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20/12/2018 | FRANCE | N°16/15359

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 20 décembre 2018, 16/15359


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
8e Chambre C


ARRÊT AU FOND
DU 20 DECEMBRE 2018


No 2018/ 464












Rôle No RG 16/15359 - No Portalis DBVB-V-B7A-7EJ4






[D] [I]




C/


SA SOCIETE GENERALE
SA CREDITLOGEMENT


























Copie exécutoire délivrée
le :
à :
BARATHON
KIEFFER Frédéric



















r>





Décision déférée à la Cour :


Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 15 Juin 2016 enregistré au répertoire général sous le no 16/02030.




APPELANTE


Madame [D] [I]
née le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 1] (POLOGNE), demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Laure BARATHON, avocat au ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
8e Chambre C

ARRÊT AU FOND
DU 20 DECEMBRE 2018

No 2018/ 464

Rôle No RG 16/15359 - No Portalis DBVB-V-B7A-7EJ4

[D] [I]

C/

SA SOCIETE GENERALE
SA CREDITLOGEMENT

Copie exécutoire délivrée
le :
à :
BARATHON
KIEFFER Frédéric

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 15 Juin 2016 enregistré au répertoire général sous le no 16/02030.

APPELANTE

Madame [D] [I]
née le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 1] (POLOGNE), demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Laure BARATHON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

SA CREDIT LOGEMENT, prise en la personne de son représentant légal en exercice, dont le siège est sis [Adresse 2]
représentée par Me Frédéric KIEFFER de la SCP KIEFFER - MONASSE & ASSOCIES, avocat au barreau de GRASSE

PARTIE INTERVENANTE

SA SOCIETE GENERALE, prise en la personne de son représentant légal en exercice, dont le siège est sis [Adresse 3], assignée en intervention forcée
représentée par Me Frédéric KIEFFER, de la SCP KIEFFER - MONASSE & ASSOCIES, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Septembre 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Valérie GAILLOT-MERCIER, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Dominique PONSOT, Président
Madame Valérie GAILLOT-MERCIER, Conseiller
Madame Anne FARSSAC, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 décembre 2018, après prorogation du délibéré

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 décembre 2018

Signé par Monsieur Dominique PONSOT, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Vu le jugement réputé contradictoire du tribunal de grande instance de Grasse du 15 juin 2016 ayant :
- condamné Mme [D] [I] à payer à la SA Crédit Logement les sommes de :
- 176.020,28 euros portant intérêts au taux légal à compter du 9 février 2016 jusqu'à parfait paiement au titre duprêt de 165.126,34 euros,
- 84.226,55 euros portant intérêts au taux légal à compter du 9 février 2016 jusqu'à parfait paiement au titre du prêt de 97.473,66 euros,
- ordonné l'exécution provisoire
- condamné Mme [D] [I] à payer à la SA Crédit Logement la somme de 1.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- laissé les entiers dépens à la charge de Mme [D] [I], dont distraction au profit de la SCP Kieffer-Monasse ;

Vu la déclaration du 19 août 2016 par laquelle Mme [D] [I] a relevé appel de cette décision ;

Vu les premières conclusions d'appelant notifiées par voie électronique le 15 novembre 2016 aux termes desquelles Mme [D] [I], demande à la cour de :
- lui donner acte de sa volonté de régler sa dette telle que retenue par le jugement du tribunal de grande instance de Grasse en date du 15 juin 2016,
- constater et au besoin dire et juger que Mme [D] [I] n'est pas en mesure de régler en une seule fois la totalité de la dette détenue à son encontre par la SA Crédit Logement au titre des deux prêts souscrits auprès de la Société Générale en date du 5 novembre 2011,
En conséquence,
- ajouter pour le surplus au jugement précité que soit octroyé à Mme [D] [I] un report de paiement ou un rééchelonnement de sa dette sur une période de deux ans en application de l'article 1244-1 du code civil,

