COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
8e Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 19 AVRIL 2018
N° 2018/151
Rôle N° N° RG 16/04458 - N° Portalis DBVB-V-B7A-6HYW
SCI MONASTERE
SCI SAINT PIERRE
C/
[B] [N]
[Z] [L]
[S] [L]
Grosse délivrée
le :
à :
Me Philippe BRUZZO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
Me Benoît PORTEU DE LA MORANDIERE de la SCP CICCOLINI PORTEU DE LA MORANDIERE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
Me Pascale PENARROYA-LATIL de la SCP LATIL PENARROYA-LATIL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 03 Mars 2016 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 2015F00094.
APPELANTES
SCI MONASTERE
dont le siège social est [Adresse 1], prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualités audit siège
représentée par Me Philippe BRUZZO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, substitué par Me Cedric DUBUCQ, avocat au barreau D'AIX EN PROVENCE, plaidant
SCI SAINT PIERRE
prise en la personne de son représentant légal, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Philippe BRUZZO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Cedric DUBUCQ, avocat au barreau D'AIX EN PROVENCE, plaidant
INTIMES
Maître [B] [N]
pris en sa qualité de Liquidateur de la SARL BATI SUD.,
demeurant [Adresse 3]
représenté par Me Benoît PORTEU DE LA MORANDIERE de la SCP CICCOLINI PORTEU DE LA MORANDIERE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
Monsieur [Z] [L]
demeurant [Adresse 4]
représenté par Me Pascale PENARROYA-LATIL de la SCP LATIL PENARROYA-LATIL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
assisté par Me Alain GALISSARD de l'ASSOCIATION GALISSARD A / CHABROL B, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant
Monsieur [S] [L]
demeurant [Adresse 5]
représenté par Me Pascale PENARROYA-LATIL de la SCP LATIL PENARROYA-LATIL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
assisté par Me Alain GALISSARD de l'ASSOCIATION GALISSARD A / CHABROL B, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant
*-*-*-*-
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Mars 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Anne CHALBOS, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Bernard MESSIAS, Président de chambre
Madame Catherine DURAND, Conseiller
Madame Anne CHALBOS, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Chantal DESSI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Avril 2018
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Avril 2018
Signé par M. Bernard MESSIAS, Président de chambre et Madame Chantal DESSI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
La SCI Saint-Pierre et la SCI Monastère ont confié à la société Bati sud, entreprise générale tous corps d'état, la réalisation de travaux de rénovation immobilière respectivement courant 2006 et 2008.
Par jugement du 11 février 2010, le tribunal de commerce de Marseille a prononcé la liquidation judiciaire de l'EURL Bati sud et désigné Maître [B] [N] en qualité de liquidateur.
Par ordonnances de référé des 2 avril 2010 (tribunal de grande instance de Marseille) et 13 juillet 2010 (tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence), des experts ont été désignés afin de vérifier les malfaçons et inachèvements allégués par les SCI Monastère et Saint-Pierre et d'en évaluer les conséquences.
Un rapport d'expertise a été déposé le 26 octobre 2010 par Monsieur [G] [D] concernant la SCI Monastère et un autre rapport a été déposé le 23 février 2011 par Monsieur [N] [Q] concernant la SCI Saint-Pierre.
La SCI Monastère a déclaré au passif de la liquidation judiciaire de la société Bati sud une créance de 31679,28 € à titre chirographaire échu et par une seconde déclaration, une créance de 150000 €.
La SCI Saint-Pierre a déclaré une créance de 100000 € à titre chirographaire échu.
Ces créances ont été contestées par le gérant de la société Bati Sud et par trois ordonnances du 12 novembre 2014, le juge commissaire saisi de la contestation a invité les parties à mieux se pourvoir, au motif que les explications et pièces produites à l'audience ne permettaient pas de statuer sur la créance.
Par acte en date du 15 janvier 2015, la SCI Monastère et la SCI Saint-Pierre ont fait assigner devant le tribunal de commerce de Marseille Maître [B] [N] agissant en qualité de liquidateur de la société Bati Sud aux fins d'entendre fixer la créance de la SCI Monastère au passif de la société Bati sud à la somme de 491297 € sur la base du rapport de l'expert [D] et subsidiairement à la somme de 100000 € et fixer la créance de la SCI Saint-Pierre au passif de la société Bati sud à la somme de 434000 € sur la base du rapport de l'expert [Q] et subsidiairement à la somme de 181679,28 €.
