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19/09/2019 | FRANCE | N°18/19409

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-3, 19 septembre 2019, 18/19409


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-3



ARRÊT AU FOND

DU 19 SEPTEMBRE 2019



N° 2019/345









N° RG 18/19409 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDOU6







Société SMABTP

SARL DETERMINANT FRANCE

SA SOLINJECTION





C/



[W] [X]

Société PACIFICA





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Isabelle FICI



Me Véron

ique DEMICHELIS



Me Romain CHERFILS





Décision déférée à la Cour :



Ordonnance du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 09 Novembre 2018 enregistrée au répertoire général sous le n° 18/03583.





APPELANTES



Société SMABTP, prise en sa qualité d'assureur de la SARL DETERMI...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-3

ARRÊT AU FOND

DU 19 SEPTEMBRE 2019

N° 2019/345

N° RG 18/19409 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDOU6

Société SMABTP

SARL DETERMINANT FRANCE

SA SOLINJECTION

C/

[W] [X]

Société PACIFICA

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Isabelle FICI

Me Véronique DEMICHELIS

Me Romain CHERFILS

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 09 Novembre 2018 enregistrée au répertoire général sous le n° 18/03583.

APPELANTES

Société SMABTP, prise en sa qualité d'assureur de la SARL DETERMINANT FRANCE et de la SA SOLINJECTION, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Isabelle FICI de la SELARL LIBERAS FICI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

plaidant par Me Frantz AZE de la SCP AZE BOZZI & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Emmanuelle DURAND de la SCP AZE BOZZI & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

SARL DETERMINANT FRANCE, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Véronique DEMICHELIS de la SCP DRUJON D'ASTROS & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

plaidant par Me Virginie POURTIER, avocat au barreau de PARIS

SA SOLINJECTION, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Véronique DEMICHELIS de la SCP DRUJON D'ASTROS & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

plaidant par Me Virginie POURTIER, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

Monsieur [W] [X], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Isabelle FICI de la SELARL LIBERAS FICI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

plaidant par Me Frédéric LIBESSART de la SELARL CABELLO ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOULON

Société PACIFICA, demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Romain CHERFILS de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

plaidant par Me Jacques LABROUSSE, avocat au barreau de TOULON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 12 Juin 2019 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Florence TANGUY, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Mme Marie-Brigitte FREMONT, Présidente

Mme Béatrice MARS, Conseiller

Mme Florence TANGUY, Conseiller rapporteur

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Jocelyne MOREL.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Septembre 2019.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Septembre 2019,

Signé par Mme Marie-Brigitte FREMONT, Présidente et Madame Jocelyne MOREL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Le 4 novembre 2011, le bien immobilier de M. [W] [X], sis à [Localité 1] et assuré par la compagnie Pacifica, a subi une inondation.

Les travaux de réfection des dommages ayant affecté le bien immobilier du fait du sinistre ont été pris en charge par l'assureur en garantie catastrophe naturelle, un arrêté de catastrophe naturelle ayant été pris le 18 novembre suivant.

La société Solinjection assurée auprès de la SMABTP a réalisé les travaux d'injection préconisés, sous la maîtrise d'oeuvre de la société Alliance BTP également assurée auprès de SMABTP et la reprise des fissures affectant les façades a été confiée à la société Alliance BTP.

La réception de ces travaux a été prononcée sans réserve le 16 octobre 2012.

Des désordres au niveau des murs, du sol, et du carrelage des façades étant réapparus à la suite des travaux, M. [X] a assigné les sociétés Pacifica et Solinjection en référé-expertise devant le tribunal de grande instance de Draguignan et il a été fait droit à sa demande par ordonnance du 8 octobre 2014 qui a désigné M. [J] en qualité d'expert et les opérations d'expertises ont été déclarées communes et opposables à la société Alliance BTP, devenue Déterminant, ainsi qu'à la compagnie SMABTP, par ordonnance du 19 octobre 2016.

Par ordonnance de référé du 23 mai 2018, la compagnie Pacifica été condamnée à verser à M. [X] la somme provisionnelle de 40 000 euros et l'examen de l'affaire a été renvoyé, par application de l'article 811 du code de procédure civile, devant le tribunal de grande instance de Draguignan qui, par jugement du 9 novembre 2018, a':

-condamné la compagnie Pacifica, la société Déterminant, la société Solinjection et la compagnie SMABTP, in solidum, à verser à M. [X] la somme de 191 832,82 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du présent jugement, au titre du coût de reprise des fondations, du plancher et des revêtements de façades';

-condamné la compagnie Pacifica, la société Déterminant, la société Solinjection et la compagnie SMABTP, in solidum, à verser à M. [X] la somme de 3 480 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du présent jugement, au titre de ses frais de conseil technique';

-condamné la compagnie Pacifica, la société Déterminant, la société Solinjection et la compagnie SMABTP, in solidum, à verser à M. [X] la somme de 2 500 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du présent jugement, au titre du coût de reprise de la cuisine intérieure ;

-condamné la compagnie Pacifica à verser à M. [X] la somme de 26 366,12 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du présent jugement, au titre des reprises des embellissements et des maçonneries d'élévation';

-dit que la somme de 40 000 euros allouée en référé à M. [X] devra être retranchée des sommes dues par la compagnie Pacifica';

-dit que la compagnie SMABTP est fondée à opposer aux sociétés Solinjection et Déterminant sa franchise contractuelle ;

-condamné la société Déterminant à verser à la compagnie Pacifica la somme de 3 912,19 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du présent jugement, au titre du coût de son intervention, qui s'est avérée inefficace ;

-condamné la société Solinjection à verser à la compagnie Pacifica la somme de 78 243,75 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du présent jugement, au titre du coût de son intervention, qui s'est avérée inefficace ;

-rejeté la demande tendant au bénéfice de l'exécution provisoire ;

-condamné la compagnie Pacifica, la société Déterminant, la société Solinjection et la compagnie SMABTP, in solidum, aux dépens, qui comprendront les frais d'expertise ;

-condamné la compagnie Pacifica, la société Déterminant, la société Solinjection et la compagnie SMABTP, in solidum, à verser à M. [X] la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné la société Déterminant et la société Solinjection, in solidum, à verser à la compagnie Pacifica la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

-rejeté le surplus des demandes des parties.

Par déclaration du 10 décembre 2018, les sociétés Déterminant et Solinjection ont interjeté appel de cette décision.

Par déclaration du 24 janvier 2019, la société Pacifica a également interjeté appel.

Les deux procédures ont été jointes par ordonnance du 9 mai 2019.

Par conclusions remises au greffe le 11 juin 2019, et auxquelles il y a lieu de se référer, les sociétés Déterminant et Solinjection demandent à la cour :

-vu les articles 1102 (ancien), 1106 (nouveau) et 1223 du code civil,

-vu les articles 1792 et suivants du code civil,

-vu l'article 700 du code de procédure civile,

-à titre principal, sur l'absence de responsabilité délictuelle de Solinjection et Déterminant au profit de la compagnie Pacifica,

-de dire et juger que Déterminant et Solinjection ont réalisé les travaux contractuellement prévus en contrepartie desquels ils ont été rémunérés,

-de dire et juger que les sommes perçues par Déterminant et Solinjection étaient dues,

-de dire et juger que l'efficacité des travaux est sans incidence sur l'obligation de payer lesdits travaux,

-de dire et juger que l'inefficacité des travaux contractuellement prévus entre M.[X] et Solinjection et Déterminant ne permettent pas de caractériser une faute délictuelle à l'encontre de la compagnie Pacifica,

-de dire et juger que Pacifica, qui a réglé l'indemnité d'assurance en application de son contrat, n'établit pas que le règlement de cette indemnité, correspondant au coût des travaux de reprise, est constitutif pour elle d'un préjudice,

-en conséquence,

-d'infirmer le jugement en ce qu'il a admis le principe d'une restitution des paiements réalisés en contrepartie de l'exécution des marchés de Solinjection et Déterminant,

