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24/09/2019 | FRANCE | N°18/12908

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-11 op, 24 septembre 2019, 18/12908


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-11 OP



ORDONNANCE SUR CONTESTATION

D'HONORAIRES D'AVOCATS

DU 24 SEPTEMBRE 2019



N°2019 / 0306















Rôle N° RG 18/12908





N° Portalis DBVB-V-B7C-BC37S





[R] [F]





C/



SELARL D. [Y]



















Copie exécutoire délivrée





le :





à :





r>
- Me Didier LEICK



- Me Ollivier CARLES DE CAUDEMBERG



Décision déférée au Premier Président de la Cour d'Appel:



Décision fixant les honoraires de Me SELARL D. SALVIA, représentée par son Gérant en exercice, Maître Dominique SALVIA rendue le

16 Juillet 2018 par le Bâtonnier de l'ordre des avocats de NICE.





DEMA...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-11 OP

ORDONNANCE SUR CONTESTATION

D'HONORAIRES D'AVOCATS

DU 24 SEPTEMBRE 2019

N°2019 / 0306

Rôle N° RG 18/12908

N° Portalis DBVB-V-B7C-BC37S

[R] [F]

C/

SELARL D. [Y]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me Didier LEICK

- Me Ollivier CARLES DE CAUDEMBERG

Décision déférée au Premier Président de la Cour d'Appel:

Décision fixant les honoraires de Me SELARL D. SALVIA, représentée par son Gérant en exercice, Maître Dominique SALVIA rendue le

16 Juillet 2018 par le Bâtonnier de l'ordre des avocats de NICE.

DEMANDEUR

Monsieur [R] [F], demeurant Élisant domicile chez Maître [S] [L] - [Adresse 2]

comparant en personne, assisté de Me Didier LEICK, avocat au barreau de PARIS

DEFENDERESSE

SELARL D. [Y], représentée par son Gérant en exercice, Maître [O] [Y], domiciliée [Adresse 1]

comparante en personne, assistée de Me Ollivier CARLES DE CAUDEMBERG, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

DÉBATS ET DÉLIBÉRÉ

L'affaire a été débattue le 19 Juin 2019 en audience publique devant

Madame Catherine LEROI, Conseiller,

délégué par ordonnance du Premier Président .

Greffier lors des débats : Mme Christiane GAYE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 Septembre 2019.

ORDONNANCE

Contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 24 Septembre 2019

Signée par Madame Catherine LEROI, Conseiller et Mme Christiane GAYE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Par décision en date du 16 juillet 2018 , le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Nice a fixé les honoraires dus par M. [R] [F] à la SELARL D. [Y] à la somme de 887579,41 € TTC et a dit que M. [R] [F] devra payer cette somme à la SELARL D. [Y].

Par courrier recommandé expédié le 26 juillet 2018 et réceptionné le 30 juillet 2018 au greffe de la cour d'appel, M. [R] [F] a relevé appel de cette décision.

A l'audience du 19 juin 2019, M. [R] [F], se référant à ses conclusions déposées à l'audience et visées par le greffier, demande à la juridiction d'appel de :

- constater l'exécution de mauvaise foi par la SELARL D. [Y] des conventions d'honoraires signées,

- constater les conditions particulières de la saisine et de l'intervention de la SELARL D. [Y],

- constater la mauvaise foi de Me D.[Y] dans l'élaboration de sa facturation,

- constater l'inutilité des diligences accomplies au titre de la prise de connaissance des procédures pénales, de l'élaboration du projet de mémoire en défense de M. [F], des diligences accomplies relatives aux revues de presse,

- constater que l'unique acte de procédure effectué en 10 mois de mission est une demande de modification partielle du contrôle judiciaire de M. [F],

- constater l'absence de décompte précis des diligences alléguées,

- constater le caractère excessif de la somme de 887579,41 € relative à 10 mois de mission et du tarif horaire de 500 € HT,

- DEBOUTER la SELARL D. [Y] de sa demande de taxation d'honoraires à hauteur de 887579,41 €,

- FIXER le montant réel des honoraires au regard des seules et uniques prestations effectivement accomplies, justifiées et utiles,