Monsieur [Z] [L], gérant de droit de la société Bati sud, et Monsieur [S] [L], gérant de fait poursuivi en responsabilité pour insuffisance d'actif, sont intervenus volontairement à l'instance.
Par jugement du 3 mars 2016, le tribunal de commerce de Marseille a :
- pris acte des interventions volontaires de Monsieur [S] [L] et Monsieur [Z] [L] et les a reçus en leurs interventions volontaires,
- constaté que suite aux trois ordonnances rendues le 12 novembre 2014 par Monsieur le juge commissaire de la procédure de liquidation judiciaire de la société Bati Sud, la SCI Monastère et la SCI Saint-Pierre n'ont pas saisi le tribunal compétent dans le délai d'un mois prévu par l'article R624-5 du code de commerce dans sa rédaction antérieure au 1er juillet 2014,
- par conséquent, déclaré irrecevables comme forcloses les demandes formulées par la SCI Saint-Pierre et la SCI Monastère,
- condamné conjointement la SCI Monastère et la SCI Saint-Pierre à payer à Maître [B] [N] agissant en qualité de liquidateur de la société Bati sud SARL, à Monsieur [S] [L] et à Monsieur [Z] [L] la somme de 1000 € chacun au titre des frais irrépétibles,
- laissé les dépens à la charge de la SCI Monastère et de la SCI Saint-Pierre.
La SCI Monastère et la SCI Saint-Pierre ont interjeté appel de ce jugement le 10 mars 2016.
Elles soutenaient qu'aucun délai de forclusion n'avait couru à leur encontre et sollicitaient la fixation de la créance de la SCI Monastère au passif de la société Bati sud à la somme de 491297 € et subsidiairement à la somme de 100000 € et la fixation de la créance de la SCI Saint-Pierre au passif de la société Bati sud à la somme de 434000 € et subsidiairement à la somme de 181679,28 €.
Par arrêt mixte du 21 décembre 2017, la cour a :
- infirmé le jugement déféré en ce qu'il a déclaré irrecevables comme forcloses les demandes de fixation de créances formulées par la SCI Monastère et la SCI Saint-Pierre et statuant à nouveau sur ce point,
- dit qu'aucune forclusion n'est opposable à la SCI Monastère et la SCI Saint-Pierre pour défaut de saisine de la juridiction compétente ensuite des ordonnances rendues par le juge commissaire le 12 novembre 2014,
- avant dire droit sur les demandes de fixation de créances, toutes autres demandes expressément réservées ainsi que les dépens,
- ordonné la réouverture des débats et invité Maître [B] [N] et à défaut les appelantes à produire les déclarations de créances de la SCI Monastère et de la SCI Saint-Pierre,
- invité les appelantes à s'expliquer sur une apparente incohérence de leurs écritures consistant pour la SCI Monastère à solliciter à titre subsidiaire une fixation de sa créance à hauteur de 100000 € alors qu'elle indique avoir procédé à deux déclarations de créances pour un montant total de 181679,28 € et pour la SCI Saint-Pierre à solliciter à titre subsidiaire une fixation à hauteur de 181679,28 € alors qu'elle indique avoir procédé à une déclaration de créances pour un montant de 100000 €.
