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20/06/2019 | FRANCE | N°17/21608

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 20 juin 2019, 17/21608


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 20 JUIN 2019

lb

N° 2019/ 427













Rôle N° RG 17/21608 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BBSCY







[L] [C]

[Y] [E] épouse [C]

[J] [N]

[Z] [Y] épouse [N]

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[O] [Y]





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SA SOCIETE D'AMENAGEMENT FONCIER ET D'ETABLISSEMENT R URAL PROVENCE ALPES COTE D'AZUR DITE SAFER



















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Me Yves HADDAD



SELARL DEBEAURAIN & ASSOCIES













Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 12 Octobre 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 16/00264.





APPELA...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 20 JUIN 2019

lb

N° 2019/ 427

Rôle N° RG 17/21608 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BBSCY

[L] [C]

[Y] [E] épouse [C]

[J] [N]

[Z] [Y] épouse [N]

[L] [Y]

[O] [Y]

C/

SA SOCIETE D'AMENAGEMENT FONCIER ET D'ETABLISSEMENT R URAL PROVENCE ALPES COTE D'AZUR DITE SAFER

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Yves HADDAD

SELARL DEBEAURAIN & ASSOCIES

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 12 Octobre 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 16/00264.

APPELANTS

Monsieur [L] [C]

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Yves HADDAD, avocat au barreau de TOULON, plaidant

Madame [Y] [E] épouse [C]

demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Yves HADDAD, avocat au barreau de TOULON, plaidant

Monsieur [J] [N]

demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Yves HADDAD, avocat au barreau de TOULON, plaidant

Madame [Z] [Y] épouse [N]

demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Yves HADDAD, avocat au barreau de TOULON, plaidant

Monsieur [L] [Y]

demeurant [Adresse 4]

représenté par Me Yves HADDAD, avocat au barreau de TOULON, plaidant

Madame [O] [Y]

demeurant [Adresse 5]

représentée par Me Yves HADDAD, avocat au barreau de TOULON, plaidant

INTIMEE

SA SOCIETE D'AMENAGEMENT FONCIER ET D'ETABLISSEMENT RURAL PROVENCE ALPES COTE D'AZUR DITE SAFER, agissant poursuites et diligences de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège, [Adresse 6]

représentée par Me Julien DUMOLIE de la SELARL DEBEAURAIN & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Baptiste CHAREYRE, avocat au barreau de PARIS, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 30 Avril 2019 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Laure BOURREL, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Laure BOURREL, Président

Madame Hélène GIAMI, Conseiller

Madame Sophie LEONARDI, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Juin 2019.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 Juin 2019,

Signé par Madame Laure BOURREL, Président et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCÉDURE, MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Monsieur et Madame [C] sont propriétaires au [Localité 1], lieu-dit [Localité 2] de trois parcelles de terre cadastrée B [Cadastre 1], B [Cadastre 2] et B [Cadastre 3], acquises en viager par acte authentique du 17 juillet 1996.

Selon acte du 17 avril 2015, ils ont promis de vendre ces trois parcelles à Monsieur [J] [N] et son épouse [Z] [Y], Monsieur [L] [Y] et Madame [O] [Y] au prix de 138 600 € avec un usufruit temporaire ou un droit de jouissance de trois ans concédé au vendeur. Ce point fait litige entre les parties.

Informée par le notaire de cette intention d'aliéner, la SAFER Alpes Côte d'Azur a considéré qu'il s'agissait d'une vente de la pleine propriété et par lettre recommandée du 24 août 2015, elle a exercé son droit de préemption en proposant une réduction du prix à 78 000 €.

Par exploit du 10 décembre 2015, Monsieur et Madame [N], Monsieur [L] [Y], Madame [O] [Y] et Monsieur et Madame [C] ont assigné la SAFER pour faire juger illégale la décision de préemption, et quelle soit condamnée à leur payer la somme de 20 000 € à titre de dommages-intérêts, à payer à Monsieur et Madame [C] la somme de 10 000 € au titre de leur préjudice moral, outre un article 700 du CPC de 3000 €.

