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14/06/2018 | FRANCE | N°16/12950

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 8e chambre b, 14 juin 2018, 16/12950


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE


8e Chambre B





ARRÊT AU FOND


DU 14 JUIN 2018





N° 2018/342




















Rôle N° N° RG 16/12950 - N° Portalis DBVB-V-B7A-65YE











SA CREDIT FONCIER DE FRANCE








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Anne-Marie X...
































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Me E...


Me Y...




















Décision déférée à la Cour :





Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 22 Juin 2016 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 15/06380.








APPELANTE





SA CREDIT FONCIER DE FRANCE S.A prise en la personne de son représentant légal,


dont le siège social est sis [...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

8e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 14 JUIN 2018

N° 2018/342

Rôle N° N° RG 16/12950 - N° Portalis DBVB-V-B7A-65YE

SA CREDIT FONCIER DE FRANCE

C/

Anne-Marie X...

Grosse délivrée

le :

à :

Me E...

Me Y...

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 22 Juin 2016 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 15/06380.

APPELANTE

SA CREDIT FONCIER DE FRANCE S.A prise en la personne de son représentant légal,

dont le siège social est sis [...]

représentée par Me Agnès E..., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assistée de Me Henri Z..., avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

Madame Anne-Marie X...

née le [...] à LE HAVRE,

demeurant [...]

représentée et assistée de Me Marc Y..., avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 13 Mars 2018 en audience publique devant la Cour composée de:

Madame Valérie GERARD, Président de chambre, magistrat rapporteur

Madame Françoise PETEL, Conseiller

Madame Anne DUBOIS, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Laure METGE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe, après prorogation, le 14 Juin 2018

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 14 Juin 2018,

Signé par Madame Valérie GERARD, Président de chambre et Madame Laure METGE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

En 1989, Anne-Marie X... a constitué avec son époux et ses deux enfants, la SARL FAVESE laquelle s'est vue consentir, par acte authentique du 31 décembre 1991 de Maître A..., notaire à Saint Barthélémy, par la SA Le Comptoir des Entrepreneurs, aux droits de laquelle vient la SA Crédit Foncier de France, un prêt d'un montant en capital de 1 500 000 francs, remboursable en 120 mensualités, au taux de 11,30% l'an, destiné à financer l'acquisition d'un local commercial dans l'ensemble immobilier le Domaine de Lonvilliers, situé sur l'île de Saint Martin. Dans le même acte, Anne-Marie X..., représentée par Claudy B..., clerc de notaire en vertu d'une procuration du 30 décembre 1191, s'est portée caution personnelle et solidaire de la SARL FAVESE pour le montant du prêt en principal, intérêts, frais et autres accessoires, et pour la durée de celui-ci.

Par acte authentique du même jour, devant le même notaire, la SNC SOCANO 4 a vendu à la SARL FAVESE le lot 109 de l'hôtel Le Domaine de Lonvilliers situé à Saint Martin.

La SARL FAVESE et les époux X... ont fait assigner leur vendeur, le Crédit Foncier de France et le notaire devant le tribunal de grande instance de Basse-Terre aux fins notamment de voir prononcer la nullité de la vente et de la procuration aux fins de se porter caution, la nullité des cautionnements et voir ordonner la restitution des sommes perçues.

Par jugement du 7 octobre 2010, le tribunal de grande instance de Basse-Terre a statué en ces termes:

- écarte le moyen d'irrecevabilité fondé sur le non-appel en cause de la SA Buildinvest (à laquelle le patrimoine de la SNC SOCANO 4 a été attribué à la suite de la dissolution de celle-ci)

- déclare irrecevable l'action en nullité des actes du 31 décembre 1991 et des stipulations de ces actes,

- condamne la SARL FAVESE et les époux X... aux dépens et au paiement de sommes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par arrêt du 15 décembre 2014, la cour d'appel de Basse-Terre a statué en ces termes:

- confirme en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de grande instance de Basse-Terre du 7 octobre 2010 sauf en ce qu'il a écarté le moyen d'irrecevabilité fondé sur le non-appel en cause de la SA Buildinvest,

Statuant à nouveau sur ce point,

- déclare irrecevable la demande en nullité de l'acte authentique de vente du 31 décembre 1991 et toutes les demandes subséquentes,

Y ajoutant,

- déboute la SARL FAVESE et les époux X... de toute demande du chef d'un taux effectif global erroné,

- déclare prescrite la contestation relative aux éventuels manquements aux dispositions de l'article 4 de la loi du 28 décembre 1966,

- déboute les époux X... de leur contestation sur la stipulation du montant cautionné,

- dit que l'obligation à paiement des époux X..., en qualité de cautions solidaires, pour toutes sommes dues par la SARL FAVESE en principal, frais et accessoires, cessera au 31 décembre 2001 et qu'ils ne pourront être tenus pour aucune somme mise à la charge de la SARL FAVESE au-delà de cette date,

- dit que le Crédit Foncier de France est déchu du droit aux intérêts conventionnels à l'égard des époux X... pour non-respect de l'obligation d'information annuelle de la caution,

- déclare irrecevable la demande des époux X... en déclaration d'extinction de la créance du Crédit Foncier de France à leur égard,

- dit n'y avoir lieu à aucune condamnation par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamne la SARL FAVESE et les époux X... aux dépens à concurrence de 90% et le Crédit Foncier à concurrence de 10%.

Cet arrêt est définitif.

Parallèlement, la SA Crédit Foncier avait fait délivrer un commandement de saisie immobilière sur un bien immobilier situé à Villeneuve Loubet appartenant à Anne-Marie X.... Une convention a été signée entre les parties le 7 février 2007 aux termes de laquelle, la SA Crédit Foncier de France a consenti à la levée de l'hypothèque judiciaire inscrite sur le bien de Villeneuve Loubet et à la main-levée du commandement de saisie pour permettre sa vente amiable, sous la condition déterminante du versement par Anne-Marie X... de la somme de 618 150,82 euros due au titre du prêt consenti le 26 décembre 1989. La convention précisait que les parties ne renonçaient pas aux moyens et prétentions développés dans le cadre des instances initiées à Basse-Terre et qu'Anne-Marie X... conservait la faculté de poursuivre le remboursement de la somme versée.

La somme de 618 150,82 euros a été réglée à la SA Crédit Foncier de France à la suite de la vente du bien.

Anne-Marie X... a fait assigner à jour fixe la SA Crédit Foncier de France devant le tribunal de grande instance de Nice en restitution de la somme de 452 833,38 euros au titre des intérêts indûment perçus.

Par jugement du 22 juin 2016, le tribunal de grande instance de Nice a statué en ces termes:

- rejette le moyen de prescription soulevé par la SA Crédit Foncier de France,

- condamne la SA Crédit Foncier de France à payer à Anne-Marie X... la somme de 381 586,32 euros majorée des intérêts au taux légal applicable à cette somme couvrant la période du 5 avril 2007, date du versement de la somme au défendeur, au 12 octobre 2015 outre les intérêts au taux légal à compter du 20 octobre 2015, date de la mise en demeure restée sans effet, jusqu'à parfait paiement, avec capitalisation conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil,

- déboute Anne-Marie X... de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive,

- condamne la SA Crédit Foncier de France au paiement des entiers dépens, avec distraction,

- condamne la SA Crédit Foncier de France à verser à Anne-Marie X... la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- ordonne l'exécution provisoire.

La SA Crédit Foncier de France a interjeté appel le 11 juillet 2016.