-d'infirmer le jugement en ce qu'il a retenu une faute délictuelle de Solinjection et Déterminant à l'encontre de la compagnie Pacifica,

-d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamné Déterminant et Solinjection à restituer à Pacifica l'ensemble des paiements qu'elles ont respectivement reçus en exécution de leur marché,

-à titre infiniment subsidiaire, de dire et juger que Solinjection n'a perçu que 70 000 euros au titre de son marché et ne saurait être tenue à restitution d'une somme de 78 243 euros à l'encontre de la compagnie Pacifica,

-de limiter toute éventuelle condamnation à restitution aux sommes effectivement perçues par les entreprises,

-à titre également principal, sur l'absence de lien d'imputabilité des désordres aux entreprises Déterminant et Solinjection,

-de dire et juger que la seule circonstance que les travaux aient été inefficaces à remédier aux désordres est insuffisante à caractériser un lien d'imputabilité au sens de l'article 1792 du code

civil,

-de dire et juger que M. [X] ne rapporte pas la preuve de l'imputabilité des désordres à la réalisation des travaux par Solinjection et Déterminant,

-de dire et juger que l'expert judiciaire, qui fonde ses conclusions exclusivement sur des constats visuels et sur des hypothèses de son sapiteur, ne justifie pas techniquement de l'existence d'une imputabilité des désordres aux travaux réalisés par Solinjection et Déterminant,

-de débouter M. [X] de l'ensemble de ses demandes incidentes,

-en conséquence,

-d'infirmer le jugement en ce qu'il admet l'existence d'un lien d'imputabilité des désordres aux travaux réalisés par Solinjection et Déterminant,

-d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamné notamment Solinjection et Déterminant in solidum au paiement de 191 832,82 euros au titre des travaux de réparation,

-d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamné notamment Solinjection et Déterminant in solidum au paiement des frais de conseil technique de M. [X] (3 840 euros) et du coût de reprise de la cuisine intérieure (2 500 euros),

-à titre encore principal, sur le caractère excessif de la solution de reprise retenue,

-de dire et juger que les travaux réparatoires auxquels peuvent être tenus les constructeurs doivent se limiter à la stricte reprise des désordres imputables aux constructeurs,

-de dire et juger que les travaux de reprise retenus sont sans lien avec les travaux réalisés par

Solinjection et Déterminant à la suite du sinistre survenu le 4 novembre 2011,

-de dire et juger qu'il n'est pas établi que les travaux de reprise retenus par l'expert judiciaire soient efficaces pour remédier aux désordres dès lors que l'origine des désordres n'a techniquement pas été déterminée,

-d'infirmer le jugement en ce qu'il retient une solution réparatoire qui ne se limite pas à la stricte reprise des désordres imputables mais génère une plus-value pour le maître d'ouvrage,

-subsidiairement,

-de confirmer le jugement en ce qu'il retient le devis chiffré par Alliance BTP,

-à titre subsidiaire, sur les appels en garantie,

-de confirmer le jugement en ce qu'il retient la garantie de la SMABTP assureur de Déterminant et Solinjection au titre de leur responsabilité décennale,

-d'infirmer le jugement en ce qu'il a omis de statuer sur la demande de condamnation formée par Déterminant et Solinjection à l'encontre de la SMABTP à les garantir de toutes condamnations prononcées à leur encontre,

-d'infirmer le jugement en ce qu'il ne retient pas la garantie de la SMABTP au titre des condamnations de Déterminant et Solinjection à payer, sur le fondement délictuel, le coût de leurs marchés respectifs à Pacifica,

-de condamner la SMABTP à garantir Déterminant et Solinjection de toutes les condamnations éventuellement prononcées à leur encontre,

-de confirmer le jugement en ce qu'il met à la charge de Pacifica le coût de reprise des embellissements et des maçonneries d'élévation,

-en tout état de cause,

-d'infirmer le jugement en ce qu'il condamne in solidum notamment Déterminant et Solinjection au titre de l'article 700 à payer 5 000 euros à l'égard de M. [X] outre les dépens comprenant les frais d'expertise, et 4 000 euros à l'égard de Pacifica,

-de débouter les parties intimées et/ou appelants à titre incident de l'ensemble de leur demande et appel incident à l'encontre de Solinjection et Déterminant,

-de prendre acte du fait que Pacifica ne forme aucune demande à l'égard de Déterminant et Solinjection,

-de condamner M. [X] et tous succombants à payer 5 000 euros à chacune des concluantes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elles s'opposent à la demande de restitution des sommes qu'elles ont perçues au titre des travaux de réparation en faisant valoir que ces sommes sont dues en vertu de contrats qui ont été exécutés et que l'inefficacité des travaux ne constitue pas une faute délictuelle à l'égard de la société Pacifica qui a financé ces travaux.

Elles soutiennent que les désordres ne sont pas imputables aux travaux de reprise qu'elles ont effectués mais à la construction d'origine et que la demande fondée sur l'article 1792 du code civil est infondée.

Elles prétendent que la solution réparatoire préconisée ne se limite pas à la stricte reprise des désordres imputables mais génère une plus-value pour le maître d'ouvrage, et qu'ils n'ont pas à supporter le coût de tels travaux.

Elles contestent le montant des demandes formées par M. [X] au titre des travaux.

Elles sollicitent la garantie de leur assureur, la SMABTP.

Par conclusions remises au greffe le 7 juin 2019, et auxquelles il y a lieu de se référer, la société Pacifica demande à la cour :

-vu l'article L.125-1 du code des assurances,

-vu l'article 1792 du code civil,

-vu l'article 1134 ancien du code civil et 1382 ancien,

-de dire et juger mal fondées les demandes formulées par M. [X] à l'encontre de Pacifica et de réformer le jugement,

-de dire et juger prescrites les demandes relatives à la cuisine extérieure,

-de dire et juger mal fondées les demandes de prise en charge de l'expert personnel de M.[X],

-de les rejeter intégralement,

-de dire et juger qu'aucune faute contractuelle ou extra-contractuelle n'est imputable à Pacifica,

-de rejeter tous les appels en garantie en ce qu'ils sont dirigés à l'encontre de Pacifica, cette dernière n'étant ni assureur décennal ni réputée constructeur Pacifica et de réformer le jugement sur ce point,

-à défaut, et à titre infiniment subsidiaire de dire et juger que des sommes à allouer seront déduites les provisions et sommes déjà versées par Pacifica,

-de condamner M. [X] à payer à Pacifica la somme de 22 643,50 euros et de confirmer le jugement rendu sur le quantum,

-de condamner tout succombant à payer à Pacifica la somme de 5 000 euros à Pacifica au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Elle rappelle qu'elle n'est pas assureur décennal et qu'elle ne peut être condamnée à relever et garantir les conséquences de la responsabilité décennale des intervenants à l'acte de construire.

Elle plaide que sa responsabilité contractuelle ne peut être recherchée par M. [X] pour la remise en état des lieux puisqu'elle a rempli son obligation contractuelle en matière de garantie catastrophe naturelle et que les désordres relèvent de la garantie décennale.

Elle conclut à la responsabilité décennale de Déterminant et Solinjection à qui il appartenait de remettre en état, alors qu'en tant qu'assureur catastrophe naturelle, elle n'est pas débitrice de l'efficacité des travaux de reprise mais uniquement de leur financement,

Elle rappelle qu'elle n'a commis aucune faute dans le choix du mode de réparation d'autant qu'elle n'est pas maître d'oeuvre.

Elle ajoute que l'assureur catastrophe naturelle n'a pas vocation à pallier la carence de défauts structurels de l'immeuble.

Elle fait valoir que la preuve de l'imputabilité des désordres survenus après les travaux de reprise avec ceux issus de la catastrophe naturelle n'est pas rapportée.

En tout état de cause, elle s'oppose à une condamnation solidaire avec le maître d'oeuvre et l'entreprise, leur responsabilité étant recherchée sur des fondements différents.

Elle conclut à la prescription de la demande relative à la cuisine intérieure.

Elle sollicite la minoration du montant des travaux de reprise sur la base du devis de Alliance BTP.

Elle réclame le remboursement par M. [X] des sommes qu'elle lui a versées indument.

Par conclusions remises au greffe le 24 octobre 2017, et auxquelles il y a lieu de se référer, la SMABTP demande à la cour :

-vu l'article 1134 ancien, l'article 1382 ancien et les articles 1792 et suivants du code civil,

-vu l'alinéa 3 de l'article L.125-1 du code des assurances,

-de dire et juger que les désordres dont M. [X] demande réparation sont la conséquence de malfaçons structurelles affectant sa maison et non celle des travaux réalisés par la société Solinjection sous la maîtrise d'oeuvre de la société Déterminant France,

-à titre subsidiaire, de dire et juger que la compagnie Pacifica n'a pas régulièrement et intégralement rempli ses obligations à l'égard de M. [X] en finançant des travaux dont l'expert considère qu'ils étaient insuffisants eu égard à l'affaiblissement des caractéristiques mécaniques du sol provoqué par l'inondation du 4 novembre 2011,

-de dire et juger que la compagnie Pacifica est seule débitrice de la réparation des dommages allégués par M. [X],

-en conséquence, de réformer le jugement du 9 novembre 2018 en ce qu'il a condamné in solidum les sociétés Déterminant France et Solinjection ainsi que la SMABTP à payer à M. [X] :

*la somme de 191 832,82 euros au titre des travaux de reprise des fondations, du plancher et des revêtements de façade,

*la somme de 3 480 euros au titre des frais de conseil technique,

*la somme de 2 500 euros au titre des travaux de réfection de la cuisine intérieure,

*la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles,

- aux entiers dépens, en ce y compris les frais d'expertise,

-à titre très subsidiaire, de le confirmer en ce que':

*le montant de l'indemnité allouée à M. [X] au titre des travaux de réparation des fondations, du plancher et des revêtements de façade a été fixé à la somme de 191 832,82 euros,

*le montant de l'indemnité qui lui a été allouée au titre des travaux de réfection de la cuisine extérieure a été fixé à la somme de 2 500 euros,

-de le confirmer en qu'il a jugé que la SMABTP est fondée à opposer sa franchise contractuelle aux sociétés Déterminant France et Solinjection dont la responsabilité a été retenue sur le fondement de la garantie décennale,

-pour le cas où leur responsabilité serait retenue sur un autre fondement, de dire la SMABTP fondée à opposer à tout bénéficiaire des indemnités mises à sa charge les franchises prévues par les contrats souscrits auprès d'elle par les sociétés Déterminant France et Solinjection,

-de le confirmer en ce qu'il a débouté les sociétés Déterminant France et Solinjection de leur appel en garantie relatif au remboursement du prix des travaux qu'elles ont exécutés,

-vu l'article 700 du code de procédure civile,

-de condamner toute partie succombante à payer à la SMABTP une indemnité de 7 000 euros au titre des frais irrépétibles,

-vu l'article 696 du code de procédure civile,

-de condamner M. [X] ou, à son défaut, la compagnie Pacifica aux entiers dépens de première instance et d'appel,

-en tant que de besoin, de condamner M. [X] ou, a son défaut, la compagnie Pacifica à

rembourser à la SMABTP la somme de 3 760 euros qu'elle a payée en exécution de l'ordonnance du 25 novembre 2016.

Elle conclut à l'irrecevabilité des demandes de M. [X] en contestant l'existence d'un lien de causalité entre les travaux exécutés en 2012 et les désordres dont il se plaint.

Elle expose que les travaux n'avaient pas pour objet de remédier à l'insuffisance structurelle résultant d'une malfaçon constructive d'origine, à savoir le mauvais positionnement du refend semelle par rapport aux charges de la cheminée.

