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29/11/2018 | FRANCE | N°16/00880

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 3e chambre b, 29 novembre 2018, 16/00880


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

3e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 29 NOVEMBRE 2018



N° 2018/325













Rôle N° 16/00880

N° Portalis DBVB-V-B7A-56SP







SARL CABINET SERRADO





C/



SAS COMPAGNIE IMMOBILIERE MEDITERRANEE





Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me L. CAPINERO



Me M-C WASSILIEFF-VIARD

















©cision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 30 Novembre 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 2015F00812.





APPELANTE



SARL CABINET SERRADO,

prise en la personne de son représentant légal en exercice

siège social [Adresse 1]

représentée e...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

3e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 29 NOVEMBRE 2018

N° 2018/325

Rôle N° 16/00880

N° Portalis DBVB-V-B7A-56SP

SARL CABINET SERRADO

C/

SAS COMPAGNIE IMMOBILIERE MEDITERRANEE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me L. CAPINERO

Me M-C WASSILIEFF-VIARD

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 30 Novembre 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 2015F00812.

APPELANTE

SARL CABINET SERRADO,

prise en la personne de son représentant légal en exercice

siège social [Adresse 1]

représentée et assistée par Me Laure CAPINERO de la SELARL IN SITU AVOCATS, avocate au barreau de MARSEILLE, substituée par Me Nadia SANDJAK, avocate au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

SAS COMPAGNIE IMMOBILIÈRE MÉDITERRANÉE,

prise en la personne de son représentant légal en exercice

siège social [Adresse 2]

représentée et plaidant par Me Marie-Christine WASSILIEFF-VIARD, avocate au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 10 Octobre 2018 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Monsieur Jean-François BANCAL, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

M. Jean-François BANCAL, Président (rédacteur)

Mme Patricia TOURNIER, Conseillère

Mme Sophie LEYDIER, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Josiane BOMEA.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 29 Novembre 2018.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 29 Novembre 2018,

Signé par M. Jean-François BANCAL, Président et Mme Josiane BOMEA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Exposé du litige :

Dans le cadre d'une opération immobilière à réaliser sur la commune de [Localité 1] où il était envisagé de construire :

' d'une part, un bâtiment numéro 1 constitué de locaux commerciaux, de logements locatifs aidés et de logements en accession libre,

' d'autre part, un bâtiment numéro 2 constitué d'une résidence dite «multigénérationnelle » de 42 appartements locatifs,

la S.A.S. COMPAGNIE IMMOBILIERE MEDITERRANEE, en qualité de maître de l'ouvrage, a conclu le 29 janvier 2013 avec la S.A.R.L. CABINET SERRADO un contrat de maîtrise d''uvre de conception et d'exécution, pour des travaux estimés à la somme de 3'245'000 € hors-taxes et un forfait global de rémunération de 195'000€ hors-taxes.

Il était stipulé dans le contrat que « l'objet du présent contrat concerne uniquement le bâtiment 1 » (page 2). Cette mention était reprise dans le cahier des clauses administratives et financières (page 3).

Aucun contrat de maîtrise d''uvre concernant le bâtiment 2 n'était signé entre la S.A.S. COMPAGNIE IMMOBILIERE MEDITERRANEE et la S.A.R.L. CABINET SERRADO.

La S.A.S. COMPAGNIE IMMOBILIERE MEDITERRANEE ne faisait pas édifier ce bâtiment.

Estimant néanmoins être fondée à réclamer des honoraires « dus pour mission partielle de permis de construire relatif à l'opération « résidence multigénérationnelle » projetée à [Localité 1] et comprenant la construction 42 logements collectifs et locaux communs et les aménagements extérieurs correspondant » , la S.A.R.L. CABINET SERRADO établissait deux factures d'honoraires à l'ordre de la S.A.S. COMPAGNIE IMMOBILIERE MEDITERRANEE :

un état n°1 des honoraires daté du 5 mars 2013 pour 39'243,75 € TTC,

un état n°2 des honoraires daté du 31 mai 2013 pour 31'395 € TTC.

