28 décembre 1983, lequel a été publié à la conservation des hypothèques de [Localité 3] le 13 janvier 1984.

Le droit d'usage dont bénéficiaient la SAFB et l'association sportive a ainsi expiré le 13 janvier 2014.

En conséquence, la SAFB et l'association sportive sont occupantes sans droit ni titre depuis cette date.

Sur les demandes de la SCI SALB

Compte tenu de la solution adoptée par la cour, il sera ordonné l'expulsion de la SAFB et de l'association sportive, assortie d'une astreinte de 300 € par jour de retard passé le délai d'un mois à compter de la signification du présent arrêt.

En ce qui concerne l'indemnité d'occupation, celle-ci est due mais uniquement depuis le 13 janvier 2014, date de l'extinction du droit d'usage, et sera due, conformément à la demande de l'appelante, jusqu'à la date du présent arrêt.

Eu égard aux éléments produits, l'indemnité mensuelle d'occupation sera fixée à la somme mensuelle de 1800 €.

La demande de cessation de l'activité commerciale dans le pro-shop sous astreinte, est déjà englobée dans la demande d'expulsion sous astreinte. Il ne sera donc pas fait droit à cette demande.

En ce qui concerne les travaux effectués sans autorisation du propriétaire sur le bâtiment servant d'accueil et de pro-shop au golf, à défaut d'éléments concernant l'état dans lequel se trouvait cette construction à la date de la mise en 'uvre du droit d'usage, soit en 1983, ni de précisions sur l'état du bâtiment avant les travaux à l'origine du déclenchement du présent litige, il ne peut être ordonné la remise en état des lieux.

La SCI SALB sera déboutée de sa demande de remise en état sous astreinte.

En ce qui concerne l'abattage des arbres par la SAFB sur les parcelles objet du présent litige, il résulte du rapport de Monsieur [J] que celui-ci n'était pas justifié par l'état des végétaux. Pour sa part, la SAFB affirme mais échoue à démontrer que la sécurité des golfeurs nécessitait cette intervention.

Le préjudice ayant été évalué par Monsieur [J] à la somme de 6900 €, le jugement déféré qui a condamné la SAFB au paiement de cette somme sera confirmé.

Enfin, en ce qui concerne la demande d'indemnisation de 100 000 €, la SCI SALB ne démontre pas que l'usage commercial du pro-shop était contraire au droit d'usage particulièrement large consenti par l'acte du 28 décembre 1983, ni que cette exploitation commerciale a entraîné pour elle, en sa qualité de propriétaire, un préjudice financier ou fiscal. La SCI SALB sera déboutée de ce chef de demande.

Sur la demande de dommages et intérêts de la SAFB et de l'association sportive

Eu égard à la solution adoptée par la cour, la SAFB et l'association sportive ne peuvent soutenir que la SCI SALB a engagé cette procédure de façon abusive. Elles seront déboutées de cette demande d'indemnisation.

Sur l'appel en garantie dirigée à l'encontre de Maître [M] [O] et de la SCI [H]

Maître [M] [O] reconnaît qu'il a commis une faute en ne retranscrivant pas exactement dans l'acte du 15 avril 1999 les dispositions de l'acte du 28 décembre 1983.

Cependant, compte tenu de l'interprétation de l'acte du 28 décembre 1983 par la Cour, le préjudice subi par la SAFB et l'association sportive, soit leur expulsion et leur condamnation à paiement d'une indemnité d'occupation depuis le 13 janvier 2014, est la conséquence de l'extinction de leur droit d'usage, et est sans lien avec la faute commise par le notaire.

En conséquence, la SAFB et l'association sportive seront déboutées de leur appel en garantie dirigé à l'encontre de Maître [M] [O] et de la SCP de notaires, et donc de leur demande d'expertise pour évaluer leur préjudice.

Sur les autres demandes

L'équité commande de faire bénéficier la SCI SALB d'une part, et Me [M] [O] et la SCP [H] des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La SAFB et l'association sportive qui succombent, seront condamnées aux entiers dépens et seront déboutées de leur demande d'indemnisation au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la SA Fairways de Beauvallon à payer à la SCI Stéphan-Arnaud-Luc de Beauvallon la somme de 6900 € au titre de l'abattage des arbres,

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau,

Dit que la SCI Stéphan-Arnaud-Luc de Beauvallon est propriétaire des parcelles cadastrées section [Cadastre 1] et [Cadastre 2] situées sur la commune de [Localité 1], [Localité 2], y compris la construction située sur la parcelle [Cadastre 1],

Dit que le droit concédé par l'acte authentique du 28 décembre 1983 aux exploitants successifs du golf est un droit d'usage,

Dit que ce droit d'usage s'est éteint le 13 janvier 2014,

Dit que la SA Fairways de Beauvallon et l'association sportive Golf Club de Beauvallon Sporting Golf Club Beauvallon sont occupantes sans droit ni titre des parcelles cadastrée section [Cadastre 1] et [Cadastre 2], et des constructions y figurant, appartenant à la SCI Stéphan-Arnaud-Luc de Beauvallon,

Ordonne l'expulsion de la SA Fairways de Beauvallon et l'association sportive Golf Club de Beauvallon Sporting Golf Club Beauvallon sous astreinte de 300 € par jour de retard passé le délai de un mois après la notification du présent arrêt,

Condamne la SA Fairways de Beauvallon et l'association sportive Golf Club de Beauvallon Sporting Golf Club Beauvallon à payer à la SCI Stéphan-Arnaud-Luc de Beauvallon une indemnité mensuelle d'occupation de 1800 € du 14 janvier 2014 jusqu'à la date du présent arrêt,

Déboute la SCI Stéphan-Arnaud-Luc de Beauvallon de sa demande de remise en état des lieux,

Déboute la SA Fairways de Beauvallon et l'association sportive Golf Club de Beauvallon Sporting Golf Club Beauvallon de son appel en garantie dirigée à l'encontre de Maître [M] [O] et de la SCP [H],

Déboute la SA Fairways de Beauvallon et l'association sportive Golf Club de Beauvallon Sporting Golf Club Beauvallon de ses demandes de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Condamne la SA Fairways de Beauvallon et l'association sportive Golf Club de Beauvallon Sporting Golf Club Beauvallon à payer d'une part à la SCI Stéphan-Arnaud-Luc de Beauvallon la somme de 6000 €, et d'autre part, à Maître [M] [O] et de la SCP [H] la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute la SA Fairways de Beauvallon et l'association sportive Golf Club de Beauvallon Sporting Golf Club Beauvallon de sa demande d'indemnisation au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires,

Condamne la SA Fairways de Beauvallon et l'association sportive Golf Club de Beauvallon Sporting Golf Club Beauvallon aux entiers dépens, ceux d'appel pouvant être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 17/20951
Date de la décision : 26/09/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 4A, arrêt n°17/20951 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-09-26;17.20951 ?
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