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07/05/2019 | FRANCE | N°18/07555

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 2-2, 07 mai 2019, 18/07555


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 2-2 anciennement dénommée 6ème chambre B





ARRÊT AU FOND

DU 07 MAI 2019



N° 2019/219









Rôle N° RG 18/07555

N° Portalis DBVB-V-B7C-

BCL4V







[B] [A]



C/



[O] [A] [N]

































Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Agnès ERMENEUX-
>CHAMPLY



SCP BUVAT-TEBIEL





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de Grasse en date du 18 avril 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 16/05611.





APPELANT



Monsieur [B] [A]

né le [Date naissance 1] 1950 à [Localité 1](MAROC) [Localité 2],

demeurant [Adresse 1]



...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 2-2 anciennement dénommée 6ème chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 07 MAI 2019

N° 2019/219

Rôle N° RG 18/07555

N° Portalis DBVB-V-B7C-

BCL4V

[B] [A]

C/

[O] [A] [N]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Agnès ERMENEUX-

CHAMPLY

SCP BUVAT-TEBIEL

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de Grasse en date du 18 avril 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 16/05611.

APPELANT

Monsieur [B] [A]

né le [Date naissance 1] 1950 à [Localité 1](MAROC) [Localité 2],

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Agnès ERMENEUX-CHAMPLY de la SCP ERMENEUX-ARNAUD- CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, Me Stephen MONTRAVER, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

Madame [O] [A] [N]

née le [Date naissance 2] 1950 à [Localité 3],

demeurant [Adresse 2]

représentée par la SCP BUVAT-TEBIEL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Clémence LE GUEN GOZLAN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, Me Alain BERDAH, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 07 mars 2019 en chambre du conseil. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Mme Michèle CUTAJAR, conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Jean-Marc BAÏSSUS, président

Mme Michèle CUTAJAR, conseiller

Mme Evelyne GUYON, conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Madame Jessica FREITAS.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 07 mai 2019.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 07 mai 2019,

Signé par Monsieur Jean-Marc BAÏSSUS, président et Madame Jessica FREITAS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Par jugement du 03 septembre 1996, le tribunal de grande instance de Grasse a prononcé le divorce de Madame [O] [N] et Monsieur [B] [A].

Il a homologué la convention définitive des parties aux termes de laquelle l'époux doit verser à l'épouse une prestation compensatoire sous forme de rente viagère d'un montant de 10.000 euros par mois (1.500 euros par mois).

Le 16 novembre 2016, Monsieur [A] a saisi le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Grasse aux fins de voir:

-ordonner la désignation de tel notaire et tel enquêteur social aux fins de dresser rapport de tous les éléments permettant d'apprécier les patrimoines mobiliers, immobiliers, conditions de vie et ressources des parties sur la période de 2012 jusqu'au jour du dépôt de leur rapport,

- supprimer la prestation compensatoire servie sous forme de rente, rétroactivement au 01 janvier 2012.

Par jugement du 18 avril 2018, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Grasse a :

déclaré recevable la requête de Monsieur [A] en suppression du paiement de la prestation compensatoire,

débouté Monsieur [A] de ses demandes au titre des mesures avant-dire droit,

débouté Madame [N] de sa demande en paiement de dommages et intérêts,

condamné Monsieur [A] à payer à Madame [N] la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Le 02 mai 2018, Monsieur [A] a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 19 février 2019, il demande à la cour:

'- avant-dire droit, désigner tel notaire et tel enquêteur social aux fins de dresser rapport de tous les éléments permettant d'apprécier les patrimoines mobiliers, immobiliers, conditions de vie et ressources des parties sur la période de 2012 jusqu'au jour du dépôt de leur rapport.

En conséquence:

-une fois déposés lesdits rapports, et ayant préalablement appelé les parties à conclure au soutien de leurs demandes respectives,

- en tout état de cause, et même sans mesures préalables, rejeter les demandes de réformation présentées par Madame [N],

- et faisant droit à celles de Monsieur [A], dire et juger que la prestation compensatoire à vie de 1.500 euros par mois mise à la charge de Monsieur [P] au bénéfice de Madame [N] est supprimée rétroactivement à compter du 01 janvier 2012.'

