COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
3e Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 27 SEPTEMBRE 2018
N° 2018/268
Rôle N° 16/07158
N° Portalis DBVB-V-B7A-6OXB
SA M M A F...
C/
SAS CENTRALE D'ACHAT UBALDI
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me C. Z... H...
Me P. X...
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce d'ANTIBES en date du 08 Avril 2016 enregistré au répertoire général sous le n° [...].
APPELANTE
SA M M A F...,
prise en la personne de son représentant légal en exercice
siège social [...]
représentée et plaidant par Me Y... Z... H... de la SCP Z... D'AA...BALDO & ASSOCIES, avocate au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
INTIMEE
SAS CENTRALE D'ACHAT UBALDI
prise en la personne de son représentant légal en exercice
siège social [...]
représentée et plaidant par Me Patrick X..., avocat au barreau de GRASSE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 26 Juin 2018 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Sophie LEYDIER, Conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de:
M. Jean-François BANCAL, Président
Mme Patricia TOURNIER, Conseillère
Mme Sophie LEYDIER, Conseillère (rédactrice)
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Josiane BOMEA.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 27 Septembre 2018.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 Septembre 2018,
Signé par M. Jean-François BANCAL, Président et Mme Josiane BOMEA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Exposé du litige :
La SAS UBALDI, assurée par les B... F... suivant polices multirisques n° 116095225 et 114627500, a pour activité la distribution d'électroménager, de salons, de literies et de cuisines, et possède 13 magasins dans le Sud-est de la FRANCE et à MONACO.
Dans la soirée du 11 juin 2013, le magasin d'ANTIBES situé [...], d'une surface de vente d'environ 1 000 m 2, spécialisé dans la vente d'électroménager, a été gravement endommagé par un incendie, en l'absence de tout occupant.
Le 22/07/2013, la société CENTRALE D'ACHAT UBALDI et les B... F... ASSURANCES MUTUELLES et B... F... ont signé un protocole d'accord indiquant notamment d'une part, qu'après examen des contrats d'assurances, il apparaissait que l'assurée était insuffisamment couverte au titre des capitaux assurés sur le matériel, théoriquement assuré en valeur à neuf, et que l'application stricte du contrat et plus particulièrement l'application de la règle proportionnelle des capitaux entraînait un découvert très important pour l'assurée, susceptible de provoquer des difficultés financières aigües, et, d'autre part qu'en l'état du chiffre d'affaires du magasin sinistré et de la marge brute mensuelle dégagée, le montant de la perte d'exploitation mensuelle s'avérait également très important et nécessitait la mise en oeuvre de travaux de réfection dans les délais les plus rapides.
Aux termes de ce protocole d'accord, B... a accepté irrévocablement de renoncer à l'application de la règle proportionnelle des capitaux, d'indemniser les dommages matériels à hauteur de 900 692 € HT, de prendre en charge d'éventuels travaux supplémentaires de rénovation du magasin selon accords des experts respectifs des parties, tandis que la société CENTRALE D'ACHAT UBALDI s'est engagée irrévocablement à renoncer à toute demande d'indemnisation au titre de la perte d'exploitation au-delà de la période comprise entre le 12/06/2013 et le 7/10/2013, le montant de cette indemnisation devant être arrêté par expertise contradictoire entre le cabinet CUNNINGHAM LINDSEY pour B... et le cabinet JAUSSEIN EXPERTISE pour la société CENTRALE D'ACHAT UBALDI.
Par ordonnance de référé du 18/09/2013, le Président du Tribunal de Grande Instance de GRASSE a désigné Jean-François C..., expert, principalement pour déterminer les causes de l'incendie, donner son avis sur les coûts de remise en état des lieux et se prononcer sur les préjudices directs et indirects subis par la société UBALDI du fait de l'incendie, au contradictoire de B..., des sociétés SEB, SONY TOSHIBA, BOSCH, et de la société UBALDI.
M. C... a intégré à son rapport celui établi par son sapiteur M. D..., expert-comptable, daté du 13/03/2017.
Invoquant un désaccord des deux experts du cabinet CUNNINGHAM LINDSEY et du cabinet JAUSSEIN EXPERTISE sur plusieurs points, principalement sur le chiffrage de l'indemnisation au titre de sa perte d'exploitation, et le refus de l'assureur de désigner un troisième expert, la société CENTRALE D'ACHAT UBALDI a saisi par requête le Président du Tribunal de Commerce d'Antibes aux fins de voir désigner un troisième expert.
Par ordonnance rendue le 07/04/2014 , le Président du Tribunal de Commerce d'ANTIBES a désigné M. Christian E... (cabinet EUREXO) aux fins d'évaluer le montant des dommages n'ayant pas fait l'objet d'un accord entre les experts d'assuré et d'assurance.
M. Christian E... a établi un rapport de tierce expertise, à la suite duquel un procès-verbal de tierce expertise a été signé par les trois experts le 02/04/2015.
Par acte du 14/04/2015, la société CENTRALE D'ACHAT UBALDI a assigné son assureur B... devant le Tribunal de Commerce d'Antibes aux fins principalement d'obtenir sa condamnation à lui payer la somme de 2 066 769 euros au titre de la perte d'exploitation consécutive au sinistre, outre la somme de 100 000 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive.
Par jugement en date du 08/04/2016, le tribunal de commerce d'Antibes a :
' condamné la société B... à payer à la société UBALDI la somme de 936 681 € au titre du solde dû, majoré des intérêts légaux à compter de la date d'assignation à parfaire au titre des honoraires d'experts,
' débouté la société UBALDI de sa demande de dommages intérêts,
' ordonné l'exécution provisoire,
' condamné la société B... à payer à la société UBALDI la somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Par déclaration reçue au greffe le 19/04/2016, la SA B... F... a relevé appel de ce jugement.
Par conclusions avec bordereau de pièces communiquées notifiées par le R.P.V.A. le 08/06/2018, l'appelante demande à la Cour :
Vu l'article 1134 du Code Civil,
Vu les dispositions du contrat d'assurance,
- de la recevoir en son appel,
Le disant bien fondé,
- de réformer le jugement entrepris,
- de fixer à la somme de 1 325 348 € l'indemnité due à la société UBALDI au titre des pertes d'exploitation,
Vu les sommes déjà versées par les B... non contestées par UBALDI avant le jugement dont appel,
- de dire et juger que les B... F... ne peuvent devoir à la société UBALDI qu'un solde de 151 312 €,
- de constater que B... a réglé à la société UBALDI, au titre de l'exécution provisoire prononcée par le tribunal, la somme de 936 681 €,
- de condamner la société UBALDI à lui rembourser les sommes trop versées,
- de débouter la société UBALDI des fins de son appel incident,
- de réformer le jugement entrepris en ce qu'il a alloué une somme de 10 000 € à la société UBALDI au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile et débouter la société UBALDI de ce chef,
- de condamner la société UBALDI à lui payer une somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile pour la procédure devant la cour d'appel,
- de la condamner aux dépens.
Par conclusions avec bordereau de pièces communiquées notifiées par le R.P.V.A. le 04/06/2018, l'intimée demande à la Cour :
Vu le contrat d'assurance liant les parties,
Vu le rapport de Monsleur E... désigné par ordonnance présidentielle du 7 avril 2014,
Vu les procès-verbaux établis par les experts,
Vu I'article 1134 du Code Civil,
- de DECLARER l'appelante mal fondée en son appel,
- de CONFIRMER le jugement entrepris en ce qu'íl a retenu le principe d'une condamnation de B... au titre de la perte d'exploitation liée à la perte de marge à l'échelle de la société,
- de REFORMER le jugement entrepris quant au quantum de la condamnation,
Y AJOUTANT,
- de G... B... à lui payer la somme de 2 066 769 € à parfaire, outre intérêt au taux légal à compter de l'assignation introductive d'instance et outre somme à parfaire au titre des honoraires d'experts,
- de G... B... à lui payer la somme de 100 000 € à titre de dommages et intérêts compte tenu de sa déloyauté contractuelle et de sa résistance abusive,
- de G... B... à lui payer la somme de 20 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 12/06/2018.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Le cadre contractuel
L'avenant N°18 au contrat N°114 627 500 susvisé stipule notamment en cas de sinistre :
III-E-2 EXPERTISE - SAUVETAGE
Les dommages sont fixés de gré à gré.
En cas de désaccord, il sera procédé à une expertise amiable contradictoire sous réserve des droits respectifs des parties.
Chacune des parties choisit un expert. Si les experts ainsi désignés ne sont pas d'accord, ils s'adjoignent un troisième expert. Les trois experts opèrent en commun et à la majorité des voix (.....) (page 94)
II-F-3-c Evaluation des dommages
Les dommages sont évalués conformément aux dispositions des conditions générales et en application des règles suivantes :
1) au titre de la baisse du chiffre d'affaires, les dommages sont constitués par la perte de marge brute qui est déterminée en appliquant le taux de marge brute à la différence entre le chiffre d'affaires qui aurait été réalisé pendant la période d'indemnisation, en l'absence du sinistre, et le chiffre d'affaires effectivement réalisé pendant cette même période.
Font également partie intégrante du chiffre d'affaires de ladite période, les opérations entrant dans l'activité de l'exploitation assurée qui, du fait du sinistre et pendant la période d'indemnisation, sont réalisées, en particulier dans le cas de dépannage par l'assuré ou par des tiers agissant pour le compte de l'assuré.
Le chiffre d'affaires annuel, la marge brute annuelle et le taux de marge brute sont calculés pour le règlement du sinistre à partir des comptes des exercices antérieurs à ce sinistre et en tenant compte de la tendance générale de l'évolution de l'entreprise et des facteurs extérieurs et intérieurs ayant eu indépendamment de ce sinistre, une influence sur son activité et ses résultats.
2) au titre des frais supplémentaires d'exploitation, les dommages sont constitués de tous les frais exposés par l'assuré, ou pour son compte, d'un commun accord entre les parties, en vue d'éviter ou de limiter, durant la période d'indemnisation, la perte de marge brute due à la réduction du chiffre d'affaires imputable au sinistre.
3) du total de la perte de marge brute et des frais supplémentaires d'exploitation calculés ci-dessus, doivent être retranchés tous les montants de charges constitutives de la marge brute que l'entreprise cesse de supporter du fait du sinistre, pendant la période d'indemnisation.
II-F-3-d Calcul de l'indemnité
1) principe du calcul
L'assurance ne peut être une cause de bénéfice pour l'assuré et l'indemnité ne peut avoir pour base que le préjudice réel. L'assuré est tenu de justifier de la réalité et de l'importance du dommage.
a) l'indemnité est calculée sur la base de la dernière marge brute annuelle prévisionnelle telle que définie au paragraphe 'obligations à la conclusion du contrat ou en cours de contrat' déclarée par le souscripteur,
b) l'indemnité est égale au montant des dommages évalué comme il est indiqué au paragraphe 'évaluation des dommages' ci-avant, sous réserve de dispositions particulières dans le cas du versement d'une indemnité au titre des frais supplémentaires d'exploitation (....)
c) le cas échéant, le montant de l'indemnité sera réduit par l'application des dispositions suivantes :
- plafonnement du montant des dommages à la somme fixée par la limitation d'indemnités qui peut être prévue au paragraphe 'garanties souscrites',
- s'il y a lieu, application de la règle proportionnelle de capitaux, et/ou d'une réduction au titre d'une insuffisance d'assurance des dommages matériels comme il est dit au paragraphe 'conséquences de dommages matériels' ci-avant,
- puis, déduction du résultat obtenu de la franchise, dont le montant est déterminé suivant les modalités prévues au contrat.
