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14/06/2018 | FRANCE | N°15/14529

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 4e chambre a, 14 juin 2018, 15/14529


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE


4e Chambre A





ARRÊT AU FOND


DU 14 JUIN 2018


jlp


N° 2018/ 532




















Rôle N° RG 15/14529





N° Portalis DBVB-V-B67-5HBW











Syndicat des copropriétaires IMMEUBLE L'ANJOU








C/





SCI NOTRE AMI ENZO


























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Grosse délivrée


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Me Joseph X...





Me Agnès E...

















Décision déférée à la Cour :








Sur saisine de la Cour suite à l'arrêt n°673 F-D rendu par la Cour de Cassation en date du 9 juin 2015, qui a cassé et annulé l'arrêt n° 52 rendu le 30 juin 2014 par la 4ème Chambre A de la Cour d'Appel D'AIX EN PROVENCE, ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

4e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 14 JUIN 2018

jlp

N° 2018/ 532

Rôle N° RG 15/14529

N° Portalis DBVB-V-B67-5HBW

Syndicat des copropriétaires IMMEUBLE L'ANJOU

C/

SCI NOTRE AMI ENZO

Grosse délivrée

le :

à :

Me Joseph X...

Me Agnès E...

Décision déférée à la Cour :

Sur saisine de la Cour suite à l'arrêt n°673 F-D rendu par la Cour de Cassation en date du 9 juin 2015, qui a cassé et annulé l'arrêt n° 52 rendu le 30 juin 2014 par la 4ème Chambre A de la Cour d'Appel D'AIX EN PROVENCE, enregistré au répertoire général sous le n° 13/6751 , sur appel d'un jugement du Tribunal de Grande Instance de Nice du 29 mars 2012 , enregistré au répertoire général sous le n° 11-10-002695 .

APPELANTE

Syndicat des copropriétaires IMMEUBLE L'ANJOU, sis [...] , pris en la personne de son syndic en exercice, le Cabinet SAFI MEDITERRANEE, sis [...] , agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

représenté par Me Joseph X..., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Michèle F... de la Y... , avocat au barreau de NICE substituée par Me Christine Z..., avocat au barreau de NICE, plaidant

INTIMEE

SCI NOTRE AMI ENZO prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié [...]

représentée par Me Agnès E..., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Christophe A..., avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 12 Avril 2018 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de:

Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre

Madame Hélène GIAMI, Conseiller

Madame Bernadette MALGRAS, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Juin 2018

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 14 Juin 2018,

Signé par Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES :

La SCI Notre Ami Enzo est propriétaire, depuis le 28 septembre 2005, du [...] avec les 45èmes indivis des parties communes; ce lot correspond au bâtiment B, tel que désigné dans le règlement de copropriété-état descriptif de division des 22 décembre 1964 et 4 janvier 1965, le bâtiment A étant un immeuble de 7 étages sur rez-de-chaussée.

Le règlement de copropriété d'origine prévoyait, page 22, que:

-la construction à édifier au nord du terrain (le bâtiment B) supportera, à concurrence de 10 millièmes, les charges de copropriété communes aux deux bâtiments;

-les comparants précisent à ce sujet que le bâtiment B participera pour 10 millièmes à l'entretien du chemin allant de l'avenue Mirabeau à la courette, compris la courette, les réparations et l'entretien de ce bâtiment seront à la charge de Mme B....

Un modificatif au règlement de copropriété a été établi le 26 octobre 1967, qui contient les dispositions suivantes:

Le bâtiment B ne participera aux charges de copropriété qu'en ce qui concerne:

1°) l'entretien du chemin allant de l'avenue Mirabeau à l'entrée de l'immeuble et de la courette entre bâtiments A et B à concurrence de dix millièmes;

2°) les dépenses EDF escaliers, conciergerie, entretien jardin à concurrence de dix millièmes,

Etant précisé que les réparations et l'entretien dudit bâtiment B sont à la charge exclusive de son propriétaire.

