COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
4e Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 29 NOVEMBRE 2018
lb
N° 2018/ 887
Rôle N° RG 17/07954 - N° Portalis DBVB-V-B7B-BANUN
Marie-France, Arlette, N... X... épouse Y...
C/
Anne Marie Jeanne Z..., K... A...
Isabelle Marie L... J... B... épouse B...
Vincent Pierre A...
Frédéric Jean A...
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
l'AARPI ALE & ASSOCIES
SELAS CABINET C...
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal d'Instance de BRIGNOLES en date du 21 Mars 2017 enregistré au répertoire général sous le n° [...].
APPELANTE
Madame Marie-France, Arlette, N... X... épouse Y...
demeurant [...]
représentée par Me Eve D... de l'AARPI ALE & ASSOCIES, avocat au barreau de TOULON, plaidant
INTIMES
Madame Anne Marie Jeanne Z..., veuve A...
demeurant [...]
représentée par Me Serge C... M... C..., avocat au barreau de DRAGUIGNAN substituée par Me E... C... DE TRETAIGNE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant
Madame Isabelle Marie L... J... B... épouse B...
demeurant [...]
représentée par Me Serge C... M... C..., avocat au barreau de DRAGUIGNAN substituée par Me E... C... DE TRETAIGNE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant
Monsieur Vincent Pierre A...
demeurant [...]
représenté par Me Serge C... M... C..., avocat au barreau de DRAGUIGNAN substituée par Me E... C... DE TRETAIGNE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant
Monsieur Frédéric Jean A...
demeurant [...] ' Résidence Les Godets ' Bât. B. - [...]
représenté par Me Serge C... M... C..., avocat au barreau de DRAGUIGNAN substituée par Me E... C... DE TRETAIGNE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 09 Octobre 2018 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Laure BOURREL, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de:
Madame Laure BOURREL, Président
Madame Bernadette MALGRAS, Conseiller
Madame Sophie LEONARDI, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 29 Novembre 2018.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 29 Novembre 2018,
Signé par Madame Laure BOURREL, Président et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS, PROCEDURE, MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES
Madame Marie-France X... épouse Y... est propriétaire sur la commune de Rocbaron (83) d'une parcelle cadastrée section [...] qui est contiguë à la parcelle cadastrée section [...] appartenant aux consorts A....
Par exploits du 10 mars 2014, Madame Y... a assigné Alain A... et Madame Anne Z... épouse A... en bornage.
Par jugement du 15 avril 2014, le tribunal d'instance de Brignoles a ordonné une expertise. Après remplacement d'expert, cette mesure d'instruction a été confiée à Monsieur Thierry F..., géomètre expert, lequel a déposé son rapport le 7 septembre 2016.
Alain A... est décédé le [...], et ses ayants droit, Madame Isabelle A... épouse B..., Monsieur Vincent A... et Monsieur Frédéric A..., sont intervenus à la procédure.
En reprise d'instance, les consorts A... ont conclu à l'homologation des conclusions expertales, alors que Madame Y... les a contestées, a réclamé l'application du plan cadastral, et subsidiairement un complément d'expertise.
Par jugement du 21 mars 2017, le tribunal d'instance de Brignoles a :
-dit que la limite séparative entre la parcelle cadastrée section [...] appartenant à Madame Y... et la parcelle cadastrée section [...] appartenant aux consorts A..., toutes deux sises sur la commune de Rocbaron (Var) suit la ligne passant par les points ABCD du plan figurant à l'annexe 3 du rapport d'expertise déposée par Monsieur Thierry F... le 16 septembre 2016,
-désigné à nouveau Monsieur Thierry F..., expert judiciaire, et lui donne pour mission, les parties dûment présentes ou appelées, de :
*procéder à l'implantation des bornes aux points ABCD déterminés par le plan de bornage, à frais partagés par moitié entre les parties,
*rédiger le procès-verbal de bornage des opérations effectuées qui devra être déposé au greffe du tribunal d'instance de Brignoles,
-invité en tant que de besoin la partie la plus diligente à faire publier la présente décision au bureau des hypothèques de la situation des immeubles en question,
-dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure,
-fait masse des dépens, frais d'expertise judiciaire, frais de bornage et frais de publicité foncière, et dit qu'ils seront supportés à parts égales entre les parties, tous autres frais restant à la charge de ceux qui les ont exposés.
Madame Marie-France X... épouse Y... a relevé appel de cette décision par déclaration du 24 avril 2017.
Par conclusions du 24 juillet 2017, qui sont tenues pour entièrement reprises, l'appelante demande à la cour de :
« Infirmer le jugement rendu le 21 mars 2017 par le tribunal d'instance de Brignoles.
Et statuer de nouveau comme suit.
À titre principal
Rejeter la fixation des limites de propriétés sur le tracé ABC telle que proposée dans le rapport d'expertise judiciaire du 15 septembre 2016.
Fixer la limite de propriété entre les parcelles [...] et [...] conformément au plan cadastral en vigueur.
