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11/05/2018 | FRANCE | N°16/03731

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 9e chambre a, 11 mai 2018, 16/03731


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 11 MAI 2018



N°2018/229



N° RG 16/03731 - N° Portalis DBVB-V-B7A-6GCK







Société ECONOCOM FRANCE





C/



Sabrina X...



















Grosse délivrée le :



11 MAI 2018



à :





Me Maud Y..., avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE



Me Michel Z... de la SCP AKHEOS, avocat au barreau de MARSE

ILLE









Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE - section E - en date du 12 Février 2016, enregistré au répertoire général sous le n° 15/563.





APPELANTE



Société ECONOCOM FRANCE, demeurant [...]



...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 11 MAI 2018

N°2018/229

N° RG 16/03731 - N° Portalis DBVB-V-B7A-6GCK

Société ECONOCOM FRANCE

C/

Sabrina X...

Grosse délivrée le :

11 MAI 2018

à :

Me Maud Y..., avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE

Me Michel Z... de la SCP AKHEOS, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE - section E - en date du 12 Février 2016, enregistré au répertoire général sous le n° 15/563.

APPELANTE

Société ECONOCOM FRANCE, demeurant [...]

représentée par Me Maud Y..., avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE

INTIMEE

Madame Sabrina X..., demeurant [...]

comparante en personne, assistée de Me Michel Z... de la SCP AKHEOS, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 26 Mars 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Nathalie FRENOY, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur David MACOUIN, Conseiller faisant fonction de Président

Mme Nathalie FRENOY, Conseiller

Mme Stéphanie BOUZIGE, Conseiller

Greffier lors des débats : Monsieur Kamel BENKHIRA.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 Mai 2018

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 11 Mai 2018

Signé par Monsieur David MACOUIN, Conseiller faisant fonction de Président et Monsieur Kamel BENKHIRA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Madame Sabrina X... a été engagée par la société ECONOCOM FRANCE, ayant pour objet social la location et la location-bail de machines de bureau et de matériel informatique, à compter du 9 mai 2012 en qualité de directeur d'agence, statut cadre.

Le 12 juin 2013, elle s'est plaint à son employeur de sa situation et a sollicité un entretien en vue d'une rupture conventionnelle.

Par courrier du 5 août 2013, elle a adressé une lettre de démission.

Elle était libre de tout engagement le 13 septembre 2013 au soir, la société ECONOCOM FRANCE ayant accepté d'écourter son préavis par courrier du 9 septembre précédent.

Elle a saisi le conseil de prud'hommes de Marseille pour obtenir condamnation de la société ECONOCOM FRANCE à lui payer l'indemnité contractuelle de non-concurrence stipulée au contrat de travail.

Par jugement du 12 février 2016, le conseil de prud'hommes de Marseille a

-dit que Madame Sabrina X... n'avait pas été délivrée par son employeur dans les délais requis de la clause de non-concurrence prévue à son contrat de travail, à la suite de sa démission,

-condamné la société ECONOCOM FRANCE à lui payer

*63'000 € à titre de compensation financière de la clause de non-concurrence prévue à son contrat de travail,

*300 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné le défendeur aux dépens.

Le 25 février 2016, la société ECONOCOM FRANCE a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Dans ses conclusions soutenues oralement, l'appelante demande à la cour de:

-infirmer le jugement déféré,

-dire que Mademoiselle X... a été régulièrement délivrée de l'obligation de non-concurrence stipulée au contrat de travail,

-dire toutes ses demandes non fondées et l'en débouter,

en tout état de cause

-dire qu'elle n'a pas respecté les termes de l'obligation de non-concurrence,

-ordonner par conséquent la restitution des sommes versées au titre de l'exécution provisoire,

à titre incident

-condamner l'intimée à lui verser 2 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à prendre en charge les dépens.

Aux termes de ses écritures développées à l'audience, Sabrina X..., intimée, conclut:

- à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a dit que la société ECONOCOM ne l'a pas déliée de son obligation de non-concurrence,

- à sa réformation sur le montant alloué,

- à la condamnation de la société ECONOCOM FRANCE à lui payer 101 808 €, outre

10 180 € au titre des congés payés y afférents,

- aux intérêts de ces sommes capitalisés à compter du 5 février 2014,

- à sa condamnation à lui payer 2 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à prendre en charge les dépens.

