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04/04/2019 | FRANCE | N°17/10376

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 04 avril 2019, 17/10376


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5



ARRÊT AU FOND

DU 04 AVRIL 2019

lb

N° 2019/ 234













Rôle N° RG 17/10376 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BAT65







[B] [I] [N]

[P] [D] [D] [O] [E]

[N] [Y] [D] [R] [E]





C/



[X] [K]

[Q] [E] [U] épouse [K]

[H] [V] [K]

[C] [K]





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :




SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON



SELAS LLC ET ASSOCIES



SELARL SELARL GREGORY KERKERIAN ET ASSOCIES



Me Luc COLSON





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de Draguignan en date du 05 Mai 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 2017/226.



APPELA...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 04 AVRIL 2019

lb

N° 2019/ 234

Rôle N° RG 17/10376 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BAT65

[B] [I] [N]

[P] [D] [D] [O] [E]

[N] [Y] [D] [R] [E]

C/

[X] [K]

[Q] [E] [U] épouse [K]

[H] [V] [K]

[C] [K]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON

SELAS LLC ET ASSOCIES

SELARL SELARL GREGORY KERKERIAN ET ASSOCIES

Me Luc COLSON

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de Draguignan en date du 05 Mai 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 2017/226.

APPELANTS

Madame [B] [I] [N], demeurant [Adresse 1]

représentée par la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Claude HESTIN de la SCP DRAP HESTIN NARDINI FERNANDES- THOMANN, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, plaidant

Monsieur [P][D] [D] [O] [E], demeurant [Adresse 1]

représenté par la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Claude HESTIN de la SCP DRAP HESTIN NARDINI FERNANDES- THOMANN, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, plaidant

Madame [N][J] [D] [R] [E], demeurant [Adresse 2]

représentée par la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Claude HESTIN de la SCP DRAP HESTIN NARDINI FERNANDES- THOMANN, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, plaidant

INTIMES

Madame [X] [K] divorcée [K] demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Philippe CAMPOLO de la SELAS LLC ET ASSOCIES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, plaidant

Madame [Q] [E] [U] épouse [K], demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Grégory KERKERIAN de la SELARL SELARL GREGORY KERKERIAN ET ASSOCIES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN substituée par Me Clémence LE GUEN GOZLAN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Monsieur [H] [V] [K], demeurant [Adresse 4]

représenté par Me Grégory KERKERIAN de la SELARL SELARL GREGORY KERKERIAN ET ASSOCIES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN substituée par Me Clémence LE GUEN GOZLAN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Monsieur [C] [K], demeurant [Adresse 5])

représenté par Me Luc COLSON, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 14 Février 2019 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Laure BOURREL, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Laure BOURREL, Président

Madame Hélène GIAMI, Conseiller

Madame Sophie LEONARDI, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 04 Avril 2019.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 04 Avril 2019,

Signé par Madame Laure BOURREL, Président et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCÉDURE, MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Les consorts [E] revendiquent des droits sur un patecq à [Adresse 6], constitué par un acte de partage du 24 décembre 1909 entre les frères et s'urs [X] ( ou [X], selon les actes), ainsi que l'usage d'un chemin charretier.

À ce jour, les consorts [E] sont propriétaires de deux tènement, un au nord et l'autre au sud séparés par les propriétés de Monsieur et Madame [K] et de Madame [K].

Le pateck se situerait entre les habitations des époux [K] et de Madame [K] et le chemin charretier traverserait à travers leurs deux propriétés du sud au nord.

À l'occasion de son divorce d'avec Monsieur [K] et du partage de leur propriété, Madame [K] a tenté d'obtenir un accord avec les consorts [E] pour qu'ils cessent de revendiquer avoir le droit de traverser sa propriété. Ceux-ci ont refusé tout arrangement.

Par exploits des 9 et 29 octobre 2007, les consorts [E] ont assigné Monsieur [K] et Madame [K] (divorcée [K]) devant le tribunal de grande instance de Draguignan afin d'obtenir outre des dommages et intérêts, la remise en état du chemin charretier utilisant le patecq, et la démolition des ouvrages y empiétant.

