COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
4e Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 21 JUIN 2018
bm
N° 2018/ 549
Rôle N° RG 17/01149
N° Portalis DBVB-V-B7B-74KR
Alain X...
Romain X...
Vélia X...
C/
Bertrand Y...
Syndicat des copropriétaires [...]
Grosse délivrée
le :
à :
Me Christine Z...
SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ
Me Maxime A...
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 01 Décembre 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 14/00143.
APPELANTS
Monsieur Alain X...
demeurant [...]
représenté par Me Christine Z... de la B..., avocat au barreau de NICE, plaidant
Monsieur Romain X...
demeurant [...]
représenté par Me Christine Z... de la B..., avocat au barreau de NICE, plaidant
Madame Vélia X...
demeurant [...]
représentée par Me Christine Z... de la B..., avocat au barreau de NICE, plaidant
INTIMES
Monsieur Bertrand Y...
demeurant [...]
représenté par la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Stéphane C..., avocat au barreau de NICE, plaidant
Syndicat des copropriétaires [...], représenté par son Syndic en exercice, le Cabinet NARDI, dont le siège est [...], lui-même pris en la personne de son représentant légal en exercice domicilié es qualité audit siège.,
représentée par Me Maxime A..., avocat au barreau de NICE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 17 Avril 2018 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Madame Bernadette MALGRAS, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de:
Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre
Madame Hélène GIAMI, Conseiller
Madame Bernadette MALGRAS, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 21 Juin 2018
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 21 Juin 2018,
Signé par Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS et PROCÉDURE ' MOYENS et PRÉTENTIONS DES PARTIES
L'immeuble situé [...] a fait l'objet d'un règlement de copropriété déposé le 23 septembre 1930 ; il disposait initialement d'un logement de gardien à l'entresol.
Madame D... a acquis le 29 décembre 1976 le lot numéro 1 constitué à la fois d'un appartement au rez-de-chaussée avec jardin et de trois caves au sous-sol portant les numéros 1, 2, 3.
Par délibération en date du 18 octobre 1977, l'assemblée générale des copropriétaires a accepté de vendre à madame D... qui était alors syndic de cette copropriété, le logement de gardien, le poste de gardien ayant été supprimé.
Par délibération du 20 novembre 1979, l'assemblée générale des copropriétaires, après avoir constaté que le prix était payé, a donné pouvoir au syndic pour signer l'acte de vente au profit de madame D... et établir le modificatif au règlement de copropriété.
Ultérieurement, les trois caves que madame D... possédait au sous-sol, comprises dans son lot 1, et le logement de gardien ont été réunis.
L'acte de vente entre le syndicat des copropriétaires et madame D... a été réitéré par acte authentique le 18 décembre 2003 ; il est mentionné que le syndicat des copropriétaires vend le lot créé sous le numéro 11, désigné comme suit : « à l'entresol deux pièces nues sans éléments d'équipement et le couloir les desservant », avec les tantièmes correspondants de parties communes.
Le 27 février 2004, madame D... a vendu à monsieur et madame Y... le lot 1 (appartement et les trois caves en sous-sol 1, 2, 3) ainsi que le lot 11 décrit comme comprenant «à l'entresol deux pièces nues et le couloir les desservant», avec les tantièmes correspondants de parties communes.
Par exploit du 17 décembre 2013, Romain X... et Vélia X..., nus propriétaires au sein de cet immeuble d'un appartement constituant le lot 3, et Alain X... usufruitier, ont fait assigner devant le tribunal de grande instance de Nice, monsieur Bertrand Y..., en restitution du couloir parties communes desservant au sous-sol les deux pièces cédées le 18 décembre 2003 à madame D... constituant le lot 11.
Le tribunal, par jugement du 1er décembre 2016, a notamment :
- dit l'action prescrite
- condamné in solidum Alain X..., Romain X..., et Vélia X... à payer à Bertrand Y... la somme de 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile
- débouté le syndicat des copropriétaires du [...] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile
- condamné in solidum Alain X..., Romain X..., et Vélia X... aux entiers dépens.
Les consorts Alain X..., Romain X..., et Vélia X... ont régulièrement relevé appel, le 18 janvier 2017, de ce jugement en vue de sa réformation.
Ils demandent à la cour, selon conclusions déposées le 30 mars 2018 par RPVA, de :
- les recevoir en leur appel et les déclarer bien fondés
- réformer la décision dont appel en ce qu'elle a estimé prescrite l'action des consorts X...
- dire et juger que Bertrand Y... s'est approprié le couloir litigieux desservant deux pièces du sous-sol de l'immeuble sis [...] à compter de la date à laquelle il a acquis les lots qui furent la propriété D..., soit à compter du 27 février 2004
- dire et juger que l'action des hoirs X... n'est pas prescrite
- ordonner la restitution par Bertrand Y... au syndicat des copropriétaires du couloir partie commune desservant au sous-sol les deux pièces cédées par la copropriété à madame D..., anciennement loge de concierge
- condamner Bertrand Y... à remettre les lieux en état dans le délai de deux mois après la signification de la décision à intervenir sous une astreinte de 500 euros par jour de retard
- débouter Bertrand Y... de l'ensemble de ses demandes
- condamner Bertrand Y... au paiement de la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
- le condamner aux entiers dépens.