Il prétend au paiement de la somme de 6.000 euros au titre des frais irrépétibles de l'instance.

Il fait d'abord plaider que le premier juge a tranché le litige au mépris des dispositions des articles 1070, 1075 -1, 1075-2 du code de procédure civile , 276-3 et 279 du code civil, puisqu'il n'a pas fait injonction à Madame [N] de communiquer sa déclaration sur l'honneur.

Il a encore violé l'article 146 du code de procédure civile en le déboutant de sa demande au titre de la mise en oeuvre de mesures d'investigation.

En estimant en effet qu'il appartient au demandeur de prouver l'existence de la modification substancielle des ressources du créancier de la prestation compensatoire, le juge aux affaires familiales a fait peu de cas de la propre carence de Madame [N] qui n'a pas communiqué les éléments nécessaires à l'appréciation de sa situation économique.

S'agissant de la prestation compensatoire, il fait valoir que le maintien du paiement est désormais hors de proportion avec les ressources dont il dispose actuellement, et qui s'élèvent à la somme mensuelle de 5.000 dollars.

Il rappelle qu'au moment du divorce, il gérait plusieurs établissements de nuit et un restaurant, et percevait alors un revenu mensuel de 1.000.000 francs (soit 12.245 euros par mois).

Il soutient que toutes les affirmations de l'intimée relatives à la consistance de son patrimoine sont erronées et ne reposent sur aucun élément concret.

Il affirme au contraire que toutes les pièces qu'il communique démontrent qu'il est totalement transparent sur sa propre situation financière, alors que l'opacité entretenue par Madame [N] le fonde dans ses demandes avant-dire droit.

En tout état de cause, la situation de Madame [N] s'est à l'évidence améliorée depuis l'intervention du jugement de divorce.

Alors qu'elle ne percevait à cette époque aucun revenu propre, l'enquête privée qu'il a fait diligenter le 21 avril 2017, a déterminé qu'elle dispose maintenant d'un patrimoine mobilier et immobilier et bénéficie d'un train de vie très confortable puisqu'elle partage sa vie avec un compagnon particulièrement fortuné.

Elle a également recueilli la succession de sa mère, comprenant des biens immobiliers sis à [Localité 3].

L'intimée bénéficie de l'usage exclusif d'un bien immobilier sis à [Localité 4], dont le coût mensuel, de l'ordre de 1.500 euros, correspond à lui seul au montant de la rente servie au titre de la prestation compensatoire.

Or, dans la mesure où il ne verse plus cette rente depuis le mois de janvier 2012, il est manifeste que Madame [N] dispose d'autres sources de revenus.

Elle est d'ailleurs associée dans la SCI BARU, propriétaire de deux biens immobiliers, générateurs de revenus.

Il rappelle que la cour de cassation considère, s'agissant de la révision de la rente viagère avant l'entrée en vigueur de la loi du 30 juin 2000, que le débiteur doit démontrer seulement de manière alternative - et non cumulative-soit un changement important intervenu dans la situation de l'une ou de l'autre des parties, soit que le maintien en l'état de la rente procurerait au créancier un avantage manifestement excessif au regard des critères posés par l'article 276 du code civil .

En l'espèce, il soutient que les deux critères se trouvent réunis.