Sur l'action en paiement de charges engagée par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble l'Anjou à l'encontre de la SCI Notre Ami Enzo, le tribunal d'instance de Nice a notamment, par jugement du 29 mars 2012:

-déclaré l'action recevable au regard de la prescription,

-rejeté l'exception de sursis à statuer,

-dit qu'en application du règlement de copropriété modifié, le propriétaire du lot 31 qui comprend 45/1000 de parties communes ne doit contribuer qu'à concurrence de 10/1000 pour les charges relatives à l'entretien du chemin et pour les dépenses EDF, escalier, conciergerie, entretien jardin, les réparations et l'entretien du bâtiment B demeurant à la charge exclusive de son propriétaire,

-invité le syndicat des copropriétaires à verser les pièces réclamées, notamment les états de répartition conformes et un décompte chronologique complet et détaillé permettant au tribunal de vérifier le montant et l'exigibilité de la créance au regard du règlement de copropriété.

Le syndicat a régulièrement relevé appel de ce jugement et, par arrêt du 30 janvier 2014, la cour d'appel d'[...] chambre A), infirmant le jugement entrepris, a, entre autres dispositions:

-infirmé le jugement, sauf en ce qu'il a déclaré recevable comme non prescrite l'action du syndicat des copropriétaires, et statuant à nouveau sur les autres chefs,

-déclaré non écrite la clause du règlement de copropriété issu de son modificatif voté le 3 octobre 1966,

-dit qu'en application du règlement de copropriété d'origine, le propriétaire du lot 31 doit contribuer aux charges communes générales à concurrence de 45/1000èmes, sauf pour les charges générées par l'entretien du chemin allant de l'avenue Mirabeau à la courette, y compris la courette, tandis que la réparation et l'entretien du bâtiment B sont à la charge exclusive de ce lot,

-rejeté les demandes plus amples ou contraires.

Cet arrêt a été cassé et annulé par un arrêt de la Cour de cassation (3ème chambre civile) en date du 9 juin 2015, mais seulement en ce qu'il a dit qu'en application du règlement de copropriété d'origine, le propriétaire du lot 31 devait contribuer aux charges communes générales à concurrence de 45/1000ème, sauf pour les charges générées par l'entretien du chemin allant de l'avenue Mirabeau à la courette y compris la courette, tandis que la réparation et l'entretien du bâtiment B étaient à la charge exclusive de ce lot et en ce qu'il a rejeté les demandes plus amples ou contraires, aux motifs suivants:

Mais sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :

Vu l'article 1134 du code civil ;

Attendu que pour dire qu'en application du règlement de copropriété d'origine, le propriétaire du lot n°31 doit contribuer aux charges communes générales à concurrence de 45/1000ème, sauf pour les charges générées par l'entretien du chemin allant de l'avenue Mirabeau à la courette, y compris la courette, tandis que la réparation et l'entretien du bâtiment B sont à la charge exclusive de ce lot, la cour d'appel retient que le calcul des charges communes générales dues par le lot 31 ne peut se faire que par référence aux dispositions du règlement d'origine, dont il résulte que le lot n°31 se voit attribuer 45/1000ème de parties communes, que les charges générales doivent être réparties en millièmes, chacun des copropriétaires les supportant au prorata de ses droits dans les parties communes mais que se trouve toutefois énoncée en page 22 dans un chapitre intitulé «conditions particulières» une dérogation à cette répartition, l'acte stipulant à son propos qu'il participera pour 10 millièmes à l'entretien du chemin allant de l'avenue Mirabeau à la courette, y compris la courette et que les réparations et l'entretien de ce bâtiment seront à la charge de Mme B... ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il est stipulé dans le chapitre «conditions particulières» que la construction à édifier au nord du terrain supportera, à concurrence de 10/1000èmes, les charges de copropriété communes aux deux bâtiments, la cour d'appel, qui a dénaturé par omission les termes clairs et précis du règlement de copropriété, a violé le texte susvisé ;

Désignée comme juridiction de renvoi autrement composée, cette cour a été saisie par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble l'Anjou suivant déclaration reçue le 5 août 2015 au greffe.

Par arrêt du 6 octobre 2016 auquel il convient de se reporter, la cour a ordonné, avant-dire droit sur la licéité de la clause relative à la répartition des charges communes entre le lot n° 31 et les autres lots et sur la détermination d'une nouvelle répartition des charges dans l'hypothèse où celle résultant du règlement de copropriété serait jugé contraire aux dispositions d'ordre public de la loi du 10 juillet 1965, une expertise confiée à M. C..., géomètre expert, avec notamment pour mission de déterminer, au regard des critères définis à l'article 5 de ladite loi, la valeur relative du lot n° 31 de l'état descriptif de division de l'immeuble «l'Anjou, par rapport aux valeurs des autres lots de copropriété.

L'expert commis a dressé, le 19 janvier 2018, un rapport de ses opérations.

L'affaire a été fixée à l'audience du 12 avril 2018, après qu'un calendrier de procédure eut été établi, fixant au 20 mars 2018 la date limite de dépôt de ses conclusions par l'appelant et au 10 avril 2018 la date limite de dépôt de ses conclusions par l'intimée.

En l'état des conclusions, qu'il a déposées le 13 mai 2016, avant l'arrêt du 6 octobre 2016 prescrivant la mesure d'expertise, via le RPVA, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble l'Anjou demande à la cour de :

(')

Vu la loi du 10 juillet 1965 et plus particulièrement les articles 5, 10 et 43 de ladite loi,

-dire et juger que la clause contenue dans le règlement de copropriété, aux termes de laquelle:

« La construction à édifier au nord du terrain (le bâtiment B) supportera, à concurrence de 10 millièmes, les charges de copropriété communes aux deux bâtiments ;

Les comparants précisent à ce sujet que le bâtiment B participera pour 10 millièmes à l'entretien du chemin allant de l'avenue Mirabeau à la courette, compris la courette»;

En ce qu'elle exonère partiellement le lot n° 31 de sa participation aux charges communes générales de l'immeuble et aux charges d'entretien de certains éléments de l'immeuble n'est pas conforme aux dispositions d'ordre public de la loi du 10 juillet 1965,

-déclarer, en conséquence, ladite clause du règlement de copropriété réputée non écrite,

-dire et juger que la SCI Notre Ami Enzo, propriétaire du lot n° 31, devra contribuer aux charges communes générales de l'immeuble à concurrence de 45 millièmes et aux charges d'entretien du chemin allant de l'avenue Mirabeau à la courette, compris la courette, à concurrence également de 45 millièmes,

-dire et juger que les réparations et l'entretien du bâtiment B (lot 31) demeureront à la charge de son propriétaire,

Vu les procès-verbaux des assemblées générales en date des 13 avril 2010, 14 septembre 2011, 18 avril 2012, 10 mars 2013, 21 mai 2014 et 19 mai 2015 ayant approuvé les comptes de la répartition des charges pour les exercices 2009, 2010, 2011, 2012, 2013 et 2014, ainsi que les budgets prévisionnels pour les exercices 2015 et 2016,

-constater que les comptes approuvés lors desdites assemblées générales n'ont pas fait l'objet de contestation et sont devenus définitifs et opposables à la SCI Notre Ami Enzo,

-constater que lesdites charges ont été calculées en appliquant au lot n° 31 45 millièmes de charges de copropriété,

-condamner, en conséquence, la SCI Notre Ami Enzo au paiement de la somme de 17629,97 euros au titre des charges et provisions sur charges impayées, arrêtées au 4 avril 2016, outre les intérêts au taux légal à compter du 19 octobre 2009, date de la mise en demeure,

Vu l'article 1153, alinéa 4, du code civil,

-condamner la SCI Notre Ami Enzo au paiement de la somme de 3500 € à titre de dommages et intérêts pour résistance manifestement abusive,

-condamner la SCI Notre Ami Enzo au paiement de la somme de 2500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La SCI Notre Ami Enzo sollicite de voir aux termes de ses conclusions déposées le 4 avril 2018 par le RPVA :

Vu l'article 1134 du code civil,

Vu les articles 5, 10 et 43 de la loi du 10 juillet 1965,

(')

'dire et juger que le rapport d'expertise déposé le 23 janvier 2018 par M. C... est nul pour ne pas avoir respecté les obligations légales d'impartialité et de contradictoire et pour n'avoir pas fourni à la cour les réponses fonctionnelles aux questions posées par la mission,

'en conséquence, déclarer nul le rapport déposé par M. C...,

'constater que les dispositions de l'arrêt de la Cour de cassation en date du 9 juin 2015 admettent que les dispositions contenues en page 22 du règlement de copropriété définissant les modalités de répartition des charges de copropriété à hauteur de 10/1000èmes pour le lot n° 31 ont valeur contractuelle,

-constater que ces dispositions sont conformes aux exigences des articles 10 et 5 de la loi du 10 juillet 1965 pour affecter au lot 31 un quota de charges générales et attribuer à chacun des bâtiments A et B la charge de leur entretien et de leur conservation, ceux-ci étant autonomes,

'dire et juger que la cour ne dispose pas des éléments permettant d'apurer les comptes entre les parties, ce point ne relevant pas de sa saisine,

'dire et juger toutefois que le syndicat par son syndic ès qualités cause un préjudice actuel direct et certain par son obstination à multiplier les procédures et les demandes à son encontre, elle qui règle ses montants de charges par application des dispositions du règlement de copropriété régulièrement jusqu'en 2012, date à laquelle le syndicat s'est vu enjoint de justifier de sa créance et compte-tenu de sa dette envers elle,

'en conséquence, dire et juger que les dispositions du règlement de copropriété initial en date du 22 décembre 1964 s'imposent au syndicat pour être conformes à la loi,

'dire et juger que l'apurement des comptes entre les parties sera effectué selon les indications du règlement de copropriété c'est-à-dire à hauteur de 10/1000èmes des charges générales, outre 10/1000èmes des frais d'entretien du «chemin allant de l'avenue Mirabeau à la courette y compris la courette», les charges générales étant celles de syndic, d'assurance, de contributions fiscales, de gardiennage, à l'exclusion de toutes prestations (eau, électricité, etc.) et d'entretien du bâtiment A,

'condamner le syndicat des copropriétaires à lui payer la somme de 6000 euros en réparation de son trouble de jouissance, outre 5000 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile,

Au subsidiaire,

'dire et juger que le lot n° 31 est à usage de box de garage comme indiqué dans le titre de son propriétaire et comme il est constaté sur place de par la conformation des lieux, qu'il s'agit d'un bâtiment annexe « autonome » car il est constitué d'une structure légère comme tout ouvrage de garage et ne dispose pas des prestations fournies au bâtiment A à usage de logement,

'dire et juger que le lot n° 31 mesure 31,051 m² de surface pondérée auxquels la conformation des lieux conduit d'attribuer un coefficient de 0,35, ce qui conduit après calcul de l'ensemble des indices pondérateurs à un quota de millièmes de 12,143 millièmes et qu'ainsi, les charges lui incombant, les deux bâtiments de la copropriété étant autonomes, s'établissent ainsi :

' le bâtiment B, lot 31, doit participer aux dépenses générales (syndic, assurance etc') à hauteur de ses millièmes,

' le même doit assumer ses dépenses d'entretien pour le tout, outre l'entretien de la courette commune au prorata de ses millièmes,

' le bâtiment A doit assumer par lui-même ses dépenses d'entretien, de conservation courante et de fonctionnement et services, hormis les grosses réparations de structures (constitutives de parties communes),

'en conséquence, dire et juger que cette répartition s'impose au syndicat des copropriétaires pour être conforme à la loi et à la convention initiale des parties,

'condamner le syndicat des copropriétaires à lui payer la somme de 6000 euros en réparation de son trouble de jouissance, outre 9000 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile,

'dire et juger qu'il sera fait application de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965.

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble l'Anjou a déposé de nouvelles conclusions, le 11 avril 2018, dont la SCI notre Ami Enzo a sollicité le rejet.

Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

C'est en l'état que l'instruction a été clôturée par ordonnance du 12 avril 2018, préalablement à l'ouverture des débats.

MOTIFS de la DECISION:

1-la recevabilité des conclusions du syndicat des copropriétaires de l'immeuble l'Anjou, déposées le 11 avril 2018 :

En déposant le 11 avril 2018 à 16 heures 39 via le RPVA de nouvelles conclusions, soit la veille du prononcé de l'ordonnance de clôture et de la tenue de l'audience, le syndicat des copropriétaires, qui n'a pas respecté le calendrier de procédure lui impartissant de déposer ses conclusions, après expertise, avant le 20 mars 2018, n'a pas mis son adversaire en mesure de prendre connaissance desdites conclusions et, éventuellement, d'y répondre, ce qui caractérise une violation du principe du contradictoire et du droit au procès équitable, énoncés aux articles 16 du code de procédure civile et 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; il y a donc lieu de déclarer irrecevables les conclusions nouvelles du syndicat des copropriétaires de l'immeuble l'Anjou, déposées le 11 avril 2018.

2-la nullité du rapport d'expertise:

Pour solliciter l'annulation du rapport d'expertise, la SCI Notre Ami Enzo reproche à M. C... son manque d'impartialité, diverses infractions au principe du contradictoire et un manquement dans l'exécution même de sa mission.

Il ne peut, en premier lieu, être déduit du fait que l'expert ait attribué à la présidente du conseil syndical (Mme D...), présente lors de ses opérations, son titre de notaire (désignant notamment l'intéressée, dans le compte rendu d'accédit du 2 février 2017, comme étant Me Marie-Pierre D..., notaire), l'existence de possibles relations professionnelles avec celle-ci et donc, un manque d'impartialité de sa part ; aucune demande de récusation de l'expert n'a d'ailleurs été formalisée par la SCI Notre Ami Enzo au motif de l'existence, réelle ou supposée, de liens commerciaux entre M. C... et la présidente du conseil syndical.

Par ailleurs, si l'expert n'a pas procédé à l'analyse de certaines pièces lui ayant été communiquées, comme les justificatifs des charges de copropriété ou la lettre du syndic, la société Icade, en date du 18 octobre 2007, c'est qu'il a estimé que ces pièces n'étaient pas utiles à l'accomplissement de sa mission, ce dont il ne peut lui être fait grief,et contrairement à ce qui est affirmé par la SCI, M. C... a annexé à son rapport définitif l'ensemble des pièces transmises par les parties ; il est également soutenu que l'expert a déposé son rapport, le 19 janvier 2018, alors que le délai imparti pour le dépôt des dires et observations des parties n'aurait pas été encore venu à expiration, mais la SCI Notre Ami Enzo qui, après avoir reçu communication, le 10 octobre 2017, du pré-rapport a été en mesure d'adresser un dire à l'expert, le 16 novembre 2017, ne justifie pas du grief que lui causerait un dépôt prétendument précipité du rapport d'expertise, sachant que le magistrat chargé du contrôle de l'expertise avait imparti à M. C... un délai expirant le 15 janvier 2018.

Enfin, le reproche fait à l'expert de ne s'être pas procuré les plans définitifs de la copropriété établis en septembre 1964, ni d'avoir déterminé par mesurage la superficie réelle des lots, n'est pas de nature à entraîner la nullité de son rapport au regard des dispositions de l'article 175 du code de procédure civile.

Les moyens, qu'invoque la SCI Notre Ami Enzo en vue d'obtenir la nullité d'un rapport d'expertise qui ne lui est pas favorable, n'apparaissent pas dès lors sérieux et doivent être rejetés.

3-le fond du litige :

L'arrêt de la cour du 30 janvier 2014 a déclaré non écrite la clause du règlement de copropriété issue de son modificatif voté le 3 octobre 1966 (le modificatif établi le 26 octobre 1967) et ce chef du dispositif n'a pas été atteint par la cassation prononcée par l'arrêt rendu le 9 juin 2015 par la Cour de cassation.

L'article 43 de la loi du 10 juillet 1965 dispose que toutes clauses contraires aux dispositions des articles 6 à 37, 41-1 à 42 et 46 et celles du règlement d'administration publique prises pour leur application sont réputées non écriteset le syndicat des copropriétaires est recevable, comme les copropriétaires eux-mêmes, à invoquer l'illicéité d'une clause du règlement de copropriété tant par voie d'action que d'exception.

Il ressort, par ailleurs, de l'article 10 de la loi du 10 juillet 1965 que les copropriétaires sont tenus de participer aux charges entraînées par les services collectifs et les éléments d'équipement commun en fonction de l'utilité que ces services et éléments présentent à l'égard de chaque lot, qu'ils sont tenus de participer aux charges relatives à la conservation, à l'entretien et à l'administration des parties communes proportionnellement aux valeurs relatives des parties privatives comprises dans leurs lots, telles que ces valeurs résultent des dispositions de l'article 5, et que le règlement de copropriété fixe la quote-part afférente à chaque lot dans chacune des catégories de charges; l'article 5 énonce que dans le silence ou la contradiction des titres, la quote-part des parties communes afférente à chaque lot est proportionnelle à la valeur relative de chaque partie privative par rapport à l'ensemble des valeurs desdites parties, telles que ces valeurs résultent lors de l'établissement de la copropriété, de la consistance, de la superficie et de la situation des lots, sans égard à leur utilisation.

Ainsi, s'agissant des charges relatives à la conservation, à l'entretien et à l'administration des parties communes, le renvoi de l'article 10, alinéa 2, à l'article 5 a pour effet de rendre d'ordre public la répartition des charges aux copropriétaires proportionnellement aux valeurs relatives des parties privatives comprises dans leurs lots, telles que ces valeurs sont déterminées en fonction de la consistance, de la superficie et de la situation des lots, sans qu'il soit tenu compte de leur utilisation effective.

En l'occurrence, le règlement de copropriété-état descriptif de division établi les 22 décembre 1964 et 4 janvier 1965, antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 10 juillet 1965, distingue, pages 30 et 31, les charges communes à l'ensemble des parties communes (1° les impôts, charges et contributions de toute nature auxquels sont et seront assujetties les choses communes '; 2° les rétributions du syndic ' les gages des personnes chargées de l'entretien des choses communes et les assurances les concernant et celles envers les tiers ' les cotisations aux assurances sociales; 3° tous les frais résultant des grosses réparations et d'entretien de l'immeuble en tant que parties communes '), des charges communes à l'ascenseur et au chauffage central; en pages 49 et 50 dudit règlement, un tableau récapitule entre les divers lots les millièmes de parties communes, ainsi que les millièmes de charges d'ascenseur et de chauffage qui ne concernent que les lots en nature de studio ou d'appartement compris dans le bâtiment A.

Selon les conditions particulières, qui sont énoncées en page 22, il est indiqué que le bâtiment B, correspondant au lot n° 31, supportera, à concurrence de 10 millièmes, les charges de copropriété communes aux deux bâtiments et qu'il participera notamment pour 10 millièmes à l'entretien du chemin allant de l'avenue Mirabeau à la courette, compris la courette, les réparations et l'entretien de ce bâtiment étant à la charge de son propriétaire; il en résulte, d'une part, que les charges communes aux deux bâtiments comprenant notamment l'entretien du chemin et de la courette seront supportées par le propriétaire du lot n° 31 dans la limite de 10/1000èmes et que les charges d'entretien et de réparation du bâtiment B, correspondant à ce lot n° 31, seront à la charge exclusive de son propriétaire.

L'arrêt de la cour du 30 janvier 2014 a été cassé au visa de l'article 1134 du code civil en ce qu'il a dit qu'en application du règlement de copropriété d'origine, le propriétaire du lot n° 31 devait contribuer aux charges communes générales à concurrence de 45/1000èmes, sauf pour les charges générées par l'entretien du chemin allant de l'avenue Mirabeau à la courette, y compris la courette, tandis que la réparation et l'entretien du bâtiment B étaient à la charge de ce lot, en raison de la dénaturation par la cour des termes clairs et précis du règlement de copropriété ; si la clause du règlement définissant la part des charges communes générales supportée par le propriétaire du lot n° 31, qui assume également la charge de la réparation et l'entretien du bâtiment B, a effectivement valeur contractuelle, elle n'en doit pas moins être conforme aux dispositions d'ordre public des articles 5 et 10, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1965 ; ainsi, pour apprécier la conformité de cette clause, qui consiste à imputer au propriétaire du lot considéré seulement 10/1000èmes des charges communes, alors que la quote-part, intangible, des parties communes afférentes à ce lot est de 45/1000èmes, il importe de vérifier si cette imputation est ou pas proportionnelle à la valeur relative des parties privatives de ce lot par rapport aux valeurs des autres lots de copropriété.

D'après le règlement de copropriété des 22 décembre 1964 et 4 janvier 1965, le lot n° 31 consiste en un grand local composé de box, buanderie, douche et water-closet auquel se trouvent affectés 45 millièmes indivis des parties communes de l'entier immeuble; à l'issue de ses opérations, l'expert, M. C..., a proposé d'affecter au lot n° 31 une quote-part de charges communes générales égale à 32/1000èmes ; pour parvenir à ce résultat, il s'est fondé sur les plans annexés au règlement de copropriété, dont il a obtenu une copie auprès du notaire détenteur des archives, et à partir desquels il a pu calculer les superficies, sans qu'il puisse lui être reproché de n'avoir pas procédé à un nouveau mesurage de la superficie des lots, dès lors que par référence à l'article 5 de la loi du 10 juillet 1965, la valeur relative de chaque lot doit être appréciée à la date d'établissement de la copropriété abstraction faite de la situation physique actuelle des lots, qui a pu a évolué depuis l'élaboration des premiers plans établis avant la construction de l'immeuble ; à cet égard, il a indiqué que si les résultats obtenus ne peuvent qu'être approximatifs, ils n'en sont pas moins suffisants eu égard au but recherché consistant à vérifier un ordre de grandeur des millièmes contestés ; il a ensuite déterminé la superficie pondérée de chaque lot en fonction d'un coefficient K de consistance ou nature (variant de 0,20 à 1), d'un coefficient K' de situation (de 0,90 à 1,08) selon que le lot est ou pas desservi par l'ascenseur et d'un coefficient K'' de vue, d'éclairement et d'ensoleillement (de 0,90 à 1,06) ; ainsi, pour le lot n° 31, d'une superficie de 113,50 m², il a obtenu une superficie pondérée de 82,74 m² correspondant à une quote-part de charges de 32/1000èmes en tenant compte d'un coefficient K de 0,90, d'un coefficient K' de 0,90 et d'un coefficient K'' de 0,90.

L'expert a d'ailleurs recalculé la quote-part des parties communes de chaque lot, faisant en particulier apparaître que pour le lot n° 31, la quote-part de parties communes s'établissait à 48/1000èmes et non à 45/1002èmes comme mentionné dans l'état descriptif de division d'origine.

La SCI Notre Ami Enzo reproche à l'expert le choix de coefficients K, K' et K'' de 0,90, estimant que le bâtiment B formant le lot n° 31, construit de murs en parpaings légers et dépourvu d'isolation, ne bénéficie pas des mêmes éléments de confort que les appartements de standing de l'immeuble principal A et qu'il comporte en réalité 69 m² de garage, outre une partie débarras et buanderie de 40,53 m² ; elle en déduit qu'à tout le moins, le coefficient K de consistance et nature aurait dû être fixé à 0,35, ce qui conduirait alors à une quote-part de charges de 12/1000èmes par référence à une surface de 109,53 m² mentionnée sur son titre de propriété; pour autant, le coefficient 0,35 a été appliqué par l'expert à un garage en sous-sol auquel ne peut être assimilé le lot n° 31 eu égard à son aspect physique, tel que résultant des photographies annexées au rapport d'expertise, et à la définition dudit lot donnée par le règlement de copropriété (un grand local composé de box, buanderie, douche et water-closet), sachant qu'hormis les garages en sous-sol, caves, parkings, terrasses et balcons affectés de coefficients variant de 0,20 à 0,35, les appartements dépendant de l'immeuble principal A se sont vus attribuer un coefficient égal à 1 supérieur à celui affecté au lot n° 31.

Il résulte de ce qui précède que la clé de répartition, conduisant à attribuer 10/1000èmes des charges communes générales au propriétaire du lot n° 31, n'est pas conforme à la valeur relative du lot déterminé selon les critères d'ordre public de l'article 5 susvisé ; le syndicat des copropriétaires de l'immeuble l'Anjou est donc fondé à soutenir que la clause relative à la répartition des charges communes entre le lot n° 31 et les autres lots doit être réputée non écrite; le tribunal d'instance de Nice, qui a ordonné une mesure d'expertise aux fins d'apurement des comptes par un jugement préparatoire du 20 avril 2015, reste en revanche saisi de l'action en paiement des charges engagée par le syndicat des copropriétaires, étant rappelé que la décision de réputer non écrite une clause illicite ne peut valoir que pour l'avenir et ne peut prendre effet qu'à compter de la date à laquelle cette décision a acquis l'autorité de la chose jugée.

Il n'est justifié d'aucun trouble de jouissance particulier, dont le syndicat des copropriétaires serait en droit d'être indemnisé ; ce chef de demande ne peut dès lors qu'être rejeté en l'état.

Au regard de la solution apportée au règlement du litige, la SCI Notre Ami Enzo doit être condamné aux dépens de première instance et d'appel, y compris les dépens afférents à la décision cassée et les frais et honoraires de l'expert, ainsi qu'à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble l'Anjou la somme de 3000 euros au titre des frais non taxables que celui-ci a dû exposer, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il n'y a pas lieu, dans ces conditions, à l'application de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965.

PAR CES MOTIFS:

La cour,

Déclare irrecevables les conclusions nouvelles du syndicat des copropriétaires de l'immeuble l'Anjou, déposées le 11 avril 2018,

Rejette la demande de nullité du rapport d'expertise,

Au fond, déclare non écrite la clause du règlement de copropriété de l'immeuble l'Anjou en date des 22 décembre 1964 et 4 janvier 1965, page 22, aux termes de laquelle : La construction à édifier au nord du terrain supportera, à concurrence de 10 millièmes, les charges de copropriété communes aux deux bâtiments. Les comparants précisent à ce sujet que le bâtiment B participera pour 10 millièmes à l'entretien du chemin allant de l'avenue Mirabeau à la courette, compris la courette ('),

Dit que le lot n° 31 appartenant actuellement à la SCI Notre Ami Enzo, consistant en un grand local composé de box, buanderie, douche et water-closet auquel se trouvent affectés 45 millièmes indivis des parties communes de l'entier immeuble, supportera 32/1000èmes des charges communes générales, telles que définies en page 30 du règlement de copropriété, les réparations et l'entretien du bâtiment B (lot n° 31) demeurant à la charge de son propriétaire,

Constate que le tribunal d'instance de Nice reste saisi de l'action en paiement des charges engagée par le syndicat des copropriétaires,

Rejette toutes autres demandes,

Condamne la SCI Notre Ami Enzo aux dépens de première instance et d'appel, y compris les dépens afférents à la décision cassée et les frais et honoraires de l'expert, ainsi qu'à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble l'Anjou la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que les dépens seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du même code,

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 4e chambre a
Numéro d'arrêt : 15/14529
Date de la décision : 14/06/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 4A, arrêt n°15/14529 : Autres décisions constatant le dessaisissement en mettant fin à l'instance et à l'action


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-06-14;15.14529 ?
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