COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
4e Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 03 DECEMBRE 2018
hg
N° 2018/ 902
N° RG 17/08252 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BAOL4
Laurent X...
C/
Guillaume Y...
Laurent Y...
Sylvia Y...
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Z...
Me A...
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 23 Mars 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 14/06440.
APPELANT
Monsieur Laurent X...
demeurant [...]
représenté par Me Joseph Z... de la SCP Z... PAUL Z... JOSEPH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
assisté par Me Joëlle C... de l'ASSOCIATION CAB D'AVOCATS ASSOCIES D... C... E..., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant
INTIMES
Monsieur Guillaume Y...
demeurant [...]
représenté et assisté par Me Frédéric A... de la SELARL DEBEAURAIN & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant
Monsieur Laurent Y...
demeurant 7 Bis avenue du Docteur Edouard F... - [...]
représenté et assisté par Me Frédéric A... de la SELARL DEBEAURAIN & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant
Madame Sylvia Y...
demeurant [...]
représentée et assistée par Me Frédéric A... de la SELARL DEBEAURAIN & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 785,786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Octobre 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Hélène GIAMI, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de:
Madame Laure BOURREL, Président
Madame Hélène GIAMI, Conseiller
Madame Sophie LEONARDI, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Priscilla BOSIO.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 03 Décembre 2018.
ARRÊT
contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 03 Décembre 2018
Signé par Madame Laure BOURREL, Président et Madame Priscilla BOSIO, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE:
Suivant acte notarié du 24 décembre 2012, Armand G... a fait donation à ses trois petits enfants, Guillaume Y... Laurent Y... et Sylvia Y..., pour 1/3 indivis chacun de la nu-propriété d'un bâtiment d'habitation, cadastré sur la commune de Septèmes les Vallons (13) avenue du Docteur Edouard F..., section [...] et [...] pour 10a 12ca (anciennement section [...]).
Il s'était réservé l'usufruit de cette propriété.
Armand G... étant décédé le [...], Guillaume Y... Laurent Y... et Sylvia Y... sont devenus pleinement propriétaires indivis de ce bien.
Le 22 juillet 2010, Laurent X... a acquis de Marcel H...:
- une maison à usage d'habitation avec terrasse, cabanon et cave, cadastrée sur la commune de Septèmes les Vallons (13) 3 avenue du Docteur Edouard F..., section [...] et [...] (anciennement section [...] et [...]) pour 2a 92ca,
- une parcelle de terre à usage d'aire de stationnement, cadastrée section [...] pour 28ca.
Les deux fonds ont une origine commune et sont séparés par une parcelle cadastrée section [...].
Le 6 février 2014, le conseil de Laurent X... écrivait à Laurent Y... pour lui dénier tout droit de passage sur le chemin utilisé jouxtant sa propriété.
Laurent Y... lui répondait par courrier du 29 mars en lui exposant tenir son droit de passage depuis 1853.
Par acte d'huissier du 22 octobre 2014, Armand G..., Guillaume Y..., Laurent Y... et Sylvia Y... ont assigné Laurent X... devant le tribunal de grande instance d'Aix en Provence, afin de voir, au visa des articles 544 et 692 du code civil,
L162-1 du code rural :
-dire et juger que le chemin qui prend naissance sur l'avenue du docteur Edouard F... et se poursuit en longeant les parcelles cadastrées section [...], [...], [...], [...], [...], [...], [...], [...] et [...] est un chemin commun,
à titre subsidiaire
-dire que c'est un chemin d'exploitation,
à titre infiniment subsidiaire,
-dire qu'il présente les caractéristiques d'un patecq;
à titre très infiniment subsidiaire
-dire qu'il est un chemin de servitude par destination du bon père de famille;
-dire et juger que Laurent X... ne peut en interdire l'usage aux demandeurs sous peine de 500 € par infraction constatée;
-dire et juger que les parcelles [...] et [...] constituent une aire commune dont ils sont copropriétaires;
-condamner Laurent X... à leur payer la somme de 1500 € à titre de réparation de leur préjudice de jouissance;
-le condamner à leur payer la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens distraits au profit de leur conseil, en ce compris les frais d'huissier, le tout sous le bénéfice de l'exécution provisoire.
Par ordonnance du 15 janvier 2016 le juge de la mise en état a déclaré l'instance éteinte à l'égard de Armand G... et a rejeté la demande des consorts Y... tendant à être autorisés à utiliser le chemin litigieux.
Par jugement du 23 mars 2017 le tribunal de grande instance d'Aix en Provence a statué en ces termes :
«déclare que le chemin qui prend naissance sur l'avenue du docteur Edouard F... et se poursuit en longeant les parcelles cadastrées section [...], [...]. 112, 15, 113, 13, 8, 9 et 10 est un chemin commun ;
fait interdiction à Laurent X... d'en empêcher l'usage à Guillaume Y... Laurent Y... et Sylvia Y... sous peine d'une astreinte de 150 € par infraction constatée par procès verbal de constat d'huissier à compter de la signification du jugement ;
déboute Guillaume Y... Laurent Y... et Sylvia Y... de leurs demandes de dommages et intérêts ;
déboute Laurent X... de ses demandes ;
condamne Laurent X... à payer à Guillaume Y... Laurent Y... et Sylvia Y... la somme de 3 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
condamne Laurent X... aux dépens ;
ordonne l'exécution provisoire ;
accorde aux avocats constitués le droit de recouvrer les dépens selon les formes de l'article 699 du code de procédure civile».
Le 27 avril 2017, Laurent X... a interjeté appel de cette décision.
Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 1er octobre 2018 , auxquelles il convient de se référer pour un exposé détaillé des moyens et prétentions, Laurent X... entend voir, au visa des articles 544 et 692 du code civil, et L 162-1 du code rural:
- infirmer le jugement en toutes ses dispositions,
- rejeter toutes les prétentions adverses,
- condamner Guillaume Y... Laurent Y... et Sylvia Y... à lui payer
3 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre entiers dépens.
Pour lui:
- le chemin revendiqué ne peut être qualifié de commun,
- son titre de propriété rappelle la convention conclue le 29 décembre 1972 entre Madame I... et Monsieur J... qui ont fixé leurs droits sur l'aire commune et les chemins communs en fixant leurs limites et en créant une servitude de passage grevant son fonds au profit seulement du fonds AI 9 (anciennement B 1223 et 1225),
- le chemin litigieux ne peut être qualifié de chemin d'exploitation, ni de patecq ni de servitude par destination du père de famille car les propriétés de chacune des parties sont issues d'un même tènement desservi par deux chemins appartenant aux consorts Y..., l'un contournant la parcelle [...], l'autre le côté de sa propriété, et son fonds bénéficiant d'une servitude de passage sur l'un d'eux,
- le fonds Y... n'est pas enclavé mais dispose de deux accès, l'un par leur parcelle [...] et l'autre le long de la parcelle [...].
Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 25 juillet 2017, auxquelles il convient de se référer pour un exposé détaillé des moyens et prétentions, Guillaume Y... Laurent Y... et Sylvia Y... entendent voir, au visa des articles L162-1 du code rural et 544 et 692 du code civil:
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
- condamner Laurent X... à leur payer 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens avec distraction dans les conditions prévues par l'article 699 du code de procédure civile.
A titre subsidiaire, ils reprennent les prétentions contenues dans leur assignation.
Pour eux:
- les propriétés ont un auteur commun, Jean-Joseph-Simon G... qui a partagé ses biens entre ses enfants le 26 avril 1853 en laissant le chemin d'accès commun aux différents lots,
- ce caractère commun du chemin a été confirmé par jugement de bornage entre les fonds des auteurs des parties au litige, du 19 janvier 1905, faisant suite à un rapport d'expertise et à un transport sur les lieux,
- la convention de servitude du 8 décembre 1971 accordée par l'un des copropriétaires mentionne le chemin commun et ne suffit pas à lui faire perdre ce caractère,
- les actes de vente G...-Castets-Roux/K... du 11 mars 1950, G...-Michel/Mondino du 28 mai 1930, avec plans annexés font état du chemin commun,
son existence ancienne et inchangée résulte des photographies de l'institut géographique national,
- son utilisation par leur auteur est démontrée par l'installation collective du portail commun en 1998 et la présence des boîtes aux lettres à son débouché.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 2 octobre 2018.
MOTIFS DE LA DECISION :
Sur l'existence d'un chemin commun, d'un chemin d'exploitation, d'un patecq ou d'une servitude par destination du père de famille:
Le chemin litigieux débute au nord sur l'avenue du docteur Edouard F... et se poursuit en direction du sud-est entre les parcelles cadastrées section [...], [...] côté est, 12, 112, 113 côté ouest, avant de longer par l'ouest et le sud la parcelle [...], puis par le sud les parcelles [...] et [...].
Au vu du plan cadastral, son assiette est en grande partie située sur la parcelle [...] (formant notamment un couloir entre les parcelles cadastrées section [...], [...] côté est, 12, 112, 113 côté ouest), mais également sur les parcelles [...], [...] et [...].
À l'acte d'acquisition de Laurent X... du 22 juillet 2010, des servitudes de passage ont été constituées afin qu'il accède au fonds acquis en empruntant le chemin grevant les parcelles [...], (consorts K...), AI n°10 ( Armand G...), AI n°113 (Piazza), AI n°9 (Vidal), les propriétaires de ces fonds étant présents ou représentés à cet acte.
En sa qualité de propriétaire de la parcelle [...], Armand G... s'est vu consentir une servitude de passage uniquement sur la parcelle [...], (consorts K...) et seul André H..., propriétaire des parcelles [...], [...], [...] et [...] s'est vu consentir une servitude de passage sur les parcelles [...], [...] et [...] vendues à Laurent X....
Eu égard à cet acte établi contradictoirement entre tous ceux qui paraissaient bénéficier de droits réels sur le chemin revendiqué comme commun ou d'exploitation ou de patecq ou par destination du père de famille, et qui semble avoir redéfini les droits de chacun sur le chemin, les consorts Y... qui se prévalent d'actes antérieurs à celui-ci mais qui n'ont pas mis en cause l'ensemble des propriétaires de l'assiette dudit chemin, ne sont pas recevables en leur demande tendant à se voir reconnaître des droits sur ce chemin, autres que ceux qui leur ont été consacrés dans l'acte du 22 juillet 2010.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile:
Guillaume Y... Laurent Y... et Sylvia Y... succombant à l'instance, seront condamnés aux dépens et à payer à Laurent X... la somme de 3 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le jugement sera infirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Infirme le jugement entrepris, et statuant à nouveau,
Déclare Guillaume Y... Laurent Y... et Sylvia Y... irrecevables en leur demande tendant à se voir reconnaître des droits sur le chemin qui prend naissance sur l'avenue du docteur Edouard F... et se poursuit en longeant les parcelles cadastrées section [...], [...]. 112, 15, 113, 13, 8, 9 et 10, à défaut d'avoir appelé dans la cause l'ensemble des propriétaires de l'assiette dudit chemin,
Condamne Guillaume Y... Laurent Y... et Sylvia Y... aux dépens et à payer à Laurent X... la somme de 3 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT