COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-8
ARRÊT AU FOND
DU 18 JANVIER 2019
N°2019/97
Rôle N° RG 18/00262 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BBXP2
CPCAM DES BOUCHES DU RHONE
C/
Bernard X...
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
CPCAM DES BOUCHES DU RHONE
Me Paule Y..., avocat au barreau de MARSEILLE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale des BOUCHES-DU-RHÔNE en date du 30 Novembre 2017, enregistré au répertoire général sous le n° 21404225.
APPELANTE
CPCAM DES BOUCHES DU RHONE, demeurant [...]
représenté par Mme Stéphanie Z... (Inspectrice Juridique) en vertu d'un pouvoir spécial
INTIME
Monsieur Bernard X..., demeurant [...]
représenté par Me Paule Y..., avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Décembre 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Pierre SAINTE, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
M. Gérard B..., Président
Madame Florence DELORD, Conseiller
Madame Marie-Pierre SAINTE, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Nathalie ARNAUD.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 18 Janvier 2019.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 18 Janvier 2019
Signé par M. Gérard B..., Président et Madame Nathalie ARNAUD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Selon déclaration reçue au greffe le 4 janvier 2018, la représentante de la Caisse Primaire Centrale d'Assurance Maladie des Bouches du Rhône (ci-après la CPCAM des Bouches du Rhône) a relevé appel du jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches du Rhône du 30 novembre 2017 lequel a, d'une part, déclaré irrecevable, pour défaut de capacité à agir, l'action de Bernard X... en contestation de la décision rendue le 24 juin 2014 par la commission de recours amiable ayant estimé bien fondée la mise recouvrement à son encontre de la somme de 8.300,74 euros correspondant à des arrérages d'allocation supplémentaire d'invalidité versés à tort et sur une base erronée pour la période du 1er novembre 2011 au 30 septembre 2013 et d'autre part, a débouté la CPCAM des Bouches du Rhône de son action en répétition de l'indu, faute de notification au curateur de Bernard X... lors de la phase non contentieuse.
A l'audience de plaidoirie du 6 décembre 2018, par des conclusions déposées par sa représentante a demandé à la cour - à titre principal - d'infirmer le jugement en ce qu'il a dit que la notification d'indu aurait dû être effectuée auprès du curateur de Bernard X... et, par conséquent, de faire droit à sa demande tendant au recouvrement de la somme de 8.123,10 euros.
Elle a sollicité sa confirmation en ce qu'il a jugé irrecevable le recours de ce dernier pour défaut de capacité à agir en l'absence de l'assistance de son curateur.
Par ses dernières conclusions déposées à l'audience, Bernard X... a demandé à la cour - à titre principal - de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la CPCAM des Bouches du Rhône de sa demande en répétition de l'indu et - à titre subsidiaire - de dire et juger que cette dernière est mal fondée à lui réclamer un indu d'arrérages d'allocation supplémentaire pour la période du 1er novembre 2011 au 30 septembre 2013.
A titre infiniment subsidiaire, il a sollicité le bénéfice des plus larges délais de paiement.
MOTIFS DE LA DECISION
Mais attendu que par un jugement du 7 décembre 2009, le juge des tutelles de Marseille a placé Bernard X... sous le régime de la curatelle simple et désigné Henri A..., mandataire judiciaire à la protection des majeurs pour le contrôler et l'assister dans la gestion de ses biens et de sa personne ;
Que Bernard X... a bénéficié de ce régime de protection jusqu'à un jugement de main levée de la mesure du 10 mai 2016 ;
Que, par une lettre recommandée avec demande d'accusé de réception du 6 novembre 2013, la CPCAM des Bouches du Rhône a notifié, sur le fondement de l'article L815.1 du code de la sécurité sociale, au seul Bernard X... une demande de remboursement d'un indu sur le versement de l'allocation supplémentaire d'invalidité pour la période du 1er décembre 2011 au septembre 2013 et ce, pour la somme totale de 8.300,70 euros ;
Que, par une lettre recommandée avec demande d'accusé de réception du 21 février 2014, la CPCAM des Bouches du Rhône lui a de nouveau notifié sa demande de remboursement de cet indu mais en lui indiquant qu'il restait redevable de la somme de 8.135,10 euros ;
Qu'elle lui a également notifié sa possibilité de saisir la commission de recours amiable en contestation de cette mise en demeure ;
Que, par une décision rendue le 26 juin 2014, la commission de recours amiable a constaté le bien-fondé de l'indu et rejeté le recours formé par Bernard X... ;
Qu'au soutien de son appel, la CPCAM des Bouches du Rhône argue de la régularité de son action en répétition de l'indu en soutenant, qu'en application des dispositions de l'article 467 du code civil, la double signification au majeur protégé et à son curateur n'est imposé à peine de nullité que lorsque le majeur protégé est destinataire d'un acte de procédure ;