Par exploits du 12 décembre 2017, les consorts [E] ont assigné Monsieur et Madame [K] acquéreurs de la partie de la propriété [K] qui avait été attribué à Monsieur [K] ensuite du partage consécutif à leur divorce.

Par jugement avant dire droit du 12 décembre 2012, une expertise a été ordonnée et confiée à Monsieur [A] [F] qui sera remplacé par ordonnance 28 mars 2013 par Monsieur [G] [I].

Celui-ci a déposé son rapport le 13 avril 2015 en retenant notamment que les consorts [E] avaient perdu leurs droits sur le patecq ensuite de l'échange effectué par leur auteur en 1975 avec Madame [A], auteur de Monsieur et Madame [K].

Par jugement du 5 mai 2017, le tribunal de grande instance de Draguignan a :

-débouté Madame [B] [N] veuve [E], Monsieur [P] [E] et Madame [N] [E] de leurs demandes tendant à voir :

*constater leurs droits au patecq et au cheminement sur les propriétés [K] [K],

*ordonner la remise en état des lieux sous astreinte de 200 € par jour de retard à compter du jugement à intervenir,

*condamner solidairement les consorts [K] et [K] à leur verser la somme de 200'000 € à titre de dommages et intérêts,

-débouté Madame [X] [K] divorcée [K] de sa demande de dommages et intérêts,

-condamné in solidum Madame [B] [N] veuve [E], Monsieur [P] [E] et Madame [N] [E] à verser à Monsieur [C] [K] la somme de 2000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné in solidum Madame [B] [N] veuve [E], Monsieur [P] [E] et Madame [N] [E] à verser à Madame [X] [K] divorcée [K] la somme de 2000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné in solidum Madame [B] [N] veuve [E], Monsieur [P] [E] et Madame [N] [E] à verser à Monsieur [H] [K] et Madame [Q] [U] épouse [K] la somme de 2000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

-dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

-rejeté tout autre demande,

-condamné in solidum Madame [B] [N] veuve [E], Monsieur [P] [E] et Madame [N] [E] aux dépens incluant les frais d'expertise judiciaire.

Madame [B] [N] veuve [E], Monsieur [P] [E] et Madame [N] [E] ont relevé appel de cette décision par déclaration du 31 mai 2017.

Par conclusions du 15 décembre 2017, qui sont tenues pour entièrement reprises, Madame [B] [N] veuve [E], Monsieur [P] [E] et Madame [N] [E] demandent à la cour de :

« Vu l'article 544 du Code civil,

Vu l'article 701 du Code civil,

Vu la jurisprudence sur le patecq,

Réformer en toutes ses dispositions le jugement entrepris.

À titre principal

Constater les droits au patecq et au cheminement sur les propriétés [K] [K] au profit des consorts [E].

Ordonner la remise en état des lieux sous astreinte de 200 € par jour de retard à compter du jugement à intervenir.

Condamner solidairement les consorts [K] [K] et les consorts [K] à verser aux consorts [E] la somme de 200'000 € de dommages et intérêts .

Débouter les consorts [K] [K] Moret de l'intégralité de leurs demandes.

Donner acte aux consorts [E] de ce qu'ils préciseront par voie de conclusions ampliatives leurs demandes indemnitaires au regard de la nécessité de replanter.

Condamner solidairement les consorts [K] [K] et [K] à verser aux consorts [E] la somme de 5000 € au titre de l'article 700.

Condamner les consorts [K] [K] et [K] aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise, distraits au profit de la SCP Badie Simon Thibaud Juston. »

Par conclusions du 16 octobre 2017, qui sont tenues pour entièrement reprises, Madame [X] [K] divorcée [K] demande à la cour de :

« Vu les articles 703, 706,707 et 1240 du Code civil,

Vu les articles 32-1 et 909 du code de procédure civile

À titre principal :

Confirmer le jugement n° 2017/226 en date du 5 mai 2017 rendu par le tribunal de grande instance de Draguignan en ce qu'il :

-déboute'

Infirmer le jugement n° 2017/226 en date du 5 mai 2017 rendu par le tribunal de grande instance de Draguignan en ce qu'il :

-déboute Madame [X] [K] divorcée [K] de sa demande de dommages et intérêts.

Et en conséquence, condamner pour procédure abusive les consorts [E] sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile, et à verser la somme de 3000 € à Madame [X] [K] au titre de l'article 1240 du code de procédure civile.

À titre subsidiaire :

Confirmer le jugement n° 2017/226 en date du 5 mai 2017 rendu par le tribunal de grande instance de Draguignan en toutes ses dispositions.

En tout état de cause :

Condamner les consorts [E] à verser à Madame [X] [K] la somme de 10'000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamner solidairement les consorts [E] aux entiers dépens qui seront recouvrés directement par la Selas LLC & Associés, agissant par Maître Philippe Campolo, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile. »

Par conclusions du 18 octobre 2017, qui sont tenues pour entièrement reprises, Monsieur [C] [K] demande à la cour de :

« Vu les pièces versées aux débats,

Vu le rapport de l'expert,

Débouter les consorts [E] de toutes leurs demandes, fins et conclusions.

Confirmer le jugement entrepris.

Condamner solidairement les consorts [E] à payer à Monsieur [K] la somme de 5000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamner solidairement les consorts [E] aux frais d'expertise.

Condamner solidairement les consorts [E] aux entiers dépens tant de première instance que d'appel qui seront recouvrés directement par Maître Luc Colson, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile. »

Par conclusions du 17 octobre 2017, qui sont tenues pour entièrement reprises, Monsieur [H] [K] et Madame [Q] [U] épouse [K] demandent à la cour de :

« Vu les anciens articles 1134 et 1147 du Code civil,

Vu les articles 703 et suivants du Code civil,

Vu l'acte de partage du 24 décembre 1909,

Vu le rapport d'expertise de Monsieur [I] du 10 avril 2015,

Vu les pièces versées aux débats,

Confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Draguignan le 5 mai 2017.

En tout état de cause,

Dire et juger que les consorts [E] n'établissent pas la réalité de leurs droits sur le patecq litigieux, ni, par conséquent, sur le chemin charretier attaché au dit patecq dans l'acte de partage du 24 décembre 1909.

En conséquence,

Les débouter de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions.

Subsidiairement, et si par extraordinaire des droits au patecq étaient reconnus aux consorts [E], dire et juger qu'il conviendra de déterminer l'emplacement exact du chemin charretier utilisant le patecq et de déterminer les droits des consorts [E] à utiliser ledit chemin, ce afin que les époux [K] ne subissent aucun préjudice du fait de l'éventuel passage d'engins agricoles sur leur propriété.

En tout état de cause,

Condamner solidairement les consorts [E] à payer aux époux [K] une somme de 5000 €

au titre des dispositions de l'article 700 du CPC.

Condamner solidairement les consorts [E] aux entiers dépens de l'instance, distraits au profit de la selarl G. Kerkerian & Associés, avocats aux offres de droit, conformément aux dispositions de l'article 604 du CPC. »

MOTIFS

Sur la pièce 42 déposée par les consorts [E]

Aux termes de l'article 15 du code de procédure civile, les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense.

La veille de la clôture de l'instruction de l'affaire, les consorts [E] ont déposé une ultime pièce n° 42.

Nécessairement, les autres parties n'ont pu prendre connaissance de cette pièce, et surtout l'analyser, et apprécier s'il y avait lieu d'apporter des modifications à leurs écritures, et ce avant l'ordonnance de clôture.

Dès lors, il y a eu atteinte au principe du contradictoire.

Cette pièce n° 42 des appelants sera donc écartée des débats.