- CONDAMNER la SELARL D. [Y] à lui verser la somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la SELARL D. [Y] aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Didier LEICK, avocat au barreau de Paris conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La SELARL D. [Y] sollicite l'allocation de ses écritures déposées à l'audience et visées par le greffier tendant à la confirmation de la décision déférée ainsi qu 'à la condamnation de M. [R] [F] à lui payer la somme de 887579,41 € à titre d'honoraires avec intérêts au taux légal à compter du jour où les factures furent émises et celle de 5000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il sera référé aux conclusions des parties pour l'exposé de leurs moyens.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Le présent recours sera déclaré recevable comme satisfaisant aux conditions prévues par l'article 176 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991.

Courant mai et juin 2016 , M. [R] [F] a saisi la SELARL D. [Y] de la défense de ses intérêts dans le cadre de plusieurs procédures pénales en cours, soit  :

à [Localité 3] :

- une procédure pénale faisant suite à la plainte déposée le 25 juin 2015 par Mme [I] [N] des chefs de dénonciation calomnieuse, faux et usage de fausse qualité à l'égard de M. [G], de complicité de dénonciation calomnieuse et de faux et usage de faux à l'encontre de M. [V] [U] et de Mme [X] [J], dans laquelle M. [R] [F] s'était constitué partie civile,

- une procédure pénale faisant suite à une plainte avec constitution de partie civile déposée le 31 mars 2016 par M. [F] à l'encontre de Mme [A] [D]

- dans une information judiciaire ouverte devant le Tribunal de Première Instance de Monaco pour faux en écritures et escroqueries, suite à une dénonciation le 9 janvier 2015 par Mme [D] au nom des sociétés Accent Delight International Ltd et Xitrans Finance Ltd à l'encontre de M. [F], et une plainte déposée le 22 janvier 2015 par Mme [B] [G] contre M. [F], pour escroqueries et complicité de blanchiment

à [Localité 4] :

- une procédure pénale faisant suite à une plainte avec constitution de partie civile déposée le 29 juillet 2015 par M. [R] [F] pour diffamation envers un particulier à l'encontre de Mme [D]

à [Localité 5] :

- une procédure pénale faisant suite à une plainte déposée le 9 avril 2015 par Mme [D] au nom de la société Accent Delight International Ltd à l'encontre de M. [R] [F] dans le cadre d'une information judiciaire ouverte pour vols, recels de vol et escroquerie au préjudice de Mme [C].

Des conventions d'honoraires ont été régularisées les 8 juin 2016 pour ces différentes procédures prévoyant une rémunération de la SELARL D. [Y] au taux horaire de 500 € HT.

La SELARL D. [Y] a émis six factures dont la première en date du 8 juillet 2016 d'un montant de 100505,09 € pour les prestations effectuées entre le 28 avril et le 30 juin 2018, a seule été réglée par M. [R] [F].

En revanche, M. [R] [F] conteste les honoraires facturés :

- le 15 septembre 2016, à hauteur de 71899,04 € pour les diligences accomplies entre le 1er juillet et le 31 août 2016,

- le 4 novembre 2016, à hauteur de 188122,60 € pour les diligences accomplies entre le 1er septembre et le 31 octobre 2016,

- le 20 janvier 2017, à hauteur de 232243,04 € pour les diligences accomplies entre le 1er novembre et le 31 décembre 2016,

- le 6 mars 2017, à hauteur de 241993,85 € pour les diligences accomplies entre le 1er janvier et le 28 février 2017,

- le 5 mai 2017, à hauteur de 153320,88 € pour les diligences accomplies entre le 1er mars et le 30 avril 2017.

M. [F] estime manifestement exagérée la durée de travail alléguée par la SELARL D. [Y], dans la mesure où Me [Y] connaissait déjà ses dossiers étant intervenu précédemment pour la défense des intérêts d'une dame [N], partie aux mêmes procédures, ainsi que l'utilité de ces diligences.

Toutefois, il n'appartient pas aux juges du fond de réduire les honoraires dus à l'avocat dès lors que le principe et le montant en ont été acceptés par le client après service rendu. A cet égard, ne peuvent constituer des honoraires librement acceptés après service rendu, que ceux qui l'ont été, au vu de factures répondant aux exigences de l'article L 441-3 du code de commerce ancien, applicable en la cause, devenu L 441-9 du même code.