Qu'elle ajoute que la notification de payer un indu ne constitue pas un acte de procédure et invoque l'article 651 du code de procédure civile précisant que la notification faite par acte d'huissier est une signification ;
Qu'elle en déduit qu'elle n'était pas tenue d'adresser la notification de l'indu au curateur de Bernard X... et ce, d'autant plus qu'elle ne savait pas qu'il avait été placé sous le régime de la curatelle simple ;
Qu'en réplique, Bernard X... rappelle qu'il a fait l'objet d'une mesure de curatelle du 7 décembre 2009 au 10 mai 2016 ;
Qu'il indique que le recours est initié en matière de sécurité sociale par la saisine préalable de la commission de recours amiable de la CPCAM et en déduit que la notification de la demande de répétition de l'indu aurait dû également être faite à son curateur afin qu'il en soit avisé pour décider d'engager une action destinée à le protéger dans ses intérêts patrimoniaux ;
Qu'il ajoute qu'il ne pouvait pas sans l'assistance de son curateur solliciter une remise de sa dette laquelle aurait été analysée par la caisse en une reconnaissance du principe de sa dette et n'est donc pas un acte d'administration ;
Mais attendu qu'il apparaît opportun de constater que, si Bernard X... n'avait pas capacité à agir seul sans l'assistance de son curateur devant la juridiction de première instance en ce que lors de sa saisine de cette juridiction il était toujours placé sous le régime de la curatelle simple, cette mesure ayant été levée le 10 mai 2016 et la déclaration d'appel de la CPCAM des Bouches du Rhône ayant été déposée le 4 janvier 2018, il a recouvré sa capacité à agir seul dans le cadre de la présente procédure en sa qualité d'intimé ;
Que, d'ailleurs, cette question n'est pas en débat en cause d'appel ;
Que, s'agissant de la régularité de la notification de l'indu par la CPCAM des Bouches du Rhône, il convient au préalable de rappeler que le majeur protégé placé sous le régime de la curatelle simple peut uniquement gérer ses affaires courantes s'agissant de la gestion ordinaire de ses biens ;
Qu'en effet, cette mesure judiciaire de protection est décidée lorsque les facultés mentales de la personne sont altérées et qu'elle ne dispose pas d'une autonomie suffisante pour gérer sa personne et ses biens ;
Que le curateur a essentiellement un rôle d'assistance personnelle et de conseil mais également d'accompagnement de la personne protégée dans tous les actes importants de la vie civile, soit des actes de disposition ;
Qu'il y a lieu également de rappeler que seuls les organismes bancaires doivent être informés par le curateur d'une mesure de curatelle simple et que la personne protégée conserve le droit de réceptionner ses courriers administratifs et financiers ;
Qu'ainsi, la mission du curateur consiste, notamment, à accompagner le majeur protégé dans ses démarches judiciaires et extra-patrimoniales, soit dans le cadre du présent litige à recevoir tout acte de Justice qu'il soit signifié par un huissier de Justice mais également notifié, dans la plupart des cas, par une lettre recommandée avec demande d'accusé de réception d'un acte d'injonction, de commandement et/ou de mise en demeure de payer une somme ;
Qu'en conséquence de ces éléments ainsi rappelés, ni Bernard X..., ni son curateur, n'était tenu d'informer la CPCAM des Bouches du Rhône de la mesure judiciaire de protection ;
Qu'en outre, il convient de constater que la CPCAM des Bouches du Rhône fait une lecture restrictive donc erronée des dispositions des articles 467 du code civil et 651 du code de procédure civile ;
Qu'en effet, il n'y a pas lieu de procéder à une distinction limitative voire spécieuse entre des actes signifiés par un huissier de Justice et des actes notifiés par lettre simple ou lettre recommandée avec demande d'accusé de réception ;
Qu'en conséquence, c'est à juste titre et par des motifs pertinents que la juridiction de première instance a considéré que la décision de la CPCAM des Bouches du Rhône réclamant l'indu à Bernard X... ainsi que la voie de recours s'offrant à lui devait être notifiées non seulement à Bernard X... mais également à son curateur ;
Que, dès lors, l'action initiée par la CPCAM des Bouches du Rhône est frappée d'irrégularité pour défaut de notification au curateur de Bernard X... lors de la phase non contentieuse de la répétition de l'indu litigieuse ;
Qu'en conséquence et sans qu'il ne soit utile d'aborder les arguments des parties concernant le bien-fondé de l'indu, le jugement déféré doit être confirmé en toutes ses dispositions et la CPCAM des Bouches du Rhône sera déboutée de son action en répétition de l'indu et de sa demande en recouvrement dudit indu ;
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches du Rhône du 30 novembre 2017 en toutes ses dispositions,
Déboute la CPCAM des Bouches du Rhône de l'intégralité de ses demandes,
La dispense de payer le droit prévu par l'article R144-10 alinéa 2 du code de la sécurité sociale.
LE GREFFIERLE PRESIDENT