Sur le pateck

Un patecq est une institution de droit coutumier provençal reconnue par la jurisprudence et constitué par un espace à vocation originairement agricole dépendant de bâtiments à l'usage desquels il reste attaché, même après la division de ces derniers. Le patecq est soumis au régime de l'indivision forcée, de nature perpétuelle, nul ne pouvant y mettre un terme, par dérogation au régime de l'indivision classique, les droits au patecq ne se perdant pas, même par le non usage.

Toutefois, il peut être mis fin au régime de l'indivision perpétuelle et forcée avec l'accord unanime de tous les indivisaires.

Il suit de là que ne peuvent revendiquer les droits d'usage attachés à un patecq que les personnes propriétaires actuels de l'immeuble qui bénéficiaient du patecq à sa création.

Dans la présente instance, le patecq a été créé par l'acte de partage du 24 décembre 1909 entre les frères et s'urs [X].

Selon cet acte, qui ne précise pas les références cadastrales de la propriété objet du partage, cette propriété [X] située [Adresse 6], a été partagée en 6 tènements attribués au cinq copartageants, Madame [U] [Q], Mademoiselle [Z] [X], Monsieur [M] [X] (2 tènements), Monsieur [K] [X] et Monsieur [Y] [X].

Le bâtiment à usage de loges à cochons, d'écurie, de grenier à foin, cave, poulailler, et comportant aussi une cuisine avec de petites pièces au-dessus et qui se trouve sur la propriété d'origine est également partagé en cinq parties distinctes, chacune d'elles étant attribuée à un des copartageant. C'est aujourd'hui la maison des époux [K].

Le patecq est ainsi défini dans cet acte :

« Tout autour du bâtiment à [Adresse 6], il sera laissé un patecq commun et indivis entre les copartageants qui aura six mètres quatre vingt centimètres au levant, cinq mètres cinquante centimètres au couchant, cinq mètres au midi et cinq mètres au Nord. »

Par acte du 20 février 1998, rectifié et complété par acte du 15 avril 1998, Madame [W] [J] épouse [A] a vendu à Monsieur [C] [K] et son épouse Madame [X] [K] une propriété située à [Adresse 6], soit les parcelles cadastrées section I n° [Cadastre 1] à [Cadastre 1], n° [Cadastre 1] à [Cadastre 2], et n° [Cadastre 3] à [Cadastre 4].

Ensuite de leur divorce, les époux [K] ont partagé cette propriété selon acte du 7 décembre 2006, et par acte du 16 mai 2007, Monsieur [C] [K] a vendu la partie qui lui avait été attribuée à Monsieur [H] [K] et son épouse Madame [T] [U].

Les consorts [E] sont propriétaires de deux tènements nord et sud qui sont séparés par les propriétés [K] et [K], et qui leur ont été transmises par succession de leur mari et père, soit [D] [E]. Le père de [D] [E] était [D] [E].

Le tènement nord des consorts [E] est cadastré aujourd'hui section I n° [Cadastre 3], [Cadastre 4], [Cadastre 4] et [Cadastre 4]. Ce tènement se situe en bordure et au nord d'un chemin communal qui est matérialisé sur les cartes d'état-major de 1930 et qui apparaît sur toutes les photographies que l'expert a jointes à son rapport.

Ces parcelles étaient anciennement cadastrées n°[Cadastre 5], [Cadastre 6], [Cadastre 7], [Cadastre 8], [Cadastre 9], [Cadastre 9], [Cadastre 9], [Cadastre 9], [Cadastre 9], [Cadastre 9] et [Cadastre 9].

D'après l'attestation de propriété immobilière du 18 novembre 1999, établie dans le cadre de la succession de [D] [E], époux de Madame [B] [N], ces parcelles ont été dévolues au père du défunt, [D] [E], aux termes d'un testament partage reçu par Maître [D] le 17 mars 1952.