- dire n'y avoir lieu à condamnation de Mme [D] [I] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- statuer ce que de droit sur les dépens ;

Vu les premières conclusions d'intimé notifiées par voie électronique le 28 novembre 2016 aux termes desquelles la SA Le Crédit Logement demande à la cour de :
A titre principal,
- déclarer Mme [D] [I] irrecevable en son appel,
En tout état de cause, vu l'absence d'éléments fournis par Mme [D] [I] sur sa capacité de remboursement,
- débouter purement et simplement Mme [D] [I] de l'ensemble de ses demandes,
En conséquence,
- confirmer purement et simplement le jugement rendu le 15 juin 2016 par le tribunal de grande instance de Grasse,
Y ajoutant,
- s'entendre condamner Mme [D] [I] à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens qui comprendront les frais de l'inscription d'hypothèque provisoire déjà prise et ceux de la confirmative à prendre, dont distraction au profit de la SCP Kieffer Monasse et Associés, avocat aux offres de droit ;

Vu l'assignation en intervention forcée devant la cour d'appel délivrée par acte d'huissier du 22 janvier 2018 à la SA Société Générale à la requête de Mme [D] [I] ;

Vu les conclusions no 2 notifiées par voie électronique le 27 janvier 2017 aux termes desquelles Mme [D] [I] demande à la cour de :
A titre liminaire,
- constater et au besoin dire et juger que son appel est parfaitement recevable,
A titre principal,
- infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Grasse prononcé en date du 15 juin 2016,
- constater et au besoin dire et juger que le manquement de la Société Générale à son devoir de mise en garde, en qualité de prêteur des deux prêts qu'elle a souscrits en date du 5 novembre 2011, implique une indemnisation dont le montant sera équivalent à la dette détenue à son encontre par la SA Crédit Logement ;
- ordonner qu'une compensation sera réalisée entre ces deux sommes,
A titre subsidiaire,
- infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Grasse prononcé en date du 15 juin 2016,
- prononcer la déchéance du droit aux intérêts au titre des deux prêts litigieux souscrits en date du 15 novembre 2011 et en conséquence imputer l'ensemble des remboursements opérés à ce titre depuis l'origine sur le capital emprunté au titre des deux prêts,
- lui donner acte de sa volonté de régler la dette contractée auprès de la SA Crédit Logement, déduction faite des intérêts dont la déchéance sera prononcée,
- lui octroyer des délais de paiement au titre de l'article 1244-1 du code civil sur une période de 2 ans,
En tout état de cause,
- condamner la SA Crédit Logement à la somme de 2.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- dire n'y avoir lieu à condamnation de Mme [D] [I] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- statuer ce que de droit sur les dépens ;

Vu les dernières conclusions notifiées par voie électronique le 28 août 2018 aux termes desquelles Mme [D] [I] demande à la cour de :
A titre liminaire,
- constater et au besoin dire et juger que son appel est parfaitement recevable,
En tout état de cause,
- déclarer irrecevable l'action de la SA Crédit Logement pour défaut de qualité à agir,