Aux termes de ces dispositions, la facture doit mentionner :

- le nom des parties ainsi que leur adresse,

- la date de la vente ou de la prestation de service, la quantité, la dénomination précise, et le prix unitaire hors TVA des produits vendus et des services rendus ainsi que toute réduction de prix acquise à la date de la vente ou de la prestation de services et directement liée à cette opération de vente ou de prestation de services, à l'exclusion des escomptes non prévus sur la facture,

- la date à laquelle le règlement doit intervenir, les conditions d'escompte applicables en cas de paiement à une date antérieure à celle résultant de l'application des conditions générales de vente, le taux des pénalités exigibles le jour suivant la date de règlement inscrite sur la facture ainsi que le montant de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement due au créancier en cas de retard de paiement.

En l'occurrence, les factures en date des 15 septembre 2016, 4 novembre 2016, 20 janvier 2017 et 6 mars 2017, contestées par M. [R] [F] portent la mention apposée de sa main « Lu et approuvé bon pour accord » suivie de sa signature. Par ailleurs, le cabinet CHABRIER chargé de présenter les notes d'honoraires des différents avocats oeuvrant pour le compte de M. [F] indiquait par courriel en date du 13 décembre 2016 adressé au cabinet d'avocats [Y], faire son possible pour rattraper le retard pris dans le règlement des notes d'honoraires tandis que M. [F] n'émettait par la suite et jusqu'à la procédure de taxation , aucune contestation ni sur les prestations facturées ni sur le montant des notes d'honoraires présentées.

Force est de constater que les factures établies par la SELARL D. [Y] comportent, outre l'identité et l'adresse des parties, le détail et la date des diligences effectuées, le nombre d'heures de travail par type de prestations, ainsi que le taux de l'heure de travail conforme à la convention et le détail des frais exposés. Si le temps consacré à chaque diligence n'est pas mentionné comme l'indique l'appelant, il apparaît que leur nombre, très important, aurait rendu plus que fastidieux l'exploitation d'un document mentionnant la durée de travail de chacune d'elles, les factures éditées comportant déjà entre 18 et 54 pages alors qu'en revanche, la datation précise de chaque prestation permet au client d'en contrôler la réalité.

Par ailleurs, les factures étant payables comptant conformément aux termes des conventions d'honoraires, il ne saurait leur être reproché de ne pas mentionner les conditions d'une éventuelle escompte ainsi que les pénalités et indemnités de retard applicables.

Dans ces conditions, l'apposition par M. [R] [F] de la mention « Lu et approuvé bon pour accord » suivie de sa signature postérieurement à la réalisation des diligences visées sur chacune des factures concernées, établit l'acceptation desdites factures et ne permet plus leur remise en cause. Il sera précisé qu'une acceptation des honoraires ne nécessite pas que ceux-ci soient effectivement réglés par le client.

Les honoraires dus à la SELARL D. [Y] au titre des factures en date des 15 septembre 2016, 4 novembre 2016, 20 janvier 2017 et 6 mars 2017, seront donc fixés conformément à la facturation, soit à :

71899,04 € pour les diligences accomplies entre le 1er juillet et le 31 août 2016 selon facture en date du 15 septembre 2016,

188122,60 € pour les diligences accomplies entre le 1er septembre et le 31 octobre 2016, selon facture en date du 4 novembre 2016,

232243,04 € pour les diligences accomplies entre le 1er novembre et le 31 décembre 2016, selon facture en date du 20 janvier 2017,

et à 241993,85 € pour les diligences accomplies entre le 1er janvier et le 28 février 2017, selon facture en date du 6 mars 2017.