À titre subsidiaire, dans l'hypothèse où le tribunal ne s'estimerait pas suffisamment éclairé sur cette limite
Ordonner un supplément d'expertise avec notamment pour chefs :
*rechercher la borne originelle mentionnée expressément dans l'acte de partage de 1858,
*rechercher l'existence d'un chemin de carraire sur la propriété D 421,
*se prononcer sur les changements à la topographie des lieux par les travaux de constructions réalisés sur la parcelle [...].
En toute hypothèse,
Partager par moitié les dépens de l'instance en ce compris les frais d'expertise judiciaire.
Dire et juger n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. »
Par conclusions du 18 septembre 2018, qui sont tenues pour entièrement reprises, les consorts A... demandent à la Cour de :
« Vu les articles 646 et suivants du Code civil,
Vu la jurisprudence suscitée,
Vu les pièces versées aux débats,
Vu le rapport d'expertise judiciaire déposé par Monsieur F... le 15 septembre 2016,
Débouter Madame Marie-France Y... de l'ensemble de ses demandes, fins, moyens et conclusions.
Confirmer le jugement rendu le 24 par le tribunal d'instance de en ce qu'il a :
Dit que la limite séparative entre la parcelle cadastrée section [...] appartenant à Madame Y... et la parcelle cadastrée section [...] appartenant aux consorts A..., toutes deux sises sur la commune de Rocbaron (Var) suit la ligne passant par les points ABCD du plan figurant à l'annexe 3 du rapport d'expertise déposée par Monsieur Thierry F... le 16 septembre 2016.
Désigne à nouveau Monsieur Thierry F..., expert judiciaire, et lui donne pour mission, les parties dûment présentes ou appelées, de :
*procéder à l'implantation des bornes aux points ABCD déterminés par le plan de bornage, à frais partagés par moitié entre les parties,
*rédiger le procès-verbal de bornage des opérations effectuées qui devra être déposé au greffe du tribunal d'instance de Brignoles.
Invite en tant que de besoin la partie la plus diligente à faire publier la présente décision au bureau des hypothèques de la situation des immeubles en question.
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure.
Fait masse des dépens, frais d'expertise judiciaire, frais de bornage et frais de publicité foncière, et dit qu'ils seront supportés à parts égales entre les parties, tous autres frais restant la charge de ceux qui les ont exposés.
Condamner Madame Marie-France Y... à payer aux consorts A... la somme de 5000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamner Madame Marie-France Y... aux entiers dépens de première instance et d'appel distraits au profit de la Selas Cabinet C... sur son affirmation de droit en application des dispositions des articles 696 et 699 du code de procédure civile. »
L'instruction de l'affaire a été close le 25 septembre 2018.
MOTIFS
Madame Marie-France X... épouse Y... soutient que la ligne divisoire entre son fonds, parcelle cadastrée section [...] sur la commune de Rocbaron, lieu-dit L'Église Vieille, et la parcelle contiguë au nord, cadastrée section [...] appartenant aux consorts A... passerait entre la maison et la piscine de ceux-ci, piscine qui serait construite sur son fonds.
Monsieur F..., expert, propose une ligne divisoire passant au sud de ladite piscine, ce qui inclut la piscine dans la parcelle n° D 2077 des consorts A....
Afin d'obtenir une réformation du jugement entrepris, Mme Y... critique ce rapport d'expertise en plusieurs points.
En premier lieu, Madame Y... invoque qu'il y aurait déjà eu un bornage et pour cela s'appuie sur un acte successoral Girard/Gueit en date du 4 novembre 1858 dans lequel serait mentionné l'emplacement d'une borne.
Elle produit ledit acte successoral en pièce n° 2.
Cependant, il ne résulte pas du rapport d'expertise de Monsieur F... que ce document lui ait été communiqué.
La mauvaise photocopie dudit document le rend illisible, ce qui ne permet pas à la cour de vérifier qu'il y ait fait mention d'une borne.
Cet acte n'est accompagné d'aucun plan en bornage ou simple plan.
Enfin, dans les dires soumis à l'expert, Madame Y... a fait état de l'existence de cette borne sans faire référence à l'acte du 4 novembre 1858, laquelle borne n'a pas été retrouvée in situ.
En deuxième lieu, Madame Y... invoque l'existence d'un chemin pastoral ou carraire dont Monsieur F... n'aurait pas tenu compte, qui se serait situé en limite Nord de sa parcelle et se serait poursuivi vers l'Est. Pour cela, elle invoque le rapport d'expertise de Monsieur G... en date du 29 octobre 1992.
Cependant, Monsieur G... avait pour mission de dire si les terrains appartenant à Madame X..., auteur de Madame Y..., propriétaire des parcelles section [...]et [...]. À ces opérations expertes, sont intervenus les époux H..., propriétaires de la parcelle [...], qui sera divisée ultérieurement en deux parcelles [...] et [...], la parcelle [...] étant elle aussi partagée ensuite en deux parcelles [...] et [...], soit la parcelle appartenant aujourd'hui aux consorts A....
Monsieur G... qui a établi son plan à partir du plan cadastral créé en 1832 révisé en 1937, conclut que le désenclavement des parcelles [...] et [...] doit se faire suivant la totalité du tracé rouge de l'annexe 2, c'est-à-dire par des droits de passage sur les propriétés Caramelo-Gueit, Mestre et Guichard, en précisant que le chemin pourra mordre de 50 cm sur le clapier qui matérialise la limite entre les propriétés H... et Mestre.
Ce chemin de désenclavement arrivait au point nord-ouest du terrain actuel de Madame Y... et compte tenu des divisions successives, la limite dont il est fait état par Monsieur G... ne concerne pas la parcelle appartenant actuellement aux consorts A....
Surtout, il ne résulte absolument pas de cet acte et du plan qui l'accompagne, que cette carraire se poursuivait vers l'est comme le soutient Madame Y....
En outre, dans ce rapport d'expertise, Monsieur G... fait état de pierrier ou clapier contrairement à ce qu'affirme Madame Y....
Madame Y... ne démontrent donc pas que les vestiges retrouvés sont ceux d'un chemin.
En troisième lieu, nonobstant l'absence de signature de Madame X..., auteur de Madame Y..., du document d'arpentage réalisé par Monsieur I... en 1995, ce document n'a pas à être écarté des débats dans la mesure où les auteurs des consorts A..., les époux H..., avaient accepté de le signer et qu'il accompagne les actes de propriété subséquents, que Monsieur F... ne s'est pas uniquement inspiré de ce rapport, et qu'il constitue donc un indice au même titre que les plans cadastraux.
En quatrième lieu, Monsieur F... n'a pas tenu compte du piquet de fer se trouvant en bas d'un talus comme valant borne.
En cinquième lieu, Madame Y... demande que soit fait application du plan cadastral.
Il convient de rappeler que ce document est à visée fiscale, et que son approximation a très souvent été démontrée. Il ne peut donc constituer qu'un indice, et ne peut à lui seul valoir plan de bornage.
Par contre, il résulte du rapport d'expertise que l'expert qui s'est rendu sur place et a dressé un plan de l'état des lieux, a examiné les actes de propriété, a analysé tous les plans qui pouvaient être joints aux différents actes produits, ainsi que les plans cadastraux, les vues aériennes de 1950, 1958, 1972 et 2003, les limites naturelles, et en particulier le perrier relevé en 1995 dont il souligne qu'il a effectivement été rogné au droit de la piscine lors des travaux.
En reconstituant ledit pierrier et la ligne le partageant en son milieu, Monsieur F... a fixé la ligne divisoire selon les points à ABC et D de l'annexe 3 de son rapport, la ligne AB passant au sud de la piscine, mais sur la plage carrelée de celle-ci. Le mur de soutènement construit au sud est donc construit sur la parcelle de Madame Y....
Au regard des développements du rapport d'expertise et des pièces produites, les critiques de Madame Y... sont sans fondement.
Madame Y... sera donc déboutée de sa demande de contre expertise ainsi que de sa demande d'application du plan cadastral.
Le jugement déféré qui a dit que la limite séparative entre la parcelle cadastrée section [...] appartenant à Mme Y... et la parcelle cadastrée section [...] appartenant aux consorts A... suit la ligne passant par les points ABCD du plan figurant en annexe 3 du rapport d'expertise de Monsieur Thierry F... du 5 septembre 2016, sera confirmé.
Il sera aussi confirmé en ce qu'il a désigné Monsieur F... pour procéder à l'implantation des bornes en ces points ABCD.
En ce qui concerne la publication au service de la publicité foncière de la situation des immeubles en question, la cour invite les parties à se rapprocher d'un notaire qui formalisera les documents nécessaires à cette publication.
L'équité commande de faire bénéficier les consorts A... des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en appel.
Les dépens de première instance, ainsi que les frais d'expertise et de bornage, seront partagés par moitié, les dépens d'appel étant seuls mis à la charge de Mme Y....
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Déboute Madame Marie-France X... épouse Y... de sa demande de contre expertise,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, notamment en ce qu'il a dit que la limite séparative entre la parcelle cadastrée section [...] appartenant à Madame Marie-France Arlette N... X... épouse Y..., née le [...] à Marseille, et la parcelle cadastrée section D n° [...] appartenant aux consorts A..., soit Madame Anne Marie O... née le [...] à Labruguière (81290), à Madame Isabelle Marie L... épouse B..., né le [...] à Mazamet (81200), Monsieur Vincent Pierre A..., né le [...] à Mazamet (81200) et Monsieur Frédéric Jean A... né le [...] à Mazamet (81200), toutes deux sises à Rocbaron (Var), suit la ligne passant par les points ABCD du plan figurant en annexe 3 du rapport d'expertise déposé par Monsieur Thierry F... le 16 septembre 2016,
Y ajoutant,
Invite en tant que de besoin la partie la plus diligente à se rapprocher d'un notaire afin de formaliser les documents nécessaires à la publication au service de la publicité foncière du jugement du 21 mars 2017 du tribunal d'instance de Brignoles et le présent arrêt,
Condamne Madame Marie-France X... épouse Y... à payer à Madame Anne Z... veuve A..., Madame Isabelle A... épouse B..., Monsieur Vincent A... et Monsieur Frédéric A... la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Madame Marie-France X... épouse Y... aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRESIDENT