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20/12/2018 | FRANCE | N°16/05864

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 8e chambre b, 20 décembre 2018, 16/05864


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE


8e Chambre B





ARRÊT AU FOND


DU 20 DECEMBRE 2018





N° 2018/632




















Rôle N° RG 16/05864 - N° Portalis DBVB-V-B7A-6LPZ











Luc X...


Gilles X...








C/





SA SOCIETE GENERALE
































Copie exéc

utoire délivrée


le :


à :


Me Y...


Me Z...




















Décision déférée à la Cour :





Jugement du Tribunal de Commerce de GRASSE en date du 08 Février 2016 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 2015F00137.








APPELANTS





Monsieur Luc X...


né le [...] à Casablanca (Maroc),


demeurant [...] [...]


représenté par Me B....

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

8e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 20 DECEMBRE 2018

N° 2018/632

Rôle N° RG 16/05864 - N° Portalis DBVB-V-B7A-6LPZ

Luc X...

Gilles X...

C/

SA SOCIETE GENERALE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Y...

Me Z...

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de GRASSE en date du 08 Février 2016 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 2015F00137.

APPELANTS

Monsieur Luc X...

né le [...] à Casablanca (Maroc),

demeurant [...] [...]

représenté par Me B... Y... de la A... B..., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Monsieur Gilles X...

né le [...] à Casablanca (Maroc),

demeurant [...]

représenté par Me B... Y... de la A... B..., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

SA SOCIETE GENERALE, prise en la personne de son représentant légal, dont le siège social est sis [...]

représentée par Me Pierre Z... de l'ASSOCIATION Z... P. LASTELLE F., avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 16 Octobre 2018 en audience publique devant la cour composée de:

Madame Valérie GERARD, Président de chambre

Madame Françoise PETEL, Conseiller

Madame Anne DUBOIS, Conseiller, magistrat rapporteur

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Laure METGE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Décembre 2018.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 Décembre 2018,

Signé par Madame Valérie GERARD, Président de chambre et Madame Laure METGE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DES FAITS :

Par actes du 16 avril 2009, Luc et Gilles X... se sont chacun portés cautions solidaires à hauteur de 40% du prêt de 300.000 euros remboursable sur 7 ans consenti par la Société Générale à la SARL Pompes et Energie le 6 avril 2009.

Cette dernière a été placée sous le régime de sauvegarde le 20 juillet 2009 puis en liquidation judiciaire le 25 juin 2014.

La Société Générale a régulièrement déclaré sa créance le 2 septembre 2014.

Elle a ensuite vainement mis les cautions en demeure d'honorer leurs engagements par lettres recommandées avec accusé de réception du 4 septembre 2014 puis les a assignées en paiement devant le tribunal de commerce de Grasse par actes des 1er et 3 juillet 2015.

Par jugement du 8 février 2016, ce tribunal a :

- condamné Luc X... à payer à la Société Générale la somme de 156.000 euros,

- condamné Gilles X... à payer à la Société Générale la somme de 156.0000 euros,

- ordonné l'exécution provisoire

- condamné in solidum Luc et Gilles X... aux entiers dépens et à payer à la Société Générale la somme de 1.400 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Ces derniers ont interjeté appel le 31 mars 2016.

Dans leurs dernières conclusions déposées et notifiées le 31 mai 2016 et tenues pour intégralement reprises, ils demandent à la cour de :

- les dire et juger recevables et bien fondés en leur appel.

- réformer le jugement entrepris.

- et statuant à nouveau :

- à titre principal :

- constater que Luc X... s'est engagé pour des montants disproportionnés au regard de ses revenus et de la composition de son patrimoine.

- dire et juger que la Société Générale ne peut se prévaloir de l'engagement de caution souscrit par Luc X... dans la mesure où ce dernier est disproportionné.

- constater que Gilles X... s'est engagé pour des montants disproportionnés au regard de ses revenus, de la composition de son patrimoine, des crédits en cours et de ses engagements de caution souscrits au profil de la SMC et de la Caisse d'Epargne.

- dire et juger que la Société Générale ne peut se prévaloir de l'engagement de caution souscrit par Gilles X... dans la mesure où ce dernier est disproportionné.

- débouter, en conséquence, la Société Générale de l'intégralité de ses prétentions.

- la condamner au paiement de la somme de 4.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens de première instance et d'appel.