Le 16 décembre 2013, une mise en demeure d'avoir à payer ladite somme était adressée par la S.A.R.L. CABINET SERRADO au maître de l'ouvrage

Par acte du 18 février 2015, la S.A.R.L. CABINET SERRADO faisait assigner la S.A.S. COMPAGNIE IMMOBILIERE MEDITERRANEE devant le tribunal de commerce de Marseille aux fins d'obtenir sa condamnation à lui payer le montant de ces deux notes d'honoraires, la somme de 4000 € à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et celle de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 30 novembre 2015, le tribunal de commerce de Marseille a :

' condamné la S.A.S. COMPAGNIE IMMOBILIERE MEDITERRANEE à payer à la S.A.R.L. CABINET SERRADO :

** 39'243,75 € en principal avec intérêts au taux légal à compter du 17 décembre 2014, représentant donc le montant de l'état n°1,

** 2500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

' rejeté les autres demandes des parties,

' condamné la S.A.S. COMPAGNIE IMMOBILIERE MEDITERRANEE aux dépens.

Le 18 janvier 2016, la S.A.R.L. CABINET SERRADO interjetait appel.

Vu les conclusions de la S.A.R.L. CABINET SERRADO avec bordereau de communication de pièces notifiées par le R.P.V.A. le 19 juillet 2016,

Vu les conclusions de la S.A.S. COMPAGNIE IMMOBILIERE MEDITERRANEE avec bordereau de communication de pièces notifiées par le R.P.V.A. le 22 août 2016,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 15.9.2018.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur les honoraires d'architecte réclamés :

En application de l'article 9 du Code de procédure civile : ' Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.'

Et l'article 1315 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance du 10.2.2016 applicable au litige, énonce que :

' Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.'

Il incombe donc à l'architecte réclamant au maître de l'ouvrage paiement d'honoraires qu'il estime dus de rapporter la preuve de la créance qu'il invoque, étant rappelé au surplus qu'en vertu du code des devoirs de l'architecte, tout engagement professionnel d'architecte doit faire l'objet d'une convention écrite préalable, obligation déontologique qui n'exclut cependant pas la possibilité d'une commande verbale.

En l'espèce, il n'est nullement contesté que le maître de l'ouvrage a réglé à l'architecte la totalité des honoraires dus au titre du bâtiment numéro 1, et qu'aucun contrat écrit n'a été conclu entre eux relativement au bâtiment numéro 2.

Il résulte des explications des parties, des différents courriels produits et des extraits du registre du commerce et des sociétés versés, que la société anonyme d'habitations à loyer modéré DOMICIL, ayant son siège social à la même adresse que la S.A.S. COMPAGNIE IMMOBILIERE MEDITERRANEE, membre du conseil d'administration du groupement d'intérêt économique HLM UNICIL, entité juridique distincte de C.I.M, a envisagé un moment d'intervenir pour la construction du bâtiment numéro 2, mais n'y a pas donné suite.

C'est dans ce cadre que [V] [M], représentant la S.A.S. COMPAGNIE IMMOBILIERE MEDITERRANEE, a pu, dans un mél du 17.12.2012, antérieur à la signature du contrat de maîtrise d'oeuvre, faire état d'un « bâtiment DOMICIL à 2'900'000 € H.T. (À faire valider par [B] [B]) », d'une répartition d'un budget de 200'000 € entre CIM et DOMICIL, et précisé que « la société CIM prendra en risque la partie PC de la résidence multigénérationnelle dans le cadre d'un courrier auquel sera joint le projet de contrat DOMICIL».

Ainsi, contrairement à ce qu'a indiqué le premier juge, cette dernière phrase ne figure nullement dans le contrat de maîtrise d''uvre signé par les parties.

