La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/09/2018 | FRANCE | N°16/10639

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 3e chambre a, 13 septembre 2018, 16/10639


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

3e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 13 SEPTEMBRE 2018



N° 2018/245













Rôle N° RG 16/10639 - N° Portalis DBVB-V-B7A-6X35







SAS SOCIETE UGC CINE CITE

Société DU ROND POINT GRAND LITTORAL





C/



Société SMABTP

SA SMA

Compagnie d'assurances MAF





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :




Me Martine X...



Me Philippe-Laurent Y...



Me Isabelle Z...



Me Joseph A...





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 02 Mai 2016 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 11/09641.





APPELANTES



SAS SOCIETE UGC ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

3e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 13 SEPTEMBRE 2018

N° 2018/245

Rôle N° RG 16/10639 - N° Portalis DBVB-V-B7A-6X35

SAS SOCIETE UGC CINE CITE

Société DU ROND POINT GRAND LITTORAL

C/

Société SMABTP

SA SMA

Compagnie d'assurances MAF

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Martine X...

Me Philippe-Laurent Y...

Me Isabelle Z...

Me Joseph A...

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 02 Mai 2016 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 11/09641.

APPELANTES

SAS SOCIETE UGC CINE CITE, demeurant [...]

représentée par Me Martine X..., avocat au barreau de MARSEILLE,

plaidant par Me Muriel B..., avocat au barreau de PARIS

S.C.I. DU ROND POINT GRAND LITTORAL, demeurant [...]

représentée par Me Philippe-Laurent Y..., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

plaidant par Me Pierre C..., avocat au barreau de PARIS

INTIMEES

Société SMABTP, demeurant [...]

représentée par Me Isabelle Z..., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

plaidant par Me Evelyne D..., avocat au barreau de PARIS substitué par Me Delphine E..., avocat au barreau de PARIS

SA SMA anciennement dénommée SA SAGENA, demeurant [...]

représentée par Me Isabelle Z..., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

plaidant par Me Evelyne D..., avocat au barreau de PARIS substitué par Me Delphine E..., avocat au barreau de PARIS

Compagnie d'assurances MAF, demeurant [...]

représentée par Me Joseph A... de la SCP A... I... A... JOSEPH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

plaidant par Me Marc F..., avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 14 Décembre 2017 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Sylvie CASTANIE, Présidente, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de:

Madame Sylvie CASTANIE, Président (rapporteur)

Mme Béatrice MARS, Conseiller

Mme Florence TANGUY, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Jocelyne MOREL.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 Mars 2018, prorogé au 24 Mai 2018, au 28 juin 2018 et au 13 septembre 2018.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 13 Septembre 2018,

Signé par Madame Sylvie CASTANIE, Président et Madame Jocelyne MOREL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Faits, procédure, moyens et prétentions des parties :

Dans le cadre de l'aménagement de la Zac Saint-André, d'une superficie de 105 ha environ, située à Marseille (Bouches-du-Rhône) comprenant un important centre commercial, un parc immobilier d'entreprises et de logements et services, la SNC Grand littoral vend en l'état futur d'achèvement, selon acte en date du 10 juillet 1996, à la SCI du rond-point Grand littoral, les volumes N° 28 et N° 29 de l'état descriptif de division en date du 7 octobre 1994.

Selon acte en date du même jour, soit le 10 juillet 1996, la SCI rond-point Grand littoral vend en l'état futur d'achèvement à la société UGC ciné cité (UGC) le volume N° 28, avec faculté d'y édifier un complexe cinématographique de 15 salles, moyennant le prix de 5'602'501,38 euros hors-taxes.

Aux termes de cet acte, la société UGC confie à la SCI du rond-point Grand littoral, sa venderesse, la réalisation, au droit du sous-secteur UEA 1 de la coque du complexe cinématographique, dans le cadre d'une vente en l'état futur d'achèvement. Le coût des travaux doit être acquitté par l'acquéreur, en fonction de leur état d'avancement.

La coque fait l'objet d'une réception, le 7 novembre 1997, à effet au 29 août 1997.

Des désordres très importants apparus quelques mois après l'ouverture du complexe cinématographique entraînent une interdiction d'activité et la fermeture de l'établissement, selon arrêté en date du 29 juillet 1999.

Une expertise judiciaire confiée à Monsieur G... est ordonnée par décision du 23 mars 1998. L'expert préconise dans son rapport déposé le 3 octobre 2001 la solution alternative, soit de la démolition sans reconstruction, soit de la démolition avec reconstruction.

Le 27 juin 2002, l'UGC et les assurances des locateurs d'ouvrage signent un protocole transactionnel auquel ni la SCI ni les AFUL ne sont parties.

Les travaux de démolition sont exécutés en 2003.

La société UGC assigne la SCI du rond-point Grand littoral, selon acte du 12 juillet 2011, devant le tribunal de grande instance de Marseille, afin d'obtenir l'actualisation et le paiement du montant des charges trimestrielles dont la société UGC doit s'acquitter auprès de l'AFUL du centre commercial Grand littoral.

La SCI du rond-point Grand littoral assigne les sociétés SMABTP, SAGENA devenue SMA et MAF (les assureurs) afin qu'elles soient condamnées à la garantir des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre, au bénéfice de la société UGC.

Par jugement en date du 2 mai 2016, le tribunal de grande instance de Marseille :

constate que la SCI du rond-point Grand littoral est tenue, en application du jugement en date du 24 novembre 2003 du tribunal de grande instance de Marseille, de garantir la société UGC ciné cité des condamnations prononcées contre elle par ce jugement,

déclare irrecevable le surplus des réclamations de la société UGC ciné cité,

déclare irrecevables les demandes en garantie formées par la SCI rond-point Grand littoral,

rejette les demandes formées en application de l'article 700 du code de procédure civile,

condamne la SCI du rond-point Grand littoral aux dépens.

La société UGC ciné cité relève appel de ce jugement, selon déclaration au greffe en date du 8 juin 2016, à l'encontre de la SCI du rond-point Grand littoral, de la société SMABTP, de la société SAGENA et de la société MAF.

La SCI rond-point Grand littoral relève à son tour appel du jugement, selon déclaration en date du 28 juin 2016 à l'encontre de la société SMABTP, de la société SMA, anciennement dénommée SAGENA et de la société MAF.

Les deux procédures ont été jointes.