A titre subsidiaire elle conclut que le dommage est lié à la faute de Pacifica qui n'a pas correctement rempli ses obligations à l'égard de son assuré.

Par conclusions remises au greffe le 13 mai 2019, et auxquelles il y a lieu de se référer, M. [W] [X] demande à la cour :

-de condamner la compagnie Pacifica à lui régler une somme de 43 958,76 euros au titre des travaux de reprise d'embellissements et des maçonneries d'élévation et 6 750 euros au titre des frais de réfection de la cuisine d'été consécutifs au sinistre du 4 novembre 2011,

-vu l'ancien article 1134 du code civil (1103 nouveau) vis-à-vis de la compagnie d'assurances Pacifica et l'article 1792 du code civil vis-à-vis de la SARL Déterminant France, de la société Solinjection et leur assureur la SMABTP,

-de condamner solidairement la compagnie Pacifica, la SARL Déterminant France, la société Solinjection et la SMABTP, et in solidum la SARL Déterminant France, la société Solinjection et leur assureur SMABTP, à régler à M. [X] les sommes suivantes :

*336 585,59 euros aux fins des travaux de reprise des fondations et de maîtrise d''uvre,

*3 480 euros au titre des frais de conseil technique de M. [X],

*8 000 euros au titre des frais des réfection de la cuisine intérieure,

*14 475,18 euros au titre des frais d'expertise judiciaire consignés par M. [X],

-de condamner solidairement la compagnie Pacifica, la SARL Déterminant France, la société Solinjection et la SMABTP, et in solidum SARL Déterminant France, Solinjection et leur assureur SMABTP au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-de débouter la compagnie Pacifica, la SARL Déterminant France, la société Solinjection et la SMABTP de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

-de condamner in solidum, Pacifica, Sarl Déterminant France, Solinjection et leur assureur SMABTP à relever M. [X] de toute condamnation qui interviendrait à son encontre,

-de condamner solidairement la compagnie Pacifica, la SARL Déterminant France, la société Solinjection et la SMABTP, et in solidum SARL Déterminant France, Solinjection et leur assureur SMABTP aux entiers dépens.

Par conclusions du 12 juin 2019, la SMABTP a demandé le rejet des conclusions remises au greffe le 7 juin par Pacifica et le 11 juin par les sociétés Déterminant et Solinjection en ce que, communiquées 4 jours avant l'audience pour celles de Pacifica et la veille de l'audience pour celles de Déterminant et Solinjection, elles ne respectaient pas le principe du contradictoire et ne lui permettaient pas de répliquer.

MOTIFS :

Sur la procédure

Les dernières conclusions de Pacifica d'une part et de Déterminant et Solinjection d'autre part n'introduisant aucune prétention nouvelle ni élément de preuve qui n'aurait pas déjà été versé au débat, et auxquels l'appelant n'aurait pas pu répondre, il n'y a pas lieu de renvoyer l'affaire, ni d'écarter des débats ces conclusions.

Sur le fond

L'expert, M. [J], a clairement identifié les désordres suivants :

-un allongement de la fissure longitudinale du carrelage sur deux carreaux dans les WC du rez-de-chaussée,

-une réapparition après les travaux d'embellissements de deux fissures sur le mur siporex séparant le salon de la chambre rose,

-l'apparition d'une fissure du carrelage se développant sur la largeur du plancher de la chambre rose,

-l'apparition d'une fissure du plancher de la chambre du rez-de-chaussée avec décollement de la plinthe.

Il explique que ces fissures sont liées à :

-un affaissement sous la cheminée avec fissuration longitudinale de la poutrelle sollicitée par le poids de la cheminée,

-un tassement de l'entrée et de la cuisine dû à une diminution de la portance du sol d'assise, consécutive à la décompression des sols lors de l'inondation du 4 novembre 2011.

Il expose que la villa de M. [X] est une construction rez-de-chaussée (R+0) sur vide sanitaire de hauteur variable avec un bloc au droit de la cuisine comportant un étage. Il indique que cette disposition constructive crée une différence significative de contrainte appliquée sur le sol d'assise entre les semelles. Il précise que le rapport géotechnique effectué avant les travaux de reprise de 2012 a montré, sous la cuisine, « une semelle filante de dimension réduite en béton ferraillé et faiblement ancré par rapport au TN aval dans les limons compacts » et que les sols ont des compétences mécaniques très faibles.

Après avoir observé que le refend semelle VS4 était mal placé par rapport aux charges appliquées par la cheminée et qu'il existait une fatigue des poutres existantes dont la flexion peut être liée à une charge excessive constituée par la cheminée et l'aquarium, il conclut que les travaux de reprise après sinistre, qui devaient tenir compte des spécificités structurelles de la maison, ont été mal exécutés.

M. [X] agit sur le fondement de l'article 1792 du code civil à l'encontre des sociétés Déterminant et Solinjection.

Il lui appartient donc de rapporter la preuve que les travaux réalisés par celles-ci ont causé à sa maison des dommages qui en compromettent la solidité.

Il ressort du rapport d'expertise' :

-que la maison présente des dispositions constructives particulières avec des semelles filantes insuffisantes, notamment sous la cuisine, et des écarts de contraintes sur les sols d'assise aggravés par le poids d'une cheminée et d'un aquarium,

-que les inondations ont provoqué des désordres sous forme de tassements différentiels avec apparition de fissures qui ont donné lieu à réparation,

-que les désordres sont réapparus ainsi que de nouveaux désordres au droit des fondations les plus chargées et au siège des travaux de reprise.

L'expert s'attache à démontrer le caractère inefficace des travaux de 2012, et il n'est pas contestable que les tassements différentiels des structures de la maison ont perduré malgré les travaux de confortement.

Il n'est cependant pas établi que ces travaux qui se sont révélés inefficaces aient ajouté aux désordres préexistants qui provenaient d'un tassement différentiel par l'effet de l'inondation en raison de la consistance des sols, aggravé par les défauts constructifs de la maison.

M. [X] invoque l'existence de désordres « de deuxième génération » induits par les travaux inadaptés en soulignant que l'expert retient que l'injection irrégulière a pu créer des points durs et des points de soulèvement. Il n'est   cependant nullement établi que la cause des nouveaux désordres sous forme de fissures, qui se trouvent ou non au siège des anciens désordres soit imputable aux travaux plus qu'au sinistre de 2011 ou aux dispositions constructives. En effet l'expert se contente de faire des hypothèses sans avoir procédé à des investigations. Il relève que la quantité de matériau injecté est globalement insuffisante mais ne démontre pas que la mauvaise conception et exécution des travaux d'injection a généré les nouveaux désordres ou la réapparition des désordres précédemment observé en 2012.

La demande en responsabilité décennale contre le maître d'oeuvre et l'entreprise, sous la garantie de leurs assureurs sera par conséquent rejetée et M. [X] sera débouté de ses demandes formées contre les sociétés Déterminant, Solinjection et SMABTP et les demandes en garantie formées par celles-ci sont dès lors sans objet.

M. [X] agit sur le fondement de l'article 1134 du code civil contre la société Pacifica en lui reprochant d'avoir validé un procédé de réparation par injection inadapté.

Il y a lieu de constater que la société Pacifica a indemnisé son assuré sur la base d'une étude géologique et géotechnique qu'elle a fait réaliser par Géo Est en mai 2012 qui préconisait ce type de réparation.

Il apparaît ainsi que la société Pacifica, qui ne dispose pas de compétence en matière de construction, a pris les précautions nécessaires pour déterminer la solution de réparation adéquate et qu'aucune faute ne peut lui être reprochée à ce stade.

Il ressort en outre des conclusions de l'expert que ce n'est pas la réparation par injection qui n'était pas adaptée mais le procédé d'injection retenu par la maîtrise d'ouvrage nécessitant d'une part une étude de projet approfondie, mais qui n'a pas été faite, pour vérifier son adéquation au contexte, et imposant d'autre part plusieurs phases d'injection avec des contrôles de résultat. Si l'expert préconise une réparation par micropieux, il ne conclut pas que la réparation par injection était un moyen totalement inadapté et nécessairement voué à l'échec et que l'expert de l'assureur s'est trompé.