Formant appel incident, Bertrand Y... sollicite de voir, selon conclusions déposées par RPVA le 16 avril 2018 :
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Nice en disant et jugeant l'action des consorts X... prescrite
- rejeter en tout état de cause l'ensemble des demandes, fins et conclusions des consorts X... en les disant et jugeant irrecevables comme n'ayant pas sollicité l'annulation des actes authentiques des 19 décembre 2003 et 24 février 2004, et à tout le moins non fondées
- condamner solidairement les consorts X... à lui payer une somme de 3000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive dans le cadre d'une simple vindicte personnelle aux fins de voir restituer un couloir qui n'existe plus depuis des décennies et qui, s'il existait, ne desservirait uniquement que ses lots
- condamner solidairement les consorts X... à lui payer une somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel
- condamner solidairement les consorts X... aux entiers dépens.
Formant appel incident, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [...] sollicite de voir, selon conclusions déposées par RPVA le 19 mai 2017 :
- donner acte au syndicat des copropriétaires du [...] de ce qu'il s'en rapporte à justice sur la réformation de la décision
- condamner la partie succombante à payer au syndicat des copropriétaires du [...] la somme de 3000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure de première instance et de celle d'appel
- condamner la partie succombante aux entiers dépens.
Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
C'est en l'état que l'instruction a été clôturée par ordonnance du 17 avril 2018.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la demande de restitution du couloir litigieux et les demandes subséquentes des consorts X...
Les consorts X... sollicitent la restitution par monsieur Y..., au syndicat des copropriétaires, d'un couloir partie commune que celui-ci se serait approprié indûment au moment de son entrée dans les lieux et de leur aménagement, outre la remise des lieux en état, sous astreinte.
Leur argumentation tirée d'une appropriation de partie commune ne peut toutefois être retenue à l'appui de la demande de restitution.
En effet, il est acquis que madame D... était propriétaire de trois caves au sous-sol comprises dans son lot numéro 1 acquis le 29 décembre 1976, puis que l'intéressée et le syndicat des copropriétaires se sont accordés sur la vente de l'ancienne loge du concierge jouxtant les caves, lors des assemblées générales des 18 octobre 1977 et 20 novembre 1979.
La cession a été réitérée le 18 décembre 2003 par acte authentiquerégulièrement publié ; le notaire chargé de la vente a procédé à cet effet à la création d'un lot numéro 11 issu des parties communes de l'immeuble, en désignant ce lot comme suit: «A l'entresol deux pièces nues sans élément d'équipement et le couloir les desservant; et les 17/637 èmes des parties communes générales».
L'acte de vente intervenu entre madame D... et monsieur et madame Y..., dressé par notaire le 27 février 2004 et régulièrement publié porte sur les lots 1 et 11; ce dernier est décrit comme suit: «A l'entresol deux pièces nues sans élément d'équipement et le couloir les desservant; et les 17/637 èmes des parties communes générales».
En conséquence, il ressort de l'ensemble de ces éléments que monsieur Y... auquel il est reproché une appropriation de parties communes dispose d'un titre lui attribuant la propriété de deux pièces nues sans élément d'équipement et le couloir les desservant, à l'entresol, portant le numéro 11; il est indifférent aux débats que les décisions d'assemblées générales aient porté sur la cession du logement de concierge, sans indication sur le couloir, les titres n'étant pas contestés.
Le couloir litigieux, étant ainsi visé expressément dans les actes authentiques, ne peut être considéré en l'état de ces actesdont il n'a pas été demandé l'annulation à ce jour, comme une partie commune; il s'agit au contraire d'une partie privative.
C'est donc à bon droit que monsieur Y... conclut à l'irrecevabilité des demandes des consorts X..., lesquels n'ont pas d'intérêt à demander la restitution d'un couloir, qui n'est plus une partie commune, et à présenter les demandes subséquentes.
Il s'ensuit, que le jugement dont appel sera infirmé en ce qu'il a dit l'action prescrite, sur le fondement d'une appropriation de partie commune de plus de 30 ans.
Sur la demande de dommages-intérêts
Rien n'établit que les consorts X... ont diligenté la présente procédure dans le cadre d'une simple vindicte personnelle, l'appréciation erronée de leurs droits ne revêtant au demeurant aucun caractère fautif au regard des éléments de fait circonstanciés produits concernant la transformation du couloir litigieux au fil du temps.
Il y a lieu par suite de rejeter la demande de dommages-intérêts formée par monsieur Y....
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Succombant sur leur appel, les consorts X... doivent être condamnés in solidum aux dépens de première instance et d'appel.
Aucune considération d'équité ne justifie l'octroi d'une indemnité en cause d'appel, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile; les demandes de ce chef seront rejetées; pour le surplus, le jugement sera confirmé du chef de l'article 700 précité.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Réforme le jugement du tribunal de grande instance de Nice en date du 1er décembre 2016, mais seulement en ce qu'il a dit l'action prescrite,
Statuant à nouveau,
Dit que la demande de restitution au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [...], d'un couloir partie commune et les demandes subséquentes des consorts X..., sont irrecevables,
Confirme le jugement entrepris dans le surplus de ses dispositions,
Rejette la demande de dommages-intérêts de Bertrand Y...,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
Condamne in solidum les consorts X... aux dépens de première instance et d'appel,
Dit que les dépens d'appel seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du même code.
Le Greffier Le Président