L'acte de vente du 14 avril 1951 entre [M] [X] et [D] [E] confirme cette analyse puisqu'il est mentionné la vente de deux parcelles dont « L'une de ces parcelles en oliviers et bois confronte du Nord l'acquéreur' »

Contrairement à ce que soutiennent les consorts [E] les parcelles constituant leur tènement nord ne proviennent donc pas de la vente du 14 avril 1951 entre [M] [X] et [D] [E].

Les parcelles concernées par cette vente du 14 avril 1951 étaient cadastrées [Cadastre 10]p, [Cadastre 10]p, [Cadastre 10], [Cadastre 10], [Cadastre 10]p et [Cadastre 6].

Des pièces produites et des investigations de Monsieur [I], expert, la parcelle [Cadastre 6] correspond à une partie du tènement sud des consorts [E].

Par contre les parcelles [Cadastre 10]p, [Cadastre 10]p, [Cadastre 10], [Cadastre 10], [Cadastre 10]p étaient situées au sud du chemin communal nord et au nord de la propriété [X]. Elles ont ensuite étaient numérotées [Cadastre 3], [Cadastre 3], [Cadastre 3], et [Cadastre 3].

Or, par acte du 16 juin 1975 sous condition suspensive, acte réitéré le 17 novembre 1975, Monsieur [D] [E] a échangé avec Madame [W] [J] épouse [A] les parcelles cadastrées section I n° [Cadastre 3], [Cadastre 4], [Cadastre 4] ainsi que les parcelles [Cadastre 4] et [Cadastre 6] contre les parcelles cadastrées section I n°[Cadastre 3] et [Cadastre 4] assorti du paiement d'une soulte de 8000 Fr.

La désignation des parcelles échangées par Monsieur [D] [E] est ainsi rédigée :

« Une parcelle de terre en nature de oliviers et bois, vignes sise sur le territoire de la commune de [Adresse 6] et qui figure au cadastre rénové de ladite commune Section I numéro [Cadastre 3] une contenance de trente ares quarante centiares, [Cadastre 3] pour vingt-cinq ares soixante centiares et [Cadastre 3] pour une contenance de vingt-trois ares vingt-cinq centiares.

Ainsi qu'une partie de vieille bâtisse à usage d'habitation en état vétuste sise même commune et lieu-dit et qui figure au cadastre rénové de ladite commune section I numéro[Cadastre 4] pour 35 centiares.

Cette partie de maison avec droit au patecq cadastrée Sn I n° [Cadastre 6] pour deux ares quatre-vingt-dix-huit centiares. »

Il suit de là que [D] [E] a échangé avec Madame [A] son droit au patecq qu'il avait acquis ensuite de son achat du 14 avril 1951.

Les consorts [E] invoquent alors d'une part, que [D] [E] n'a pas échangé la totalité des parcelles acquises de [M] [X] par l'acte du 14 avril 1951 dans la mesure où il a conservé environ 37 ares, et d'autre part, qu'ensuite de l'échange de 1975, il a obtenu des parcelles, I [Cadastre 3] et I [Cadastre 3], qui provenaient de la propriété [X].

En effet, par acte du 12 avril 1943, [K] [X] a vendu à [S] [H] la partie qu'il avait reçue ensuite du partage de 1909, ainsi que la part de sa s'ur [L] [X] épouse [T] qu'il avait acquise par acte du 28 avril 1911, et de parcelles acquises le 21 février 1934 de Madame [F] [P] épouse [R].

Par comparaison au plan cadastral ancien, Monsieur [I], expert, a identifié que dans les parcelles objet de cette vente du 12 avril 1943, on retrouve les parcelles constituant les fonds [K] et [K], anciennement cadastrées [Cadastre 10], [Cadastre 10], [Cadastre 10], [Cadastre 10] et [Cadastre 10], et une partie du tènement sud des consorts [E], les parcelles numéro [Cadastre 3], [Cadastre 4], [Cadastre 4], et [Cadastre 2] qui se retrouvent dans la parcelle numérotée ensuite [Cadastre 6].

Par acte du 4 novembre 1958, la veuve de [S] [H], [I] [S], a vendu en viager à [FF] [W] sa propriété qui contenaient notamment les parcelles acquises de [K] [X].