2) règle proportionnelle de capitaux
Si au jour du sinistre le capital à garantir au titre de la marge brute excède le capital garanti, l'assuré est considéré comme son propre assureur pour la différence et supporte une part proportionnelle des dommages en application de l'article L 121-5 du code des assurances.
3) franchise
L'assuré conservera à sa charge une franchise d'un montant en euros correspondant à un nombre de jours de marge brute annuelle du dernier exercice comptable clos de l'entreprise assurée, montant fixé au tableau des garanties.
Le montant en euros, correspondant à un jour de marge brute annuelle est le quotient du montant de la marge brute annuelle du dernier exercice comptable clos de l'entreprise assurée par le nombre de jours ouvrés de l'entreprise assurée au cours de ce même exercice comptable.
Sauf convention contraire, ce nombre est fixé forfaitairement à 250.
Elle s'applique quel que soit l'événement générateur du sinistre, à l'exception toutefois des événements pour lesquels il est prévu par ailleurs au contrat une franchise particulière d'un montant supérieur, auquel cas c'est cette franchise qui s'applique.
4) cas particuliers
(......)
b) assurance dite 'par activités ou départements'
Si la comptabilité de l'assuré permet d'obtenir, au jour du sinistre, la ventilation exacte des résultats comptables par activités ou départements, les dispositions prévues ci-avant s'appliqueront séparément à chaque activité ou département affecté par le sinistre.
Toutefois, si la somme assurée au titre de la marge brute est inférieure au total des sommes obtenues en appliquant le taux de marge brute pour chaque activité ou département (affecté ou non par le sinistre) au chiffre d'affaires annuel de chacun d'eux, multiplié par la durée maximum de la période d'indemnisation, exprimée en années, l'indemnité sera réduite proportionnellement (pages 71 et 72), étant précisé que le lexique figurant à la fin de l'avenant définit ainsi l'indemnité 'versement que les assureurs effectuent, par suite d'un sinistre, en exécution du contrat.
Suivant les garanties, l'indemnité est versée soit à l'assuré, soit à un tiers.
Sauf pour les assurances de responsabilités, les règles de calcul de l'indemnité sont fixées par le contrat ; certaines dispositions du contrat prévoient une réparation en nature des dommages matériels' (page 102).
Le rapport de tierce expertise établi par M. E... mentionne notamment :
- que le tiers expert a pour mission d'évaluer le montant des dommages n'ayant pas fait l'objet d'un accord entre les experts d'assuré et les experts d'assurance,
- que le 14/11/2014, une réunion s'est tenue entre les trois experts (celui de B..., celui de l'assurée et M. E...), lesquels sont parvenus à un accord sur la période d'indemnisation du jour du sinistre, soit le 11/06/2013, au 30/09/2014, et sur le montant des frais supplémentaires de travaux s'élevant à 247 642 euros,
- que les points de divergence constituant la mission du tiers expert concernaient les postes suivants :
tendance,
perte de chiffre d'affaire,
report de chiffre d'affaire sur le magasin de MANDELIEU,
taux de marge brute,
économies sur charges variables,
frais supplémentaires publicités,
franchise,
perte de marge brute liée aux conditions d'achat,
- que le taux de marge brute annuel est défini contractuellement page 103 des conditions particulières du contrat et de son avenant N°18, que la marge brute assurée est de 51 958 392 euros, sous déduction d'une franchise de 3 jours, cette dernière étant établie sur la marge brute 2010/2011 pour un montant de 37 436 831 euros porté à la somme de 43 298 660 euros compte tenu d'un coefficient de tendance de 1.16 (calculé), avec un taux d'ajustabilité de 20%,