Dans ses dernières écritures en date du 30 novembre 2017, la société UGC ciné cité conclut à l'infirmation du jugement entrepris dans toutes ses dispositions. Les fins de non-recevoir soulevées par la SCI doivent être rejetées dans leur totalité. Il doit être constaté que le jugement du 24 novembre 2003, passé en force de chose jugée et irrévocable a dit que la SCI était débitrice d'une obligation de garantie constante à son bénéfice, au titre des charges appelées par l'AFUL du centre commercial Grand littoral. Elle doit en conséquence être jugée bien fondée à réclamer à la SCI, les charges étant trimestrielles, l'actualisation régulière des sommes. La SCI doit en conséquence être condamnée à lui rembourser la somme de 1'984'989,31 euros payée à l'AFUL centre commercial Grand littoral, au titre des appels de charge pour la période du deuxième trimestre 2003 au troisième trimestre 2017. La SCI doit, en toute hypothèse, être condamnée à lui payer la somme de 50'000 €, en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Dans ses dernières écritures en date du 5 décembre 2017, la SCI du rond-point Grand littoral conclut au principal à l'irrecevabilité des demandes de la société UGC pour les motifs suivants: la société UGC, en lui demandant devant la cour l'actualisation régulière des charges à échéances successives introduit, au titre des charges qui pourraient lui être appelées ultérieurement, une demande nouvelle dont elle n'a jamais saisi le tribunal antérieurement. La demande est irrecevable, en application de l'article 564 du code de procédure civile. Elle observe, sur les demandes concernant les charges exigibles du deuxième trimestre 2002 au premier trimestre 2003 qu'il a déjà été statué par le jugement devenu définitif du 24 novembre 2003 sur ces charges. Cette demande reçue à tort par le jugement dont appel doit être jugée irrecevable en raison de l'autorité de la chose jugée attachée à ce jugement. Il en est de même de la constatation et des dispositions du jugement du 2 mai 2016 relatives à des points sur lesquels il a déjà été statué au titre de la période visée par cette décision, à savoir les charges échues entre le deuxième trimestre 2002 et le premier trimestre 2003, seules les demandes postérieures au deuxième trimestre 2003 étant susceptibles d'être examinées. Il doit être jugé subsidiairement, au visa de l'article 624 du code de procédure civile, que la cassation de l'arrêt du 8 décembre 2015 portant sur le rejet de la demande en garantie de la société UGC contre la SCI s'étend nécessairement aux dispositions du même arrêt ayant déclaré sans objet la demande en garantie de la SCI contre les assureurs. Elle indique, sur les demandes postérieures au premier trimestre 2003 que la société UGC, en soutenant contradictoirement dans des instances successives que la SCI devait la garantir en application de l'article 1646.1 du Code civil, puis en faisant valoir devant la Cour de Cassation que sa demande devait échapper au périmètre de la transaction qui ne concernait que les dommages à l'ouvrage et leurs conséquences, puis enfin, en reprenant devant le tribunal, le moyen tiré de l'article précité relatif à la garantie du vendeur, s'est contredite au détriment d'autrui, cette attitude devant être sanctionnée, en vertu du principe de l'Estoppel par l'irrecevabilité de la demande. La société UGC doit, pour l'ensemble de ses prétentions, être déclarée prescrite, en application de l'article 2243 du Code civil. Les demandes additionnelles présentées par l'AFUL à l'encontre de la société UGC dans le cadre de la procédure ayant abouti à l'arrêt de cette cour du 8 décembre 2005, ayant fait l'objet de l'appel en garantie formé par la société UGC n'ont pas été reprises par la société UGC, après la cassation de l'arrêt du 8 décembre 2005 l'ayant déboutée de son appel en garantie. Il s'ensuit que les actes interruptifs de prescription accomplis dans le cadre de la procédure d'appel mais non repris devant la cour d'appel de renvoi sont en réalité dépourvus d'effet interruptif, la société UGC, en l'absence de saisine de la cour de renvoi, ayant laissé périmer l'instance, objet de sa demande en garantie. La réception est en date du 29 août 1997. La garantie due par le vendeur, sur le fondement de l'article 1646.1 du Code civil est échue le 30 août 2007. La demande de la société UGC, formée selon acte du 12 juillet 2011, est donc atteinte par la prescription en raison à la fois du délai de prescription de l'article 1646.1, du délai de droit commun de cinq ans (article 2224 du Code civil) et du délai de l'article 189 du code de commerce, alors applicable. Elle se prévaut subsidiairement de l'article 2224 du Code civil pour la période correspondant aux charges échues entre le deuxième trimestre 2003 et le deuxième trimestre 2006. Elle observe par ailleurs que l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du 24 novembre 2003 doit s'apprécier au regard de l'objet de la demande et du dispositif du jugement, lequel ne s'est pas prononcé au-delà de la demande, sur l'exigibilité à son encontre des appels de fonds notifiés à la société UGC pour une période postérieure au premier trimestre 2003. L'autorité de la chose jugée du jugement du 24 novembre 2003 ne peut s'étendre au-delà. Subsidiairement, la demande de la société UGC à son encontre ne peut prospérer, faute de la part de celle-ci de justifier que les conditions d'application de la garantie du vendeur sont réunies, alors même qu'il a été définitivement jugé qu'elle n'était tenue à l'égard de l'AFUL qu'en sa qualité de propriétaire du lot N° 28, indépendamment de tout sinistre. Plus subsidiairement, dans le cas où la cour jugerait bien fondées les prétentions de la société UGC à son encontre, elle demande à être garantie par les assureurs qui ont reconnu la responsabilité de leurs assurés respectifs et ont été condamnés de ce chef par le jugement du tribunal de grande instance de Nanterre en date du 14 février 2003, étant observé que la cassation s'étend aux dispositions de l'arrêt présentant un lien d'indivisibilité et de dépendance nécessaire avec les dispositions cassées. Les assureurs doivent en conséquence être condamnés à la relever et garantir indemne de l'ensemble des condamnations mises à sa charge, en principal, intérêts et frais. Tout succombant sera enfin condamné à lui payer la somme de 15'000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Dans leurs dernières écritures en date du 30 novembre 2017, la société SMABTP et la société SAGENA Paris SMA concluent au rejet de l'intégralité des demandes formées à leur encontre, à leur mise hors de cause et à la condamnation de la SCI rond-point du Grand littoral à lui payer la somme de 35'000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Dans ses dernières écritures en date du 20 septembre 2016, la société MAF conclut, au principal, à la confirmation du jugement entrepris dans toutes ses dispositions. Elle demande subsidiairement qu'il soit jugé que sa garantie ne peut s'appliquer que dans les limites et les conditions des polices souscrites auprès d'elle par Monsieur H... et la société Delta Engeneering (franchise opposable au tiers lésé et plafond de garantie au titre des dommages matériels et immatériels d'un montant de 3'048'994,07 euros, non réactualisable). Les plafonds étant épuisés, la SCI doit être déboutée de toutes ses demandes et condamnée à lui payer la somme de 5000 €, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

L'ordonnance de clôture est en date du 12 décembre 2017.