La SAFER a conclu au débouté des vendeurs et acquéreurs, qu'il soit dit qu'elle avait valablement exercé son droit de préemption, qu'elle soit déclarée propriétaire desdites parcelles, qu'il lui soit donné acte de ce qu'elle laissera la jouissance du bien à Monsieur et Madame [C] pendant une durée de trois ans à dater de la décision à intervenir, et de lui octroyer un article 700 du CPC de 3000 €.

Par jugement du 12 octobre 2017, le tribunal de grande instance de Toulon a :

-débouté Monsieur [J] [N], Madame [Z] [Y] épouse [N], Monsieur [L] [Y], Madame [O] [Y], Monsieur [L] [C] et Madame [Y] [E] épouse [C] de leurs demandes,

-déclaré que la SAFER a valablement exercé son droit de préemption le 24 août 2015,

-constaté que Monsieur [J] [N], Madame [Z] [Y] épouse [N], Monsieur [L] [Y], Madame [O] [Y], Monsieur [L] [C] et Madame [Y] [E] épouse [C] ne sollicitent pas la révision du prix proposé par la SAFER,

-déclaré la SAFER propriétaire des parcelles sises sur la commune du [Localité 3] cadastrées :

*section B numéro [Cadastre 1] lieu-dit [Localité 2] d'une superficie de 45a et 20ca,

*section B numéro [Cadastre 2] lieu-dit [Localité 2] d'une superficie de 37a et 60ca,

*section B numéro [Cadastre 3] lieu-dit [Localité 2] d'une superficie de 30a et 20ca,

et ce pour le prix de 78 000 €,

-donné acte à la SAFER de ce qu'elle laissera la jouissance du bien à Monsieur [L] [C] et Madame [Y] [E] épouse [C] pendant une durée de trois ans à compter de la présente décision,

-condamné Monsieur [J] [N], Madame [Z] [Y] épouse [N], Monsieur [L] [Y], Madame [O] [Y], Monsieur [L] [C] et Madame [Y] [E] épouse [C] à payer à la SAFER la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné Monsieur [J] [N], Madame [Z] [Y] épouse [N], Monsieur [L] [Y], Madame [O] [Y] , Monsieur [L] [C] et Madame [Y] [E] épouse [C] aux dépens,

-dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Monsieur [J] [N], Madame [Z] [Y] épouse [N], Monsieur [L] [Y], Madame [O] [Y], Monsieur [L] [C] et Madame [Y] [E] épouse [C] ont relevé appel de cette décision par déclaration du 1er décembre 2017.

Par conclusions du 26 février 2019, qui sont tenues pour entièrement reprises, les appelants demandent à la cour de :

« Vu les articles L. 143-1 alinéa 5, L. 143-3 et R. 143-6 alinéa 2 et 3 du code rural et de la pêche maritime,

Infirmer la décision querellée.

Juger illégale la décision de préemption de la SAFER en date du 24/08/2015.

En réparation du préjudice causé par sa décision illégale, condamner la SAFER à payer aux requérants la somme de 20 000 € à titre de dommages et intérêts.

Condamner la SAFER à payer aux requérants la somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du CPC.

Condamner la SAFER à payer aux promettants, à savoir Monsieur et Madame [C],

*la somme de 20 000 € au titre de leur préjudice matériel,

*la somme de 10 000 € au titre de leur préjudice moral.

Condamner la SAFER aux entiers dépens ces derniers distraits au profit de Maître Yves Haddad, avocat. »

Par conclusions du 10 avril 2019, qui sont tenues pour entièrement reprises, la SAFER demande à la cour de :

« Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que la SAFER a valablement exercé son droit de préemption.

Confirmer le jugement en ce qu'il a dit que les époux [C] ne sollicitaient par la révision du prix proposé par la SAFER.

Confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré la SAFER propriétaire des parcelles sises sur la commune du [Localité 3] cadastrées :

*section B numéro [Cadastre 1] lieu-dit [Localité 2] d'une superficie de 45a et 20ca,

*section B numéro [Cadastre 2] lieu-dit [Localité 2] d'une superficie de 37a et 60ca,

*section B numéro [Cadastre 3] lieu-dit [Localité 2] d'une superficie de 30a et 20ca,

pour le prix de 78 000 €.

Dire et juger que ces parcelles sont libres de toute occupation.

Confirmer également le jugement entrepris en ce qu'il a condamné les demandeurs à 1500 € du chef de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

De plus il y aura lieu de condamner solidairement les appelants à 3000 € du chef de l'article 700 du code de procédure civile en voie d'appel ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de Maître Julien Dumolie du cabinet Debeaurain & associés, selon ses offres et affirmation de droits. »

L'instruction de l'affaire a été close le 30 avril 2019.

MOTIFS

Préalablement, il convient de préciser que sont applicables au présent litige les dispositions du code rural et de la pêche maritime en vigueur à la date de la promesse de vente et de la décision de préemption de la SAFER Alpes Côte d'Azur, soit en 2015.

Sur la procédure de préemption

1.L'article L. 143-1 du code rural et de la pêche maritime énonce dans sa version applicable dans son alinéa 1 qu'il est institué au profit des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural un droit de préemption en cas d'aliénation à titre onéreux de biens immobiliers à usage agricole et de biens mobiliers qui leur sont attachés ou de terrains nus à vocation agricole, sous réserve du I de l'article L. 143-7 ; que sont considérés comme à vocation agricole, pour l'application du présent article, les terrains situés soit dans une zone agricole protégée créée en application de l'article L. 112-2 du présent code, soit à l'intérieur d'un périmètre délimité en application de l'article L. 143-1 du code de l'urbanisme, soit dans une zone agricole ou une zone naturelle et forestière délimitée par un document d'urbanisme ; qu'en l'absence de document d'urbanisme, sont également regardés comme terrains à vocation agricole les terrains situés dans les secteurs ou parties non encore urbanisés des communes, à l'exclusion des bois et forêts.

Les parcelles de terrain objet de la promesse de vente du 15 avril 2015 et sur lesquelles la SAFER Alpes Côte d'Azur entend exercer son droit de préemption étaient utilisées jusqu'à présent comme jardin d'agrément par Monsieur et Madame [C]. Les appelants soulignent aussi que cette propriété est située entre deux parcelles qui sont bâtis pour contester le droit de préemption de la SAFER Alpes Côte d'Azur.

Cependant, les consorts [C] [N] [Y] reconnaissent en page 12 de leurs écritures que ce terrain est situé en zone agricole, soit en zone A du PLU, comme l'indique la SAFER à Maître [B] [S], notaire, dans son courrier du 3 juin 2015. Dès lors, nonobstant l'absence d'utilisation actuelle à des fins agricoles, ces trois parcelles n'ont pas perdu leur vocation agricole. C'est pourquoi la SAFER peut exercer son droit de préemption sur lesdites parcelles.

2. L'alinéa 5 de cet article précise que les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural peuvent exercer leur droit de prévention en cas d'aliénation à titre onéreux de l'usufruit ou de la nue-propriété des biens mentionnés au présent article ; qu'elles ne peuvent préempter la nue-propriété de ces biens que dans les cas où elles en détiennent l'usufruit ou sont en mesure de l'acquérir concomitamment, ou lorsque la durée de l'usufruit restant à courir ne dépasse pas deux ans.

Le compromis de vente du 17 avril 2015 indique au paragraphe Propriété-Jouissance :

« L'acquéreur sera propriétaire du bien à compter du jour de la réalisation de la vente par acte authentique.

Il en aura la jouissance à l'issue d'un délai de trois années à compter de la signature de l'acte authentique de vente réitérant les présentes. »

Le paragraphe Prix est par contre ainsi rédigé :

« La vente si elle se réalise aura lieu moyennant le prix principal de cent trente-huit mille six cents euros (138 600,00 eur) qui sera payable comptant par virement pour le jour de la signature de l'acte authentique.

Précision étant ici faite que la valeur en pleine propriété est de cent quatre-vingts mille euros (180 000,00 eur) sous déduction de la valeur de l'usufruit temporaire, soit 41 400,00 euros. »

Ces termes traduisent deux situations juridiques contradictoires.

Les parties s'opposent sur la qualification de l'acte projeté, vente en pleine propriété avec réserve de jouissance aux vendeurs pendant trois ans, ou vente de la nue-propriété assortie d'un usufruit temporaire dans la mesure où le droit de préemption de la SAFER ne peut s'exercer que dans le premier cas.

Le courrier du 19 juin 2015 de Monsieur et Madame [C] adressé à Maître [B] [S] permet d'avoir un éclairage sur la volonté de Monsieur et Madame [C]. Ceux-ci indiquent ainsi au notaire qu'ils souhaitent que la vente projetée aille à son terme et qu'ils veulent la réalisation d'une vente en deux temps qui leur permet de conserver leur droit d'usage et de jouissance pendant trois ans.

Il s'agit donc d'une vente en pleine propriété, comme l'a très justement analysé le premier juge. La SAFER est donc légitime à exercer son droit de préemption à l'occasion de cette transaction.

3. L'article L. 143-2 du code rural et de la pêche maritime énonce que l'exercice de ce droit a pour objet, dans le cadre des objectifs définis à l'article L. 1 :

1° L'installation, la réinstallation ou le maintien des agriculteurs ;

2° La consolidation d'exploitations afin de permettre à celles-ci d'atteindre une dimension économique viable au regard des critères du schéma directeur régional des exploitations agricoles et l'amélioration de la répartition parcellaire des exploitations existantes, dans les conditions prévues à l'article L. 331-2 ;

3° La préservation de l'équilibre des exploitations lorsqu'il est compromis par l'emprise de travaux d'intérêt public ;

4° La sauvegarde du caractère familial de l'exploitation ;

5° La lutte contre la spéculation foncière ;

6° La conservation d'exploitations viables existantes lorsqu'elle est compromise par la cession séparée des terres et de bâtiments d'habitation ou d'exploitation ;

7° La mise en valeur et la protection de la forêt ainsi que l'amélioration des structures sylvicoles dans le cadre des conventions passées avec l'Etat ;

8° La protection de l'environnement, principalement par la mise en 'uvre de pratiques agricoles adaptées, dans le cadre de stratégies définies par l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs établissements publics ou approuvées par ces personnes publiques en application du présent code ou du code de l'environnement ;

9° Dans les conditions prévues par le chapitre III du titre IV du livre Ier du code de l'urbanisme, la protection et la mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains.

L'article L. 143-3 du code rural et de la pêche maritime édicte qu'à peine de nullité, la société d'aménagement foncier et d'établissement rural doit justifier sa décision de préemption par référence explicite et motivée à plusieurs des objectifs ci-dessus définis, et la porter à la connaissance des intéressés.

La SAFER Alpes Côte d'Azur justifie que dans son courrier du 24 août 2015 adressé par lettre recommandée à Maître [B] [M]-[S], elle a notifié qu'elle exerçait son droit de préemption qu'elle a motivé par rapport à la lutte contre la spéculation foncière et la consolidation d'exploitation, et ce de façon détaillée.

La procédure est donc régulière en ce qui concerne la motivation de la décision de préemption.

Elle justifie avoir notifié cette lettre par courrier avec accusé de réception à Monsieur [L] [Y], à Madame [Z] [Y], à Madame [O] [Y] et à Monsieur [J] [N]. Elle ne justifie pas avoir notifié sa décision à Monsieur et Madame [C]. Toutefois, ceux-ci ne discutent pas avoir reçu cette notification.