- qu'à partir des balances des bilans clos au 31/03/2010 sur 12 mois, au 31/03/2011 sur 12 mois, au 31/03/2012 sur 12 mois, au 31/03/2013 sur 12 mois, de la situation au 30/09/2013 sur six mois et d'une balance du bilan au 31/12/2013 sur 9 mois, il a défini la marge brute contractuelle ainsi que la marge sur coût variable connu par les assureurs sous le terme de bénéfice brut, et que l'écart entre le pourcentage de marge brute et le pourcentage de bénéfice brut lui permettait de déterminer les économies sur charges variables (page 15),
- qu'il a étudié la ventilation des charges fixes et variables des différents exercices ou situations, et a noté une forte stabilité des charges variables des exercices clos du 31/03/2010 au 31/03/2013 (soit avant sinistre), puis une augmentation sur la situation du 30/09/2013 les charges variables passant de 80,8% à 83,04%,
- que sur cette augmentation, les comptes 603 (variation de stock), 607 (achat) et 609 (RFA) représentaient une hausse de 2,8% conséquence directe de la baisse des marges et des conditions d'achat dégradées,
- avoir déterminé, à partir d'une moyenne pondérée, l'impact sur le chiffre d'affaire réalisé, pour la période relative à la situation du 01/04/2013 au 30/09/2013, chiffré à 2 133 756 euros, la perte de marge de la société étant arrondie à 2 100 000 euros (pages 44 et 45),
- que le 02/04/2015, les trois experts se sont à nouveau réunis et ont procédé au vote sur les points de divergence ayant donné lieu à l'établissement d'un procès-verbal de tierce expertise dont les résultats sont les suivants :
votes à l'unanimité des trois experts
pour la perte de chiffre d'affaires (CA)
arrêtée à 4 112 000 euros, déduction faite du report de CA du magasin de MANDELIEU, pour la perte de CA, hors SAV,
arrêtée à 345 089 euros, déduction faite du report de CA du magasin de MANDELIEU, pour la perte de CA relatif au SAV,
pour le taux de marge brute
arrêté à 20,39% hors SAV,
arrêté à 97,65% sur SAV,
arrêté à 25,88% hors SAV, propre au magasin d'Antibes avec application de la clause par département,
pour la perte de marge brute hors clause par département
perte de marge brute sur vente= 4 112 000 X 20,39%= 836 437 euros
perte de marge brute sur SAV= 345 089 X 97,45%= 336 979 euros
soit une perte globale de marge brute de 1 175 416 euros
pour les économies
les économies sur SAV sont arrêtées à la somme de 104 361 euros,
les économies sur ventes sont arrêtées à la somme de 100 541 euros,
soit un montant d'économies de 204 902 euros,
pour le complément de marge brute après application de la clause par département
arrêté à la somme de 225 921 euros avec les indications suivantes
' le cabinet CUNNINGHAM LINDSEY considère que cette clause n'est pas applicable contractuellement mais donne son aval sur le montant,
le cabinet JAUSSEIN EXPERTISES considère que cette clause doit être appliquée et donne son aval sur le montant,
M. E... précise que sa mission consiste à une évaluation des dommages suivant mission du Tribunal de Commerce',
pour les frais supplémentaires
bâtiment 247 642 euros,
publicité 239 660 euros étant précisé que 'le cabinet CUNNINGHAM LINDSEY limite ces frais à la période reprise dans le protocole (soit jusqu'au 07/10/2013) à hauteur de 155 292 euros, soit une différence de 84 368 euros',
pour la franchise
franchise sur la société 579 622 euros,
franchise sur magasin hors clause par département 48 100 euros
franchise après application clause par département 57 482 euros.
vote à la majorité de deux experts sur trois pour la perte de marge de la société arrêtée à 2 100 000 euros, M. E... précisant 'ce n'est pas une conséquence d'une perte de CA, hormis la perte de CA constatée sur le magasin d'ANTIBES. La perte est liée à une dégradation des conditions d'achats démontrée sur 6 mois et 9 mois, mais non démontrée sur 12 mois par absence de situation au 31/03/2014".