Puis [FF] [W] et son épouse ont cédé cette propriété les 16 et 19 mars 1959 à [LL] [M] et son épouse à charge pour eux de payer une partie du prix comptant et de continuer à servir la rente viagère à Madame [H].

Les mauvaises photocopies des deux actes du 4 novembre 1958, et des 16 et 19 mars 1959 qui sont produits par les parties sont peu lisibles notamment en ce qui concerne la désignation des parcelles vendues.

Ensuite par acte du 24 mars 1975, Monsieur et Madame [M] ont vendu cette propriété à Madame [W] [J] épouse [A]. Cet acte est surtout plus clair et complet. Il est ainsi précisé que sont vendues les parcelles situées à [Adresse 6], anciennement cadastrées section I n° [Cadastre 10]p, [Cadastre 10]p, [Cadastre 10]p, [Cadastre 10]p, [Cadastre 6]p, [Cadastre 10], [Cadastre 10], [Cadastre 10]p, [Cadastre 11], [Cadastre 10]p, [Cadastre 10]p, [Cadastre 10]p et qui figure au cadastre rénové section I numéro[Cadastre 12], [Cadastre 4], [Cadastre 4], [Cadastre 4], [Cadastre 4], [Cadastre 4], [Cadastre 4], et [Cadastre 13] étant précisé que la parcelle numéro [Cadastre 13]provient de la réunion des parcelles anciennement cadastrées [Cadastre 4] et [Cadastre 4].

Effectivement, comme le constate Monsieur [I], expert, dans son rapport, lors de l'échange de 1975, [D] [E] a reçu des parcelles provenant du partage [X] de 1909, et plus particulièrement, une partie du tènement qui avait été alloué à [K] [X].

Cependant, au regard de la volonté exprimée clairement par [D] [E] de renoncer au patecq en même temps que ce qu'il échangeait les parcelles supportant les bâtisses, le fait qu'il conserve des parcelles issues de ce partage est sans emport.

Au demeurant, ceci est conforme avec la définition du patecq rappelée ci-dessus, et aux exemples de patecq donnés par la jurisprudence : en principe, un patecq permet la libre circulation des propriétaires riverains de cet espace. Dans l'acte de partage de 1909, le patecq permettait le libre accès des copartageants à la bâtisse qui avait été partagée entre les 5 frères et s'urs [X].

Les propositions effectuées par Madame [K] pour tenter de trouver une issue amiable aux prétentions des consorts [E] n'est d'aucun effet sur la solution du présent litige.

Compte tenu de l'échange portant sur la part de bâtisse et du patecq y associé par [D] [E] avec Madame [A], les consorts [E] seront déboutés de leurs demandes à être restaurés dans leurs droits sur ledit patecq, et donc de leur demande subséquente de remise en état des lieux.

Sur le chemin charretier

Dans l'acte de partage [X] du 24 décembre 1909, il est précisé :

« Le chêne qui se trouve dans ce patecq est laissé aussi indivis. Personne ne pourra le couper ; le produit des glands appartiendra cependant à ladite demoiselle [Z] [Y] [X].

Le puits qui se trouve dans le lot de la dame [Q] est laissé en commun et indivis entre les copartageants.

Le chemin charretier qui arrive vers Nord au bâtiment servira à tous les lots qui ont été ci-dessus formés dans cette propriété quartier des Clos ainsi que le sentier qui sépare le lot de la dame [Q] et le lot de la demoiselle [Z] [Y] [X] et qui aboutit au bâtiment.

'

Le chemin quartier des Clos qui part du bâtiment, traverse l'aire, traverse le lot de [Z] [Y] [X] et borde ce même lot au midi, servira à l'exploitation de [K] [X] et[Y] [J] [X].

Le hangar qui se trouve au derrière le bâtiment, sera commun et indivis entre tous les copartageants. »

Le sentier qui sépare les lots de [U] [Q] et de [Z] [X] et qui permettait, semble-t-il, d'accéder au puits indivis, n'est pas l'objet du présent litige.

