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21/02/2019 | FRANCE | N°17/02857

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-3, 21 février 2019, 17/02857


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-3

(anciennement dénommée 3ème Chambre A)



ARRÊT AU FOND

DU 21 FEVRIER 2019



N° 2019/080







N° RG 17/02857 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BAAYQ







SA SWISS LIFE PRÉVOYANCE ET SANTÉ





C/



[W] [Y]





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Agnès ERMENEUX-CHAMPLY



Me Sophie MORREEL WEBE

R









Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 10 Janvier 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 13/05976.





APPELANTE



SA SWISS LIFE PRÉVOYANCE ET SANTÉ

R.C.S. de NANTERRE sous le numéro B 322 215 021, demeur...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-3

(anciennement dénommée 3ème Chambre A)

ARRÊT AU FOND

DU 21 FEVRIER 2019

N° 2019/080

N° RG 17/02857 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BAAYQ

SA SWISS LIFE PRÉVOYANCE ET SANTÉ

C/

[W] [Y]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Agnès ERMENEUX-CHAMPLY

Me Sophie MORREEL WEBER

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 10 Janvier 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 13/05976.

APPELANTE

SA SWISS LIFE PRÉVOYANCE ET SANTÉ

R.C.S. de NANTERRE sous le numéro B 322 215 021, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Agnès ERMENEUX-CHAMPLY de la SCP ERMENEUX-ARNAUD- CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

plaidant par Me Marc BOUYEURE, avocat au barreau de LYON, substitué par Me AADSSI BOUCHRA, avocat au barreau de LYON

INTIME

Monsieur [W] [Y]

né le [Date naissance 1] 1959, demeurant [Adresse 2]

représenté et plaidant par Me Sophie MORREEL WEBER, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 09 Janvier 2019 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Florence TANGUY, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Mme Marie-Brigitte FREMONT, Présidente

Mme Béatrice MARS, Conseiller

Mme Florence TANGUY, Conseiller rapporteur

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Jocelyne MOREL.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 21 Février 2019.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 21 Février 2019,

Signé par Mme Marie-Brigitte FREMONT, Présidente et Madame Jocelyne MOREL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Par contrat n°A 1980.1001, ayant pris effet au 1er janvier 1997 remplaçant un contrat préexistant n°A 1265-1003 , les laboratoires Mverck Sharp & Dohme Chibret (M.S.D) ont souscrit auprès

de la société Suisse assurances générales sur la vie humaine un contrat d'assurance de groupe ayant pour objet de garantir ses salariés contre le risque invalidité-décès notamment.

Le 20 avril 1990, M. [W] [Y] a adhéré à ce contrat d'assurance groupe.

Le [Date décès 1]. 2011, [V] [B] épouse de M. [Y], est décédée à l'âge de 49 ans et la société Swisslife a adressé à M. [Y] un chèque de 34 759 euros :

-soit 32 991,21 euros au titre du capital pré-décès correspondant à 40% du salaire de base de 82.478,03 euros (option A par défaut),

-et 1 767,60 euros au titre du capital frais d'obsèques.

Reprochant à la société Swisslife d'avoir commis une faute contractuelle en ne démontrant pas lui avoir remis le bulletin individuel d'adhésion mentionnant l'option choisie, et en ne l'informant pas du régime de l'option souscrite et de la faculté de la modifier, M. [Y] a fait assigner cette compagnie d'assurance en responsabilité sur le fondement des articles 1147 du code civil et L.112-2 du code des assurances, en sollicitant le paiement, avec exécution provisoire, de la somme de 64.214,82 euros à titre de dommages-intérêts.

Par jugement du 10 janvier 2017, le tribunal de grande instance de Grasse a :

-condamné la Swisslife à verser à M. [W] [Y] :

*la somme de 33 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de la perte de chance par lui subie de pouvoir prétendre au versement du capital pour pré-décès de son conjoint sur la base des garanties prévues par les options B, C ou D,

*ainsi qu'une indemnité de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

-rejeté la demande d'exécution provisoire ;

-condamné la Swisslife aux entiers dépens.

Par déclaration du 13 février 2017, la société Swisslife a relevé appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions remises au greffe le 31 août 2017, et auxquelles il y a lieu de se référer, elle demande à la cour :

-de réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

-de débouter M. [Y] de toutes ses prétentions,

-de condamner M. [Y] à payer à la société Swisslife la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

-de le condamner aux dépens de première instance et d'appel.

Elle prétend qu'il appartient à l'adhérent, en application des stipulations contractuelles, de rapporter la preuve de l'option choisie et elle soutient que l'option A par défaut n'apparaissant pas défavorable à l'adhérent, celui-ci ne rapporte pas la preuve d'un réel préjudice.

Par conclusions remises au greffe le 5 juillet 2017, et auxquelles il y a lieu de se référer, M. [W] [Y] demande à la cour :

-vu l'article 1147 du code civil,

-vu les articles 112-2 et R 112-3 du code des assurances,

-de déclarer recevable l'appel interjeté par Swislife mais mal fondé,

-de dire et juger que l'assureur a commis une faute contractuelle susceptible d'engager sa responsabilité en ne démontrant pas avoir remis à l'assuré le bulletin individuel d'adhésion et en ne versant pas aux débats le second exemplaire de ce document,

-de dire et juger que l'assureur a manqué à son obligation de conseil et d'information en n'informant pas l'assuré du régime de l'option souscrite et la possibilité de modifier annuellement l'option choisie ainsi que des conséquences des choix de l'assuré,

-en conséquence,

-de confirmer le jugement entrepris sauf en ce qui concerne le montant des dommages et intérêts alloués,

-de condamner la société Swisslife au paiement de la somme de 64 214,82 euros de dommages et intérêts à M. [Y],

-de la condamner au paiement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de

procédure civile, outre les dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 décembre 2018.

MOTIFS :

La société Swiss Life a appliqué l'option A par défaut en l'absence d'élément permettant de déterminer si M. [Y] a effectué un choix lors de son adhésion et quelle a été l'option choisie.

Elle s'est ainsi fondée sur un guide pratique d'avril 2008 imposant à l'assuré de conserver les volets des formulaires, et précisant qu'en cas de contestation, le volet retourné par la société Swisslife sera la preuve du choix du bénéficiaire. Ce guide pratique qui est postérieur à l'adhésion de M. [Y] n'a pas valeur contractuelle et la société Swisslife ne peut donc se prévaloir de stipulations contractuelles faisant peser sur l'adhérent la preuve de l'option choisie.

Il appartient à la société Swisslife qui prétend que l'option A est applicable de rapporter la preuve d'une absence de choix par l'adhérent ou du choix par celui-ci de l'option A.

Cette preuve devrait résulter du bulletin d'adhésion retourné par l'assureur. Or ce bulletin n'est pas produit, la société Swisslife se contentant de verser au débat la première page du bulletin d'adhésion et non la page comportant l'option choisie et la signature de l'adhérent. En outre M. [Y] affirme ne jamais avoir eu retour du bulletin d'adhésion et plusieurs autres salariés du même établissement attestent se trouver dans la même situation.

La SA Swisslife, en ne produisant pas ce bulletin d'adhésion, place l'adhérent dans l'impossibilité de bénéficier d'une autre option que l'option A qui s'appliquerait à défaut d'un autre choix.

En outre elle ne démontre pas avoir rempli son obligation d'information par la remise, lors de la souscription, des documents contractuels informant l'adhérent :

-des garanties offertes,

-de la nécessité de s'assurer que le volet du formulaire d'adhésion lui a été retourné,

-de l'obligation de le conserver à titre de preuve,

-de la possibilité de modifier ultérieurement son choix.

Les manquements de l'assureur à ses obligations contractuelles sont donc établis.

La société Swisslife prétend que l'option A n'est pas globalement désavantageuse pour M. [Y] qui ne subirait aucun préjudice, faute pour lui de justifier avoir perdu la chance de souscrire à une option plus favorable. Elle fait ainsi valoir que les garanties prévues par l'option A étaient les plus équilibrées et les plus cohérentes par rapport à la situation personnelle de M. [Y] et que pour bénéficier d'un capital plus élevé en cas de pré-décès de son conjoint ou d'une personne à charge, il aurait dû accepter que d'autres garanties soient moins élevées, et notamment le capital susceptible d'être versé à son conjoint survivant ou à ses enfants en cas de survenance de son propre décès.

Il n'en reste pas moins que l'option A n'est pas la plus favorable en cas de pré-décès du conjoint, que la société Swisslife ne rapporte pas la preuve du choix réellement fait par M. [Y] et que celui-ci n'a pu modifier son choix initial en fonction de l'évolution de sa situation ou de sa seule volonté. M. [Y] a donc bien subi une perte de chance d'être indemnisé sur la base d'une autre option.

M. [Y] réclame le paiement de dommages et intérêts de 64 214,82 euros correspondant à la différence entre le capital décès de l'option A et celui résultant des autres options. Il n'est cependant pas certain qu'il aurait choisi une autre option que l'option A.

Compte tenu que cette option était globalement un régime équilibré pour M. [Y] au regard de sa situation personnelle, sa perte de chance de choisir une autre option sera évaluée à 25% et il lui sera ainsi alloué la somme de 16 000 euros en réparation de son préjudice.

Il serait inéquitable de laisser à sa charge les frais irrépétibles qu'il a été contraint d'exposer.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré,

INFIRME le jugement déféré en ce qui concerne le montant des dommages et intérêts alloués à M. [Y] ;

Le CONFIRME pour le surplus ;

Statuant à nouveau ;

CONDAMNE la SA Swisslife prévoyance et santé à payer à M. [Y] la somme de 16 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de la perte de chance par lui subie de pouvoir prétendre au versement du capital pour pré-décès de son conjoint sur la base des garanties prévues par les options B, C ou D ;

CONDAMNE la SA Swisslife prévoyance et santé à payer à M. [Y] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SA Swisslife prévoyance et santé aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés contre elle conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-3
Numéro d'arrêt : 17/02857
Date de la décision : 21/02/2019

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 3A, arrêt n°17/02857 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-02-21;17.02857 ?
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