4. L'article R. 143-6 du même code complète les dits article L. 143-2 et L. 143-3 et précise :

« La société d'aménagement foncier et d'établissement rural qui exerce le droit de préemption notifie au notaire chargé d'instrumenter par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou sous forme électronique dans les conditions prévues aux articles 1316-1 et 1316-4 du code civil sa décision signée par le président de son conseil d'administration ou par toute personne régulièrement habilitée à cet effet. La décision de préemption indique l'identification cadastrale des biens concernés et leur prix d'acquisition. Elle précise en outre en quoi la préemption répond à l'un ou à plusieurs des objectifs prévus par les dispositions de l'article L. 143-2.

Cette décision ainsi motivée est notifiée également à l'acquéreur évincé, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, dans un délai de quinze jours à compter de la date de réception de la notification faite au notaire.

Une analyse de cette décision est adressée dans le même délai au maire de la commune intéressée en vue de son affichage en mairie pendant quinze jours. »

La SAFER reconnaît qu'elle n'a pas satisfait à cette dernière obligation d'envoyer une analyse au maire de la commune intéressée en soutenant que ce n'est que lorsqu'il y aura décision définitive sur sa préemption qu'elle satisfera à cette obligation.

Cependant les termes de cet article sont précis : la SAFER a obligation d'envoyer une analyse de la décision de préemption au maire de la commune intéressée dans le délai de 15 jours de la date de réception de la notification faite au notaire de ce qu'elle exerce son droit de préemption.

Dès lors, la procédure de préemption de la SAFER Alpes Côte d'Azur est irrégulière pour ne pas avoir satisfait à toutes ses obligations de publication.

Eu égard au droit exorbitant que constitue le droit de préemption de la SAFER par rapport aux droit de propriété, nonobstant les objectifs poursuivis par le législateur, cette irrégularité entraîne la nullité de la procédure de préemption.

En conséquence, la procédure de préemption sera déclarée nulle et le jugement déféré sera infirmé, sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens développés par les parties.

Sur les demandes de dommages intérêts

Les appelants sollicitent dans leur dispositif le paiement de dommages-intérêts à hauteur de sommes conséquentes sans aucune explication dans leurs motifs.

La cour ne pouvant pallier la carence des parties, en l'absence de toute explication, les consorts [C] [N] [Y] seront déboutés de leur demande de dommages et intérêts.

Sur les autres demandes

L'équité commande de faire bénéficier les consorts [C] [N] [Y] des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La SAFER Alpes Côte d'Azur qui succombe, sera condamnée aux entiers dépens et sera déboutée de sa demande d'indemnisation au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement déféré,

Dit nulle la procédure de préemption de la SAFER Alpes Côte d'Azur engagée à l'occasion du projet de vente par Monsieur [L] [C] et Madame [Y] [E] épouse [C] à Monsieur [J] [N], Madame [Z] [Y] épouse [N], Madame [O] [Y] et Monsieur [L] [Y] des parcelles cadastrées B [Cadastre 1], B [Cadastre 2] et B [Cadastre 3], située sur la commune du [Localité 1], lieu-dit [Localité 2],

Déboute la SAFER Alpes Côte d'Azur de toutes ses demandes,

Déboute Monsieur [L] [C], Madame [Y] [E] épouse [C], Monsieur [J] [N], Madame [Z] [Y] épouse [N], Madame [O] [Y] et Monsieur [L] [Y] de leurs demandes de dommages et intérêts,

Condamne la SAFER Alpes Côte d'Azur à payer à Monsieur [L] [C], Madame [Y] [E] épouse [C], Monsieur [J] [N], Madame [Z] [Y] épouse [N], Madame [O] [Y] et Monsieur [L] [Y] la somme globale de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SAFER Alpes Côte d'Azur aux entiers dépens, ceux d'appel pouvant être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 17/21608
Date de la décision : 20/06/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 4A, arrêt n°17/21608 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-06-20;17.21608 ?
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