SUR CE

Historique de la procédure antérieure :

Par jugement en date du 24 novembre 2003, le tribunal de grande instance de Marseille, saisi selon acte du 27 novembre 2002 par l'AFUL du centre commercial Grand littoral d'une demande en paiement de charges à l'encontre de la société UGC ciné cité laquelle à son tour appelle en garantie la SCI du rond-point Grand littoral, selon acte du 17 décembre 2002 :

condamne la société UGC à payer à l'AFUL la somme de 92'646,09 euros, au titre des appels de fonds des deuxième, troisième et quatrième trimestre 2002 et du premier trimestre 2003,

déboute l'association foncière de ses autres demandes,

condamne la SCI Grand littoral à relever et garantir la société UGC de cette condamnation,

condamne in solidum la SMABTP, la SAGENA et la MAF à relever et garantir la SCI Grand littoral de cette condamnation,

dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile,

condamne in solidum les assureurs aux dépens.

Sur appel des trois assureurs, la cour statuant par arrêt du 8 décembre 2005 :

confirme le jugement mais seulement en ce qu'il a condamné la société UGC,

le réformant sur le quantum de cette condamnation, condamne à la société UGC à payer à l'association foncière la somme de 359'875,54 euros, au titre des charges dues pour la période allant du deuxième trimestre 2002 au deuxième trimestre 2005, avec intérêts au taux légal à compter, pour chaque réclamation, des mises en demeure respectives,

ordonne la capitalisation des intérêts, en application des dispositions de l'article 1154 du Code civil,

déboute la société UGC de son appel en garantie formé contre la SCI,

constate que les appels en garantie formés par la SCI à l'encontre des trois assureurs sont sans objet,

condamne la société UGC aux dépens et à payer à l'association foncière la somme de 2000 €, en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur pourvoi formé par la société UGC, la Cour de Cassation, statuant par arrêt du 31 mai 2007, casse et annule mais seulement ce qu'il a rejeté la demande de garantie de la société UGC contre la SCI du rond-point du Grand littoral, l'arrêt du 8 décembre 2005 et condamne la SCI aux dépens.

Acte de vente du 10 juillet 1996 et assemblée générale du 16 décembre 1998 :

L'acte de vente du 10 juillet 1996 par lequel la SCI du rond-point Grand littoral vend à la société UGC le lot N°28 consistant dans le volume global, localisé précisément sur les plans annexés et emportant le droit de réaliser à l'intérieur du volume toutes constructions et notamment un «complexe cinématographique » contient les énonciations suivantes :

La société Tréma Promotion, aménageur de la Zac Saint-André, a mis en place les associations foncières urbaines libres suivantes :

- association foncière de l'espace littoral. « L'acquéreur fait partie de plein droit de cette association du seul fait de la présente acquisition ».

- association foncière du sous-secteur UE a1 ayant notamment pour objet la gestion des réseaux d'assainissement, des talus et de l'éclairage du sous-ensemble (NB : c'est dans ce sous-secteur que doit être implanté le complexe cinématographique). « L'acquéreur fait partie de plein droit de cette association du seul fait de la présente acquisition ».

-association foncière du centre commercial Grand littoral dont l'objet est la gestion des équipements à usage commun du centre commercial. « En conséquence, l'acquéreur ne sera pas membre de cette association ».

L'association foncière du sous-secteur UE a1 a été dissoute par une assemblée générale du 16 décembre 1990, date à partir de laquelle ses membres sont devenus membres de l'association foncière Grand littoral, laquelle a approuvé les nouveaux statuts définissant les conditions dans lesquelles les anciens membres de l'association foncière de l'UEa1 sont devenues de plein droit membres de l'association.

Par jugement en date du 14 octobre 2010, le tribunal de grande instance de Marseille saisi par la société UGC de demandes à l'encontre de l'association foncière :

déclare la société UGC irrecevable en son action ayant pour objet de contester la valeur et la portée des décisions prises par l'assemblée générale de l'association foncière du sous-secteur en date du 16 décembre 1998, en raison de l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt du 8 décembre 2005,

dit l'association foncière du centre commercial Grand littoral bien fondée en sa demande en paiement des charges par la société UGC pour un montant de 413'215,46 euros correspondant aux charges dues depuis l'arriéré sur les charges 2005, arriérés sur le quatrième trimestre 2006, 2007, 2008 et 2009.

