COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
11e Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 17 MAI 2018
N° 2018/ 130
Rôle N° N° RG 15/13507 - N° Portalis DBVB-V-B67-5EQB
SCI BIBINOBI
C/
SARL CAC 06
Grosse délivrée
le :
à :
Me Alain CURTI
Me Thimothée JOLY
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 02 Juillet 2015 enregistré au répertoire général sous le n° 14/00777.
APPELANTE
SCI BIBINOBI, agissant par la personne de son représentant légal en exercice domicilié [Adresse 1]
représentée par Me Alain CURTI, avocat au barreau de NICE
INTIMEE
SARL CAC 06 prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège [Adresse 2]
représentée par Me Thimothée JOLY, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 20 Février 2018 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Mme Françoise FILLIOUX, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Catherine KONSTANTINOVITCH, Présidente
Mme Brigitte PELTIER, Conseiller
Mme Françoise FILLIOUX, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Agnès SOULIER.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 17 Mai 2018
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 17 Mai 2018,
Signé par Madame Catherine KONSTANTINOVITCH, Présidente et Mme Agnès SOULIER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Faits et Prétentions des parties
Par acte du 16 septembre 2010, la société Bibinobi a donné à bail professionnel à la société CAC 06 un local de 100m² situé au 2ième d'un immeuble du [Adresse 1] pour l'exercice d'une activité d'expert comptable, moyennant un loyer de 21 600€ par an outre le remboursement de tous les impôts, taxes et charges.
Monsieur [U], gérant de la société Bibinobi, travaillait au sein de la société CAC 06 dont le gérant est Monsieur [Y].
Par jugement contradictoire du 2 juillet 2015, le tribunal de grande instance de Nice a condamner la société Bibinobi à payer à la société CAC 06 la somme de 5 832,61€ en remboursement des sommes perçues au titre du bail et ce avec intérêt de droit et 3 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile et a rejeté toutes autres demandes.
Il a estimé que les locaux donnés à bail n'ont jamais été mis à disposition de la société CAC 06 par la bailleresse.
Le 23 juillet 2015, la SCI Bibinobi a interjeté appel de cette décision.
Par ordonnance du 10 janvier 2017, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevables les conclusions notifiées le 13 septembre 2006 par la société Bibinobi.
Par conclusions du 7 décembre 2015, la société CAC 06 demande à la cour de :
*confirmer le jugement sauf en ce qu'il a rejeté les demandes de dommages et intérêts de la société CAC 06,
*condamner la SCI Bibinobi à lui payer la somme de 10 000€ à titre de dommages et intérêts et 3 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient qu'il n'est pas contesté qu'elle n'a jamais utilisé les locaux objet du bail, qu'elle n'en a pas reçu les clès et que les locaux étaient en tout état de cause inutilisables ainsi qu'en atteste le procès verbal de constat dressé le 20 avril et 20 mai 2011par Maître [E] alors que le bail contenait une clause mettant à la charge du bailleur la remise de locaux en bon état et d'équipements en parfait état de fonctionnement, que la bailleresse s'est exonéré de son obligation de délivrance, que la locataire considérait à compter du 20 avril 2011 le bail comme étant résolu faute d'exécution par la société Bibinobi.
Elle conteste avoir accepté la suspension des travaux de remise en état en contrepartie d'une suspension de son obligation de payer les loyers, en indiquant que la présence de deux véhicules garés sur le parking affectés aux locaux litigieux est dépourvue de toute force probante quant à l'exécution du bail, faute d'éléments sur l'identité des propriétaires des dits véhicules et ce d'autant que la SCI Boval représentée par Monsieur [U] a loué à la concluantes des baux relatifs à des emplacements situés sur le parking du [Adresse 1].
Elle fait valoir que la société Bibinobi doit lui rembourser les sommes versées à tort ainsi que l'assurance souscrite sans cause ainsi que de justes dommages et intérêts.
Par conclusions du 6 novembre 2015, la société Bibinobi demande à la cour :
*d'infirmer la décision de première instance,
*débouter la société CAC 06 de ses demandes,
*dire que le bail est rompu du fait de la non exécution de ses obligations par la société CAC 06 au 30 avril 2011,
*condamner la société CAC 06 au paiement à la société Bibinobi d'une somme de 10 760€ représentant les loyers impayés de décembre 2010 à avril 2011 et 3 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle expose qu'elle a loué par un bail professionnel des locaux à la société CAC 06 par bail du 16 septembre 2010, sachant que le gérant de la société Bibinobi exerce la profession de comptable au sein de la société CAC 06 dans laquelle il avait la qualité d'associé, qu'en novembre 2010, la société CAC 06 faisait part au bailleur de ses interrogations sur la nécessité pour elle de prendre ces nouveaux locaux en location, que les parties convenaient de suspendre le paiement du loyer ainsi que les travaux d'aménagement à la charge du bailleur, que nonobstant cet accord verbal, la société CAC 06 arguant le 20 avril 2011 d'une résiliation pour faute sollicitait la restitution des sommes versées.
Elle soutient que les travaux d'aménagement des locaux ont été suspendus avec l'accord de la locataire, qu'il est improbable que les membres de la société CAC 06, tous professionnels du chiffre et des comptes n'auraient pas constaté le paiement du loyer pendant 7 mois et n'auraient pas mesuré les engagements liés à la signature du bail, que dès le mois d'avril 2010 la société Bibinobi a en accord avec la société CAC 06 fait effectuer un certain nombre de devis pour l'aménagement des locaux, qu'une partie des travaux a été exécutée et payée en novembre 2010 puis en mars 2011, que les dirigeants de la société CAC 06 utilisent les emplacements de parking loués avec le local ainsi qu'en atteste les procès verbaux de constat, démontrant que le bail a reçu sa pleine application.
Elle fait valoir que depuis le 20 septembre 2010 elle a immobilisé les locaux, sans indemnisation compensatrice correspondante, qu'il convient de condamner à la locataire à lui régler les loyers pour la période de décembre 2010 à avril 2011 soit 10 760€ ;
L'ordonnance de clôture est intervenue le 6 février 2018 ;
Sur ce
Attendu que les parties sont en l'état d'un bail souscrit le 16 septembre 2010 portant sur un local de 100m² à aménager ; qu'il est acquis et non contesté que la société CAC 06 n'a pas occupé les locaux nonobstant le règlement des échéances d'octobre et novembre 2010 et a cessé tout versement à compter du mois de décembre 2010 ;
Attendu qu'il résulte d'un procès verbal établi le 26 avril et le 20 mai 2011 par Maître [E], huissier de justice, que les lieux n'étaient pas à la date des constatations en l'état d'être exploités, Maître [E] notant que les locaux étaient fermés que ni Monsieur [U], représentant la société Bibinobi ni Monsieur [Y] gérant de la société CAC 06 ne possédaient les clés permettant l'accès au local, que des photographies prises par l'interstice sous la porte d'entrée montrent un local nu et brut, dépourvu de revêtement au sol et sur les murs et encombré de matériaux ; qu'il résulte de ce document que les locaux tels qu'ils apparaissent au constat d'huissier ne pouvaient servir à l'usage d'exploitation d'un cabinet d'expert comptable prévu au bail ;
Attendu que la société Bibinobi ne conteste pas cet état des locaux mais se prévaut d'un accord intervenu entre les parties aux termes duquel leurs obligations respectives étaient suspendues, la locataire s'interrogeant sur l'utilité pour elle de louer une surface aussi importante, que ses affirmations sur cette version des faits contenues dans son courrier du 26 avril 2011 sont corroborées par le fait d'une part que la locataire a accepté de verser deux échéances en début de bail puis a interrompu tout versement compter du 1er octobre 2010 et qu'elle a assuré les locaux auprès de la société Gan et d'autre part que la bailleresse n'a pas réclamé de loyer de décembre 2010 à avril 2011 alors qu'elle réalisait par ailleurs des travaux d'aménagement de grande ampleur dans les lieux loués ;
Attendu que la société CAC 06 explique les différents versements effectués au profit de la société Bibinobi par le fait que Monsieur [U], gérant de la société Bibinoni exerçait la profession de comptable au sein de la société CAC 06 et qu'il aurait pu effectuer ces différents règlements de loyers sans en avoir reçu l'ordre, que toutefois, la preuve du caractère frauduleux des dits versements dont se prévaut la société CAC 06 n'est pas rapportée, que les relations croisées des différentes parties expliquent au contraire l'absence d'accord écrit et formalisé sur la suspension du contrat de bail intervenu en décembre 2010 ; qu'il est acquis que les membres de la société CAC 06 dont son gérant Monsieur [Y] exerçaient l'activité d'expertise comptable qu'ils avaient toutes les compétences nécessaires pour prendre connaissance des versements effectués au titre des loyers, en appréhender la portée et en déceler la fraude ;
Attendu qu'il résulte de l'examen de ces éléments que le bail a commencé à être exécuté de septembre à décembre 2010, date à laquelle la preuve de l'état inutilisable des locaux n'est pas rapportée, qu'à compter de janvier 2011, les parties ont convenu de suspendre leurs obligations réciproques en l'attente de la réalisation de travaux, qu'il convient de constater qu'à compter du mois d'avril 2011 au moins, les locaux ne sont plus en l'état d'être utilisés par la société CAC 06 pour l'usage qu'elle comptait leur donner et que le bail a été résiliation par accord des parties à compter de cette date, qu'aucune somme ne peut être sollicitée au titre du loyer ni un quelconque préjudice, les parties n'en justifiant pas ;
Attendu qu'il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile à l'une quelconque des parties ni pour la procédure de première instance ni pour celle d'appel ;
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement par arrêt contradictoire, mis à la dispositions des parties conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de procédure civile
- INFIRME le jugement déféré,
- Déboute les parties de leur demande ;
- Constate la résiliation du bail au 30 avril 2011,
- Dit que les parties garderont la charge de leurs propres dépens.
LE GREFFIER LE PRESIDENT