Par conclusions du 9 février 2018, auxquelles il est expressément référé en application de l'article 455 du code de procédure civile, la SA Crédit Foncier de France demande à la cour de:

- infirmer la décision du tribunal de grande instance de Nice du 22 juin 2016 relativement aux condamnations prononcées à l'encontre du Crédit Foncier,

Ce faisant :

- dire et juger que la demande de condamnation au paiement du Crédit Foncier est prescrite depuis le 19 juin 2013 en application des articles 2222 et 2224 du code civil,

- dire et juger que l'expiration des effets de la caution et la déchéance d'intérêts, dont se prévaut Madame Anne-Marie X..., se rapporte à une créance qui est prescrite depuis le 19 juin 2013, et ne saurait constituer une restitution consécutive à une nullité de la caution, cette demande ayant été rejetée par la Cour d'Appel de Basse Terre, laquelle n'a prononcé aucune condamnation à l'encontre du Crédit Foncier,

- dire et juger que la subrogation intervenue au profit de Madame X... la laisse indemne de tout préjudice,

Et, en conséquence,

- débouter Madame Anne-Marie X... de toutes demandes fins et prétentions,

- condamner Madame Anne-Marie X... au paiement d'une somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Madame Anne-Marie X... aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Maître Agnès C..., avocat au Barreau d'Aix en Provence, dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions du 6 février 2018, auxquelles il est expressément référé en application de l'article 455 du code de procédure civile, Anne-Marie X... demande à la cour de:

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a considéré que Mme X... était recevable et fondée au visa des dispositions combinées des articles 1134 et 1235 anciens du code civil à agir en restitution,

- en tout état de cause et si par extraordinaire la cour venait à déclarer prescrite l'action en répétition exercée par Mme X..., déclarer recevable et fondée l'action en responsabilité contractuelle exercée par Mme X... et dire et juger la banque redevable de dommages et intérêts équivalents à la créance de restitution,

- en conséquence et en tout état de cause, condamner la SA Crédit Foncier de France à payer à Mme X... la somme en principal de 412 041,44 euros ce quantum étant obtenu après déduction du capital restant dû de 206 109,38 euros figurant sur le décompte du 16 juin 2016 (après imputation des acomptes), de la somme acquittée le 5 avril 2007 à concurrence de 618150,82 euros,

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a considéré que la somme en principal due à Mme X... devait être augmentée des intérêts au taux légal applicable à cette somme couvrant la période du 5 avril 2007, date du versement de la somme au défendeur, au 12 octobre 2015 outre les intérêts au taux légal à compter du 20 octobre 2015, date de la mise en demeure restée sans effet, jusqu'à parfait paiement, avec capitalisation conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil,

- condamner la SA Crédit Foncier de France à payer à Mme X... la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,

- débouter la SA Crédit Foncier de France de l'intégralité de ses prétentions,

- condamner la SA Crédit Foncier de France à payer à Mme X... la somme de 4.500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens avec distraction.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La SA Crédit Foncier de France soutient que la demande d'Anne-Marie X... est prescrite dès lors que le droit dont elle se prévaut lui était connu dès le 7 février 2007, date de la convention, que la prescription court contre le créancier d'une obligation sous condition résolutoire comme c'est le cas en l'espèce, qu'il ne résulte nullement de la convention que les parties ont entendu stipuler de manière non équivoque un allongement de la prescription et que les demandes formulées, à titre subsidiaire, au titre des engagements de caution devant les juridictions de Basse-Terre, ne tendant pas au même but que l'action principale en nullité du contrat de prêt, l'effet interruptif de prescription relatif à cette action n'a pas pu s'étendre à l'action relative au cautionnement.

Anne-Marie X... réplique que la prescription quinquennale de l'action en restitution court à compter du fait générateur de l'obligation de répéter, que lors de la convention du 7 février 2007, les parties ont entendu fixer le fait générateur de l'obligation de restitution à l'issue du contentieux alors pendant. Elle fait valoir également que les parties étaient autorisées à reporter ou suspendre conventionnellement le cours de la prescription dans la convention du 7 février 2007. Subsidiairement, elle précise qu'elle a depuis l'origine poursuivi les moyens tirés de la déchéance de la banque aux intérêts conventionnels et de la limitation dans le temps de l'engagement de caution et que la prescription de l'action en restitution des sommes indues a été interrompue par l'action en déchéance des intérêts, ces deux actions, tendant à un seul et même but, l'action en restitution étant virtuellement comprise dans l'action en déchéance.

La convention conclue le 7 février 2007 stipule, après avoir rappelé les engagements des parties et les procédures pendantes, à l'article 5 que «les parties rappellent expressément que les engagements susvisés ne sauraient emporter reconnaissance de la qualité de débiteur de Mme F... D... épouse X..., laquelle maintient les moyens et prétentions développés par elle devant le tribunal de grande instance de Basse-terre. Ainsi Mme F... D... épouse X... conserve la faculté de poursuivre en restitution de la somme sus-visée de 618 150,82 euros, dès lors que ses prétentions seraient accueillies favorablement par une décision de justice passée en force de chose jugée».

Le paiement réalisé en exécution de la convention du 7 février 2007, n'est devenu partiellement indu qu'à la suite de l'arrêt de la cour d'appel de Basse-Terre du 15 décembre 2014 et le délai de prescription n'a donc pu courir qu'à compter de cette date. Il est en outre observé que les parties ont expressément convenu dans le cadre de cette convention que l'action en restitution pourrait être exercée «dès lors que les prétentions seraient accueillies favorablement par une décision de justice passée en force de chose jugée» et que les parties n'ont pas, contrairement à ce que soutient l'appelante, édicté une condition résolutoire du versement de la somme de 618150,82 euros par la SA Crédit Foncier de France, mais suspendu l'action en restitution ouverte à Anne-Marie X... à la survenance d'une décision de justice passée en force de chose jugée.

C'est donc à juste titre que les premiers juges ont fixé le point de départ de l'action en répétition de l'indu exercée par l'intimée au 15 décembre 2014 et énoncé que cette action n'était pas prescrite.

La SA Crédit Foncier de France soutient également qu'Anne-Marie X... n'a subi aucun préjudice dès lors qu'elle est subrogée dans les droits du créancier en application de l'article 2306 du code civil. Or la subrogation dans les droits du créancier ne fait pas échec à l'exercice de l'action en restitution d'un indu dont les parties avaient au surplus expressément réservé la possibilité aux termes de la convention du 7 février 2007.

Sur le montant des sommes réclamées, la déchéance du droit aux intérêts a été prononcée en application de l'article L313-22 du code monétaire et financier, de manière totale, par la cour d'appel de Basse -Terre, la banque n'ayant justifié d'aucune information de la caution. En application de ce même texte, «les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapports entre la caution et l'établissement, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette».

Les sommes dues par la caution s'établissaient par conséquent, au jour du seul décompte produit aux débats (pièce 11 de l'intimée) à la somme de 224 472,35 euros, au titre du capital restant dû, dont il convient de déduire les trois acomptes mentionnés sur ce décompte pour un total de 18.362,97 euros soit une somme restant due par la caution d'un montant de 206 109,38 euros.

Le trop perçu s'établit par conséquent à la somme de 618,150,82 ' 206 109,38 = 412.041,44 euros et le jugement est infirmé en ce sens.

C'est par des motifs pertinents que la cour adopte que les premiers juges ont débouté Anne-Marie X... de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive, le jugement est confirmé de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement du tribunal de grande instance de Nice en ce qu'il a condamné la SA Crédit Foncier de France à payer à Anne-Marie X... la somme de 381 586,32 euros,

Statuant à nouveau,

Condamne la SA Crédit Foncier de France à payer à Anne-Marie X... la somme de 412 041,44 euros,

Confirme le jugement déféré pour le surplus,

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la SA Crédit Foncier de France à payer à Anne-Marie X... la somme de trois mille euros,

Condamne la SA Crédit Foncier de France aux dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 8e chambre b
Numéro d'arrêt : 16/12950
Date de la décision : 14/06/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 8B, arrêt n°16/12950 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-06-14;16.12950 ?
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