C'est dans ce contexte que l'UGC ciné cité assigne la SCI du rond-point Grand littoral, selon acte du 12 juillet 2011 en remboursement des charges payées par elle à l'association foncière soit, au vu des dernières conclusions en date du 9 décembre 2014 déposées devant le tribunal, la somme de 1'611'176,67 euros, pour la période du deuxième trimestre 2002 au quatrième trimestre 2014, élevée en l'état des dernières conclusions en date du 30 novembre 2017 à la somme de 1'984 989,31 euros pour la période du deuxième trimestre 2003 au troisième trimestre 2017.

Le jugement prononcé par le tribunal de grande instance de Marseille le 2 mai 2016 est l'objet de la présente instance d'appel.

A) Sur la demande principale formée par la société UGC ciné cité à l'encontre de la SCI rond-point du Grand littoral :

1) sur la recevabilité de la demande :

La SCI rond-point du Grand littoral évoque successivement plusieurs fin de non recevoir :

La cour constate en préalable, avec la SCI, que la société UGC inclut à tort, dans les termes de son assignation, les charges appelées au titre du deuxième, troisième et quatrième trimestre 2002 et du premier trimestre 2003 pour lesquelles elle disposait déjà d'un titre exécutoire.

La société UGC a d'ailleurs abandonné ce chef de demande, dans ses dernières écritures du 30 novembre 2017.

C'est à tort que la SCI conclut ensuite au visa de l'article 534 du code de procédure civile à l'irrecevabilité des demandes nouvelles de la société UGC tendant à obtenir une décision de principe sur l'actualisation à venir des charges qui pourraient être appelées ultérieurement par l'association foncière.

Il est constant en effet que la société UGC, contrairement aux affirmations adverses avait déjà demandé au tribunal dans ses dernières écritures du 9 décembre 2014 de constater que la dette, objet de la garantie étant à échéances successives, elle était bien fondée à « réclamer à la SCI du rond-point une actualisation régulière des sommes devant être garanties ».

La fin de non-recevoir soulevée de ce chef par la SCI doit en conséquence être rejetée.

La SCI conclut également à l'irrecevabilité des demandes adverses, en vertu du principe selon lequel les parties à une procédure ne peuvent se contredire au détriment d'autrui.

Elle expose que la société UGC, en poursuivant dans le cadre de la procédure ayant abouti au jugement du 24 novembre 2003 et à l'arrêt du 8 décembre 2005 la garantie de son vendeur sur le fondement de l'article 1646.1 du Code civil, puis en faisant valoir devant la Cour de Cassation que son appel en garantie ne pouvait être rattachée aux conséquences des dommages ayant affecté l'ouvrage vendu, ce qui excluait l'application de l'article 1646.1 précité et enfin en se prévalant à nouveau devant le tribunal dans le cadre de l'instance ayant conduit au jugement dont appel, de ce même article, a choisi de se contredire à son détriment à elle, SCI.

Cette fin de non recevoir ne peut prospérer dès lors en effet que le flou dénoncé au demeurant par la SCI règne sur le fondement juridique des présentes demandes au fond de la SCI, de sorte qu'il est impossible de parler d'une contradiction avérée entre la défense de la SCI lors de la présente instance et sa défense actuelle et, qu'à supposer qu'une contradiction de fondement juridique existe entre l'instance au fond ayant abouti au jugement du 24 novembre 2003 et le pourvoi en cassation, il ne peut être soutenu que cette contradiction a induit l'adversaire à l'erreur sur les intentions de son auteur.

La SCI fait valoir enfin que les demandes présentées par la société UGC sont irrecevables en raison, d'abord de la prescription décennale de l'article 1792.4.1 du Code civil (ancien article 2270-2), ensuite, de la prescription quinquennale de l'article 2224 du Code civil dans sa rédaction issue de la loi du 19 juin 2008 et encore de la prescription décennale de l'article 189 bis de l'ancien code de commerce.

Cette fin de non recevoir tirée de la prescription ne peut là encore être admise dès lors que la société UGC se prévaut utilement du régime transitoire de la loi du 19 juin 2008 ainsi que d'actes ayant eu pour effet d'interrompre la prescription encourue du chef des articles 2224 du Code civil et 189 bis de l'ancien code de commerce, la prescription décennale de l'article 1792-4-1 du Code civil à laquelle renvoie l'article 1646.1 du Code civil, dont la SCI dit clairement qu'il ne constitue pas le fondement juridique de son action, étant donc sans application.