Enfin la société Pacifica n'a pas été en charge des travaux et elle ne peut répondre de l'inefficacité des travaux mal conçus par le maître d'oeuvre et mal exécutés par l'entreprise.

La demande fondée sur l'article 1134 du code civil contre la société Pacifica sera donc rejetée.

M. [X] réclame le paiement par la société Pacifica des frais d'embellissements et de surélévation de maçonnerie que la société Pacifica n'a pas pris en charge au titre des travaux de reprise de 2012 au motif qu'ils n'étaient pas liés à l'inondation ainsi que des frais relatifs à la réfection de la cuisine d'été qui ont été refusés en raison de l'absence de sinistre déclaré pour cette pièce.

La réparation des désordres consécutifs à l'inondation a été financée par la société Pacifica et la réception des travaux à compter de laquelle il est apparu que l'assureur n'avait pas payé les travaux d'embellissements et de réfection de la cuisine, est intervenue le 6 octobre 2012. La demande présentée par assignation en 2018 encourt donc la prescription biennale comme ayant été présentée plus de deux ans après la connaissance de l'indemnisation.

La société Pacifica sollicite le remboursement de l'indemnité de 22 643,50 euros qu'elle a versée à M. [X] pour la reprise du décollement des carrelages lors des travaux de reprise au motif que le constat d'huissier du 22 septembre 2012 ne mettait pas en évidence de fissures du carrelage. Cependant Pacifica qui en 2012 a reconnu sa garantie est mal fondée à réclamer le remboursement des sommes qu'elle a payées au vu des expertises et études qu'elle a diligentées et elle ne prouve pas sur la seule base du constat d'huissier que ce désordre n'existait pas. Elle sera donc déboutée de cette demande.

La société Pacifica réclame à la société Déterminant et la société Solinjection le montant des sommes qu'elle leur a payé au titre des travaux de reprise au motif que les travaux ont été inefficaces.

En application de l'article 1382 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Il est certain que les travaux de reprise se sont avérés totalement inefficaces puisqu'ils n'ont pas empêché la réapparition de désordres.

L'expert conclut que l'inefficacité des travaux est imputable aux fautes du maître d'oeuvre dans le procédé d'injection effectué sans étude géotechnique préalable et sans vérification après injection, et à la société Déterminant en raison de ses fautes d'exécution dans la mise en 'uvre des injections.

L'assureur prétend qu'il subirait un préjudice en raison de l'inefficacité, voire de l'inutilité des travaux.

Ce préjudice ne peut consister dans la garantie du sinistre puisqu'il devait cette garantie à son assuré.

Il ne consiste pas plus dans le paiement de travaux de reprise de ces travaux inefficaces puisque la demande de ce chef formée par le maître d'ouvrage est rejetée.

Si la société SMABTP demande que soit ordonnée la restitution des sommes versées en exécution de l'ordonnance du 25 novembre 2016, le présent arrêt infirmatif constitue le titre ouvrant droit à cette restitution avec intérêts au taux légal à compter de la signification valant mise en demeure de la décision ouvrant droit à restitution ; il s'ensuit qu'il n'y a pas lieu de statuer sur cette demande.

Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de chaque partie les frais irrépétibles qu'elle ont exposés.

PAR CES MOTIFS':

La cour,

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau';

Déboute M. [W] [X] de toutes ses demandes';

Déboute la société Pacifica de toutes ses demandes';

Déclare sans objet les appels en garantie';

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile';

Condamne M. [W] [X] aux dépens de première instance et d'appel qui comprendront les frais d'expertise et dit que ceux d'appel pourront être recouvrés contre lui conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-3
Numéro d'arrêt : 18/19409
Date de la décision : 19/09/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 3A, arrêt n°18/19409 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-09-19;18.19409 ?
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