Alors :
- que le protocole d'accord signé le 22/07/2013 prévoit que le montant de l'indemnisation de la perte d'exploitation sera arrêté par expertise contradictoire entre le cabinet CUNNINGHAM LINDSEY pour B... et le cabinet JAUSSEIN EXPERTISE pour la société CENTRALE D'ACHAT UBALDI,
- que le contrat d'assurance stipule que l'indemnité est égale au montant des dommages évalué comme il est indiqué au paragraphe 'évaluation des dommages', ce dernier renvoyant aux conditions générales indiquant notamment en page 94 que les dommages sont fixés de gré à gré, qu'en cas de désaccord il doit être procédé à une expertise amiable contradictoire, chacune des parties choisissant un expert, qu'en cas de désaccord des experts, un troisième est désigné, les trois experts opérant alors en commun et à la majorité des voix,
l'assureur est contractuellement tenu par les votes unanimes et les votes à la majorité des experts tels que figurant au procès-verbal de tierce expertise du 02/04/2015 ci-dessus visé.
Sur la perte de marge
La perte de marge de la société a été arrêtée à 2 100 000 euros à la majorité des voix de deux experts sur trois.
Contrairement à ce que soutient l'appelante, le troisième expert, M. E..., a bien pris en compte les dispositions contractuelles qui ne prévoient pas seulement que les dommages sont constitués par la perte de marge brute déterminée en appliquant le taux de marge brute à la différence entre le chiffre d'affaires qui aurait été réalisé pendant la période d'indemnisation en l'absence de sinistre, et celui effectivement réalisé pendant cette même période.
En effet, en page 71 du contrat, il est précisé que 'le chiffre d'affaires annuel, la marge brute annuelle et le taux de marge brute sont calculés pour le règlement du sinistre à partir des comptes des exercices antérieurs à ce sinistre et en tenant compte de la tendance générale de l'évolution de l'entreprise et des facteurs extérieurs et intérieurs ayant eu indépendamment de ce sinistre, une influence sur son activité et ses résultats' et c'est bien en analysant dans le détail les comptes de la société avant et après sinistre que l'expert E... a pu conclure à une perte de marge à l'échelle de la société résultant de facteurs extérieurs et intérieurs ayant eu une influence sur son activité et ses résultats, cette perte étant donc contractuellement garantie.
Si l'appelante soutient que l'analyse de l'expert E... serait insuffisante et approximative puisque l'expert a lui-même indiqué en page 40 de son rapport que 'dans l'absolu, on aurait dû établir à partir des données du grand livre une situation entre les différents sites de génération de chiffre d'affaires', ce qui n'a pas été fait, et que l'expert a également reconnu n'avoir pas pu étudier si certaines indemnisations faisaient l'objet d'amortissement et entraient dans le cadre de charges décaissables, cette critique n'est pas de nature à remettre en cause le chiffrage soumis au vote des trois experts en application du contrat, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, étant au surplus observé que l'ensemble des données comptables fournies (principalement les bilans et situations) ont permis de déterminer incontestablement une baisse des conditions d'achats suite au sinistre, ce point étant corroboré par le sapiteur expert-comptable intervenu dans le cadre de l'expertise diligentée par M. C..., puisqu'il a indiqué que le magasin d'Antibes représente 7% du chiffre d'affaires du groupe et surtout 20% du chiffres d'affaires des ventes globales en électroménager et qu'une telle baisse avait eu pour conséquence directe une baisse des conditions d'achats dans les secteurs concernés (électroménager en particulier) (page 55 du rapport produit en pièce 17 par l'intimée).
En conséquence, le jugement déféré doit être ici infirmé et l'indemnisation de la perte de marge de la société doit être fixée à 2 100 000 euros.
Sur l'assurance dite 'par activité ou par départements'
Alors que l'expert E... n'a pas voté sur l'application de la clause par département, que l'expert de l'assureur a indiqué qu'elle n'était pas applicable et que l'expert de l'assuré a indiqué qu'elle l'était, il appartient au juge de statuer sur ce point puisqu'aucune majorité ne s'est dégagée.