Formant appel incident, Madame [N] demande à la cour, aux termes de ses dernières conclusions déposées le 19 novembre 2018 :

'- d' infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a déclaré recevable la demande en suppression de la prestation compensatoire,

et

- dire et juger irrecevable la demande en suppression de la prestation compensatoire formée par Monsieur [A] en application des dispositions de l'article 33 paragraphe IX de la loi N° 2004-439 du 26 mai 2004,

- dire et juger qu'en tous les cas, Madame [N] est fondée à opposer son droit acquis à une prestation compensatoire non révisable à une éventuelle rétroactivité de la loi N° 2004-439 du 26 mai 2004, et conséquemment la demande en suppression est irrecevable ;

Subsidiairement, si par extraordinaire la cour estimerait recevables les demandes de Monsieur [A]:

- dire et juger que l'article 276-3 du code civil n'est pas applicable au litige car régissant les rentes temporaires et non viagères,

- dire et juger que seul l'article 276 du code civil aurait vocation à régir le présent litige, le crédit-rentier bénéficiant d'une rente viagère,

-dire et jugé que l'âge avancé de Madame [N] et un état de santé par définition moins bon que celui constaté lors de la fixation de la prestation compensatoire, ne permettent pas au juge de supprimer la prestation compensatoire,

- débouter en tout état de cause Monsieur [A] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- confirmer en conséquence la décision entrepris en ce qu'elle a débouté Monsieur [A] de ses demandes,

- condamner en tous les cas Monsieur [A] à payer à Madame [N] la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts pour appel abusif et la somme de 15.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.'

S'agissant de la question de la recevabilité de la demande de Monsieur [A], elle se livre à l'exégèse et au commentaire des dispositions qui régissaient le droit du divorce au moment où le jugement est intervenu, ainsi que du paragraphe IX de l'article 33 de la loi du 26 mai 2004.

Elle soutient que ces dernières dispositions précisent de manière non équivoque que les paragraphes VI et VII sont applicables aux instances en cours qui n'ont pas donné lieu à une décision passée en force de chose jugée.

Or, le premier juge a méconnu les règles pourtant claires édictées par l'article 33 de la loi du 26 mai 2006, qui dispose notamment que la loi s'applique aux procédure introduites avant son entrée en vigueur sous certaines exceptions, dont celle tenant au fait que la convention temporaire a été homologuée avant l'entrée en vigueur de la loi.

Par conséquent, Madame [N] dispose d'un droit acquis à se prévaloir d'une convention homologuée, exécutoire et définitive, qui ne prévoit pas la possibilité d'une révision et a fortiori d'une suppression de la prestation viagère.

S'agissant du paiement de la prestation compensatoire, elle rappelle à titre liminaire que Monsieur [A] ne s'acquitte plus du paiement de la prestation compensatoire depuis le 01 janvier 2012.

Elle considère inopérante toute l'argumentation de l'appelant au soutien de sa demande d'investigations formulées à titre principal.

Sur le fond, elle soutient que l'appelant dissimule la réalité de sa situation économique, puisqu'il est toujours propriétaire de plusieurs établissements de nuit, très prisés sur l'Ile de Saint Martin, et qu'il est également gérant de plusieurs autres société (société PICO, société HENCO) génératrices à l'évidence de revenus à propos desquels l'appelant reste taisant.

Il est également propriétaire, directement ou via des sociétés civiles immobilières, d'au moins quatre biens immobiliers sis à Saint Martin et de terrains sis à [Adresse 3].

Il a également perçu en 2012, une somme de 800.000 euros, à la suite de la vente d'un bien immobilier sis à Mougins au profit de la SCI l'Espérance.

S'agissant de sa propre situation, elle expose quelle est la consistance de son patrimoine immobilier.

Elle détient 50 % des parts sociales dans la SCI l'Espérance, ces parts lui ayant été attribuées en rémunération de l'apport en nature constitué par la moitié indivise d'une villa sise à Mougins.

Elle fait observer que les charges générées par l'occupation de ce bien ne sont pas supportées par son patrimoine, mais bien par celui de la société civile immobilière.

Elle détient 40% des parts sociales composants la SCI BARU, propriétaire d'un bien immobilier sis au Cannet, lequel est occupé à titre gratuit par un des petit-fils des parties.

A la suite du décès de sa mère, elle se trouve en indivision avec trois autres héritiers en ce qui concerne quatre garage et un bien immobilier (d'une valeur de 170.000 euros), sis à Saint Hyppolite du Fort.

Le fait qu'elle partage sa vie avec un compagnon ne lui confère pour autant aucun droit sur le patrimoine de ce dernier.