Surtout, il suit de ses énonciations et de la différence de traitement, qu'il n'y a pas un seul chemin, mais deux, un chemin charretier qui vient du nord et rejoint le bâtiment, et un second qui part du bâtiment et se dirige au sud.

D'après le plan de Monsieur [I], le rétablissement du chemin tel que décrit dans l'acte de partage de 1909, venant du sud, passerait entre la terrasse de la maison de Mme [K] et sa piscine.

La jonction entre les deux chemins s'effectuerait en longeant la maison des consorts [K], en circulant sur l'assiette du patecq.

Dans son rapport, Monsieur [I] démontre à l'aide de la carte d'état-major de 1930, des plans cadastraux, anciens et rénovés, et de photographies, qu'au nord, il existe un chemin communal qui a toujours existé entre le tènement Nord des consorts [E] et l'ancienne propriété [X], devenue la propriété [K], que de même, il existe un chemin au sud séparant aujourd'hui la propriété [K] et le tènement sud des consorts [E]. Il note l'existence aussi d'un chemin situé plus à l'ouest partant du chemin sud et rejoignant le chemin Nord, avec une antenne se dirigeant vers l'est et qui est aujourd'hui l'accès à la propriété [K].

L'accès à la propriété [K] s'effectue aujourd'hui par le chemin revendiqué partant du bâtiment vers le sud.

En ce qui concerne lesdits chemins revendiqués, sur les photographies retrouvées et exploitées par l'expert, ils étaient visibles en 1950 dans leur partie nord et sud par rapport à la bâtisse, ils ont disparu en 1960, en 1971, en 1972, n'est visible que le chemin au nord de la bâtisse, en 1973, n'apparaît que le chemin au sud de la bâtisse.

En 1975, année de l'échange entre [D] [E] et Madame [A], le chemin au sud de la bâtisse revendiqué apparaît, mais pas le chemin partant de la bâtisse vers le nord. Le chemin ouest est visible, ainsi que son antenne se dirigeant vers la bâtisse.

En 1981, le chemin partant vers le sud est visible, et le chemin partant vers le nord semble se dédoubler.

À compter des photographies de 1988, le chemin nord revendiqué n'est plus visible, alors que le chemin partant vers le sud est toujours visible.

Enfin, d'après l'acte de vente du 4 novembre 1958 de Madame [I] [S] veuve [H] à Monsieur [FF] [W], à cette date, la maison qui deviendra celle de Madame [K] était en construction.

À la différence du patecq, du chêne, du puits, et du hangar, ni le chemin charretier qui part du bâtiment et rejoint au nord le chemin communal, ni le chemin qui part du bâtiment vers le sud, lequel est limité à la seule exploitation de [K] [X] et [Y] [X], ni d'ailleurs le sentier qui sépare les lots de [U] [Q] et de [Z] [X], n'ont été expressément désignés comme étant en indivision.

Les copartageants ont donc écarté l'indivision pour ces deux chemins.

À la lecture de cet acte de 1909, il résulte que le chemin charretier partant de la bâtisse vers le nord permettait à tous les copartageants de la bâtisse de rejoindre le chemin nord communal, qui sépare aujourd'hui la propriété [K] du tènement nord des consorts [E], lequel chemin charretier était en 1909 l'accès principal à la propriété [X].

Ce chemin au nord de la bâtisse, qui est un accessoire du patecq mais n'en fait pas partie, est donc une servitude qui bénéficiait aux 6 tènements créés, la lecture de l'acte de partage de 1909 permettant de dire que le fonds servant était le tènement attribué à [U] [Q].

En ce qui concerne le chemin revendiqué partant de la bâtisse vers le sud, l'acte de partage de 1909 précise que ce chemin qui traverse le lot de [Z] [X] et borde ce même lot au midi, servira à l'exploitation de [K] [X] et [Y] [J] [X].