- à titre subsidiaire, si la cour devait estimer que les engagements des consorts X... ne sont pas disproportionnés,

- constater qu'ils se sont, chacun, portés caution à hauteur de 40 % du prêt accordé à la SARL Pompes et Energie d'un montant de 300.000 euros.

- constater que l'engagement de chacun des consorts X... n'excédait pas 120.000 euros.

- constater que suivant correspondances des 7 mars 2012, 29 mars 2013, 16 mars 2015, 8 mars 2016, la Société Générale a informé chacune des cautions que le montant de son engagement était « limité à un montant global de 120.000 euros, incluant principal, intérêts, frais et accessoire, et si elle est prévue au contrat, l'indemnité de résiliation ou la soulte actuarielle due par le client au titre de l'obligation garantie».

- dire et juger que la Société Générale ne saurait réclamer à chacun des consorts X..., en leur qualité de caution, une somme supérieure à 120.000 euros.

Dans ses dernières écritures déposées et notifiées le 27 août 2018 et tenues pour intégralement reprises, l'intimée demande à la cour de :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement attaqué,

- ce faisant,

- la recevoir en son action et 1'y déclarant bien fondée,

- condamner Luc X... à lui payer la somme de 156.000 euros, montant du cautionnement qu'il a consenti sur l'engagement souscrit par la SARL Pompes et Energie au titre du prêt de 300.000 euros sur 5 ans,

- condamner Gilles X... à lui payer la somme de 87.076,94 euros, montant restant dû sur l'acte de cautionnement à hauteur de de 156.000 euros qu'il a consenti sur l'engagement souscrit par la SARL Pompes et Energie au titre du prêt de 300.000 euros sur 5 ans,

- les condamner in solidum au paiement de la somme 4.000 euros en cause d'appel sur le fondement des dispositions de 1'article 700 du code de procédure civile,

- les condamner aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 18 septembre 2018.

***

*

SUR CE :

Sur le caractère disproportionné de l'engagement:

En vertu de l'ancien article L341-4 du code de la consommation applicable au litige, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de la caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.

Le caractère manifestement disproportionné du cautionnement s'apprécie au regard, d'une part, de l'ensemble des engagements souscrits par la caution et, d'autre part, de ses biens et revenus, sans tenir compte des revenus escomptés de l'opération garantie.

L'ancien article L341-4 précité devenu L 332-1 et L 343-3 du code de la consommation n'impose pas au créancier professionnel de vérifier la situation financière de la caution lors de son engagement. C'est à la caution qu'il incombe de rapporter la preuve de la disproportion qu'elle allègue, et au créancier qui entend se prévaloir d'un contrat de cautionnement manifestement disproportionné, d'établir qu'au moment où il appelle la caution, le patrimoine de celle-ci lui permet de faire face à son obligation.

Une fiche patrimoniale n'étant pas obligatoire, l'existence d'un tel document certifié exact par son signataire permet simplement à la banque, sauf anomalies apparentes, de s'y fier et la dispense de vérifier l'exactitude des déclarations de son client, lequel ne peut ensuite se prévaloir de leur fausseté pour échapper à ses obligations.

=$gt; concernant Gilles X...:

Selon la fiche de renseignements confidentiels qu'il a signée lors de la souscription du cautionnement, Gilles X..., célibataire sans enfant, percevait des revenus annuels bruts de 121.653,60 euros ainsi que des revenus locatifs annuels de 15.600 euros.

Le document mentionne également que:

- il était propriétaire:

- d'un appartement de deux pièces acquis au prix de 28.000 euros en juillet 2003,

- d'un appartement de quatre pièces acquis au prix de 80.000 euros en décembre 2003,

un parking de 12.000 euros.

- il avait souscrit en 2003 un prêt de 80.000 euros remboursé par mensualités de 907,54 euros jusqu'en août 2018 et un autre de 36.000 euros remboursé par mensualités de 558,25 euros jusqu'en février 2016.

L'appelant produit aux débats les tableaux d'amortissements des deux prêts qui s'élèvent en réalité à 87.554 euros et 28.966 euros, respectivement amortissables par mensualités de 655 euros et 296 euros, de sorte que l'appartement de 4 pièces avait une valeur nette d'environ 18.500 euros et le studio de 14.000 euros environ, lors de la signature de l'acte litigieux.