Elle ne dispose d'aucun revenu en propre, et ne vit que grâce à la générosité de son compagnon.

L'appelant ne démontre pas en quoi le maintien du paiement de la rente constitue un avantage manifestement excessif, alors que son âge et son état de santé sont autant d'obstacles pour supprimer un avantage équivalent à celui résultant de la volonté antérieure des parties.

La procédure a été clôturée le 21 février 2019.

Par conclusions déposées le 05 mars 2019, Madame [N] a sollicité la révocation de l'ordonnance de clôture aux fins d'admettre deux nouvelles pièces numérotées 33 et 34 que lui a communiqué l'appelant.

DISCUSSION

Sur la révocation de l'ordonnance de clôture :

Postérieurement à l'ordonnance de clôture, l'appelant a communiqué les pièces numérotées 33 et 34 (courrier du 23 février 2019 et conclusions 'papier' non signifiées).

Cette communication tardive n'est justifiée par la survenance d'aucun élément particulier, et ne constitue pas une cause grave au sens de l'article 784 du code de procédure civile.

Il y a donc lieu de rejeter la demande au titre de la révocation de l'ordonnance de clôture intervenue le 21 février 2019.

Sur la recevabilité de la demande de suppression du paiement de la prestation compensatoire:

En l'espèce, le paiement de la rente viagère fixée au titre de la prestation compensatoire prévue par les parties dans leur convention de divorce a été homologuée par jugement de divorce du 03 septembre 1996.

Cette décision est donc intervenue antérieurement aux modifications des dispositions législatives de la loi N° 2000-596 du 30 Juin 2000, et de la loi N° 2004-439 du 26 mai 2004.

C'est par une exacte application des textes régissant la révision des rentes viagères fixées antérieurement à ces modifications, que le premier juge a déclaré recevable la demande formulée par Monsieur [A] au titre de la suppression du paiement de la prestation compensatoire.

En effet, l'article 33 de la loi N° 2004-439 du 26 Mai 2004 prévoit des dispositions transitoires en vue de l'application de la loi dans le temps.

Le point VI de cet article est relatif à la révision des rentes viagères.

Il dispose, dans son alinéa premier, que les rentes viagères fixées avant l'entrée en vigueur de la loi N° 2000- 596 du 30 juin 2000 relative à la prestation compensatoire en matière de divorce peuvent être révisées, suspendues ou supprimées à la demande du débiteur ou de ses héritiers, lorsque leur maintien en l'état procurerait un avantage manifestement excessif au regard des critères posés à l'article 276 du code civil.

Il résulte de ces dispositions que la révision des rentes viagères fixées avant l'entrée en vigueur de la loi N° 2000- 596 du 30 juin 2000 peut toujours être demandé en cas de changement important dans les ressources ou les besoins des parties, que ces rentes aient été fixées par le juge ou par la convention des époux.

Il y donc lieu de confirmer le jugement entrepris qui a déclaré recevable la requête présentée par Monsieur [A].

Sur les mesures avant-dire droit:

C'est également à juste titre que le premier juge, en rappelant qu'il incombe au demandeur de prouver l'existence des modifications dans la situation des parties dont il se prévaut, a rejeté les demandes de Monsieur [A] aux fins de désignation d'un expert et d'un enquêteur social dans le but de déterminer la consistance des patrimoines, les conditions de vie et les ressources des parties.

L'article 146 du code de procédure civile dispose en effet qu'une mesure d'instruction ne peut être ordonnée sur un fait, que si la partie qui l'allègue ne dispose pas d'éléments suffisants pour le prouver.

En aucun cas une mesure d'instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence des partie dans l'administration de la preuve.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement entrepris qui a débouté Monsieur [A] - lequel a par ailleurs pris l'initiative de faire diligenter une enquête privée pour s'assurer de la situtaionéconomoque de Madame [N] - de sa demande au titre de la mise en oeuvre de mesure d'instruction.