L'avenant N°18 au contrat N°114 627 500 à effet au 01/04/2013 stipule notamment :
- 'si la comptabilité de l'assuré permet d'obtenir, au jour du sinistre, la ventilation exacte des résultats comptables par activités ou départements, les dispositions prévues ci-avant s'appliqueront séparément à chaque activité ou département affecté par le sinistre.
Toutefois, si la somme assurée au titre de la marge brute est inférieure au total des sommes obtenues en appliquant le taux de marge brute pour chaque activité ou département (affecté ou non par le sinistre) au chiffre d'affaires annuel de chacun d'eux, multiplié par la durée maximum de la période d'indemnisation, exprimée en années, l'indemnité sera réduite proportionnellement' (page 72),
- Assurance 'par département'.
'l'assuré fournissant annuellement à l'assureur une ventilation exacte des résultats comptables par magasin ou dépôt, les dispositions du contrat s'appliqueront séparément à chaque magasin ou dépôt affecté par un sinistre garanti (page 27).
Alors que cet avenant date du 11/03/2013 avec effet au 1er/04/2013, soit deux mois avant le sinistre, que la clause ci-dessus visée en page 27 doit s'analyser comme prenant en considération l'existence d'une situation de fait avérée 'l'assuré fournissant annuellement à l'assureur une ventilation exacte des résultats comptables par magasin ou dépôt', corroborée par la transmission d'un tableau analytique adressé par mail le 06/05/2013 par la SAS UBALDI à son assureur, soit plus d'un mois avant le sinistre, l'appelante ne peut valablement soutenir que la SAS UBALDI ne justifie pas avoir une comptabilité analytique au jour du sinistre permettant de déterminer l'absence de résultat net comptable pour le magasin d'Antibes et cette clause spécifique figurant en page 27 doit s'appliquer.
En conséquence, le jugement déféré doit être ici confirmé.
Sur les frais supplémentaires
Si le procès-verbal de tierce expertise fait état d'un vote à l'unanimité des experts concernant les frais supplémentaires, il convient de relever que M. E... a noté que 'le budget publicité a été arrêté à la somme de 239 660 euros' tout en précisant que 'le cabinet CUNNINGHAM LINDSEY limite ces frais à la période reprise dans le protocole (soit jusqu'au 07/10/2013) à hauteur de 155 292 euros', soit une différence de 84 368 euros'.
Il s'ensuit que s'il y a eu unanimité des votes sur les chiffrages dans les deux cas, le tiers expert n'a pas pris position par un vote sur celui à retenir, de sorte qu'il appartient au juge de statuer sur l'indemnisation de ces frais de publicité.
Contrairement à ce que soutient l'intimée, la proposition de l'assureur consistant à prendre en charge les frais de publicité pour un montant de 155 292 euros (arrondi) arrêté au 07/10/2013, correspondant à la date fixée en accord entre les parties selon le protocole du 28/07/2013, n'est pas 'arbitraire' puisqu'elle est fondée sur l'analyse de l'expert E... de trois factures établies par la société EUROGRAPH les 20 et 21/11/2013 et d'une facture établie par la société RTE BROA DCAST le 30/09/2013, l'expert E... ayant additionné les montants antérieurs au 07/10/2013 figurant sur ces factures pour aboutir à la somme de 155 292 euros.
Alors que la SAS UBALDI ne produit ni les factures susvisées, ni aucun devis de ces sociétés pour ces prestations, elle n'établit nullement que les frais facturés pour un montant total arrêté à 239 660 euros ont été engagés antérieurement à la date de réouverture du magasin et en tout cas avant le 07/10/2013, de sorte que c'est à juste titre, mais pour d'autres motifs, que les premiers juges n'ont pas fait droit à sa demande.
En conséquence, le jugement déféré doit être ici confirmé.