Et c'est [B] [B], se présentant comme directeur de l'agence de maîtrise d'ouvrage Languedoc-Roussillon de DOMICIL, qui a envoyé à la S.A.R.L. CABINET SERRADO le programme DOMICIL correspondant au bâtiment 2 et indiqué à l'architecte le 4 mars 2013 que «le comité d'engagement de DOMICIL n'ayant pas, à ce jour, validé le lancement de ce programme, il ne peut y avoir de contractualisation entre le cabinet Serrado et notre société, ni de facturation». Il a seulement suggéré à l'architecte de se rapprocher de CIM pour prise en charge d'un forfait de débours dans les termes suivants : « il me semble cependant logique d'aborder avec [V] [M] la prise en charge d'un forfait de débours du cabinet sur les phases ESQ et AVP/PC pour la part du programme locatif intergénérationnel dans l'opération »(mél du 4.3.2013 , pièce 6 de la S.A.R.L. CABINET SERRADO).

Cependant, ce salarié du GIE HLM UNICIL(attestation de la directrice des ressources humaines de ce groupement, pièce 11 de l'intimée) n'avait aucune qualité pour engager la S.A.S. COMPAGNIE IMMOBILIERE MEDITERRANEE.

Et si le représentant de la S.A.S. COMPAGNIE IMMOBILIERE MEDITERRANEE a pu évoquer une possibilité de prise en charge des honoraires de l'architecte concernant le bâtiment DOMICIL, celle-ci n'était que conditionnelle, puisque soumise à un courrier auquel devait être joint le projet de contrat DOMICIL.

Cette condition ne s'étant pas réalisée, aucun projet de contrat n'étant versé, aucune commande verbale n'étant prouvée, la S.A.R.L. CABINET SERRADO n'établit nullement l'existence de l'obligation à paiement qu'elle allègue à l'encontre de la S.A.S. COMPAGNIE IMMOBILIERE MEDITERRANEE.

L'opération immobilière n'ayant pas été réalisée dans son ensemble et n'ayant pas donné lieu à engagement contractuel de la S.A.S. COMPAGNIE IMMOBILIERE MEDITERRANEE de prendre en charge les honoraires réclamés 'pour mission partielle de permis de construire relatif à l'opération « résidence multigénérationnelle', la S.A.R.L. CABINET SERRADO n'est pas fondée à réclamer à la S.A.S. COMPAGNIE IMMOBILIERE MEDITERRANEE les sommes figurant sur ses états n°1 et 2 précités.

Elle doit donc être déboutée de ses demandes.

En conséquence, le jugement déféré doit être partiellement confirmé en ce que les premiers juges ont débouté l'architecte de sa demande en paiement de la seconde note d'honoraires, mais pour d'autres motifs, et réformé, en ce qu'ils ont fait droit à sa demande en paiement afférente à la première note d'honoraires.

Sur les dommages et intérêts pour résistance abusive :

Alors que les sommes réclamées par l'architecte ne sont pas dues, aucune 'résistance abusive' ne peut être imputée au maître de l'ouvrage.

Le jugement déféré doit donc ici être confirmé, mais pour d'autres motifs, en ce que les premiers juges ont débouté la S.A.R.L. CABINET SERRADO de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive.

Sur l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens :

Succombant, l'appelante devra supporter les dépens de première instance et d'appel.

L'équité ne commande nullement d'allouer à la S.A.S. COMPAGNIE IMMOBILIERE MEDITERRANEE la moindre somme au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR :

Statuant publiquement,

Contradictoirement,

CONFIRME partiellement le jugement déféré en ce que les premiers juges ont :

- débouté la S.A.R.L. CABINET SERRADO de sa demande en paiement de la somme 31'395€ TTC correspondant à l'état n°2 de ses honoraires du 31 mai 2013,

- débouté la S.A.R.L. CABINET SERRADO de sa demande de dommages et intérêts,

- débouté la S.A.S. COMPAGNIE IMMOBILIERE MEDITERRANEE de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

LE REFORME pour le surplus,

STATUANT A NOUVEAU ET Y AJOUTANT,

DÉBOUTE la S.A.R.L. CABINET SERRADO de ses demandes en paiement d'une somme de 39'243,75 € à titre d'honoraires et d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE la S.A.S. COMPAGNIE IMMOBILIERE MEDITERRANEE de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la S.A.R.L. CABINET SERRADO aux dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIÈRELE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 3e chambre b
Numéro d'arrêt : 16/00880
Date de la décision : 29/11/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 3B, arrêt n°16/00880 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-11-29;16.00880 ?
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