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24/05/2018 | FRANCE | N°284

France | France, Cour d'appel d'aix-en-provence, Ct0021, 24 mai 2018, 284


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
8e Chambre B

ARRÊT AU FOND
DU 24 MAI 2018

No 2018/ 284

No RG 16/20086

No Portalis DBVB-V-B7A-7Q45

Société COMASUD

C/

Sébastien Y...

Grosse délivrée
le :
à :

- Me Philippe PARISI de la SCP IMAVOCATS, avocat au barreau de TOULON

- Me Arnaud LUCIEN, avocat au barreau de TOULON

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 06 Octobre 2016 enregistré(e) au répertoire général sous le no 14/06455.

APPELANTE>
Société COMASUD
dont le siège social est [...]

représentée par Me Philippe PARISI de la SCP IMAVOCATS, avocat au barreau de TOULON substitué par Me Adeli...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
8e Chambre B

ARRÊT AU FOND
DU 24 MAI 2018

No 2018/ 284

No RG 16/20086

No Portalis DBVB-V-B7A-7Q45

Société COMASUD

C/

Sébastien Y...

Grosse délivrée
le :
à :

- Me Philippe PARISI de la SCP IMAVOCATS, avocat au barreau de TOULON

- Me Arnaud LUCIEN, avocat au barreau de TOULON

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 06 Octobre 2016 enregistré(e) au répertoire général sous le no 14/06455.

APPELANTE

Société COMASUD
dont le siège social est [...]

représentée par Me Philippe PARISI de la SCP IMAVOCATS, avocat au barreau de TOULON substitué par Me Adeline DEMEULIER, avocat au barreau de TOULON

INTIME

Monsieur Sébastien Y...
né le [...] ,
demeurant [...]

représenté par Me Arnaud LUCIEN, avocat au barreau de TOULON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785,786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Mars 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Valérie GERARD, Président de chambre, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Valérie GERARD, Président de chambre
Madame Françoise PETEL, Conseiller
Madame Anne DUBOIS, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Lydie BERENGUIER.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 Mai 2018.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 24 Mai 2018

Signé par Madame Valérie GERARD, Président de chambre et Madame Lydie BERENGUIER, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

LA COUR

Par acte portant la date du 10 janvier 2013, intitulé "Garantie à première demande d'une personne physique", M. Sébastien Y..., dirigeant de la société Var Ingénierie Cloisons (VIC), a déclaré se porter garant à première demande, pour une durée d'un an, envers la société Comasud, "pour le montant réclamé, dans la limite de 50 000 €". L'acte fait référence à la : "Connaissance prise de l'ouverture d'un crédit en fourniture de marchandises accordé par la société Comasud à son client la SARL VIC".

La société VIC a été mise en redressement puis en liquidation judiciaires, les 29 juillet 2013 et 12 juin 2014.

La société Comasud a déclaré au passif une créance de 55 382,06 €, montant de factures émises entre le 31 mars et le 30 juin 2013.

Après avoir mis en demeure M. Y..., le 28 août 2013, la société Comasud l'a fait assigner en paiement, le 5 décembre 2014.

M. Y... a fait valoir que l'acte de garantie s'analyse en un cautionnement, lequel est irrégulier pour être dépourvu de la mention manuscrite exigée à peine de nullité. Il a soutenu que l'acte, remis à la société Comasud en juillet 2013, a été antidaté au 10 janvier précédent, dans le but de le situer hors la période suspecte. Il s'est prévalu d'un préjudice moral découlant de cette faute pour solliciter l'allocation de la somme de 10 000 € à titre de dommages-intérêts.

Par jugement contradictoire du 6 octobre 2016, le tribunal de grande instance de Toulon a :

- dit que l'acte doit être requalifié en un cautionnement ;

- dit que l'acte est nul et de nul effet pour cause d'absence de la mention manuscrite prescrite en matière de cautionnement ;

- débouté la société Comasud de ses demandes ;

- débouté M. Y... de sa demande en paiement de dommages-intérêts ;

- condamné la société Comasud aux dépens et au paiement de la somme de 1 300 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Comasud est appelante de ce jugement.

****

Vu les conclusions remises le 24 mars 2017, auxquelles la cour se réfère expressément en application de l'article 455 du code de procédure civile, et aux termes desquelles la société Comasud demande à la cour de :

- confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a débouté M. Y... de sa demande en paiement de dommages-intérêts ;

- l'infirmer pour le surplus ;
- débouter M. Y... de ses demandes ;
- le condamner à payer la somme de 50 000 €, avec intérêts se capitalisant au taux légal à compter du 28 août 2013 ;
- le condamner aux dépens et au paiement de la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

****

Vu les conclusions remises le 13 février 2017, auxquelles la cour se réfère expressément en application de l'article 455 du code de procédure civile, et aux termes desquelles M. Y... demande à la cour de :

- confirmer le jugement attaqué, sauf en ce qu'il l'a débouté de sa demande en paiement de dommages-intérêts
- condamner la société Comasud à lui payer la somme de 10 000 € à titre de dommages-intérêts ;
- la condamner aux dépens et au paiement de la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

****

Vu l'ordonnance de clôture prononcée le 6 février 2018.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la qualification juridique de l'acte souscrit par M. Y...

M. Y... fait valoir que l'acte litigieux a été souscrit pour permettre la poursuite des chantiers de la société Vic, que l'objet de la convention était de garantir l'exécution de l'obligation de paiement de cette société, que l'expression "dans la limite" crée un lien entre la créance sur cette société et celle sur le garant, enfin, que dans l'assignation en paiement, la société Comasud déclare mettre en jeu la garantie à raison de la défaillance de la société Vic. Il en tire la conséquence que son obligation a un caractère accessoire et non autonome, et il demande la confirmation du jugement en ce qu'il a requalifié son obligation en un engagement de caution.

L'acte litigieux, dont le jugement a rappelé les clauses de façon exhaustive, est intitulé "Garantie à première demande d'une personne physique". Il emporte, pendant une période d'un an reconduite tacitement sauf dénonciation, engagement de payer "à première demande du bénéficiaire" la somme que ce dernier réclamera, dans une limite fixée pour un montant maximal. L'acte stipule que l'engagement est autonome, que le garant ne peut faire valoir aucune objection ou exception et que la disparition des rapports de droit ou de fait entre le garant et la personne garantie ne peut affecter ni sa portée, ni sa mise en jeu.

La référence faite dans l'acte, en des termes généraux, à l'ouverture de crédit consentie par la société Comasud à la SARL Vic, dont le garant est le dirigeant, comme l'expression "personne garantie", n'ont pour finalité que de spécifier le contrat de base qui constitue la cause de l'obligation de garantie, au sens de l'article 1108 du code civil, dans sa rédaction applicable. Il n'en résulte pas que l'objet de la garantie porte sur les sommes dues par le débiteur principal.

Les circonstances que la société Comasud a appelé la garantie le jour de la déclaration de sa créance au passif de la société Vic et qu'elle justifie, au soutien de la demande judiciaire en paiement, d'une créance sur cette société, sont indifférentes quant à la qualification de la sûreté personnelle puisque, sous peine d'abus, la garantie ne peut être mise en oeuvre que par référence au seul contrat de base.

Enfin, la fixation de la garantie dans une certaine limite et non pour un montant déterminé, n'est pas exclusive de la qualification de garantie à première demande.

En souscrivant un contrat par lequel il s'est engagé à effectuer, sur la demande de la société Comasud , le paiement d'une somme à concurrence d'un montant maximal, sans qu'il puisse en différer le paiement ou soulever une contestation quelconque pour quelque cause que ce soit, M. Y... s'est porté garant à première demande et non caution.

Dès lors, il ne peut se prévaloir de la méconnaissance des dispositions de l'article L 341-2, devenu l'article L 331-1 du code de la consommation, applicables aux seuls engagements de caution.

Sur la demande en paiement de dommages-intérêts

M. Y... prétend que l'acte, remis à la société Comasud en juillet 2013, a été antidaté au 10 janvier précédent, dans le but de le situer hors la période suspecte de la société Vic. Il se prévaut d'un préjudice moral découlant de cette faute et sollicite, en réparation, l'allocation de la somme de 10 000 € à titre de dommages-intérêts.

Mais, s'il est probable que l'acte a été antidaté puisque M. Y... justifie qu'un formulaire vierge de "Garantie à première demande d'une personne physique" lui a été transmis le 12 juillet 2013 par un message électronique de la banque, il n'est pas établi que l'apposition d'une date antérieure à celle de la signature soit le fait de la banque et non de M. Y... lui-même. Ce dernier, qui n'allègue pas avoir remis un acte non daté, ne fournit, au demeurant, aucune explication sur les circonstances de la signature de l'acte.

Dès lors, M. Y... ne démontre pas la faute qu'il invoque au soutien de sa demande en indemnisation.

****

Le jugement attaqué est infirmé en ce qu'il a rejeté la demande en paiement formée à l'encontre de M. Y.... Il est confirmé sur le rejet de la demande en paiement de dommages-intérêts.

M. Y..., qui succombe, est condamné aux dépens.

Aucune considération d'équité ne justifie l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement attaqué en ce qu'il a rejeté la demande en paiement de dommages-intérêts formée par M. Sébastien Y...,

L'infirme en ses autres dispositions,

Statuant à nouveau,

Rejette la demande en requalification de l'acte de garantie à première demande,

Condamne M. Sébastien Y... à payer à la société Comasud la somme de 50 000 €, avec intérêts au taux légal à compter du 28 août 2013,

Dit que les intérêts se capitalisent dans les conditions de l'article 1154 devenu l'article 1343-2 du code civil,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. Sébastien Y... aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers distraits au profit de M. Philippe Parisi, avocat.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'aix-en-provence
Formation : Ct0021
Numéro d'arrêt : 284
Date de la décision : 24/05/2018

Analyses

Le dirigeant d'une société qui s'est engagé à effectuer, sur la demande de la société cocontractante, le paiement d'une somme à concurrence d'un montant maximal, sans qu'il puisse en différer le paiement ou soulever une contestation quelconque pour quelque cause que ce soit, se porte garant à première demande. Dès lors, débiteur d'une obligation autonome, il ne peut se prévaloir de la méconnaissance des dispositions de l'article L 331-1 du code de la consommation, applicables aux seuls engagements de caution.


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Toulon, 06 octobre 2016


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.aix-en-provence;arret;2018-05-24;284 ?
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