Sur l'indemnisation restant dûe
Les parties s'accordent :
- sur le montant des acomptes versés par l'assureur pour l'ensemble des postes d'indemnisation s'élevant à 3 074 212 euros,
- sur l'indemnisation des dommages aux biens arrêtée à 1 436 968 euros (et non 1 436 698 euros comme indiqué par erreur par la SAS UBALDI en page 26 de ses écritures, alors que le résultat qu'elle obtient pour le total de l'indemnisation des dommages a nécessairement pris en compte la somme de 1 436 968 euros reconnue par l'assureur),
- sur l'indemnisation des dommages aux marchandises arrêtée à 499 898 euros.
Alors que l'assureur justifie avoir réglé directement, sur délégation de paiement de son assurée, les travaux de nettoyage du site sinistré pour un montant de 36 689,69 euros TTC (pièce 20), cette somme doit être prise en compte en déduction du montant des accomptes.
En application des votes ayant retenu les chiffrages repris dans le tableau synthétique annexé au procès-verbal de tierce expertise et compte tenu de ce qui précède :
- le total de la perte de marge brute (avec application de la clause par département) s'élève à 1 401 337 euros,
- le montant total des économies s'élève à 204 902 euros,
soit un préjudice économique de 1 196 435 euros,
- les frais supplémentaires pour le bâtiment s'élèvent à 247 642 euros et pour la publicité à 155 292 euros, soit un total de frais supplémentaires de 402 934 euros,
dont franchise à déduire de 57 482 euros (avec application de la clause par département),
soit 1 541 887 euros,
- la perte de marge de la société s'élève à 2 100 000 euros dont franchise à déduire de 522 140 euros non contestée par les parties dans leurs écritures, soit 1 577 860 euros,
pour un montant total de 3 119 747 euros.
Le montant de l'indemnisation de l'ensemble des postes de préjudices s'élève à
5 056 613 euros (1 436 968 + 499 898 + 3 119 747),
dont il faut déduire les sommes de 3 074 212 euros (accomptes) et de 36 689,69 euros (délégation de paiement), soit 1 945 711,31 euros que l'assureur B... doit régler à la SAS UBALDI, avec intérêts au taux légal à compter du 14/04/2015, date de l'assignation.
En conséquence, le jugement déféré doit être ici infirmé.
Sur les dommages et intérêts pour déloyauté contractuelle et résistance abusive
Contrairement à ce que soutient l'intimée, le fait que l'assureur se soit opposé à une partie de la demande d'indemnisation de son assurée, en se fondant principalement sur les conclusions de son expert s'agissant des pertes d'exploitation, ne caractérise aucune résistance abusive alors qu'un accord transactionnel est intervenu 5 semaines après le sinistre entre les parties, permettant la reconstruction du site sinistré dans un délai de moins de 3 mois et donc la limitation dans le temps de ces pertes, et que la procédure d'expertise amiable a permis à l'assuré d'obtenir des accomptes sur indemnisation d'un montant supérieur à 3 millions d'euros.
En conséquence, le jugement déféré doit être ici confirmé.
Sur les dépens et l'article 700 du Code de procédure civile
Succombant principalement, l'appelante doit être condamnée aux dépens d'appel.
Il est équitable d'allouer à la SAS UBALDI une indemnité de 12 000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile pour les frais qu'elle a dû exposer en première instance et en appel.
PAR CES MOTIFS
LA COUR :
Statuant publiquement et contradictoirement,
CONFIRME partiellement le jugement déféré en ce que les premiers juges ont :
- débouté la SAS CENTRALE D'ACHAT UBALDI de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive et déloyauté contractuelle,
- condamné la SA B... F... aux dépens,
LE REFORME pour le surplus et Y AJOUTANT,
CONDAMNE la SA B...A F... à payer à la SAS CENTRALE D'ACHAT UBALDI
1 945 711,31 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 14/04/2015 au titre du solde à devoir sur l'indemnisation du sinistre du 11 juin 2013 concernant le magasin d'ANTIBES,
CONDAMNE la SA B... F... à payer à la SAS CENTRALE D'ACHAT UBALDI une indemnité de 12 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
DEBOUTE SA B... F... de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la SA B... F... aux dépens d'appel et en ordonne la distraction en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRELE PRÉSIDENT