S'agissant de la facture n° 2017/03/05/12 en date du 5 mai 2017 d'un montant de 153320,88 € pour les diligences accomplies entre le 1er mars et le 30 avril 2017, il apparaît qu'elle porte sur :

- la lecture approfondie, l'analyse d'un point de vue factuel juridique et logique de 176 pages de cotes d'un dossier d'information pour escroqueries et complicité de blanchiment ouvert au TPI de Monaco à l'encontre de M. [F] 30 heures

- entretiens téléphoniques 12 heures

- l'élaboration d'un projet de mémoire dans l'affaire d'escroqueries et complicité de blanchiment 26 heures

- l'élaboration d'un mémoire en vue de l'audience devant la chambre du conseil de la cour d'appel de Monaco sur appel de l'ordonnance de rejet de la modification du contrôle judiciaire rendue par le juge d'instruction le 12 décembre 2016 46h30

- les prestations réalisées pour l'ensemble des dossiers entre le 1er mars et le 3 avril 2017 (audience du 2 mars 2017 à [Localité 3], lecture et analyse des revues de presse, échanges avec confrères, traitement de courriels, déplacement à [Localité 3] les 24 et 25 avril 2017, élaboration de courriers officiels 190h30

soit 305 heures X 500 € 152500,00 €

frais de cabinet (déplacements photocopies , impression... 820,88 €

TOTAL 153320,88 €

L'importance de la durée de travail facturée s'explique notamment par la nécessité d'un travail en équipe imposant de nombreux échanges avec les autres conseils de M. [F] et l'analyse des revues de presse maintenant critiquée comme étant une diligence inutile, a pourtant toujours été réalisée et facturée par le cabinet [Y] dès le début de son intervention, sans aucune critique de son client.

Toutefois, la facture litigieuse ne permet pas de connaître la nature du travail effectué pour l'élaboration du projet de mémoire aux intérêts de M. [F] dont la durée est fixée à 26 heures ; par ailleurs, la SELARL D. [Y] ne justifie par aucun relevé, du temps consacré aux appels téléphoniques alors que celui-ci est contesté par M. [R] [F] non plus que des frais exposés par le cabinet. Il y a lieu, en conséquence, au regard des justificatifs produits, de ne retenir qu'une durée totale de travail de 110 heures.

Le montant des honoraires de la SELARL D. [Y] faisant l'objet de la facture n° 2017/03/05/12 en date du 5 mai 2017 correspondait aux diligences accomplies entre le 1er mars et le 30 avril 2017 sera en conséquence fixé à la somme de 55000 € HT soit 66000 € TTC.

Les sommes allouées ne porteront intérêts au taux légal qu'à compter du 20 novembre 2017, date de saisine de la juridiction ordinale aux fins de fixation de ses honoraires par la SELARL D. [Y], à défaut de justification d'une mise en demeure antérieure dûment réceptionnée par M. [R] [F].

L'équité commande de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS, statuant publiquement, contradictoirement en matière de contestation d'honoraires d'avocat,

DECLARONS recevable le recours formé par M. [R] [F] à l'encontre de la décision du bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Nice en date du 16 juillet 2018  ;

CONFIRMONS cette décision en ce qu'elle a fixé les honoraires dus à la SELARL D. [Y] à :

- 71899,04 € pour les diligences accomplies entre le 1er juillet et le 31 août 2016 selon facture en date du 15 septembre 2016,

- 188122,60 € pour les diligences accomplies entre le 1er septembre et le 31 octobre 2016, selon facture en date du 4 novembre 2016,

- 232243,04 € pour les diligences accomplies entre le 1er novembre et le 31 décembre 2016, selon facture en date du 20 janvier 2017,

- 241993,85 € pour les diligences accomplies entre le 1er janvier et le 28 février 2017, selon facture en date du 6 mars 2017 ;

L'INFIRMONS pour le surplus et statuant à nouveau,

FIXONS les honoraires dus par M. [R] [F] à La SELARL D. [Y] au titre des diligences faisant l'objet de la facture n° 2017/03/05/12 en date du 5 mai 2017, accomplies entre le 1er mars et le 30 avril 2017 à la somme de 55000 € HT soit 66000 € TTC ;

DISONS que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 20 novembre 2017;

DISONS n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

DISONS que chaque partie supportera la charge des dépens par elle avancés;

REJETONS le surplus des demandes.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-11 op
Numéro d'arrêt : 18/12908
Date de la décision : 24/09/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 20, arrêt n°18/12908 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-09-24;18.12908 ?
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