L'action en remboursement de charges engagée par la société UGC contre la SCI du rond-point Grand littoral doit, en conséquence de ce qui précède, être déclarée recevable.

2) sur le fond :

La société UGC fonde son action sur l'obligation de garantie constante dégagée par le jugement du 24 novembre 2003.

Il est acquis certes, qu'en l'absence de saisine de la cour d'appel de renvoi, en suite de l'arrêt de cassation partielle du 8 décembre 2005, doit recevoir application l'alinéa 2 de l'article 1034 du code de procédure civile, selon lequel, l'absence de déclaration (de saisine) dans le délai ou l'irrecevabilité de celle-ci confère force de chose jugée au jugement rendu en premier ressort, lorsque la décision cassée avait été rendue sur appel de ce jugement, le jugement du 24 novembre 2003 est revêtu de cette force de chose jugée.

La lecture du dispositif de ce jugement ne permet pas en revanche de dire que le tribunal s'est prononcé sur une prétendue obligation constante de la SCI de payer les charges appelées.

La société UGC parvient à cette conclusion en se prévalant des motifs du jugement selon lesquels « si UGC est tenue contractuellement de payer « ad vitam aeternam » les charges de l'association foncière, la SCI et les associés sont tenus de l'indemniser de ce préjudice futur et permanent ».

Le dispositif clair, précis et limité du jugement ne souffre pas cependant d'ambiguïté et ne nécessite pas, en conséquence, d'être interprété à la lumière des motifs auxquels il y a lieu de recourir seulement pour être éclairé sur l'étendue des points tranchés par le dispositif.

Or il n'est nul besoin, au cas présent, d'être éclairé sur le dispositif explicite du jugement du 24 novembre 2003.

La condamnation de la société UGC à payer à l'association foncière les charges appelées repose sur sa qualité de propriétaire du lot N° 28, telle qu'elle résulte de l'acte de vente du 10 juillet 1996 stipulant expressément que l'acquéreur fait partie de plein droit de l'association foncière, du seul fait de la présente acquisition.

Dès lors, la société UGC, tenue en sa qualité de propriétaire et qui reste silencieuse sur le fondement juridique de son action, n'est pas fondée, ladite qualité étant indépendante des vices affectant l'ouvrage vendu, dont l'exigibilité des charges ne fait pas partie, à rechercher la garantie de son vendeur, sur quelque fondement que ce soit.

La société UGC doit en conséquence être déboutée de sa demande en remboursement des charges formées à l'encontre de la SCI du rond-point Grand littoral.

B) Sur les appels en garantie formés par la SCI du rond-point Grand littoral contre les sociétés SMABTP, SMA et MAF :

Les appels en garantie formés par la SCI du rond-point Grand littoral à l'encontre des sociétés SMABTP, SMA venant aux droits de la société SAGENA et MAF doivent en conséquence être déclarés, non pas irrecevables, mais sans objet.

La solution apportée au litige en appel justifie que la société UGC qui succombe soit condamnée, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, à payer à la SCI du rond-point Grand littoral, la somme de 10'000 € et à chacun des trois assureurs, la somme de 5000 €.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement par défaut et après en avoir délibéré :

Infirme le jugement entrepris et statuant à nouveau :

Déclare recevable l'action en remboursement des charges formée par la société UGC ciné cité à l'encontre de la SCI du rond-point Grand littoral,

Rejette cette action, comme étant non fondée,

Déclare les appels en garantie formés par la SCI du rond-point Grand littoral à l'encontre des sociétés SMABTP, SMA et MAF, sans objet,

Condamne, en application de l'article 700 du code de procédure civile, la société UGC ciné cité à payer :

à la SCI du rond-point Grand littoral, la somme de 10'000 €,

à la société SMABTP, la somme de 5000 €,

à la société SMA, venant aux droits de la société SAGENA, la somme de 5000 €,

à la société MAF, la somme de 5000 €,

Condamne la société UGC ciné cité aux dépens de première instance et d'appel, avec droit de recouvrement direct, au profit des avocats de la cause, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 3e chambre a
Numéro d'arrêt : 16/10639
Date de la décision : 13/09/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 3A, arrêt n°16/10639 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-09-13;16.10639 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award