Sur le fond,
- infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Grasse prononcé en date du 15 juin 2016 en toutes ses dispositions,
Et statuant à nouveau,
A titre principal,
- condamner la SA Société Générale à lui payer la somme de 262.246,83 euros à titre de dommages et intérêts en raison du manquement à son devoir de mise en garde à son encontre dans le cadre de l'octroi des 2 prêts souscrits en date du 5 novembre 2011,
- débouter la SA Crédit Logement de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- débouter la SA Société Générale de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles, fins et conclusions,
- prononcer la mainlevée de l'hypothèque judiciaire inscrite provisoirement sur autorisation d'une ordonnance du 26 mars 2016 du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Grasse,
- ordonner la radiation de son inscription provisoire de ladite hypothèque judiciaire aux frais du Crédit Logement.
A titre subsidiaire,
- débouter la SA Crédit Logement de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- débouter la SA Société Générale de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles, fins et conclusions,
- constater et au besoin dire et juger que le manquement de la SA Société Générale à son devoir de mise en garde, en qualité de prêteur des deux prêts qu'elle a souscrits en date du 5 novembre 2011, implique une indemnisation à son profit dont le montant sera équivalent à la dette détenue à son encontre par la SA Crédit Logement,
- ordonner qu'une compensation soit effectuée entre les dommages et intérêts auxquels la SA Société Générale sera condamnée au titre de son manquement à son devoir de mise en garde par le jugement à intervenir et la créance détenue par la SA Crédit Logement à son encontre,
A titre infiniment subsidiaire,
- débouter la SA Crédit Logement de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- débouter la SA Société Générale de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles, fins et conclusions,
- prononcer la déchéance du droit aux intérêts au titre des deux prêts litigieux souscrits en date du 5 novembre 2011 et en conséquence imputer l'ensemble des remboursements opérés à ce titre depuis l'origine sur le capital emprunté au titre de ces deux prêts,
- lui donner acte de sa volonté de régler sa dette contractée auprès de la SA Crédit Logement, déduction faite des intérêts dont la déchéance sera prononcée,
- constater et au besoin dire et juger qu'elle n'est pas en mesure de régler la totalité de la dette détenue par la SA Crédit Logement au titre des deux prêts litigieux souscrits auprès de la SA Société Générale en date du 5 novembre 2011 en une seule fois, déduction faite des intérêts dont la déchéance sera prononcée,
- lui octroyer des délais de paiement au titre de l'article 1244-1 du code civil sur une période de deux ans,
- constater et au besoin dire et juger que l'hypothèque judiciaire inscrite provisoirement par ordonnance du 26 mars 2016 du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Grasse apparaît comme excessive,
- ordonner le cantonnement de l'hypothèque judiciaire ordonnée le 26 mars 2016 par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Grasse au lot no 6123 comprenant un appartement au 2ème étage, avec les 2.512/100.000èmes des parties communes,
- ordonner la mainlevée partielle de ladite hypothèque judiciaire au titre du lot no6050 comprenant une cave au sous-sol, avec les 9/100.000èmes des parties communes,
- ordonner la radiation de l'inscription provisoire de ladite hypothèque judiciaire concernant ledit lot aux frais du Crédit Logement,
- condamner solidairement la SA Crédit Logement et la SA Société Générale au paiement de la somme de 3.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

Vu les dernières conclusions notifiées par voie électronique le 30 août 2018 aux termes desquelles la SA Le Crédit Logement et la SA Société Générale demandent à la cour de :
- statuer ce que de droit sur la recevabilité de l'appel interjeté par Mme [D] [I],
- déclarer irrecevable l'intervention forcée diligentée à l'encontre de la Société Générale,
- se déclarer incompétente pour ordonner la mainlevée de l'inscription d'hypothèque judiciaire, la matière relevant de la compétence exclusive du juge de l'exécution,
En tout état de cause,
- débouter purement et simplement Mme [D] [I] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
En conséquence,
- confirmer purement et simplement le jugement rendu le 15 juin 2016 par le tribunal de grande instance de Grasse,
Y ajoutant,
-s'entendre condamner Mme [D] [I] à leur payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens qui comprendront les frais de l'inscription d'hypothèque provisoire déjà prise et ceux de la confirmative à prendre, dont distraction au profit de la SCP Kieffer Monasse et Associés, avocat aux offres de droit ;

SUR CE,

Attendu que selon offre de prêt du 13 octobre 2011 acceptée le 5 novembre 2011, Mme [D] [I], kinésithérapeute, a souscrit en vue du financement d'un appartement, 2 prêts professionnels auprès de la SA Société Générale (ci-après la Société Générale), à hauteur de 262.000 euros au total incluant les frais de notaire pour 17.000 euros et le coût de la garantie pour 3.100,80 euros, répondant aux caractéristiques suivantes :
? l'un de 165.126,34 euros au taux fixe hors assurance de 4,36%, remboursable en 240 mensualités fixées, pour le 1er palier pendant 42 mois à 657,14 euros, pour le 2ème palier pendant 78 mois à 706,14 euros, et, pour le 3ème palier à 1.709,35 euros pour les 120 derniers mois
? le second de 97.473,66 euros au taux variable hors assurance de 3,68% remboursable en 120 mensualités de 1.005,26 euros ;

Que la synthèse de la solution de financement mentionne un TEG de 4,97% pour le prêt à taux fixe et un TEG de 4,75% pour le prêt à taux révisable +1/-1 ;

Que pour garantir son concours la Société Générale a obtenu la caution de la SA Le Crédit Logement (ci-après le Crédit Logement) pour les deux emprunts no M11092672505 et noM11092672506 ;

Qu'en raison de la défaillance de Mme [D] [I] dans le règlement des échéances, la Société Générale, par deux lettres recommandées avec demande d'accusé de réception du 14 décembre 2015 a prononcé la déchéance du terme pour les deux emprunts et l'a mise en demeure de lui régler la somme de 180.008,78 euros au titre du prêt de 165.126,34 euros et celle de 71.682,15 euros au titre de celui de 97.473,66 euros ;

Qu'en l'absence de paiement par Mme [D] [I] la Société Générale a sollicité, en sa qualité de caution, le Crédit Logement lequel a réglé entre les mains de la banque les sommes suivantes :
? 7.512, 84 euros au titre des échéances impayées de novembre 2014 à août 2015 pour le premier prêt selon quittance du 13 novembre 2015
? 168.507,44 euros au titre des échéances impayées de septembre 2015 à décembre 2015, le solde restant dû et les pénalités de retard selon quittance du 26 janvier 2016 ;
? 17.165,59 euros au titre des échéances impayées de avril 2014 à août 2015 pour le second prêt selon quittance du 13 novembre 2015
? 67.058,96 euros au titre des échéances impayées de septembre 2015 à décembre 2015, le solde restant dû et les pénalités de retard selon quittance du 26 janvier 2016 ;

Que le Crédit Logement, par deux lettres recommandées avec demande d'accusé de réception du 22 janvier 2016 adressées à Mme [D] [I], lui a rappelé qu'il était intégralement subrogé dans les droits de la Société Générale Cros de Cagnes et l'a mise en demeure de lui régler la somme de 176.020,28 euros (prêt noM11092672505) et celle de 84.226,55 euros (prêt noM11092672506) ;

Que par différents courriers de février 2016 et mars 2016, Mme [D] [I] a été invitée à régulariser amiablement sa situation par le paiement de la somme totale de 260.391 euros ; que cette tentative de règlement amiable n'a pas été suivie d'effet ;

Que pour garantir sa créance, le Crédit Logement a obtenu, suivant ordonnance du juge de l'exécution près le tribunal de grande instance de Grasse en date du 15 mars 2016, l'autorisation de régulariser une inscription provisoire d'hypothèque judiciaire sur des biens situés à Saint-Laurent du Var et appartenant à Mme [D] [I] ;

Que par acte d'huissier du 30 mars 2016, le Crédit Logement a assigné Mme [D] [I] en paiement de la somme de 176.098,99 euros portant intérêts au taux légal sur la somme de 176.020,28 euros à compter du 9 février 2016 jusqu'à parfait paiement au titre du prêt de 165.126,34 euros et de celle de 84.292,01 euros portant intérêts au taux légal sur la somme de 84.226,55 euros à compter du 9 février 2016 jusqu'à parfait paiement au titre du prêt de 97.473,66 euros ;

Que par le jugement entrepris le tribunal de grande instance de Grasse a fait droit aux demandes du Crédit Logement selon les dispositions sus-visées ;

Sur la procédure

Sur la recevabilité de l'appel interjeté par Mme [D] [I]

Attendu que le Crédit Logement demande à la cour de déclarer irrecevable l'appel interjeté par Mme [D] [I] en ce qu'aux termes de ses premières écritures d'appel, celle-ci a uniquement sollicité des délais de paiement ; que le Crédit Logement soutient que dans la mesure où cette demande de délais ne tendait, ni à l'annulation, ni à l'infirmation du jugement entrepris, l'appel est irrecevable comme poursuivant une fin non prévue par l'article 542 du code de procédure civile ; qu'il rappelle cependant que Mme [D] [I] était non comparante devant le juge de première instance et indique qu'il se rangera à la décision de la cour sur la recevabilité de cet appel ;

Attendu qu'en réplique Mme [D] [I] fait valoir qu'en application de l'article 564 du code de procédure civile les prétentions qui constituent des défenses même formulées pour la première fois en appel sont recevables tout comme celles qui ont pour finalité de formuler des demandes reconventionnelles en application de l'article 567 du même code ;

Attendu qu'antérieurement à l'entrée en vigueur du décret no 2017-891 du 6 mai 2017, l'appelant, ayant conclu au fond dans le délai de trois mois prévu à l'article 908 du code de procédure civile, disposait de la possibilité, postérieurement à l'expiration de ce délai, de saisir la cour de prétentions additionnelles ; qu'au regard de ce texte, constituent des conclusions au fond, en ce qu'elles déterminent l'objet du litige, des conclusions se bornant à solliciter des délais de paiement ;

Qu'en conséquence, Mme [D] [I] ayant valablement conclu au fond le 15 novembre 2016, fût-ce pour solliciter de simples délais de paiement dont, étant défaillante, elle n'avait pu saisir les premiers juges, elle a pu, par ses conclusions du 27 janvier 2017, postérieures à l'expiration du délai imparti par l'article 908 susvisé, saisir la cour de prétentions tendant à la réformation du jugement, et satisfaire ainsi aux exigences de l'article 542 du code de procédure civile ;

Qu'ainsi l'appel formé par Mme [D] [I] doit être déclaré recevable ; que les intimés seront déboutés de leur demande de ce chef ;

Sur l'intervention forcée de la Société Générale et la qualité à agir du Crédit Logement

Attendu que les intimés soutiennent, au visa des articles 554 et 555 du code de procédure civile, que l'intervention forcée de la Société Générale assignée à cette fin par Mme [D] [I] le 22 janvier 2018 est irrecevable en ce qu'aucune circonstance de nature à modifier le litige n'est intervenue depuis le jugement prononcé le 15 juin 2016 ;

Qu'ils font encore valoir que c'est le Crédit Logement, en sa qualité de caution exerçant son recours récursoire, qui a assigné Mme [D] [I], de sorte que les données relatives à l'acte de prêt ou à sa créance ne pouvaient être modifiées ; qu'ils soulignent que le Crédit Logement n'entend pas se prévaloir de la subrogation, contrairement aux écritures de l'appelante, mais qu'il agit dans le cadre du recours personnel, et non subrogatoire, de la caution ;

Attendu qu'en réplique Mme [D] [I] soutient que c'est à la suite de la communication de nouvelles pièces par le Crédit Logement, qu'elle a formulé de nouvelles prétentions en défense et des demandes reconventionnelles pour la première fois en cause d'appel comme l'y autorise le code de procédure civile ; que c'est en réponse à la demande en paiement formée à son encontre qu'elle s'est vu contrainte d'assigner en intervention forcée la Société Générale en sa qualité de prêteur ;

Qu'elle fait valoir en tout état de cause que le Crédit Logement n'a pas qualité pour agir et soutient à cette fin que le règlement de la créance subrogative n'ayant pas été effectué le même jour que l'établissement de ladite quittance, le Crédit Logement ne saurait être subrogé dans les droits de la Société Générale en application de l'ancien article 1250 du code civil aux termes duquel la subrogation doit être expresse et fait en même temps que le payement ;