Gilles X... n'a fait mention, dans cette fiche, d'aucun autre engagement de caution qu'il aurait antérieurement souscrit en 2004, 2006 et 2008, auprès de la SMC et de la Caisse d'Epargne, de sorte qu'il est mal fondé à les invoquer aujourd'hui.

Il s'évince de l'ensemble de ces éléments qu'aucune disproportion manifeste ne peut être retenue entre son cautionnement d'avril 2009 et ses biens et revenus.

En conséquence, le moyen tiré de l'application de l'article L341-4, devenu L 332-1, du code de la consommation doit être écarté.

=$gt; concernant Luc X...:

Aux termes de la fiche de renseignements confidentiels qu'il a certifiée conforme lors de la souscription du cautionnement, Luc X..., gérant salarié de la SARL ABC, percevait un salaire annuel de 48.000 euros et ne possédait aucun patrimoine. Il remboursait en outre un crédit de 35.000 euros par mensualités de 558,85 euros jusqu'en février 2016.

Toutefois, la fiche d'imposition sur les revenus de l'année 2009 qu'il verse aux débats démontre que le montant total de ses salaires annuels s'élevait à 57.250 euros et qu'il percevait en outre des revenus fonciers nets de 13.456 euros, attestant de l'existence d'un patrimoine sur lequel il ne fournit aucun justificatif, ni même explication, quant à sa consistance et sa valeur.

Dans ces conditions, Luc X... ne rapporte pas la preuve d'une disproportion manifeste entre l'engagement qu'il a souscrit le 6 avril 2009 et des biens et revenus dont il ne justifie pas.

En conséquence, il ne peut être déchargé de ses obligations de caution.

Sur le montant des engagements:

Les consorts X... font subsidiairement valoir qu'ils n'ont garanti que la somme de 120.000 euros correspondant à 40% du montant du prêt de 300.000 euros consenti à la SARL Pompes et Energie, et non celle de 156.000 euros

Mais l'intimée répond valablement que leur engagement portait sur 156.000 Euros maximum, correspondant à 40% de l'obligation garantie définie dans l'encadré ci-après qui vise un prêt de 300.000 Euros, d'une durée de 5 ans, au taux d'intérêt fixe de 5,30%, comme chacune des cautions l'a d'ailleurs expressément indiqué dans la mention manuscrite figurant juste au dessus de sa signature.

Les appelants se dont donc engagés à garantir à hauteur de 40% le montant de l'encours dû au titre du prêt de 300.000 euros en principal, et des intérêts courus et à courir au taux de 5,30% dans la limite maximum de 156.000 euros.

Or, la créance étant de 422.614,70 euros au 4 septembre 2016, 40% de l'encours représentent 169.045 euros, soit une somme supérieure au montant maximum de l'engagement souscrit par les cautions, lesquelles sont ainsi bien tenues à hauteur de 156.000 euros.

Le jugement sera par conséquent confirmé en ce qu'il a condamné Luc X... à payer à la Société Générale la somme de 156.000 euros.

La banque ayant reçu de Gilles X... la somme de 68.923,06 euros en suite de la vente d'un bien immobilier sis [...] sur lequel elle avait inscrit une hypothèque judiciaire définitive en vertu d'une ordonnance du 28 juin 2011 homologuant le protocole du 17 juin 2011 pour sûreté et garantie de la somme de 156.000 euros, Gilles X... sera condamné à lui payer la somme de 87.076,94 euros au titre du montant restant dû sur son cautionnement de 156.000 euros.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile:

Les appelants qui succombent, supporteront les dépens d'appel et seront condamnés à payer in solidum à la Société Générale la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

***

**

PAR CES MOTIFS

la cour, statuant par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition,

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qui concerne le montant de la condamnation de Gilles X...,

Le réformant de ce chef,

CONDAMNE Gilles X... à payer à la Société Générale la somme de 87.076,94 euros au titre du montant restant dû sur son cautionnement de 156.000 euros,

Y ajoutant,

CONDAMNE in solidum Gilles et Luc X... à payer à la Société Générale la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

REJETTE le surplus des demandes,

CONDAMNE in solidum Gilles et Luc X... aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 8e chambre b
Numéro d'arrêt : 16/05864
Date de la décision : 20/12/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 8B, arrêt n°16/05864 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-12-20;16.05864 ?
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