Il s'agit donc d'une servitude créée au bénéfice des fonds dominants de [K] [X] et [Y] [J] [X], le fonds servant étant celui de [Z] [X]. Il est rappelé que les consorts [E] ont pour auteurs [K] [X] et [Y] [J] [X] en vertu de l'acte de vente du 14 avril 1951 et de l'échange de 1975.

Cependant, l'article 706 du Code civil énonce qu'une servitude est éteinte par le nom usage pendant 30 ans.

Les consorts [E] soutiennent qu'ils utilisaient ces 2 chemins, qu'ils désignent dans leurs écritures comme un seul et unique chemin, pour se rendre de leur tènement sud à leur tènement nord, et ce depuis moins de trente ans.

Cependant, outre qu'il a été démontré ci-dessus que la maison de Madame [K] a été construite en 1958, que la partie nord de ce chemin n'existe plus depuis 1988, ce qui empêche toute circulation du sud au nord, les auteurs des consorts [E] ne pouvaient plus circuler, sur le patecq à compter de l'échange de 1975. En outre, Madame [K] explique qu'à compter de cet échange, les consorts [E] avaient obtenu la tolérance par Madame [A] de passer sur sa propriété, soit d'utiliser le chemin situé à l'ouest de sa propriété, qui joint le chemin sud au chemin nord et que cette tolérance avait duré jusqu'en 2011, année au cours de laquelle l'actuel propriétaire, Monsieur [CC] [O], a installé une barrière. Dans leurs écritures, les consorts [K] indiquent que les consorts [E] bénéficieraient d'une servitude de passage sur d'autres terrains, mais ils n'en justifient pas.

Depuis au moins 1975, les auteurs des consorts [E] n'ont donc plus utilisé ces deux chemins.

Les attestations produites par les consorts [E], imprécises quant à la date des faits relatés, ou contraires aux constatations matérielles de l'expert sur les photographies ci-dessus énoncées, sont inopérantes pour justifier que les appelants ont utilisé cette servitude depuis moins de 30 ans.

Les consorts [E] qui échouent à démontrer qu'il n'y a pas prescription, seront donc déboutés de toutes leurs demandes.

Sur les demandes d'amende civile et de dommages et intérêts de Mme [K]

Nonobstant la solution adoptée par la Cour, il ne résulte pas des développements qui précèdent que les consorts [E] ont agit avec malignité et intention volontaire de nuire, et que leurs droits d'ester en justice et d'interjeter appel ont dégénéré en abus.

Mme [K] sera déboutée de ses demandes d'amende civile et de dommages et intérêts.

Le jugement entrepris sera donc confirmé et sera complété par le débouté de Mme [K] de sa demande d'amende civile.

Sur les autres demandes

L'équité commande de faire bénéficier les époux [K], Mme [K] et M. [K] des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Les consorts [E] qui succombent, seront condamnés aux dépens qui comprendront les frais d'expertise judiciaire, et seront déboutés de leur demande d'indemnisation au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire,

Ecarte des débats la pièce n° 42 produite par Mme [B] [N] veuve [E], M. [P] [E] et Mme [N] [E],

Confirme le jugement déféré,

Y ajoutant,

Déboute Mme [X] [K] de sa demande d'amende civile,

Condamne Mme [B] [N] veuve [E], M. [P] [E] et Mme [N] [E] à payer à Mme [X] [K] d'une part, à M. [C] [K] d'autre part, et enfin à Mme [Q] [U] épouse [K] et M. [H] [K] la somme de 3000 € (3000 € x 3) au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus de la somme déjà allouée de ce chef en 1ère instance,

Déboute Mme [B] [N] veuve [E], M. [P] [E] et Mme [N] [E] de leur demande d'indemnisation au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme [B] [N] veuve [E], M. [P] [E] et Mme [N] [E] aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-5
Numéro d'arrêt : 17/10376
Date de la décision : 04/04/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 4A, arrêt n°17/10376 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-04-04;17.10376 ?
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