Attendu que le Crédit Logement, qui en a le libre choix, indique agir sur le fondement du recours personnel de la caution fondé sur l'article 2035 du code civil ; qu'il est dès lors indifférent que les réglements des créances ne soient pas tous intervenus le jour même de l'établissement des quittances par la Société Générale ;

Que la cour observe que les 4 quittances produites aux débats, au demeurant non qualifiées de quittance subrogative, comprennent les clauses suivantes :
...
Ce remboursement a été effectué par la société Crédit Logement pour le compte du (des) codébiteur(s) solidaire(s) ci dessus désigné(s), en vertu de l'acte sous seing privé en date du 12/10/2011 et aux termes duquel la société Crédit Logement s'est déclarée caution solidaire du remboursement d'un prêt souscrit auprès de SG Cros de Cagnes.

Le présent reçu est délivré pour valoir ce que de droit et notamment la subrogation de la société Crédit Logement dans les droits et actions du prêteur à l'encontre du (des) codébiteur(s) solidaire(s), et ce, par application des articles 1251 (3ème), 2305 et 2306 du code civil.
...

Qu'ainsi ces quittances ont été rédigées par la Société Générale à seule fin d'établir la réalité du paiement et n'ont aucune incidence sur le choix de la caution d'exercer exclusivement son recours personnel en application de l'article 2305 du code civil ;

Qu'en conséquence, la cour retient, d'une part, que le Crédit Logement dispose bien d'un intérêt et d'une qualité à agir en paiement à l'encontre de Mme [D] [I] en vertu des paiements effectués entre les mains de la Société Générale en ses lieu et place ;

Que, d'autre part, qu'en raison du seul recours personnel exercé par le Crédit Logement à l'encontre de Mme [D] [I] , toutes les exceptions opposées par cette dernière et nées de ses engagements initiaux avec la Société Générale sont sans objet ; que le litige n'a ainsi connu aucune évolution révélé par le jugement entrepris ou postérieurement à celui-ci et impliquant la Société Générale ;

Que l'intervention forcée de la Société Générale en cause d'appel initiée par Mme [D] [I] selon l'assignation délivrée le 22 janvier 2018 est irrecevable en vertu de l'article 555 du code de procédure civile ;

Sur le fond

Attendu que Mme [D] [I], sollicite, au fond :
à titre principal,
- la réformation du jugement entrepris
- la condamnation de la Société Générale à des dommages et intérêts à hauteur de la somme de 262.246,83 euros dont le Crédit Logement demande le paiement
- le débouté du Crédit Logement de toutes ses demandes compte tenu de son défaut de qualité à agir
- la mainlevée de l'hypothèque judiciaire et la radiation de son inscription provisoireà titre subsidiaire,
- la compensation de la créance du Crédit Logement avec sa propre créance à l'encontre de la Société Générale
à titre infiniment subsidiaire,
- la déchéance du droit aux intérêts encourue par la Société Générale et opposable au Crédit Logement et le cantonnement subséquent de l'hypothèque judiciaire ;

Attendu que les intimés concluent à la confirmation pure et simple du jugement entrepris ;

Attendu que la cour rappelle que l'irrecevabilité de l'intervention forcée de la Société Générale en cause d'appel, irrecevabilité retenue supra, rend de facto irrecevables toutes les demandes relatives aux prêts formées à l'encontre de la banque par l'appelante ;

Que le Crédit Logement, dont la qualité à agir a été retenue plus haut, justifie par les quittances des 13 novembre 2015 et 26 janvier 2016 du paiement par ses soins entre les mains de la Société Générale :
- des sommes de 7.512,84 euros et de 168.507,44 euros (pièces des intimés no4 et 5), soit un total de 176.020,28 euros au titre du prêt à taux fixe du 5 novembre 2011 d'un montant initial de 165.126,34 euros
- des sommes de 17.167,59 euros et de 67.058,96 euros (pièces des intimés no11 et 12), soit un total de 84.226, 55 euros au titre du prêt à taux variable du 5 novembre 2011 d'un montant initial de 97.473,66 euros

Que le Crédit Logement est en conséquence bien fondé à solliciter la confirmation du jugement entrepris en ce que Mme [D] [I] a été condamnée à lui payer les sommes de 176.020,28 euros et de 84.226,55 euros avec intérêts au taux légal à compter du 9 février 2016 jusqu'à parfait paiement ;

Qu'en conséquence de l'ensemble de ces éléments, toutes les demandes de Mme [D] [I] relatives à l'hypothèque provisoire ainsi que celle fondée sur la compensation de prétendues créances réciproques seront rejetées ;

Sur les délais de paiement

Attendu que Mme [D] [I], faisant valoir qu'elle a rencontré d'importantes difficultés financières à la suite de la souscription des crédits litigieux à des fins professionnelles, expose que ses revenus ne lui permettent pas de régler en une seule fois le montant total de sa dette et sollicite des délais de paiement sur deux ans ; qu'elle précise le montant de ses revenus et charges et fait valoir que ses charges sociales et l'impôt sur le revenu peuvent donc se retrouver très rapidement supérieures aux revenus dans le cadre de son activité libérale soumise au régime des BNC ;

Attendu que le Crédit Logement s'oppose fermement à tout octroi de délai et conclut à la confirmation du jugement de ce chef ; qu'il rappelle que l'assignation a été délivrée à Mme [D] [I] le 30 mars 2016 après les mises en demeure du 22 janvier 2016 ; qu'elle n'a versé aucune somme, ni proposé le moindre règlement ; qu'il souligne que sa créance s'élevant à 260.391 euros au 8 février 2016 outre les intérêts au taux légal ayant couru à compter de cette date, un remboursement sur deux années nécessiterait de s'acquitter de mensualités de 10.849 euros alors que les revenus mensuels de la débitrice ne dépassent pas 3.750 euros au maximum ;

Attendu que l'article 1244-1 devenu l'article 1343-5 du code civil dispose que compte-tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues ;

Que cependant, la cour constate que Mme [D] [I] qui a déjà, de fait, bénéficié des plus larges délais de paiement depuis l'acte introductif d'instance du 30 mars 2016, ne forme aucune proposition et n'indique pas comment elle pourra s'acquitter de sa dette supérieure à 260.000 euros dans le délai de deux ans sollicité ;

Qu'il convient dès lors de rejeter cette demande de délais et de confirmer également le jugement entrepris de chef ;

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Attendu qu'il convient de condamner Mme [D] [I] partie succombante aux entiers dépens incluant, en application de l'article 595 du code de procédure civile, tous les frais liés aux inscriptions d'hypothèque provisoire et confirmative, et dont distraction au profit de la SCP Kieffer Monasse et associés ; que le jugement sera confirmé sur les dépens de première instance ;

Attendu qu'il convient de condamner Mme [D] [I], partie tenue aux dépens, à verser au Crédit Logement et à la Société Générale, ensemble, la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement et contradictoirement,

Dit recevable l'appel formé par Mme [D] [I] ;

Dit irrecevable l'intervention forcée en cause d'appel de la Société Générale ;

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne Mme [D] [I] à payer au Crédit Logement et à la Société Générale, ensemble, la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette toutes demandes plus amples ou contraires au présent dispositif ;

Condamne Mme [D] [I] aux entiers dépens incluant tous les frais liés aux inscriptions d'hypothèque provisoire et confirmative, et dont distraction au profit de la SCP Kieffer Monasse et associés ;

LE GREFFIERLE PRESIENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro d'arrêt : 16/15359
Date de la décision : 20/12/2018

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Grasse


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-12-20;16.15359 ?
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