Par conclusions déposées et notifiées le 7 mars 2018, la SCI Monastère et la SCI Saint-Pierre demandent à la cour, vu les articles 1134, 1147 du code civil et L642-24 du code de commerce de :
- constater qu'aux termes du rapport dressé le 26 octobre 2010, Monsieur l'expert [D] a estimé le préjudice subi par la SCI Monastère à 491297 €, constater que par une décision rendue le 12 novembre 2014, Monsieur le juge commissaire a invité les parties à saisir le juge compétent afin de fixer précisément la créance au passif de la SARL Bati sud, constater que le préjudice subi par la SCI Monastère s'établit à hauteur de 491297 €,
- à titre principal, fixer la créance de la SCI Monastère au passif de la société Bati sud à la somme de 491297 € correspondant au préjudice réellement subi par la SCI Monastère du fait des malfaçons et inachèvements imputables à la société Bati Sud,
- à titre subsidiaire, fixer la créance de la SCI Monastère au passif de la société Bati sud à la somme de 181679,28 € correspondant à la hauteur de la déclaration de créance initiale,
- constater qu'aux termes du rapport dressé le 25 février 2011, Monsieur l'expert [Q] a estimé le préjudice subi par la SCI Saint-Pierre à 434000 €, constater que par une décision rendue le 12 novembre 2014, Monsieur le juge commissaire a invité les parties à saisir le juge compétent afin de fixer précisément la créance au passif de la SARL Bati sud, constater que le préjudice subi par la SCI Saint-Pierre s'établit à hauteur de 434000 €,
- à titre principal, fixer la créance de la SCI Saint-Pierre au passif de la société Bati sud à la somme de 434000 € correspondant au préjudice réellement subi par la SCI Saint-Pierre du fait des malfaçons et inachèvements imputables à la société Bati Sud, à titre subsidiaire, fixer la créance de la SCI Saint-Pierre au passif de la société Bati sud à la somme de 100000 € correspondant à la hauteur de la déclaration de créance initiale,
- rejeter la demande de nullité des rapports de gestion,
- en toutes hypothèses, condamner Monsieur [Z] [L] à la somme de 5000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par conclusions déposées et notifiées le 5 mars 2018, Monsieur [Z] [L] et Monsieur [S] [L] demandent à la cour, vu les articles L642-2, R624-5, R622-24 du code de commerce, 14 et suivants du code de procédure civile, 1353 du code civil, de :
- déclarer recevable l'intervention volontaire de Monsieur [Z] [L],
- dire et juger nuls et de nul effet et à tout le moins inopposables à l'EURL Bati Sud, à Monsieur [Z] [L], gérant de droit et à Monsieur [S] [L] les rapports d'expertise de Messieurs [D] et [Q] invoqués par la SCI Saint-Pierre et la SCI Monastère,
- dire et juger irrecevables comme tardives les demandes de fixation de créance à hauteur de 491297 € en ce qui concerne la SCI Monastère et 434000 € en ce qui concerne la SCI Saint-Pierre à défaut de déclaration régulière dans les délais légaux,
- constater que les SCI Saint-Pierre et Monastère ne rapportent pas la preuve de l'existence d'une créance opposable à l'EURL Bati Sud, à Monsieur [Z] [L], gérant de droit et à Monsieur [S] [L],
- rejeter les créances de la SCI Saint-Pierre et de la SCI Monastère qui ne seront pas admises au passif de la société Bati Sud,
- débouter la SCI Saint-Pierre et la SCI Monastère de l'ensemble de leurs demandes comme étant infondées,
- condamner la SCI Saint-Pierre et la SCI Monastère au paiement de la somme de 3000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Maître [B] [N] pris en sa qualité de liquidateur de la SARL Bati sud n'a pas conclu postérieurement à l'arrêt mixte du 21 décembre 2017.
Par conclusions déposées et notifiées le 29 avril 2016, il demandait à la cour à titre principal de dire et juger forcloses les créances des SCI Monastère et Saint-Pierre : ce point a été tranché par l'arrêt du 21 décembre 2017.
La cour demeure saisie de ses demandes présentées à titre subsidiaire sur la fixation des créances et tendant à :
- sur les déclarations de créance à titre provisionnel, constater que les créances déclarées à titre provisionnel ne correspondent ni à une évaluation ni à une volonté de déclarer à titre définitif, en conséquence, dire et juger que les créances déclarées à titre provisionnel sont irrecevables,
- sur les créances évaluées par les rapports d'expertise, constater que les appelantes n'ont pas, dans le délai d'un an, sollicité un relevé de forclusion pour pouvoir déclarer leurs créances telles qu'évaluées par les experts judiciaires, en conséquence, dire et juger forcloses et inopposables à la procédure collective les créances des SCI Monastère et Saint-Pierre,
- en toute hypothèse, condamner la SCI Monastère et la SCI Saint-Pierre aux entiers dépens et à payer à Maître [N] ès-qualités chacune la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles.
MOTIFS :
Aucune des parties n'ayant critiqué la disposition du jugement déféré recevant Monsieur [S] [L] et Monsieur [Z] [L] en leurs interventions volontaires, cette disposition sera confirmée.
Il résulte des dispositions des articles L622-24, L622-26, R622-23 et R622-24 du code de commerce que la déclaration des créances doit être faite dans le délai de deux mois à compter de la publication du jugement d'ouverture alors même qu'elles ne sont pas établies par un titre, celles dont le montant n'est pas encore définitivement fixés étant déclarées sur la base d'une évaluation.