MOTIFS DE L'ARRET

Sur la levée de la clause de non-concurrence:

La société ECONOCOM FRANCE soutient que dans son envoi postal du 9 septembre 2013 se trouvaient deux lettres, conformément à une pratique habituelle au sein de l'entreprise, l'une acceptant le préavis écourté et l'autre levant la clause de non-concurrence stipulée au contrat de travail. Elle relève que la salariée n'a formulé aucune réclamation à ce titre avant le 5 février 2014. Elle souligne surtout que sa renonciation à l'exécution de la clause de non-concurrence s'est faite avant le délai de huit jours à compter du départ effectif de la salariée prévu au contrat et n'encourt ainsi aucune critique.

Sabrina X... rappelle avoir envoyé sa lettre de démission le 5 août 2013 reçue le 8 suivant, n'avoir été destinataire d'aucun courrier levant la clause de non-concurrence dans les huit jours à compter de cette date et se dit donc en droit de percevoir l'indemnité de non-concurrence qui lui est due. Elle conteste tout mode de preuve de l'envoi de deux courriers dans une même enveloppe, critique l'attestation de la responsable des ressources humaines, en fâcheuse posture, et produit la lettre obtenue par Guillaume A..., ayant rompu son contrat de travail de sa propre initiative, raccourcissant le délai de préavis mais également le déliant expressément de sa clause de non-concurrence, et ce dans un même courrier. Elle critique également la sincérité du constat d'huissier qui n'a pas respecté les diligences minimales en matière informatique et indique qu'un document word peut à tout moment être modifié de son contenu originel en gardant sa date de création initiale.

Enfin, ayant été dispensée d'exécution d'une partie de son préavis, elle réfute toute possibilité d'application des dispositions contractuelles relatives à l'inobservation du préavis, et rappelant que c'est bien la date de notification de la démission qui constitue le point de départ du délai de renonciation à la clause de non-concurrence, considère la levée, pour le cas où elle aurait été effective, comme tardive.

Le contrat de travail de l'espèce stipule en son article 11 que 'Madame Sabrina X... sera soumise à une interdiction de concurrence, limitée à une période d'un an, qui court du jour de la cessation effective de son contrat de travail et concerne le ou les territoires d'exercice des fonctions de Madame Sabrina X... durant l'année antérieure à ladite cessation.

Éventuellement, toute infraction à cette clause de non-concurrence obligerait Madame Sabrina X... au paiement immédiat d'une indemnité égale au montant de la rémunération perçue par lui (sic) dans les six mois précédant le jour de son départ, sans préjudice de tous dommages et intérêts pour toute concurrence déloyale.

En contrepartie de cette interdiction et pendant toute la durée de celle-ci, Madame Sabrina X... percevra une indemnité mensuelle égale à « 50 % de son salaire de base mensuel et 1/12 du total de sa rémunération variable » versée à Madame Sabrina X... au cours des 12 derniers mois précédant la rupture du contrat de travail.

Econocom France pourra cependant libérer Madame Sabrina X... de l'interdiction de concurrence et se décharger elle-même de l'indemnité mensuelle spéciale, sous condition de le (sic) prévenir par écrit au plus tard dans les huit jours suivant la notification du préavis ou, en cas d'inobservation du préavis, dans les huit jours qui suivront la rupture effective du contrat de travail.'

L'employeur peut renoncer à la clause de non-concurrence à la condition que le contrat de travail ou la convention collective à laquelle le contrat se réfère lui en donne expressément la possibilité. À défaut, il lui faut l'accord du salarié.

Il appartient à la société ECONOCOM FRANCE, qui avait stipulé cette faculté de renonciation, de démontrer la levée effective et non tardive de la clause de non-concurrence.

Pour ce faire, elle produit les deux courriers adressés le 9 septembre 2013 à Sabrina X..., l'accusé de réception signé par cette dernière, le courrier de réclamation du conseil de Sabrina X... en date du 5 février 2014, la réponse du 12 février 2014 rappelant que par courrier recommandé du 9 septembre 2013 la clause de non-concurrence a été levée, l'attestation de Marie Angèle B..., responsable des ressources humaines et signataire des deux courriers litigieux ainsi qu'un constat d'huissier en date du 6 novembre 2015 faisant état de l'existence de deux documents word créés le 9 septembre 2013 à 11:48 dans le sous- dossier ' S X...' lui-même contenu dans un dossier 'DEMISSION' '2013' et dans un dossier 'FR DRH' sur un ordinateur de la société ECONOCOM FRANCE.

L'accusé de réception par Sabrina X... n'est intrinsèquement probant que de la remise d'un courrier de la part de la société ECONOCOM FRANCE et non de la remise de deux lettres. L'attestation de Marie Angèle B..., auteur de l'envoi, et donc particulièrement concernée par le litige, est de ce fait sujette à caution. Enfin, la contestation rapide et vive de la société appelante dans son courrier du 12 février 2014, en réponse à la réclamation de la salariée par l'intermédiaire de son conseil, est dénuée de toute valeur probante, en application du principe selon lequel on ne peut se constituer de preuve à soi-même.

Toutefois, ces divers éléments corroborés par le procès-verbal de constat, énonçant les informations minimales pour vérifier la régularité de la démarche de l'huissier, l'objectivité de ses constatations et l'authenticité des éléments recueillis, parfaitement clairs quant à la date de dernière modification (le 9 septembre 2013 à 11:48) du document - nonobstant l'orthographe approximative et sans conséquence du fichier word décrit- contenant deux courriers successifs adressés à Sabrina X... (le même jour), doivent être pris en considération pour démontrer la levée de la clause de non-concurrence, les critiques avancées par l'intimée n'étant étayées par aucune donnée informatique précise, José C..., autre salarié démissionnaire à la même période ayant été destinataire du même envoi double et la situation de Guillaume A... destinataire d'un unique courrier - sur une trame distincte contenant la précision de l'objet du courrier - n'étant pas strictement transposable puisque relative à une rupture de période d'essai.

Il est donc établi que la société appelante a levé la clause de non-concurrence contractée avec Sabrina X....

En cas de rupture du contrat de travail avec dispense d'exécution du préavis par le salarié, la date à partir de laquelle celui-ci est tenu de respecter l'obligation de non-concurrence, la date d'exigibilité de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence et la date à compter de laquelle doit être déterminée la période de référence pour le calcul de cette indemnité sont celles du départ effectif de l'entreprise. Il en résulte que l'employeur qui dispense le salarié de l'exécution de son préavis doit, s'il entend renoncer à l'exécution de la clause de non-concurrence, le faire au plus tard à la date du départ effectif de l'intéressé de l'entreprise, nonobstant stipulations ou dispositions contraires.

Par conséquent, en dépit de la controverse élevée relativement à la dispense ou à l'inobservation du préavis, il est manifeste que le courrier du 9 septembre 2013 levant la clause de non-concurrence n'est pas tardif eu égard au départ effectif de l'entreprise de Sabrina X..., à savoir le 13 septembre au soir.

La demande tendant donc au paiement de la contrepartie financière de l'obligation de non-concurrence doit donc être rejetée et le jugement infirmé de ce chef.

Il n'y a pas lieu, par ailleurs, d'ordonner par une disposition spécifique la restitution des sommes versées par la société ECONOCOM FRANCE au titre de l'exécution provisoire, le présent arrêt constituant le titre nécessaire pour ce faire.

Sur les frais irrépétibles et les dépens:

L'équité commande de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile à l'une quelconque des parties ni pour la procédure de première instance, ni pour celle d'appel.

Sabrina X..., qui succombe, doit être tenue aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Rejette les demandes des parties,

Condamne Sabrina X... aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT

David MACOUIN faisant fonction


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 9e chambre a
Numéro d'arrêt : 16/03731
Date de la décision : 11/05/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-05-11;16.03731 ?
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