Sur le bien fondé le demande de suppression du paiement de la prestation compensatoire :

C'est donc au regard du point VI de l 'article 33 de la loi N° 2004-439 du 26 mai 2004 qu'il convient d'examiner la demande en suppression du paiement de la prestation compensatoire.

La prestation compensatoire versée sous forme de rente peut être révisée, suspendue ou supprimée à la demande du débiteur ou de ses héritiers, lorsque son maintien en l'état procurerait un avantage manifestement excessif au regard des critères posés à l'article 276 du code civil.

L'article 7 de la loi N° 2015-177 du 16 février 2015, d'application immédiate, inséré à l'article 33 de la loi du 26 mai 2004, édicte qu'à ce titre, il est tenu compte de la durée du versement de la rente et du montant déjà versé.

Il doit donc être déterminé soit qu'il existe un changement important dans les ressources ou les besoins de l'une ou de l'autre des parties, soit que le maintien en l'état de la rente procurerait au créancier un avantage manifestement excessif au regard des critères posées par l'article 276 du code civil.

Il convient donc d'examiner la situation des parties au regard de l'ensemble de ces dispositions.

Monsieur [A] procède par affirmation lorsqu'il indique qu'au moment du divorce, il percevait un revenu mensuel de l'ordre de 12.242 euros, puisqu'il ne communique strictement aucune pièce relative à sa situation économique à cette époque.

Force est d'ailleurs de constater que la convention de divorce ne comporte aucune indication quant aux revenus et charges des parties au moment de la dissolution du lien matrimonial.

Pour justifier de ses revenus actuels, il ne communique que des documents rédigés en langue anglaise ou néerlandaise.

Il est cependant possible de déterminer au regard de certaines des mentions figurant sur ces documents, que le revenu imposable de l'intéressé a été de l'ordre de 93.498 dollars, par an, soit 7.791 dollars par mois, ce qui représente une somme mensuelle de l'ordre de 6.876 euros pour l'année 2017.

Monsieur [A] déclare en cause d'appel perce un revenu mensuel de 6.000 dollars par mois (5.295 euros par mois) pour l'année 2018.

Dans sa déclaration sur la composition du patrimoine datée du 07 décembre 2018, il affirme que ses charges mensuelles s'élèvent à la somme mensuelle de 1.574 euros, mais sans justifier de ces dépenses.

Il a constitué le 23 janvier 2006 avec Madame [B], son épouse, la société civile immobilière dénommée HENCO, au capital social de 314.500 euros.

Il a apporté au capital social de cette société la somme de 311.355 euros.

La somme de 3.150 euros a été libérée par Madame [B].

Il détient donc dans cette société 99 parts sociales sur 100.

Cette société est propriétaire d'un bien immobilier sis [Adresse 4], évalué par l'appelant à la somme de 120.000 euros, qui constitue le logement de l'appelant.

Il affirme ne détenir que 50 % des parts sociales de la société COPI, propriétaire de terrains sis en République Dominicaine.

La cour ne dispose d'aucun élément relativement à cette société.

La SARL PICO, constituée le 18 décembre 1998 avec Monsieur [Q] [H], dont l'objet social était la création et l'exploitation, notamment en Guadeloupe, de tous fonds de commerce à vocation touristique, et dans laquelle Monsieur [A] détenait la moitié du capital social, a cessé son activité au 23 novembre 2016.

Cependant, la cour ne dispose non plus d'aucun élément de nature à déterminer quelle a été l'évolution de l'activité de cette structure, les causes de la cessation de son activité, les éléments de son patrimoine éventuellement recueillis par l'appelant au moment de sa dissolution.

Compte tenu de ces éléments, et de l'opacité à l'évidence entretenue par Monsieur [A], pourtant demandeur de la suppression du paiement de la prestation compensatoire, l'appelant ne démontre pas que sa situation a subi une dégradation depuis l'intervention du jugement de divorce.

En ce qui concerne, Madame [N], c'est avec pertinence qu'elle fait plaider que le fait de vivre maritalement, ne lui attribue aucun droit sur le patrimoine de son compagnon, fût-il conséquent.

Elle indique que ses revenus sont constitués par la perception d'une pension de retraite servie par la CARSAT,d'un montant de 457,50 euros par mois.

Il apparaît cependant, à la lecture de l'avis de situation déclarative à l'impôt 2018 sur les revenus 2017, qu'elle a perçu à ce titre la somme annuelle de 14.648 euros, soit 1.207 euros par mois.

Le fait qu'elle détienne 50 % des parts sociales de la société civile immobilière l'Espérance, propriétaire du bien immobilier sis à [Localité 4], ne constitue pas un élément démontrant un accroissement de son patrimoine immobilier.

Il n'est en effet pas inutile de rappeler que les parties, au moment de la dissolution du lien matrimonial, se trouvait en indivision sur ce bien, comme cela ressort de l'article 8 de la convention de divorce, de sorte qu'elle détenait déjà la moitié des droits sur ce bien.

Il est constant qu'à la suite de la constitution de la société civile immobilière au cours de l'année 2012, l'intimée s'est vue attribuer la moitié des parts sociales, en rémunération de l'apport en nature constitué par la moitié indivise du bien immobilier.

L'autre moitié des parts sociales est détenue par la société RIFIORITA REAL ESTATE.

Elle justifie qu'elle détient 40% des parts sociales de la société civile immobilière BARU, constituée le 18 juin 2004 avec Monsieur [L] [D], propriétaire d'un bien immobilier sis au [Localité 5].

Elle affirme que ce bien ne génère aucun revenu locatif, puisqu'il a été mis à la disposition de la famille du petit-fils des parties.

Cette situation se trouve confirmée par la déclaration de revenus 2018, qui ne porte mention d'aucun revenu foncier.

Il est constant que du fait du décès de sa mère survenu au cours de l'année 2016, l'intimée a recueilli la succession de cette dernière, composé de 4 garages et d'une maison sis à Saint Hippolythe du Fort, proposée à la vente en 2017 au prix de 170.000 euros, selon les éléments transmis par l'enquêteur privé mandaté par l'appelant.

Elle se trouve cependant en indivision avec trois autres personnes sur ces biens, ce qui relative considérablement ses droits dans ce patrimoine immobilier.

Dès lors, la situation de Madame [N] ne s'est pas modifiée de manière significative, au sens des dispositions de l 'article 33 de la loi N° 2004-439 du 26 mai 2004.

Au surplus, compte tenu de l'âge de la créancière (69 ans) et du fait que ses revenus propres, constitués d'une modique pension de retraite, ne sont pas susceptibles d'évoluer, le montant du paiement de la prestation compensatoire convenue par les parties, ne constitue pas un avantage manifestement excessif au sens de l'article 276 du code civil .

Sur la demande en paiement de dommages et intérêts :

Madame [N] ne présente aucun argumentaire au soutien de cette demande.

Le fait pour Monsieur [A] d'user de son droit d'appel, au regard des enjeux relatifs à la question de la recevabilité et au bien fondé du maintien du paiement de la prestation compensatoire, ne saurait constituer un abus de droit.

Sur les frais irrépétibles de l'instance et les dépens:

Il serait inéquitable que Madame [N] assume l'intégralité des frais irrépétibles de l'instance de l'instance.

La somme de 4.000 euros lui sera allouée.

Monsieur [A], qui succombe, assumera la charge des dépens.

PAR CES MOTIFS:

La Cour, statuant publiquement, après débats en chambre du conseil, contradictoirement,

REJETTE la demande au titre de la révocation de l'ordonnance de clôture intervenue le 21 février 2019.

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement entrepris.

DEBOUTE Madame [O] [N] de sa demande en paiement de dommages et intérêts.

CONDAMNE Monsieur [B] [A] à payer à Madame [O] [N] la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE Monsieur [B] [A] aux dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 2-2
Numéro d'arrêt : 18/07555
Date de la décision : 07/05/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 6B, arrêt n°18/07555 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-05-07;18.07555 ?
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