Les SCI Monastère et Saint-Pierre justifient avoir procédé aux déclarations de créances suivantes, versées aux débats en exécution de l'arrêt du 21 décembre 2017 :
- pour la SCI Monastère :
- le 24 février 2010, une première déclaration à titre chirographaire en vertu d'une assignation en référé délivrée le 21 janvier 2010 pour un montant de 31679,28 € détaillé comme suit :
- montant en principal de la demande : 30000 €
- article 700 : 1000 €
- dépens : 679,28 €,
- le 12 avril 2010 une seconde déclaration à titre chirographaire 'dans le cadre des suites d'une expertise judiciaire faisant suite à l'assignation en référé' pour un montant de 150000 € qualifié d'estimation,
- pour la SCI Saint-Pierre une déclaration du 2 mars 2010 pour 'la somme de 100000 € à titre de dommages et intérêts, préjudice, frais, abandon de chantier etc...', la créance devant être fixée après une expertise contradictoire.
Contrairement à ce que soutient Maître [N], aucune mention de ces déclarations de créances ne permet de les qualifier de provisionnelles.
Ces déclarations comportent une évaluation du principal de la créance conformément aux dispositions des articles L622-24 alinéa 4 et R622-23 1° du code de commerce, formulée pour un montant arrondi et non détaillé s'agissant de créances non liquidées dans une matière nécessitant le recours à une expertise afin que le créancier soit à même de mesurer son préjudice.
Ces déclarations sont en conséquences recevables.
Il résulte d'autre part des textes précités que la créance ne peut être admise que dans la limite du montant déclaré à titre d'évaluation.
En l'absence de déclaration de créance complémentaire effectuée dans le délai de deux mois à compter du jugement d'ouverture, les demandes de fixation de créances des SCI Monastère et Saint-Pierre pour les montants respectifs de 491297 € et 434000 € sont irrecevables.
Les appelantes sont en revanche recevables à solliciter la fixation de leurs créances au passif de la SARL Bati Sud dans les limites de leurs déclarations de créances.
Les appelantes demandent à la cour de liquider l'entier préjudice de chacune des SCI afin de leur permettre le cas échéant d'engager une action en responsabilité contre leurs anciens conseils qui auraient commis une faute en ne déclarant pas un montant suffisant au passif de la SARL Bati Sud.
Il n'incombe pas à la cour de procéder à la liquidation d'un préjudice relevant d'un autre procès, engagé éventuellement contre des parties qui ne figurent pas à la présente instance.
La cour se limitera en conséquence à vérifier le bien fondé des demandes d'admission dans la limite de leur recevabilité.
Aux termes de l'article 175 du code de procédure civile, la nullité des décisions et actes d'exécutions relatifs aux mesures d'instruction est soumise aux dispositions qui régissent la nullité des actes de procédure.
La nullité du rapport d'expertise doit ainsi être soulevée in limine litis avant toute défense au fond conformément aux dispositions de l'article 112 du code de procédure civile.
Les consorts [L] sont en conséquence irrecevables à soulever pour la première fois en appel la nullité des rapports d'expertise pour non-respect du principe du contradictoire alors qu'ils ont conclu au fond en première instance.
L'EURL Bati Sud est représentée à la présente procédure par son liquidateur Maître [B] [N], qui est mentionné comme partie en cette qualité aux rapports des experts [D] et [Q] et n'a jamais contesté avoir été destinataire des convocations, pré-rapports et rapports que les experts précisent avoir adressés aux parties.
Messieurs [Z] et [S] [L], qui interviennent à titre personnel à la présente procédure, n'avaient pas vocation à participer aux opérations d'expertise ordonnées par des décisions auxquelles ils n'étaient pas parties.
Ils ont été destinataires, dans le cadre de la présente procédure, des pièces sur lesquelles les SCI fondent leurs demandes de fixation de créance, et notamment des rapports d'expertise, soumis à la discussion contradictoire des parties.
Le moyen tiré de l'inopposabilité des rapports d'expertise sera en conséquence écarté.
Sur la créance alléguée par la SCI Monastère :
La SCI Monastère a confié à la société Bati Sud des travaux de rénovation d'un bâtiment ancien suivant devis du 22 janvier 2008 versé aux débats pour un prix de 200000 € TTC.
L'expert [D] précise dans son rapport que les travaux concernent l'aménagement de 6 appartements et des parties communes, ce qui n'est contesté par aucune des parties.
L'expert relève que le devis est très imprécis, qu'il ne comporte aucun détail ni prix unitaire, et considère que le prix des travaux est sous-évalué et devrait s'élever pour ce type de chantier à 500141 €.
L'expert a retenu, sur la base des factures et relevés de compte produits, que la SCI Monastère avait réglé une somme totale de 128390 € pour ce chantier, ce qui n'est pas contesté par les intimés.
Il a procédé à une visite du chantier le 16 juin 2010 et conclut que les travaux n'ont été que sommairement commencés et que leur état d'avancement peut être estimé à 4%.
Il évalue le coût des travaux restant à effectuer à 491297 €.
S'agissant du compte entre les parties, il retient que la SCI Monastère a versé une somme de 128390 € sur les 200000 € prévus au devis, que les travaux réalisés par la SARL Bati Sud peuvent être estimés à 8844 € TTC, qu'il existe en conséquence un trop perçu par la SARL Bati Sud de 119546 €.
Il ressort des explications fournies à l'expert par le gérant et le conseil de la SCI Monastère que Monsieur [A] [Z], gérant de la SCI, avait l'habitude de travailler avec la société Bati Sud avec laquelle il avait effectué une dizaine d'opérations du même types.
Il en résulte qu'au regard de l'expérience de son gérant, spécialisé dans les opérations de rénovations immobilières, la SCI Monastère doit être considérée comme un professionnel averti et ne peut se prévaloir de l'imprécision et de la sous estimation du devis qu'elle a accepté.
Sa créance ne peut consister qu'en un remboursement du trop versé par rapport à l'état d'avancement du chantier abandonné par la société Bati Sud.
Bien que l'appelante n'ait pas communiqué les annexes du rapport d'expertise, cette créance est suffisamment caractérisée par l'expert dans le corps de son rapport, qui comporte une description précise de l'état d'avancement des travaux.
Il a ainsi été constaté par l'expert :
- qu'aucune intervention n'avait été réalisée concernant les travaux, prévus au devis, de débarras, maçonnerie (démolition, reconstruction de cloisons, mise en place de portes, raccord de carrelage ou tomettes, reprises diverses), révision de toiture, réajustage ou changement de menuiseries, électricité des parties communes, peinture des appartements et parties communes,
- que seule une partie des travaux d'électricité et plomberie avait été réalisée dans les appartements 1, 2 et 3, soit :
- appartement 1 : 60% pour l'électricité et 40% pour la plomberie,
- appartement 2 : 20% pour l'électricité, 40% pour la plomberie et 40% pour la salle de bains,
- appartement 3 : 60% pour l'électricité, 50% pour la plomberie et 80% pour la salle de bains.
Sur la base de ces constatations l'expert a pu évaluer le montant des travaux réalisés à 8844 € par rapport au montant total du devis.
Les intimés critiquent les conclusions de l'expert mais ne justifient pas de la réalisation d'autres travaux que ceux décrits par l'expert.
La proposition de l'expert sur le compte entre les parties sera en conséquence entérinée pour le montant de 119546 €.
Il n'est fourni aucun justificatif de l'existence des créances déclarées le 24 février 2010 pour les sommes de 1000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de 679,28 € au titre des dépens, ni de leur antériorité par rapport au jugement d'ouverture de la procédure collective. Ces sommes ne seront en conséquence pas retenues et la créance sera limitée au montant de 119546 €.
Sur la créance alléguée par la SCI Saint-Pierre :
La SCI Saint-Pierre a confié à la société Bati Sud des travaux de rénovation d'un bâtiment ancien suivant devis du 5 juillet 2006 versé aux débats pour un prix de 484000 € TTC.
L'expert [Q] précise dans son rapport que les travaux concernent l'aménagement de 7 appartements et des parties communes, ce qui n'est contesté par aucune des parties. Il qualifie le devis de 'totalement indigent' ('descriptif hyper succint, incomplet, aucun sous détail de prix, etc...').
L'expert retient que la SCI Saint-Pierre a réglé à la société Bati Sud une somme totale de 371500 € détaillée comme suit :
- facture du 3 mai 2007 : 40000 €,
- facture du 25 juillet 2007 : 60000 €,
- facture du 14 septembre 2007 : 90000 €,
- facture du 22 octobre 2007 : 80000 €,
- facture du 10 novembre 2007 : 60000 €,
- facture du 12 décembre 2007 : 30000 €,
- facture du 1er octobre 2008 : 11500 €.
La SCI Saint-Pierre justifie du paiement effectif des 6 premières factures par la production des factures approuvées et de l'extrait de sa comptabilité, compte 61500000 entretien réparation, faisant apparaître les paiements correspondants.
Il n'est en revanche pas justifié du paiement de la facture 1er octobre 2008, d'un montant de 11500 € qui ne figure pas dans la comptabilité précitée.
Les consorts [L] produisent au contraire la copie d'un chèque de 11500 € établi le 3 octobre 2008 par la SCI Saint-Pierre à l'ordre de Sotrabat (nom commercial de la société Bati Sud) ainsi que l'avis de rejet de ce chèque pour défaut de provision, adressé par le Crédit Agricole Alpes Provence le 5 novembre 2008.
Les sommes payées par la SCI Saint-Pierre à la société Bati Sud s'élèvent en conséquence au minimum à 360000 €.
L'expert [Q] a procédé à la visite des lieux le 6 octobre 2010 et a constaté que l'entreprise Bati Sud avait tout juste commencé les travaux puis abandonné le chantier, les travaux réalisés correspondant au maximum à 15% de la totalité des travaux et étant évalués à 69600 € TTC.
Il a relevé certaines malfaçons affectant par exemple le revêtement de sol du 1er étage, un parquet de très mauvaise qualité mal posé et mal découpé, et a conclu à la nécessité de reprendre entièrement les travaux.
Il a également retenu un préjudice de 63000 € au titre d'une perte de loyers de 18 mois résultant de l'arrêt du chantier et de la durée des travaux de reprise.
Il résulte de ces éléments que la créance déclarée par la SCI Saint-Pierre à hauteur de 100000 € est largement justifiée, ne serait-ce qu'au titre du trop versé par rapport aux travaux effectivement réalisés (360000 € - 69600 €), dont certains sont en outre à reprendre.
La créance sera en conséquence admise pour le montant de 100000 € déclaré.
Les dépens seront mis à la charge des parties intimées qui succombent, à concurrence d'une moitié à la charge de la procédure collective de la SARL Bati Sud et une moitié à la charge des consorts [L].
L'équité commande de condamner les consorts [L] à payer à chacune des appelantes la somme de 2000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, contradictoirement,
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a reçu Monsieur [S] [L] et Monsieur [Z] [L] en leurs interventions volontaires,
Vu l'arrêt du 21 décembre 2017 ayant infirmé le jugement déféré en ce qu'il a déclaré irrecevables comme forcloses les demandes de fixation de créances formulées par la SCI Monastère et la SCI Saint-Pierre et statuant à nouveau sur ce point, dit qu'aucune forclusion n'est opposable à la SCI Monastère et la SCI Saint-Pierre pour défaut de saisine de la juridiction compétente ensuite des ordonnances rendues par le juge commissaire le 12 novembre 2014,
Infirme le jugement déféré pour le surplus, et statuant à nouveau,
Déclare recevables les déclarations de créances produites par la SCI Monastère les 24 février 2010 et 12 avril 2010 et par la SCI Saint-Pierre le 2 mars 2010,
Déclare la SCI Monastère irrecevable en sa demande de fixation de sa créance pour un montant supérieur à 181679,28 €,
Déclare la SCI Saint-Pierre irrecevable en sa demande de fixation de sa créance pour un montant supérieur à 100000 €,
Déclare Monsieur [Z] [L] et Monsieur [S] [L] irrecevables en leur demande en nullité des rapports des experts [D] et [Q] et rejette le moyen tiré de l'inopposabilité des rapports d'expertise,
Fixe la créance de la SCI Monastère au passif de la SARL Bati Sud à la somme de 119546 €,
Fixe la créance de la SCI Saint-Pierre au passif de la SARL Bati Sud à la somme de 100000 €,
Condamne in solidum Monsieur [S] [L] et Monsieur [Z] [L] à payer à chacune des SCI appelantes la somme de 2000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Dit que les dépens de première instance et d'appel seront supportés pour une moitié par la procédure collective de la société Bati Sud et pour l'autre moitié par Monsieur [S] [L] et Monsieur [Z] [L] tenus in solidum.
Le greffier Le président